L'acquisition de nouvelles parts de marchés est pour
85% des firmes multinationales chinoises un objectif prioritaire affiché
et vise autant les pays développés que les pays en voie de
développement. Ces dernières affirment vouloir utiliser
l'expérience acquise sur le marché domestique et les exportations
vers les pays étrangers afin de se lancer directement dans
l'implantation à l'étranger81. A la base, les
premières expansions ont pris la forme de bureaux de vente et de
représentation qui avaient pour mission de faciliter les ventes en gros
et au détail et de faciliter les importations depuis l'étranger
des produits fabriqués par les usines en Chine. Ces bureaux permettaient
un lien plus direct avec les consommateurs pour mener des études de
marché, évaluer la demande, signer des contrats
d'approvisionnement... Mais avec le temps les formes d'expansion ont
évolué pour mieux s'adapter aux marchés étrangers
avec la mise en place : d'unités de production à
l'étranger, et des parties de la chaîne de production globale, qui
amena à une diminution (assez limitée) des importations des pays
étrangers.
De plus, l'acquisition de nouvelles parts de marchés
à l'étranger s'avère vital pour certaines industries
chinoises qui ont déjà atteint un certain stade de
maturité comme : le
80 Christine KERDELLANT, L'Express,
N°3106, semaine du 12 au 18 janvier 2011, page.78.
81 D'après l'International Finance Corporation
(IFC) et le Multilateral Investment Guarantee Agency (MIGA).
textile, les chaussures, les bicyclettes, les appareils
électriques... Ces dernières, qui connaissaient une pression
concurrentielle forte sur le marché domestique, ont vu accroître
cette pression avec l'entrée de la Chine dans l'Organisation Mondiale du
Commerce (OMC) en 2001. Cette arrivée massive d'entreprises
étrangères (parfois des délocalisations) et la fin de
barrières protectionnistes a poussé certaines entreprises
à trouver des débouchées sur les marchés
étrangers comme pour la société Haier. Il faut
aussi comprendre que les usines chinoises produisent déjà bien
plus que le marché domestique ne peut absorber, et cette surproduction
concerne de nombreux biens : 30% de surproduction pour les machines à
laver, 40% pour les réfrigérateurs, 45% pour les fours
micro-ondes, et 87% pour les télévisions. Le secteur de
l'automobile atteignit, quand à lui, une surproduction de
véhicules de l'ordre de 3 millions d'unités en 2004.
Un point important à souligner est que, pour
accéder à certains marchés afin découler leurs
produits, quelques firmes chinoises s'installent d'abord sur d'autres
marchés limitrophes moins développés. Ces marchés
limitrophes sont en lien avec le marché final visé, et les
entreprises chinoises mélangent leurs produits avec les produits locaux
afin de les faire rentrer sur ce marché. Les entreprises chinoises
acquièrent pour cela des entreprises locales où elles font
fabriquer leurs produits, ce qui permet de les estampiller « Made in
Turkey », ou « Made in Jamaica ». Cette méthode permet de
contourner les quotas ciblant les produits chinois, même si ces produits
sont au final réalisés par une entreprise chinoise
installée, sur un autre marché. Cela est particulièrement
vrai pour le secteur du textile, qui s'installe en Jamaïque et sur l'Ile
Maurice afin de pouvoir, par la suite, exporter vers le marché
américain, en Turquie avec l'exploitation et le traitement du coton pour
le marché européen, et les Îles Fidji pour le marché
australien. En effet, depuis l'augmentation massive des produits chinois
exportés dans les années 1990, les pays étrangers pour
protéger leurs industries locales ont mis en place diverses
barrières protectionnistes et quotas pour empêcher que leurs
marchés respectifs soient inondés par l'arrivée massive de
produits chinois. Les entreprises chinoises pour pouvoir contourner ces
mesures, ont commencé à investir à l'étranger et
à délocaliser une partie de la chaîne de production. Ainsi
donc, l'expansion à l'international de certaines firmes chinoises n'est
qu'une réponse adaptée à la mise en
place de barrières protectionnistes par les Etats, afin
de pouvoir continuer leur activité économique.
Sur ce plan là, le gouvernement chinois n'aida de
façon que relative ses entreprises, même si ce dernier affirme que
l'acquisition de parts de marché est un objectif crucial pour
l'économie du pays. En réalité, sa politique d'aide fut un
échec relatif, car même si grâce à son action le
nombre d'investissements augmenta, le montant de ces derniers resta très
bas. Néanmoins, plus que l'aide du gouvernement, c'est la menace de la
cession d'activité qui poussa les firmes chinoises à se lancer
sur les marchés étrangers. On peut s'apercevoir que sur ce
facteur bien précis d'expansion, les intérêts
économiques en sont à l'origine, et non les intérêts
politiques qui restent largement mis de côté.