Avec le temps, le poids du gouvernement et des
intérêts politiques ont diminué face aux
économiques, et l'invention de l'entreprise semi-privée en est le
parfait exemple. Le gouvernement chinois a, en effet, petit à petit
laissé de côté des intérêts politiques, dans
l'intérêt des grandes firmes chinoises afin de permettre à
ces dernières de pouvoir accumuler des bénéfices et de
vivre une vie économique normale. Ces intérêts
économiques sont très divers et peuvent représenter pour
les entreprises concernées des objectifs plus ou moins primordiaux selon
leur orientation stratégique. Ici, nous nous basons sur un rapport de
l'OCDE pour établir notre étude liée aux facteurs
économiques de l'expansion78. Néanmoins, pour plus de
clarté, nous devons diviser ces facteurs économiques en groupes
afin permettre une analyse plus claire. Cinq facteurs économiques
majeurs peuvent ainsi être dégagés, et qui sont :
l'acquisition de ressources naturelles, l'acquisition de parts de
marchés, l'acquisition d'atouts stratégiques, des
stratégies de diversification, et enfin une augmentation de
l'efficacité.
78 Chiffres officiels de l'Organisation de
coopération et de développement économique (OCDE),
rapports de l'OCDE de 2008, OCDE Investment Policy Reviews : China
2008.
L'acquisition de ressources naturelles a été
dès le début (1979), la principale raison des investissements
chinois à l'étranger. En effet, le pays doit pour pouvoir
maintenir un taux élevé de croissance économique,
s'assurer d'un approvisionnement régulier en ressources naturelles de
toutes sortes, allant du pétrole aux alliages en passant par les
matières radioactives. En effet, depuis l'ouverture du pays en 1979 et
sa modernisation rapide, la demande en ressources naturelles, et
particulièrement en pétrole, explosa et obligea le pays et les
entreprises à s'assurer des approvisionnements stables pour maintenir la
croissance. Cette brutale augmentation de la demande fit passer la Chine de la
place de plus gros exportateur de pétrole de toute l'Asie de l'Est dans
les années 80, à celle de second plus gros consommateur mondial
vingt ans plus tard. En effet en 2006, la Chine importait déjà
43% de sa consommation de pétrole, ratio qui atteignit 60% en 2010 et
qui devrait atteindre 76% en 2020.
Les entreprises d'Etat comme : China National Offshore
Oil Corporation (CNOOC), et China National Petroleum
Corporation (CNPC) sont à l'origine, et demeurent encore
aujourd'hui, les plus grandes entreprises travaillant dans le secteur de
l'extraction et de l'exploitation des ressources pétrolières. Sur
le plan de l'extraction et de l'exploitation minière, Baosteel,
China Minmetals, et Capital Iron And Steel Corporation sont
les firmes les plus puissantes et actives. En effet, le principal
élément unifiant ce secteur de l'économie chinoise est
l'implication très active de l'Etat chinois depuis les débuts de
l'ouverture en 1979, qui est le seul à pouvoir accorder des financements
suffisamment larges pour pouvoir mener de tels projets économiques
à travers les banques nationales. Sur un autre point, les
procédures d'évaluation des IDE chinois sont assouplies pour ce
genre de projets et les entreprises sont sures de ne subir aucun refus, ce qui
pousse ces dernières à vouloir mener de tels projets en sachant
que « le risque administratif » est désormais nul. De plus,
l'Etat chinois joue de ses relations diplomatiques afin de favoriser ses
entreprises dans de nombreux pays, en particulier ceux d'Afrique et d'Asie
centrale depuis les années 2000. En effet, la Chine joue la politique de
l'aide au développement contre des signatures d'exploitation de
ressources naturelles par des firmes chinoises, comme celles
précitées. Pékin met aussi en avant, le
fait qu'elle n'est pas une démocratie et qu'elle
s'engage à aider des pays non démocratiques eux aussi, comme le
Soudan. Il est vrai que certaines entreprises étrangères (souvent
occidentales, coréennes, ou japonaises) se voient contraintes par leurs
gouvernements de ne pas investir dans certains pays pour des raisons politiques
liées aux questions démocratiques et de respect des droits de
l'Homme, ce qui n'est pas le cas des firmes multinationales chinoises, qui au
contraire, sont aidées par leur gouvernement. C'est ainsi, que des
entreprises chinoises ont pu investir entre 2003 et 2006 en Algérie
(2006), au Kazakhstan (2005), au Soudan (2004), au Niger (2004), et en Zambie
(2006). Ces investissements se font sous différentes formes, par exemple
au Kazakhstan, cela est passé par l'acquisition de la compagnie
PetroKazakhstan à 67% le 26 octobre 2005. En
réalité, le but de l'Etat est ici de maintenir la
sécurité énergétique du pays, comme d'autres pays
le font eux aussi.
Néanmoins, au-delà de l'action de l'Etat
chinois qui cherche à assurer la sécurité
énergétique du pays, le privé en Chine voit aussi d'un bon
oeil ces acquisitions de ressources naturelles. Face à la
volatilité du prix du baril de pétrole, l'intégration
verticale peut se révéler un moyen efficace pour en limiter les
conséquences. Cette intégration verticale des firmes chinoises
permet un approvisionnement en matières premières dont l'ensemble
de l'économie a besoin. De plus, cette intégration ne se limite
pas au secteur de l'extraction et de l'exploitation pétrolière,
mais aussi aux métaux et alliages comme : l'aluminium, le zinc, le
nickel, le minerai de fer, l'étain... En effet, ces métaux voient
leurs prix monter en flèche avec la consommation croissante de nouvelles
technologies comme : les ordinateurs portables, les téléphones
mobiles de troisième génération (l'étain
étant un élément essentiel des circuits imprimés
qui permet les soudures), et même les technologies vertes liées au
développement durable. En effet, le secteur des technologies vertes est
devenu un objectif prioritaire pour de nombreuses firmes chinoises, ce qui fit
du pays le plus gros investisseur privé dans ces technologies avec un
total de 34,6 milliards de dollars (sur une période s'étendant de
2005 à 2010) selon l'association américaine
PEW79. La Chine, qui prépare la reconversion de son
économie, maîtrise d'ores et déjà la moitié
des « nouvelles ressources naturelles » nécessaires à
l'ensemble des technologies vertes qui sont : les « terres rares ».
Ces « terres rares » que nous avons
79
http://www.eenews.net/public/25/14924/features/documents/2010/03/25/document
cw 03.pdf (le 1 mars 2011).
déjà citées (cf. page.76) sont
produites à 90% par la Chine qui possède aussi 50% des
réserves. L'acquisition des ressources naturelles vise aussi ces
minéraux rares (rubidium, germanium, indium, scandium, yttrium...), dont
la Chine en a produit 130 000 tonnes en 2010 (en comparaison, l'Inde qui est le
deuxième producteur mondial de ces métaux, en a produit la
même année 2 700 tonnes)80.
Ainsi, bien que l'acquisition de ressources naturelles soit
l'une des grands facteurs économiques de l'expansion des firmes
chinoises, le but de l'acquisition ne se limite pas aux ressources
pétrolières comme des média pourraient le laisser
entendre. D'autres matières, qui dans l'avenir se
révèleront de plus en plus vitales pour les économies,
sont déjà recherchées par ces mêmes firmes
chinoises, même si elles se font beaucoup plus discrètes.