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Les stratégies d'expansion des firmes multinationales chinoises: facteurs économiques, facteurs politiques.

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par Geoffrey BONNEL
IEP d'Aix en Provence - Master 2011
  

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b) Les différentes formes d'expansion :

Les formes d'expansion sont nombreuses mais peuvent se résumer sous quatre grandes formes : les entreprises communes, les fusions et acquisitions, les créations, et les réutilisations d'investissements précédents (voir graphique I.A.1).

Graphique I.A.1 : Les formes des investissements des firmes chinoises à l'étranger

Réutilisations (brownfield investment)
Créations (greenfield investment)
Fusions et Acquisitions
Joint ventures

 
 

0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40%

Source: China council for the promotion of international trade.

L'analyse de ce graphique permet de voir que la forme d'expansion favorisée par les entreprises chinoises, est la création d'établissements (greenfield investment), avec 40%. Ceci peut aller à l'encontre de certaines hypothèses qui veut que les entreprises chinoises soient inexpérimentées. En effet, il semblerait au contraire que ces dernières aient accumulé une expérience suffisante afin de mener des projets par elles-mêmes à l'international, même si ce graphique ne permet pas de montrer le taux de réussite et d'échec de ces derniers. Or, il est intéressant de regarder le deuxième choix des firmes chinoises qui est : les joint ventures.

Les entreprises communes (joint ventures) sont des formes d'expansion caractéristiques d'entreprises qui connaissent des difficultés pour pénétrer un marché et qui nécessitent l'aide d'une entreprise présente sur place afin d'y arriver. En effet, les coentreprises sont caractéristiques des entreprises qui nécessitent de l'aide de façon très diverse. Les entreprises communes permettent, en effet, de partager les coûts liés à la création de l'entreprise et donc de limiter le montant global de l'IDE. Cela permet alors de rentrer dans les critères définis par le ministère du commerce de la République Populaire de Chine, et aussi d'utiliser l'argent économisé d'en d'autres projets

d'investissements à l'étranger. De plus, les coentreprises ont comme autres avantages, de permettre de contourner les chocs culturels qui peuvent apparaître lors de l'entrée sur un nouveau marché. Il est vrai que s'associer avec un partenaire local peut permettre de mieux s'adapter aux attentes des consommateurs, ainsi qu'aux lois et règlements du pays. Enfin, l'entreprise commune peut être aussi un moyen d'acquérir de nouvelles technologies présentes sur un marché local. Ainsi, cette autre forme d'expansion semble aller à l'opposé de notre première constatation qui voulait que les entreprises chinoises soient autonomes. Cette forme d'expansion appréciée par une grande partie des entreprises chinoises peut montrer au contraire, une forme de faiblesse de la part des firmes chinoises qui nécessitent de l'aide afin d'accéder aux marchés visés. On se retrouve donc face à un paradoxe : une partie des firmes chinoises semble suffisamment autonome pour mener des projets à partir de zéro, et de s'installer par elles-mêmes sur ces marchés visés, l'autre partie des firmes, quand à elle semble à l'opposé, incapable de mener des projets toutes seules et utilisent la forme des entreprises communes afin de pouvoir mener leurs politiques d'expansion. Cependant même si les projets d'investissement « greenfield » marquent une maturité certaine de la part d'une partie des firmes chinoises, ces dernières sont encore peu nombreuses à choisir l'option des fusions&acquisitions.

Les fusions&acquisitions sont, en effet, encore peu nombreuses parmi les firmes chinoises (19%). Cette forme d'expansion est sans doute la plus difficile que peut choisir une entreprise, chose qui peut s'expliquer par diverses raisons. Tout d'abord, les fusions&acquisitions nécessitent des moyens financiers bien supérieurs que pour les entreprises communes. Ce fort montant peut rentrer en conflit avec les plafonds d'IDE définis par le ministère du commerce de la République Populaire de Chine (cf. page.37), et toutes les firmes chinoises ne sont, de plus, pas capables de fournir de tels montants. Aussi, les fusions&acquisitions obligent à d'autres obligations comme une parfaite connaissance des lois et règlements du pays hôte, ainsi qu'une capacité pour l'entreprise acheteuse à absorber des employés, une culture d'entreprise différente... Il est vrai qu'audelà des simples aspects matériels, les aspects immatériels sont à prendre en compte. Or, les entreprises chinoises peuvent accumuler certaines difficultés comme : une mauvaise image liée à la qualité des produits chinois, à l'organisation du travail... On peut pour

illustrer cette affirmation prendre l'exemple du rachat du journal américain The Onion par l'entreprise sichuanaise Yu Wan Mei Corporation en juillet 2009. Cette acquisition fut un échec total pour l'entreprise chinoise qui voulut utiliser le journal à des fins de propagande prochinoise, alors qu'à la base, ce journal était d'obédience satyrique69. Ce simple exemple permet de montrer deux erreurs que l'entreprise a commises en rachetant ce journal : une mauvaise connaissance des lecteurs américains, et une mauvaise connaissance de l'esprit d'entreprise du journal acheté.

Cependant, il est intéressant de noter que même si les fusions acquisitions restent limitées à l'heure actuelle, ces dernières connaissent une progression lente mais ininterrompue depuis 2008, en particulier au sein des pays en voie de développement. La proportion des fusions&acquisitions par rapport aux autres formes d'expansion (au sein des pays en voie de développement) est passée de 8% en 2008, pour atteindre 15% en 2009, et finalement 22% en 2010. Selon un rapport de l'OCDE de 200870, les flux d'IDE concernant des fusions&acquisitions sont passés de 60 millions de dollars en 1990 pour atteindre 5,3 milliards de dollars en 2005. Ces dernières sont utilisées par les entreprises chinoises comme des moyens d'accéder rapidement et relativement facilement à des hautes technologies (en particulier dans le secteur des télécommunications), d'acquérir des parts de marchés, de posséder une nouvelle marque (pouvant contrebalancer la mauvaise image des marques chinoises)... Mais le rapport permet aussi de démontrer que même si cette forme d'expansion commence petit à petit à s'imposer parmi les firmes chinoises, elle reste encore le panache des grandes firmes multinationales, les plus petites se contentant encore des entreprises communes pour la grande majorité d'entres elles.

Malgré une progression du nombre de fusions&acquisitions, les échecs restent encore nombreux à cause d'une mauvaise préparation et d'un manque flagrant de conseil. Le conseil aux entreprises (consulting) reste encore peu populaire en Chine et amène régulièrement à des échecs cuisants lors de fusions&acquisitions comme avec le groupe TCL (cf. page.69). En fait, les entreprises chinoises sont plus habituées au phénomène de la guanxi (?\u31995OEn : guânxi), qu'on pourrait traduire en français par : « les relations ».

69 EuroBiz, juin 2010, p.37.

70 OECD Investment Policy Reviews : China 2008, OECD 2008, page.74.

Cependant, ces relations vont au-delà d'un simple contact, mais de véritables liens plus ou moins directs avec les clients, les fournisseurs, le PCC... Sans guanxi, il est totalement impossible de mener à bien une activité commerciale en Chine, ou, depuis la Chine71. Or, le problème est, que les entreprises chinoises sont habituées aux guanxi, et les confondent avec le conseil aux entreprises, ce dernier est alors sous-estimé et est pris comme une sorte d'intermédiaire à la réalisation d'un projet. Néanmoins, malgré ce manque de compréhension de l'intérêt du conseil aux entreprises par la majorité des firmes chinoises, certains groupes, parmi les plus puissants, ont commencé à s'y référer pour n'importe quel projet appelant à une fusion&acquisition. Ils ont alors traité avec des groupes comme : JP Morgan, Lehman Brothers, Merril Lynch... (Voir tableau I.A.2).

Tableau I.A.2 : Les 5 meilleurs contrats de fusions&acquisitions conseillés
(2008-2010)

Dates

Nom de
la cible

Nationalité
de la cible

Nom de
l'acquéreur

Montant
(en
milliards
de
dollars)

Conseiller(s)
de
l'acquéreur

Industrie

Avril
2010

Syncrude
Canada

Canada

Sinopec
Int'l

4,639

Deutsche
Bank AG

Energy
and
Power

Mars
2010

Bridas

Argentine

CNOOC

3,100

JP Morgan

Energy
and
Power

Juin
2009

Addax
Petroleum

Suisse

Mirror Lake
Oil & Gas

9,025

Credit Suisse
Group

Energy
and
Power

 

71 http://www.marketing-chine.com/conseils-business-en-chine/les-guanxis-%E5%85%B3%E7%B3%BB, par Olivier VEROT, le 1 mars 2011.

 
 
 
 
 

Lehman
Brothers

 
 

Awilco

 

COSL

 
 
 

Juillet

 
 
 
 

Asia

Energy

2008

Offshore

Norvège

Norwegian

3,887

JP Morgan

and Power

 

ASA

 

AS

 
 
 
 
 
 
 
 

China Int'l

 
 
 
 
 
 

Capital

 
 
 
 
 
 

China Int'l

 
 

China

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Capital

 
 

Netcom

 
 
 
 
 

Juin

 
 

China

 

JP Morgan

 
 

Group

Hong Kong

 

32,012

 

Telecom

2008

 
 

Unicom

 

Merril Lynch

 
 

(Hong

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

CITIC

 
 

Kong)

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Securities

 
 

Source: Thomson Reuters

On peut ainsi s'apercevoir que ceci concerne surtout des groupes qui travaillent dans le secteur de l'Energie, voir de la télécommunication, en effet, même si pour la télécommunication (période 2008/2010), ceci ne concerne qu'une seule acquisition (mais pour un montant de plus de 32 milliards de dollars). Le conseil, bien qu'encore marginalement compris par les firmes chinoises, s'avère nécessaire et profitable surtout lors de fusions&acquisitions très lourdes.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote