Section II: Les conflits de compétence entre ces
deux autorités.
Il y a un certain conflit de compétence entre
l'autorité traditionnelle et l'autorité de l'Etat dans la mesure
où dans un certain nombre de cas l'autorité traditionnelle, une
fois saisie d'une affaire, fait tout pour solutionner à son ressort,
l'affaire. Et l'autorité étatique même si elle est
indirectement au courant de l'affaire comme elle ne peut pas s'auto saisir dans
les tous les cas n'a naturellement pas le choix que de se tenir à
l'écart.
Les conflits de compétence ou devons-nous dire le
conflit de compétence qui peut exister entre l'autorité des
leaders religieux et les textes ou autorités gouvernementales n'en est
rien qu'un conflit de fait car en principe tous les deux côtés
s'accordent et sont soucieux des idéaux de justice, du bien être
social et de la paix sociale, bref de tous les maux qui constituent notre
société, mais les avis ou les moyens d'actions divergent si elles
ne se contredisent pas.
Pour le dogon, le chef religieux traditionnel incarne
l'unificateur, l'impartial mais aussi le chef spirituel auquel il accorde son
entière confiance et sa pleine dévotion.
Quel qu'en soit la complexité ou l'embarras d'une
affaire, une réponse leur est apportée. Tous les sujets ou cas
trouvent ici leur issu en tout cas pour le moins qu'on puisse dire, ce qui ne
peut en rien empêcher l'Etat à affirmer sa primauté ou son
autorité s'il le faut.
Les deux points qui seront mis en lumière ici
sont : les chefs religieux, sont des acteurs de proximité
(Paragraphe I) et l'affirmation de la primauté de l'Etat
(Paragraphe II.)
Paragraphe I: Les chefs religieux traditionnels acteurs de
proximité.
Les chefs religieux dogon étant les premiers
responsables de la société dans laquelle ils vivent, sont les
premiers ou du moins les privilégiés, quand il y a lieu de
solliciter l'intervention d'une autorité dans tel ou tel cas ou
situation.
Inutile de jouer aux sourds ou aux aveugles pour les
pessimistes de la réalité des faits, plus concrètement de
l'existence d'un réel pouvoir de décisions des chefs religieux
traditionnels, hautement reconnu et approuvé par les populations
locales, car cet état de fait est un fait concret donc, constatable sur
le terrain.
En matière successorale, la plupart des cas ou des
affaires sont solutionnées sur place c'est à dire par les
chefferies traditionnelles. Les intéressés dans ces genres de cas
préfèrent ne pas porter leurs affaires devant les
autorités politiques ou administratives étatiques, estiment-ils
ces autorités publiques ne prennent pas toujours nécessairement
en compte les pratiques d'ordre local ou coutumier auxquelles ils sont
intimement liés.
Egalement, la succession s'opère sous une forme
pouvons-nous affirmer contradictoire aux dispositions et textes existants en la
matière. Exemple, cas de décès d'un chef de famille, les
héritiers ou successeurs sont les frères directs ou de la famille
étendue du défunt et non ses plus proches, épouse(s),
enfant(s) comme le prévoit la loi. Ici la succession suit des normes
coutumières aux dépens des textes républicains.
Localement soutient-on que c'est pour éviter de se
chamailler pour un héritage et également pour éviter, la
division ou la dislocation de la famille uniquement sur la succession d'un
être cher perdu, çà serait là déranger son
sommeil, son repos dans sa nouvelle vie à l'au-delà.
Ne voyons donc pas, cette pratique comme une atteinte aux
droits des proches du défunt (épouse(s), enfant(s)), car
pratiquement dans la majorité des cas le mariage en lui-même a
été célébré dans les normes
coutumières sans la participation quelconque de telle ou telle
autorité administrative ou politique.
Les chefs religieux traditionnels sont réputés
êtres des individus très sages, discrets, respectables et
respectés par tous, par conséquent la population adhère
à l'idée selon laquelle ces chefs ne rendent aucunement des
décisions hâtives ou imprécises.
Notons particulièrement qu'en matière
coutumière, les tribunaux de première instance et les justices de
paix à compétence étendue sont complétés par
des assesseurs de la coutume des parties. N'est-il pas intéressant de le
souligner, ces assesseurs ont voix délibérative.
Cette mesure opérée par l'Etat est salutaire car
celui-ci ne pouvait se permettre d'ignorer pour le bon fonctionnement de ses
institutions, les coutumes locales gages de tout équilibre social.
Seulement ces populations locales sont réticentes à
adhérer aux systèmes dits modernes instaurés par l'Etat,
systèmes qui les ont pris de court et sur lesquels elles sont
évidemment moins informées ou mal informées.
Mais de nos jours, progressivement le fossé s'amenuise
entre ces deux tendances. Ainsi, nous pouvons dire que les décisions des
chefs religieux traditionnels ne contredisent pas pour autant les lois et
règlements de la république.
Car de nos jours au Mali les sociétés
traditionnelles ignorent la majorité des institutions
républicaines existantes ou du moins les méconnaissent. Cela
n'est pas fortuit, car depuis des décennies l'Etat n'a manifesté
aucune volonté de sensibiliser ces sociétés ou populations
qui sont pour autant un des piliers majeurs de développement dans une
société.
L'Etat n'est sollicité que et cela est peu
fréquent que quand les problèmes dépassent des
frontières de ces sociétés et impliquent, des parties
hétérogènes c'est à dire de localités
différentes ou lointaines.
Mais notons quand même, que cet acte peut être
interprété comme un geste d'ouverture ou de reconnaissance,
opéré par les autorités traditionnelles à travers
leurs chefs à l'endroit des autorités étatiques. Et pour
démontrer, aux défenseurs de l'idée selon laquelle il ne
peut y avoir de pouvoir décisionnel sous quelle que forme que ce soit
autre que celui de l'Etat que ces dites sociétés ne sont et sont
loin d'être des hors-la-loi.
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