2.2 Problématique
Au Bénin, jusqu'en 1995, la distribution et la
commercialisation des produits pétroliers et de leurs
dérivés étaient assurées exclusivement par l'Etat
à travers la SONACOP. En application des décisions prises par la
Conférence Nationale des Forces Vives de la Nation de 1990, le
Gouvernement a décidé de libéraliser en 1995, les
activités de distribution des produits pétroliers.
Aujourd'hui, il y a plus d'une quinzaine de
sociétés qui opèrent au Bénin. On peut citer entre
autres la SONACOP, SHELL, TOTAL, TEXACO, ORYX, ARICOCHE SUPER OIL, AGF,
AFRIPETROL, EAO PETROLEUM, etc.
On constate que les produits pétroliers jouent un
rôle très important dans le développement du
Bénin.
Etant donné que le contexte interne se décompose
des éléments suivants :
- Deux (2) forces majeurs animent le marché des
produits pétroliers au Bénin à savoir le secteur formel
sensible aux mécanismes du marché pétrolier mondial et le
secteur informel de plus en plus dynamique en provenance du Nigeria et souvent
déconnecté du jeu du marché international de
pétrole.
- Le revenu généré par an aux trafiquants
d'essence est en augmentation et passe de 28 milliards de FCFA environ en 2002
à 56 milliards de FCFA environ en 200712.
- Le gain financier que tirent les consommateurs de la
commercialisation informelle de l'essence est évalué à
environ 23 milliards de FCFA par an en moyenne.
Alors le problème qui est posé est celui du mode
de fiscalité à adopter pour cette activité dont la
dynamique à générer plus de revenu que l'Etat n'en perd
est palpable. Nous ne pensons pas qu'à l'étape où est
arrivée cette activité de la vente frauduleuse des produits
pétroliers qu'il soit opportun pour l'Etat de continuer à
combattre ladite activité. Il doit avoir un autre regard sur cette
activité informelle et adopter une attitude autre que celle de la lutte
qu'il mène présentement.
Il vaut mieux pour lui d'adopter une stratégie qui
puisse lui permettre d'en tirer profit. Il est évident que ce point de
vue ne sera pas partagé par les sociétés distributrices
formelles. Il va falloir que celles-ci aussi réfléchissent sur
comment procéder, quelle stratégie mettre en oeuvre pour ne pas
se faire pénaliser tout le temps au lieu de demander à l'Etat de
supprimer ce commerce qui en réalité s'intensifie. Un autre
regard s'impose pour les gestionnaires prospectivistes.
12GNIMASSOUN (A. K. Blaise),
2008, Impact de la flambée mondiale du prix du
pétrole sur l'économie béninoise, Université
d'Abomey-Calavi.
Etant donné que le contexte externe se compose des
éléments suivants :
- Le code pétrolier objet de l'Ordonnance n°73-33
du 13 avril 1973 portant loi pétrolière du Dahomey et de
l'Ordonnance n°73-34 du 13 avril 1973 portant Fiscalités
Pétrolières de la République du
Dahomey13 complété par une
série de textes réglementaires, définissent le cadre
réglementaire.
- Les activités du secteur des hydrocarbures en
l'occurrence de la SONACOP, sont exécutées par le pouvoir central
(le Gouvernement).
- La politique de prix des produits pétroliers
découle des orientations politiques et économiques prises par le
Gouvernement (ce que réfutent toujours les acteurs).
- Les sociétés pétrolières qui
n'arrivent plus à supporter la concurrence que leur livrent les
trafiquants, s'arrangent dans la nuit à alimenter leur cuve à
essence de ces produits vendus dans l'informel en vue d'obtenir une marge brute
qui leur permet de supporter les charges incompressibles.
Alors le problème posé est celui de la non
adaptation et de la non application des textes réglementant le secteur
de la vente des produits pétroliers, car les textes datent de 1973 et
l'Etat n'a toujours pas libéralisé les prix et continue de les
fixer dans un contexte concurrentiel.
Nous pensons que, si les sociétés distributrices
formelles ont la possibilité d'aller s'approvisionner chez le
fournisseur de leur choix, elles pourront appliquer des prix adaptés au
pouvoir d'achat des consommateurs béninois. En se référant
au marché nigérian, les prix pratiqués ne sont pas les
mêmes sur toute l'étendue du territoire du Nigeria. Il va falloir
penser à ce mode de gestion du marché des hydrocarbures au
Bénin.
13Ministère des Mines, de
l'Energie et de l'Eau, Bénin, 2007, sur le site :
www.appa.int
Etant donné que :
- Dans le domaine de la distribution des produits
pétroliers, on assiste à une très mauvaise
répartition des stations-service sur l'ensemble du territoire
national.
- Le Bénin compte à ce jour 195 stations-service
dont 80% dans le sud14.
- Les pénuries de produits pétroliers que l'on
observe fréquemment dans les
stations-service lorsque les trafiquants ont des
difficultés à s'approvisionner
sur le marché nigérian.
- La vente illicite de l'essence ne cesse de créer des
désagréments à l'homme et à l'environnement
(dégradation des voies, incendies, dommages corporels et
matériels, décès, etc.).
Alors le problème posé est celui des
dysfonctionnements de la politique de gestion du secteur pétrolier qui
sont caractérisés par l'insuffisance des infrastructures de
distribution et par l'irrégularité de l'approvisionnement de
certaines stations. Avec environ une station-service pour 36.000 habitants et
pour 600Km2, le Bénin dispose de l'un des plus faibles taux
de couverture du territoire national et points de vente officiels des produits
pétroliers15.
De nombreuses localités ne disposant pas de stations
officielles, permettent au marché informel de se développer. Le
problème de la mauvaise gestion du secteur pétrolier se pose ici
et la libéralisation du secteur n'incite pas les compagnies
pétrolières à investir.
Les acteurs du secteur informel sont bien organisés
à tel point dès qu'ils décident d'aller en «
grève », c'est tout le secteur économique qui en ressent.
Ils sont si bien « organisés » que s'ils veulent passer un
message entre eux, l'information circule dans les quelques minutes qui suivent
la prise de décision par les responsables du secteur. Eh ! Oui !
Apparemment, nous pouvons dire qu'ils sont aussi « structurés
».
14Op. Cit.
15Ibid.
Donc ils ont une sorte d'organisation qui fonctionne.
D'où la nécessité de les organiser dans une structure qui
puisse permettre à toutes les parties prenantes de se sentir à
l'aise. Il faut aussi penser au mode de transport et de vente de ces produits
par les acteurs de l'informel.
Par secteur informel, comme son nom l'indique, il s'agit
d'organisation commerciale (marchande à valeur économique) qui
s'opère hors du cadre juridique (étatique) et ne
bénéficiant pas de régimes formalisés qu'ont les
entreprises enregistrées à la Chambre de Commerce. C'est à
partir du secteur informel que les Béninois développent
actuellement les stratégies de protection contre toutes les
difficultés du développent national. Dans le domaine des
hydrocarbures, nous assistons à un problème d'organisation ou
mieux à l'inexistence d'un cadre institutionnel applicable au secteur
informel de la vente des produits pétroliers.
Au vu de ces quelques clarifications d'ordre
général, il nous est donc possible de poser notre question de
recherche.
Comment aider les personnes s'occupant dans le
secteur informel à tirer partie de leur situation ?
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