Impacts socio-économiques de la transhumance transfrontalière dans la zone riveraine du parc W du Bénin( Télécharger le fichier original )par Byll Orou KPEROU GADO Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Docteur vétérinaire 2006 |
Chapitre 2 : RésultatsLes résultats issus de l'analyse et du traitement des données collectées présentent d'abord la situation socio-économique et la transhumance dans la région du parc W du Bénin. C'est à la lumière de cette présentation que les impacts socio-économiques de la transhumance transfrontalière sont abordés. Enfin, quelques atouts et contraintes pour la résolution des problèmes posés par la transhumance sont cités en vue d'aborder le chapitre de discussion et des recommandations. 2.1. Les populations de la périphérie du parc W du Bénin 2.1.1. Traits socio-culturels Les principales ethnies des villages riverains du parc national du W sont : les Peul qui sont présents dans tous les villages riverains au niveau des cinq communes et sont, de ce fait, l'ethnie majoritaire des agro-éleveurs des localités riveraines du parc ; les Bariba (majoritaires dans les communes de Banikoara, Kandi et Kérou), les Dendi (dans les communes de Karimama et Malanville), les Gourmantché, les Mokolé, les Gando, les Djerma, les Haoussa, les Tchenga. La proportion de chaque ethnie au sein de l'échantillon enquêté est donnée par la figure 3. Mokolé 5% Gourmantché Gando Autres Peul 43% Dendi Bariba Figure 3 : Principales ethnies des villages riverains du parc national du W du Bénin L'Islam est la religion de 81% des riverains enquêtés, alors que 11% sont des chrétiens et 7% des animistes. Peul, Dendi, Mokolé, Gando et Gourmantché sont en majorité des musulmans. Les Bariba sont à 37% chrétiens, à 31% musulmans et à 31% animistes. Les chefs de ménages sont âgés de 19 à 80 ans avec une moyenne d'âge de 46 #177; 12 ans ; le nombre de personnes au sein des ménages varie de 3 à 60 personnes avec une moyenne de 17 #177; 11 personnes. 2.1.2. Activités socio-économiques Les populations riveraines du PNW du Bénin pratiquent essentiellement l'agriculture et l'élevage. Pour 61% des ménages, l'agriculture est l'activité principale alors que les 39% restant la considèrent comme une activité secondaire. Ces 39% restant correspondent aux ménages Peul chez qui l'élevage demeure la principale activité. L'élevage est accessoire pour 56% des ménages. Les autres activités sont le commerce, l'artisanat, la pêche ; elles occupent respectivement 23%, 7% et 1% des ménages riverains. Des occupations secondaires ont été notées, notamment des fonctions d'élus locaux, de membres de groupements ou associations villageois, de guides religieux, d'alphabétiseurs et de guérisseurs traditionnels. 2.1.2.1. L'agriculture 2.1.2.1.1. Sollicitation humaine A l'exception des Peul, l'agriculture est l'activité principale de toutes les autres ethnies riveraines du W. Les agriculteurs en zone riveraine du PNW produisent principalement le sorgho, le maïs, le coton, le petit mil ; ces cultures occupent respectivement 95%, 88%, 65% et 37% des ménages (figure 4). 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 Pourcentages de Cultures ou spéculations agricoles Figure 4 : Production agricole des ménages de la zone riveraine du PNW du Bénin La culture du coton est plus développée dans la commune de Banikoara où elle est la principale culture de rente de 86% des ménages. Cette culture est moins développée dans la commune de Karimama et occupe 25% des ménages. Le maïs et le sorgho sont des habitudes culturales très développées dans les communes de Kérou et Kandi où presque tous les ménages cultivent ces céréales. Ces deux cultures vivrières occupent aussi une place de choix dans les communes de Banikoara et Malanville ; à Karimama, c'est plutôt le sorgho et le petit mil qui sont plus cultivés par les riverains du PNW. Les ménages s'adonnent plus au maraîchage dans la commune de Karimama que les autres communes riveraines (tableau III). Tableau III : Production agricole des ménages des communes riveraines du PNW du Bénin
2.1.2.1.2. Occupation des terres Les superficies emblavées par exploitant agricole, dans la zone riveraine du PNW, varient en moyenne de 5,15 ha (à Karimama) à 15,02 ha (à Kérou). Kérou et Kandi sont les communes où les superficies emblavées sont les plus élevées. Dans les zones riveraines des communes de Banikoara, Malanville et Karimama, les superficies emblavées sont moindres (tableau IV). La culture du coton utilise le plus d'espace, avec des
superficies moyennes de 7,63 ha enregistré des exploitations cotonnières dont les superficies vont jusqu'à 24 ha. En matière d'espace occupé, après le coton, viennent, par ordre décroissant, le sorgho, le maïs, le petit mil, les autres cultures vivrières et tubercules (igname, manioc, patate douce, le petit mil précoce,...), l'arachide, le niébé, les plantations d'anacardiers, les cultures maraîchères (oignon, piment, tomate, courge, pommes de terre), les plantations d'arbres fruitiers, le riz. Les autres plantations (teck, eucalyptus,...) et les cultures fourragères sont très faiblement rencontrées dans les systèmes d'exploitation en zone riveraine du PNW du Bénin. C'est surtout en zone riveraine nord, dans les communes de Karimama et Malanville que les cultures fourragères sont rencontrées dans les systèmes agricoles. Quotas d'utilisation de l'espace par les différentes spéculations agricoles sont représentés par la figure 5. Tableau IV : Superficies des exploitations selon la culture en zone riveraine du W du Bénin
Les ménages ont diversement acquis les terres
exploitées. Les ménages qui ont hérité à personne (9%), par prêt (7%). Les autres modes d'acquisition ne concernent que 1% des ménages. Enfin, les terres exploitées par 7% des ménages ont une origine double. Dans les communes de Kérou, Kandi et Malanville, les exploitations agricoles riveraines du parc W sont séparées du parc lui-même par les zones cynégétiques de la Mékrou et de la Djona sur de vastes étendues ; ces exploitations se démarquent de celles de Banikoara et Karimama par leurs superficies moyennes plus grandes, donc une disponibilité en terres cultivables plus élevée. Les zones riveraines de Banikoara et Karimama tournées vers le parc sont âprement disputées entre agriculteurs et éleveurs. En terme de production de coton, la commune de Banikoara est classée première dans la zone d'étude et même sur le plan national. Remarquons que ce statut de commune grande productrice de coton ne s'affiche pas ici pour Banikoara. Les localités enquêtées dans cette commune sont très proches du parc, comme c'est le cas pour Karimama. En effet, la situation foncière est plus contraignante en zones riveraines du parc W que dans les zones en retrait de la réserve.
Maïs Petit mil Sorgho 25,4% Coton 40,2% Figure 5 : Quotas d'utilisation de l'espace par les différentes spéculations agricoles en zone riveraine du W du Bénin 2.1.2.2. L'élevage 2.1.2.2.1. Effectifs du cheptel local Toute la zone riveraine du W est un espace d'élevage par
excellence. Cet élevage du cheptel bovin est assez important. Evaluer cet effectif en particulier et celui des autres espèces de façon générale est un exercice périlleux pour un espace comme celui de la zone riveraine du PNW du Bénin caractérisé par un élevage transhumant à plus ou moins longue distance ; une zone de concentration pastorale internationale le long du fleuve Niger pour ses bourgoutières ; un sous encadrement notoire du secteur de l'élevage caractérisé par l'insuffisance d'agents d'élevage officiellement présents sur le terrain et des moyens de travail mis à leur disposition. C'est donc avec les réserves d'usage que sont présentées les différentes approches. Le dernier recensement du cheptel effectué par les CARDER Borgou et Atacora en 1999 permet de constater que les communes riveraines du PNW du Bénin concentrent de grands effectifs de ruminants (348638 têtes de bovins et 272928 têtes de petits ruminants). La commune de Banikoara occupe la première place avec 36% des bovins et 29% des petits ruminants ; elle est suivie de Kandi qui a 27% des bovins et 23% des petits ruminants. Enfin, par ordre d'effectif décroissant, il y a Malanville et Karimama précédées de Kérou pour le cheptel bovin ou suivies de Kérou pour les petits ruminants (tableau V). Tableau V : Répartition du cheptel par espèce dans la zone riveraine du PNW du Bénin Espèces Communes Volailles Effectifs Effectifs % % Bovins Effectifs % Petits ruminants Effectifs % Porcins
Source : CARDER Borgou et Atacora ; Recensement 1999 Selon les résultats de nos travaux, les ménages riverains, toutes catégories confondues, ont chacun en moyenne 33 #177; 14 bovins et 18 #177; 7 petits ruminants. Les ménages d'éleveurs ont évidemment les effectifs les plus élevés, soit une moyenne de 72 #177; 18 têtes de bovins et 23 #177; 7 têtes de petits ruminants contre respectivement 12 #177; 6 et 14 #177; 6 chez les agriculteurs (tableau VI). Tableau VI : Répartition du cheptel bovin par catégorie socio-professionnelle et par commune dans la zone riveraine du PNW du Bénin
Si nous nous intéressons uniquement aux bovins, nous constatons que les éleveurs de Kérou détiennent les effectifs moyens les plus importants avec 171 #177; 33 têtes, suivis de loin par ceux de Kandi qui ont 81 #177; 5 têtes. Dans les autres communes riveraines, ces effectifs sont faibles et les éleveurs de Malanville ont les effectifs moyens les plus faibles avec 35 #177; 5 têtes. Pour les ménages d'agriculteurs, c'est également à Malanville que les effectifs moyens de bovins sont les plus faibles avec 3 #177; 1 têtes ; les ménages d'agriculteurs de Banikoara ont les plus grands effectifs de leur catégorie soit 20 #177; 7 têtes par ménage enquêté. 2.1.2.2.2. Les tendances évolutives du cheptel local Etablir l'évolution du cheptel bovin de la zone riveraine du PNW à partir des données du recensement de 1999 et celles des campagnes périodiques de vaccination contre la pasteurellose bovine et la péripneumonie contagieuse bovine (PPCB) n'est sûrement pas l'idéal. Cependant, à défaut de recensements réguliers et fiables, c'est l'une des procédures qui permettra de disposer d'informations utiles pour une perception des tendances récentes du cheptel. Il faut noter que lors d'un recensement, le cheptel est dénombré au détail, alors que lors des campagnes de vaccination, tous les animaux ne sont pas pris en compte (jeunes animaux qui bénéficient de l'immunité maternelle ou dont le système immunitaire est incapable de répondre aux sollicitations de l'antigène vaccinal ; animaux âgés bénéficiant d'une immunité ; animaux n'ayant pas été présentés aux agents vaccinateurs ; animaux présentés mais ayant réussi à s'échapper avant l'opération vaccinale et communément appelés les "cordes cassées"). Dans l'ensemble de la zone riveraine du W, l'effectif de bovins vaccinés en 2001 est supérieur de 24562 têtes à l'effectif obtenu au recensement de 1999. Cette différence positive après deux années, malgré les contraintes sus-citées, témoigne d'un taux d'accroissement positif du cheptel dans la zone riveraine du PNW du Bénin (tableau VII et figure 6). Tableau VII : Effectifs du cheptel bovin de la zone riveraine du PNW du Bénin
* Total sans la commune de Kérou Sources : Rapports annuel d'activité des CeRPA Borgou - Alibori et Atacora - Donga Les effectifs vaccinés en 2002 et en 2003 ont baissé mais sont restés supérieurs à l'effectif de référence c'est-à-dire celui du recensement de 1999 qui est de 348638 têtes. En 2004 et 2005, les effectifs vaccinés ont connu une baisse très importante. La commune de Banikoara a enregistré les baisses les plus remarquables. De telles baisses ne permettent plus de croire que le taux d'accroissement demeure toujours positif, bien au contraire, elles donnent les preuves d'un taux d'accroissement en baisse. En effet, aucun phénomène naturel ne permet de justifier cette baisse. La diminution des effectifs de bovins en zone riveraine du W est la conséquence des flux migratoires du cheptel bovin de la zone. Par exemple à Founougo, arrondissement de Banikoara
frontalier au parc W, les avec, au bilan, une baisse continuelle des effectifs présentés. Les éleveurs disent ne plus se sentir en sécurité face à la menace des forestiers qui ont fini par mettre en application la triste formule de "vaccination"6. Ces éleveurs partent alors avec leurs animaux vers le département de l'Atacora et même vers le Togo sans projeter revenir pour la majorité. Ceux qui ont encore le courage ou l'obligation de rester dans cette zone d'attache pensent qu'ils ne vont certainement pas pouvoir résister longtemps si rien n'est fait pour les aider à sécuriser leur cheptel.
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 Années Banikoara Kandi Karimama Malanville Total Figure 6 : Tendances évolutives du cheptel bovin de la zone riveraine du PNW du Bénin à partir des données du recensement de 1999 et de celles des campagnes de vaccination de 2001 à 2005 Ce problème est plus ancien dans la commune de Karimama dont la superficie est à 83% occupée par le PNW et où les conflits sont plus fréquents entre éleveurs, agriculteurs et forestiers. Les taux de couverture vaccinale, toujours bas (24% pour 2005 en tenant compte de l'effectif recensé en 1999) témoignent de la forte instabilité du cheptel de la zone. C'est pourquoi les éleveurs qui réussissent à trouver une stabilité ailleurs n'y retournent plus. Les bovins de Kérou sont également faiblement
couverts lors des campagnes de 6 Terme péjoratif employé localement pour désigner l'abattage des animaux domestiques au moyen de fusils par les forestiers et leurs auxiliaires chargés de la surveillance du parc W au Bénin. explication nous citerons notamment un problème de sensibilisation, la présence d'éleveurs allochtones réticents ou difficilement accessibles par les agents vaccinateurs. Les zones de Kaobagou, Djoléni et Gorobani sont en effet des lieux de convergence d'animaux étrangers en saison difficile. Kandi et Malanville ont par contre les meilleurs taux de couverture vaccinale avec respectivement 79 et 74%. En effet, les forêts classées de Goungoun dans la commune de Malanville et de Bensékou dans la commune de Kandi, sont des lieux de convergence des éleveurs locaux et étrangers. Pour les éleveurs, ces lieux constituent des zones de sécurité sur le plan alimentaire et sur le plan de la pression des forestiers. 2.1.2.2.3. Elevage et pratiques spatiales dans la zone riveraine du PNW A priori, la zone du PNW du Bénin est un pôle d'attraction pour les activités d'élevage. Mais l'opposition forestière oblige les riverains, et particulièrement les éleveurs, à un changement de comportement vis-à-vis de cette réserve. Ainsi, 44% des éleveurs enquêtés dans la zone d'étude mènent leurs activités champêtres ou conduisent leurs animaux dans la zone libre7 ou dans des zones éloignées du parc ; 40% profitent de la zone tampon8 qui leur a été cédée. Indépendamment de ces deux premiers groupes, 11% reconnaissent faire des incursions régulières à l'intérieur du parc avec leurs animaux. Dans ce dernier groupe, la majorité adopte ce comportement surtout en saison difficile pour sauver le cheptel. Pour éviter les confrontations fréquentes avec les éco-gardes du parc W, 48% des éleveurs préfèrent aller en transhumance pour préserver leur cheptel et améliorer leurs revenus. 2.1.2.3. Autres activités Les agro-éleveurs de l'échantillon
enquêté mènent d'autres activités pour
améliorer, 7 La zone libre est un espace non classé mais appartenant au domaine protégé de l'Etat. Elle est occupée par les forêts de particuliers, les champs, les jachères,... 8 Selon l'article 11 de la loi n° 2002-016 du 18 octobre 2004 portant régime de la faune en République du Bénin, la zone tampon est la bande du domaine forestier protégé qui ceinture les aires protégées. Selon l'article 25 de la même loi, la zone tampon est destinée à la réalisation d'activités ou d'aménagements socio-économiques compatibles avec les objectifs de l'aire protégée, au profit et avec la participation des populations riveraines. l'appartenance à des bureaux de groupements de producteurs (12%), de l'artisanat (7%). Les fonctions de guides religieux, élus locaux, gestionnaires de biens publics occupent chacun 4% des agro-éleveurs riverains du PNW du Bénin. On a également la boucherie qui occupe 2% ; et, pour les activités qui n'occupent que 1% de la population ciblée, il y a notamment la pêche, la négociation et l'animation en milieu rural. 2.1.3. Revenus des ménages d'agro-éleveurs 2.1.3.1. Revenus agricoles 2.1.3.1.1. Revenus agricoles disponibles Les revenus agricoles dont disposent les ménages riverains du PNW sont d'une importance modeste. C'est évidemment les agriculteurs qui tirent les meilleurs revenus de ce secteur d'activité. En effet, pour toutes cultures confondues, les agriculteurs disposent d'un revenu moyen annuel de 902 259 FCFA contre 139 900 FCFA pour les éleveurs (figure 7). Ménages d'éleveurs Ménages d'agriculteurs Ensemble des ménages Exploitations agricoles Revenus agricoles disponibles (en FCFA) Figure 7 : Revenus agricoles disponibles par produit dans les ménages de la zone riveraine du PNW au cours d'une année. La culture du coton est la meilleure source de liquidité
; elle procure un revenu coton, les agriculteurs ont un revenu disponible annuel de 680 661 #177; 926 475 FCFA, tandis que chez les éleveurs, il n'est que de 92 807 #177; 140945 FCFA. Après le coton, par ordre décroissant de revenu moyen annuellement disponible moyen, il y a la culture du maïs (86 802 FCFA), des plantes maraîchères (16 465 FCFA), du sorgho (10 303 FCFA), du niébé (9 099 FCFA), de l'arachide (9 006 FCFA), du riz (6 056 FCFA). Les autres produits sont essentiellement destinés à l'autoconsommation du ménage. 2.1.3.1.2. Productions agricoles auto-consommées ou distribués en don Les ménages concernés par nos enquêtes font essentiellement une agriculture de subsistance. Pour l'ensemble de ces ménages, en moyenne 3675,1 kg de produits agricoles sont annuellement auto-consommés ou distribués en dons. Les ménages d'agriculteurs ont une moyenne légèrement plus élevée que celle des éleveurs, soit respectivement 3663,5 kg et 3620,0 kg par an (figure 8). Ménages d'éleveurs Ménages d'agriculteurs Ensemble des ménages Produits agricoles Quantités auto-consommées (en kg) Figure 8 : Autoconsommation de produits agricoles dans les ménages de la zone riveraine du PNW au cours d'une année. La culture du sorgho vise beaucoup plus la satisfaction directe des besoins nutritionnels des ménages que la commercialisation. C'est la céréale la plus utilisée surtout par les ménages d'éleveurs qui consomment jusqu'à 2191,7 #177; 1785,3 kg par an contre 1470,5 #177; 1564,4 kg par an pour les ménages d'agriculteurs. Dans l'alimentation de base des agriculteurs, le maïs est légèrement moins utilisé que le sorgho. Mais chez ces agriculteurs, le maïs est beaucoup plus important dans l'alimentation que chez les éleveurs. Les ménages d'agriculteurs auto-consomment 1445,9 #177; 1762,1 kg de maïs par an ; quant aux ménages d'éleveurs la consommation de maïs oscille autour de 896,4 #177; 821,9 kg par an. Le reste des produits agricoles, par ordre d'autoconsommation décroissante, se classe comme suit : petit mil 323,1 #177; 611,4 kg, l'ensemble des autres cultures vivrières et tubercules 206,3 #177; 848,1 kg, le niébé 53,8 #177; 136,1 kg, le riz 50,3 #177; 155,4 kg, l'arachide 21,6 #177; 79,6 kg. 2.1.3.2. Revenus d'élevage 2.1.3.2.1. Revenus disponibles Les produits d'élevage qui procurent des revenus aux éleveurs sont la vente des animaux sur pied (bovins, ovins, caprins, porcins, pintades, poulet, canard,...), la vente du lait de vache et la vente d'autres produits comme les oeufs. Dans la tradition Peul de la zone périphérique d'influence du PNW, la gestion du lait revient de droit à la femme. Ce sont les revenus issus de la vente de cette denrée qui permettent aux femmes d'acheter les condiments, les parures et de satisfaire certains besoins sans faire recours aux maris. Dans la zone d'étude, c'est évidemment les éleveurs qui tirent les revenus les plus importants des activités d'élevage avec une moyenne annuelle de 400 839 FCFA. Les agriculteurs, pour leur part, disposent, en moyenne, de 201 722 FCFA par an, c'est-àdire à peu près la moitié de celui des ménages d'éleveurs. Pour tous les ménages confondus, en zone riveraine du PNW, la moyenne annuelle des revenus disponibles est de 316 582 FCFA (figure 9). Ménages d'éleveurs Ménages d'agriculteurs Ensemble des ménages 52 Produits d'elevage Revenus disponibles (en FCFA) Figure 9 : Revenus disponibles annuels selon les produits d'élevage et par ménage dans la zone riveraine du PNW Les revenus issus des bovins sont les plus importants avec 226 800 FCFA en moyenne par an et par ménage sans compter les revenus du lait (figure 9). Ces revenus, gérés par les femmes, sont évalués en moyenne à 1 652 FCFA par jour dans les ménages d'éleveurs contre 766 FCFA dans les ménages d'agriculteurs. Pour l'ensemble des ménages, la moyenne journalière est de 1431 FCFA. Les ménages d'éleveurs et d'agriculteurs vendent respectivement 5 #177; 4 et 2 #177; 2 bovins par an. Après les bovins, c'est l'ensemble des volailles et autres produits d'élevage qui procurent plus de revenus avec une moyenne de 51 141 FCFA par an et par ménage. Les petits ruminants génèrent, en moyenne, un revenu disponible annuel de 38 641 FCFA. 2.1.3.2.2. Produits d'élevage auto-consommés Dans les ménages enquêtés, le lait et les oeufs produits sont consommés en partie ou en intégralité. Pendant des occasions spéciales, des animaux peuvent être abattus pour la viande. Ces rares occasions correspondent dans la majorité des cas aux fêtes religieuses comme la Tabaski et le Ramadan. La moyenne des abattages de bovins est largement inférieure à 1 tête/ménage/an. Dans ces ménages, les bovins sont rarement abattus pour la famille. Les petits ruminants sont, par contre, plus abattus, soit 2 ~ritpc~ts so~~~~~~~~~~~~~~~ ~~ Lc tr~~s~~~~vc tr~~sfro~tcLi~r~ cs Lc ov r v~rc~&~ ~~ P&r~ W ~~ "~~~~ têtes/ménage/an. Les ménages d'agriculteurs en abattent plus que ceux d'éleveurs avec 3 têtes/ménage/an contre 1 tête/ménage/an. Dans le cas des volailles et autres espèces animales, c'est plutôt le contraire. Les éleveurs abattent, pour leur propre consommation, 6 têtes/ménage/an en moyenne contre 4 têtes/ménage/an dans les ménages d'agriculteurs. Les ménages d'éleveurs auto-consomment, en moyenne, 5 à 20 litres de lait par jour. Précisons que dans la plupart des ménages d'éleveurs de la commune de Karimama, le lait produit est toujours totalement consommé dans le cercle familial ou donné. Les éleveurs dont les campements sont très éloignés des grandes agglomérations ne vendent pas le lait ; ils le consomment ou le transforment en fromage. Pour les ménages d'agriculteurs propriétaires de vaches, le lait auto-consommé journellement oscille, en moyenne, autour de 4 à 12 litres. La consommation des oeufs est un paramètre peu maîtrisé dans les ménages enquêtés, car l'oeuf y est surtout réservé aux enfants en phase de croissance qui en ont plus besoin selon les propos d'un chef de ménage. 2.1.3.3. Autres revenus Il s'agit des revenus générés par les activités secondaires menées par certains agroéleveurs riverains du PNW. Ces activités concernent 51% des agro-éleveurs rencontrés. Au sein de cette proportion d'agro-éleveurs, 52% ont une seule activité secondaire génératrice de revenus, 45% en ont deux et 2% ont jusqu'à trois activités secondaires qui leur permettent d'avoir des revenus complémentaires. Chaque chef de ménage, sans distinction de catégorie socio-professionnelle, gagne de ses activités secondaires 271 863 #177; 347 796 FCFA par an. Les éleveurs ont de leurs activités secondaires des revenus beaucoup plus élevés que ceux des agriculteurs, soit respectivement 471 000 #177; 610 241 FCFA et 217 553 #177; 218 379 FCFA. 2.1.3.4. Place de l'élevage dans l'économie de la zone riveraine du W Sur la base des revenus générés par les
activités menées dans la zone riveraine du compte pour 26% dans les revenus des chefs de ménages enquêtés contre 51% pour l'agriculture. Les autres activités apportent 23% des revenus; ce qui correspond en moyenne à 271 863 FCFA par an. Les agriculteurs tirent 69% de leurs revenus de l'agriculture, soit une moyenne annuelle de 902 259 FCFA ; 15% de ces revenus proviennent de l'élevage et 16% des autres activités. Les activités d'élevage procurent aux éleveurs 40% de leurs revenus, l'agriculture seulement 14% et les autres activités jusqu'à 46%, correspondant à 471 000 FCFA en moyenne par an. Remarquons que le commerce est classé dans les activités secondaires ; comme beaucoup d'éleveurs font le commerce de bétail, leurs revenus générés par les activités secondaires ont alors un taux élevé. 2.2. La transhumance dans la zone riveraine du W du Bénin Dans la zone d'influence du parc national du W, la transhumance est intégrée au système d'élevage. En effet, cette zone, en certains endroits, connaît une augmentation saisonnière du cheptel bovin due à un flux de troupeaux nationaux ou étrangers à la recherche de ressources alimentaires principalement. 2.2.1. Transhumance locale La transhumance locale se traduit par le déplacement des bouviers locaux avec leurs animaux vers l'intérieur du pays ou à l'intérieur du parc national du W à la recherche des pâturages et de l'eau. Cette transhumance est menée par des acteurs dont les raisons orientent son déroulement. 2.2.1.1. Les acteurs Dans la zone riveraine du PNW, la transhumance est le fait des éleveurs Peul qui représentent 64% des partisans de cette pratique. Les animaux de 48% de ces éleveurs riverains enquêtés vont en transhumance. Ces animaux sont conduits par les membres de la famille qui sont généralement les enfants (91%), les frères (6%) ou d'autres parents au propriétaire du troupeau. Ces bouviers ont un âge moyen de 21,9 #177; 5,5 ans. Selon nos enquêtes, 22% des agriculteurs confient leurs animaux aux Peul qui, au moment d'aller en transhumance, les emmènent avec leur troupeau. Par exemple, 43% des Gourmantché vivant en périphérie du PNW, confient leurs bovins aux Peul qui les emmènent en transhumance. Dans la même zone d'étude, 33% des Mokolé, 18% des Dendi, 15% des Bariba laissent également leurs bovins aux mains des Peul transhumants de leur localité (tableau VIII). Tableau VIII : Acteurs de la transhumance dans la zone riveraine du PNW du Bénin
2.2.1.2. Les raisons Les transhumants locaux rencontrés au cours de nos investigations donnent plusieurs raisons pour justifier le départ des animaux en transhumance. La recherche de pâturages est la raison la plus évoquée (79% des enquêtés), ensuite la recherche d'eau, la recherche de sécurité, la protection des animaux contre certaines maladies, l'extension des champs dans les zones d'attache9 pour respectivement 52%, 21%, 5%, 5% des bouviers enquêtés. D'une commune riveraine à l'autre, le schéma n'est pas toujours le même. Ainsi dans la commune de Banikoara, la recherche d'eau est la raison qui, selon 60% des transhumants rencontrés, motive le départ pour la transhumance ; ensuite, c'est la recherche de pâturages pour 40% des enquêtés ; la recherche de sécurité, l'extension des champs et la tradition sont les raisons qui poussent, chacune, 20% des enquêtés à partir en transhumance. 9 La zone d'attache correspond à l'endroit où est établie la concession de l'éleveur (Bierschenk, Le Meur, 1997) La recherche d'eau est également prioritairement évoquée par tous les transhumants de la zone de Malanville comme raison de départ pour la transhumance. Raisons du depart en Par contre, à Karimama où le bas-fond du fleuve Niger est accessible au bétail en saison sèche, la recherche d'eau n'est pas une préoccupation majeure pour les éleveurs. En effet, 94% des bouviers enquêtés dans cette zone évoquent la recherche des pâturages comme raison de la transhumance (figure 10). Malanville 0 20 40 60 80 100 Proportions de transhumants Figure 10 : Raisons du départ en transhumance dans trois communes riveraines du PNW La recherche de sécurité, évoquée parmi les raisons de départ en transhumance, revêt plusieurs sens selon le pasteur et l'itinéraire de transhumance : 1' les pasteurs qui préfèrent transhumer à l'intérieur du parc espèrent garantir une sécurité alimentaire à leurs animaux. Ils s'arrangent pour négocier avec les agents des eaux et forêt ou entrent frauduleusement dans la réserve, prenant le risque de se voir imposer le payement de fortes amendes ; alternative préférable pour certains ; 1' les pasteurs qui préfèrent éloigner leurs itinéraires de transhumance du parc fuient la traque forestière avec ses corollaires (payement d'amendes, abattage des animaux) ou la prédation des animaux par certains carnivores sauvages; 1' les agressions, les vols, les maladies sont aussi des aspects de sécurité qui peuvent être pris en compte dans les choix. 2.2.1.3. Le déroulement de la transhumance locale Les transhumants rencontrés au cours de nos enquêtes sur le terrain sont à 70% des locaux. De façon générale, l'abord des éleveurs sur les lieux de pâture, en zone riveraine du W, n'est très aisé à cause d'une réticence exagérée de ces derniers. C'est l'enquête auprès des agro-éleveurs sédentaires surtout qui a permis d'avoir des informations sur les lieux et périodes de départ, les périodes de retour et les itinéraires. 2.2.1.3.1. Zones de départ, itinéraires et zones d'accueil 2.2.1.3.1.1. Dans la commune de Kérou Dans cette commune, 42% des troupeaux d'agro-éleveurs sont menés en transhumance, 33% n'y vont pas et les propriétaires des 25% restants ne se prononcent pas. Parmi les troupeaux menés en transhumance, 16% sont conduits vers des localités de la commune plus proche du parc W. Il s'agit, par exemple, des zones de Kaobagou, Djoléni, Gorobani, Gnompagou. Compte tenu de l'intensification des activités de surveillance du parc par les éco-gardes, 25% des transhumants de la commune préfèrent emmener leurs troupeaux plus à l'ouest, dans le même département de l'Atacora. A titre d'exemple, certains se déplacent suivant l'itinéraire : collines de Firou - Batinnin - Wouroufina - Toucountouna - Natitingou. Au sein de ceux qui ne vont pas en transhumance, 25% justifient leur choix par le fait qu'ils sont dans une zone d'accueil (cas des agro-éleveurs de Koabagou et Gorobani) ; 8% ont des effectifs restreints dont les besoins sont satisfaits sur place. 2.2.1.3.1.2. Dans la commune de Banikoara Nos enquêtes indiquent que 32% des troupeaux sont concernés par la transhumance. Ces troupeaux ont une multitude de destinations. En effet, 11% privilégient les zones d'accueil du département de l'Atacora et de la Donga, c'est-à-dire Firou, Péhunco, Djougou, Natitingou notamment. L'un des itinéraires de certains transhumants de la commune est le suivant : Goumori - fermes de Kérou - traversée de la Mékrou - fermes de Djoléni et Gorobani - Kaobagou. Certaines localités de la commune de Banikoara proches du parc W accueillent 7% des troupeaux transhumants de ladite commune. C'est le cas des zones d'accueil comme Bonni, Sombannou, Bontè, Guibagou, Batran, Yambannou. Les localités comme Boukoubrou et Woré, proches de la forêt classée de l'Alibori supérieur, accueillent 7% des transhumants de Banikoara. Le Togo est la destination de choix de 4% des éleveurs transhumants de Banikoara ; alors que 4% autres déclarent continuer leur transhumance à l'intérieur du parc W. Parmi ceux qui ne vont pas en transhumance (54%), 25% s'abstiennent de cette pratique parce qu'ils ont de petits effectifs, 7% pensent que la transhumance augmente la mortalité dans le troupeau, 7% ne savent pas où aller et 4%, qui sont des cultivateurs, ne confient pas leurs animaux aux Peul qui partent en transhumance pour manque de confiance. 2.2.1.3.1.3. Dans la commune de KandiSeulement 17% des agro-éleveurs enquêtés comptent la transhumance dans leur système d'élevage. Dans ce groupe, 8% ont leur zone d'accueil vers Djougou dans le département de la Donga ; 8% continuent jusque dans le Togo avec leurs animaux. L'augmentation de la mortalité pendant ou au retour de la transhumance persuade 8% des éleveurs à arrêter la transhumance dans le groupe de 75% des enquêtés n'ayant pas la transhumance dans leurs pratiques d'élevage ; 17% du groupe ont de petits effectifs. Notons au passage que, dans la commune de Kandi, il y a des atouts qui peuvent maintenir sur place le cheptel bovin. Il s'agit de la forêt classée de l'Alibori supérieur à l'ouest et de la forêt classée de la Sota à l'est. 2.2.1.3.1.4. Dans la commune de Karimama La transhumance est présente dans les moeurs
d'élevage de 30% des personnes le cas de l'itinéraire de certains éleveurs de Loumbou-Loumbou : Loumbou-Loumbou - zone tampon - Bongnammi, Bonwalou, Koundjibangoun ou profondeur du parc W - collines de Monsey - Pékinga - Goumbitigoura - bas-fond - Loumbou-Loumbou. Parmi les propriétaires d'animaux qui ne sont pas des habitués de la transhumance, 25% justifient leur position par la crainte du contrôle forestier dans le parc W, 20% qui sont des cultivateurs ne confient pas leurs animaux aux Peul qui partent en transhumance pour manque de confiance, 15% ont de petits effectifs dont les besoins sont facilement satisfaits sur place. 2.2.1.3.1.5. Dans la commune de Malanville Dans cette commune, 30% des troupeaux sont concernés par la transhumance et ont leurs zones d'accueil vers Alfakoara et les forêts classées de Goungoun et de l'Alibori supérieur, précisément dans les localités de Yara et de Sinendé dans le département du Borgou. Il y en a qui vont plus loin vers l'Atacora, la Donga, les Collines et même au Togo. 2.2.1.3.2. Calendrier de la transhumance locale La figure 11 schématise l'avis des agro-éleveurs sédentaires de la périphérie du W sur les périodes d'arrivée et de départ des transhumants béninois dans leurs localités. L'analyse de cette figure permet de constater ce qui suit : 1' au cours des mois de mars et avril, la périphérie du parc connaît des flux d'arrivées de transhumants de diverses localités béninoises et des flux de départs vers des destinations éloignées de cette périphérie. Ces flux marquent une transition qui annonce les départs pour la grande transhumance qui va globalement de mars à juin ; 1' à partir du mois de juin, les départs deviennent plus importants ; les animaux doivent s'éloigner des champs après les premières pluies pour éviter les dégâts sur les cultures : c'est le début de la petite transhumance ; certains éleveurs transhumants doivent aussi rejoindre leur zone d'attache pour les travaux champêtres ; i' la période allant de novembre à février connaît une vague d'arrivée de transhumants ; cette période correspond à celle où les animaux revenant de la petite transhumance viennent profiter des résidus de récolte dans les champs de sorgho et de coton notamment. Le départ pour la grande transhumance dépend du début de la saison des pluies dans les zones d'accueil ; ce début connaît des variations d'une année à l'autre ou d'une région à l'autre et peut être entre mars et avril ; il peut aussi aller jusqu'à début mai. Proportion des avis (%) 40 35 30 25 20 15 10 5 0 Périodes de l'année Arrivées Départs Figure 11 : Périodes d'arrivée et de départ des transhumants locaux en zone riveraine du PNW 2.2.2. Transhumance transfrontalière 2.2.2.1. Le cheptel transhumant 2.2.2.1.1. Les effectifs Il est difficile de donner des chiffres exacts sur l'effectif des animaux migrant d'un lieu à un autre dans la zone riveraine du PNW compte tenu du manque de suivi des mouvements de bétail. Au niveau du poste frontalier de la Mékrou, de décembre 2005 à janvier 2006, les effectifs d'animaux en provenance du Burkina Faso se chiffrent à 552 bovins, 619 ovins et 276 caprins, soit un total de 32 troupeaux. Nous n'avons pas les données de février. Au même poste, pour la période allant de mars 2006 à la mi-avril 2006, il a été enregistré 246 bovins, 171 ovins, 40 caprins et 2 ânes répartis en 15 troupeaux. Le but du déplacement de 92 % de ces troupeaux transhumants est la vente, tandis que pour le reste (8 %), c'est la recherche de pâturages et d'eau. A Madécali, le recensement a tenu compte aussi bien des mouvements du bétail étranger que ceux du bétail local. Ainsi, pour le seul mois de décembre 2005, les effectifs d'animaux enregistrés se présentent comme suit : 4494 bovins, 588 ovins et 524 caprins. 80 % des troupeaux recensés sont béninois et 20 % nigérians. Le but du déplacement de tous les animaux recensés à ce poste est la recherche de pâturages et d'eau. Il faut noter que l'absence d'animaux nigériens, au sein des animaux recensés, est liée à l'impossibilité de traverser le fleuve Niger à cette date en raison de la crue. 2.2.2.1.2. Les tendances évolutives 2.2.2.1.2.1. Evolution à la périphérie du parc Au poste frontalier de la Mékrou, le plus grand mouvement d'animaux du Burkina Faso vers le Bénin a été noté durant le mois de décembre 2005, soit 1123 têtes d'animaux (figure 12) ; et le nombre d'ovins introduits a été plus important. Ce mois a connu, en effet, la préparation de plusieurs fêtes (Noël, nouvel an et Tabaski). Ce grand mouvement, en période de fêtes, confirme le rôle commercial joué par ce poste de passage du bétail étranger. Bov Ovins Caprins Autres 200 100 0 600 500 400 300 Effectifs d'an imaux déc-05 janv-06 mars-06 1ère quinzaine d'avr 06 Temps Figure 12: Evolution des mouvements d'animaux au poste frontalier de la Mékrou (Commune de Banikoara) Les mois qui ont suivi ont été
caractérisés par une diminution régulière des
effectifs ~ritpc~ts so~~~~~~~~~~~~~~~ ~~ Lc tr~~s~~~~~~~ tr~~sfro~tcLi~r~ cs Lc ov r v~rc~&~ ~~ P&r~ W ~~ "~~~~ tendance à la hausse en avril 2006. Quant aux petits ruminants, leurs effectifs ont baissé en janvier, puis augmenté en mars avant de connaître encore une baisse en avril de la même année. Les données obtenues au poste de Madécali n'ont concerné que le seul mois de décembre 2005, d'où l'impossibilité de dégager une tendance évolutive. 2.2.2.1.2.2. Evolution à l'intérieur du parc La présence illégale du bétail domestique à l'intérieur du parc W a aussi évolué dans le temps. L'appréciation de cette évolution est rendue possible grâce aux données du service contentieux de la DPNW sur les arrestations de bouviers dans le parc ou ses zones d'influence. Ces données indiquent la fréquentation du parc W par les troupeaux transhumants de trois pays principalement : le Bénin, le Niger et le Burkina Faso (figure 13). 120 100 80 60 40 20 0 Nombre de transhumants Béninoise Nigérienne Burkinabé Total 2001 2002 2003 2004 2005 Années Figure 13 : Evolution du nombre de transhumants arrêtés dans le PNW ou dans ses zones d'influence (Service contentieux de la DPNW-Bénin) En 2001 et 2003, le nombre des arrestations a été très bas, 4 et 1 respectivement, pour les trois nationalités. Ces chiffres traduisent soit un relâchement dans la surveillance, soit une diminution effective des incursions de bétail dans le parc. Nous retenons la première hypothèse compte tenu des résultats des autres années. En effet, en 2002, il y a eu 88 arrestations avec une majorité de Nigériens, suivis des Béninois et des Burkinabé. Ces arrestations ont augmenté en 2004 et en 2005 ; elles se chiffrent respectivement à 98 et 97 bouviers transhumants. Pour ces deux années les Béninois sont majoritaires, suivis des Nigériens. La tendance, de 2004 à 2005, est à la baisse pour les bouviers Béninois et Burkinabé arrêtés contrairement à celle des Nigériens. La tendance globale à la hausse des arrestations traduit deux réalités ; d'une part, une meilleure organisation des patrouilles de surveillance qui arrivent à déloger les bouviers et leurs animaux illégalement présents dans le parc et ses environs ; d'autre part, les bouviers, luttant pour la survie de leurs animaux, ont une intention toujours renouvelée de faire du W leur refuge malgré la pression forestière. En effet, les résultats de nos enquêtes montrent que 74% de ces bouviers savent que le parc W est protégé contre la transhumance et, à la question « pourquoi n'allez-vous pas ailleurs ?», 19% ont répondu qu'ils n'ont pas d'autres possibilités. 2.2.2.2. Acteurs 2.2.2.2.1. Les transhumants étrangers La rencontre des transhumants est généralement difficile en particulier les étrangers ; Ces transhumants étrangers n'ont représenté que 5% de l'ensemble des personnes enquêtées soit 8 sur 159 et 31% des transhumants enquêtés (8 sur 26). Ceux que nous avons réussi à approcher ont affiché, dans leur grande majorité, une réticence qui ne dit pas son nom. Il y en a qui n'ont pas voulu répondre à certaines de nos questions, d'autres ont fui. Malgré ces difficultés, les résultats obtenus sont en concordance avec les données du service contentieux de la DPNW (figure 13). En effet, nos résultats d'enquête (figure 14) montrent que les transhumants étrangers sont minoritaires en zone riveraine du W et sont d'origine nigérienne (22%) ou burkinabé (7%) ; les données du service contentieux indiquent qu'en 2004 et 2005, respectivement 9% et 6% des transhumants illégaux arrêtés à l'intérieur du parc W étaient des Burkinabé et que respectivement 17% et 37% étaient des Nigériens. Les moyennes pour ces deux années montrent qu'au sein des transhumants interceptés dans le W, 27% sont des Nigériens et 7,5% des Burkinabé. Nous avons remarqué une disproportion entre le nombre de
troupeaux transhumants assurent leur conduite (figure 14). En effet, certains éleveurs Béninois font recours au service de bouviers Burkinabé ou Nigériens pour la conduite de leurs animaux en transhumance. De façon générale, les transhumants étrangers sont en majorité de l'ethnie Peul (88%) ; leur âge est compris entre 14 et 37 ans et leurs activités, en dehors des saisons de transhumance, sont l'élevage pour 63% et l'agriculture pour 25%. Du point de vue expérience, 63% sont des habitués à aller en transhumance hors de leur pays d'origine, tandis que 13% seulement sont à leur premier essai. 100 Po urcentages 80 60 40 20 0
Pays d'origine du bouvier Pays de départ du troupeau 22 19 7 4 Bénin Niger Burkina Pays Figure 14 : Pays de départ des animaux et pays d'origine des bouviers transhumants enquêtés 2.2.2.2.2. Les intermédiaires locaux Ces intermédiaires sont les complices ou facilitateurs qui sont des individus ou des organisations d'éleveurs installés dans la zone riveraine du W. En effet, les transhumants étrangers reconnaissent, à 75%, que le parc W est protégé par les écogardes. Pour échapper à ces derniers, les transhumants en général profitent soit des failles de surveillance de ces éco-gardes (67%), soit de la nuit pour aller s'installer avec leurs animaux en profondeur dans le parc à des endroits inaccessibles aux équipes de patrouille (11%) ; ils profitent aussi de certaines complicités (11%). D'après nos enquêtes, 8% des agents de l'administration disent que les transhumants nouent une complicité avec les agents d'élevage et 10% de ces agents pensent plutôt qu'ils bénéficient de la complicité des éco-gardes eux-mêmes. Des éleveurs sédentaires en zone riveraine du parc W du Bénin et certains élus locaux sont également cités parmi les complices de transhumants étrangers. Ces derniers trouvent, Proportion des avis (%) 45 40 35 30 25 20 15 10 5 0 Périodes de l'année Arrivées Départs auprès de certains de leurs confrères de la zone riveraine du W, hébergement et protection. Auprès de leurs complices élus locaux, ils ont des informations et orientations pour pâturer avec moins de risques à l'intérieur du parc W. En retour, ces transhumants payent les services de leurs complices en nature par des animaux ou en espèce par de l'argent. Des organisations d'éleveurs oeuvrent pour aider les transhumants étrangers à sortir de leur clandestinité, à se mettre en règle vis-à-vis des exigences en vigueur dans leurs zones d'accueil et à se faire accepter sur le territoire béninois. Il s'agit notamment de : i' l'Union Départementale des Organisations Professionnelles d'Eleveurs de Ruminants (UDOPER) et de ses ramifications communales, les UCOPER. i' l'ONG-ASPEB (Action pour la Sauvegarde et la Promotion de l'Elevage au Bénin) qui a organisé, du 08 au 10 avril 2005 à Malanville, un forum sur la prévention et la gestion des conflits entre agriculteurs et éleveurs dans les départements du Borgou et de l'Alibori. i' l'association Seho Sudu Baba. 2.2.2.3. Motifs de la transhumance Les pasteurs étrangers viennent en transhumance au Bénin pour la recherche de pâturage (75%), d'eau (63%), de sécurité (38%) ; les motifs de ce choix pour d'autres, c'est l'extension des superficies cultivées dans leur zone d'attache (25%), la recherche de la préservation de la santé de leurs animaux (13%), le souci de perpétuer la tradition (13%) ou le commerce de bétail (13%). Malgré les interdictions, des transhumants étrangers continuent leurs pratiques pastorales dans le W ; 33% de ceux que nous avons rencontré justifient cette obstination par le fait qu'à l'intérieur de la réserve, ils trouvent à mieux satisfaire les besoins de leurs animaux. 2.2.2.4. Déroulement de la transhumance transfrontalière La figure 15 présente les pays de provenance des transhumants étrangers accueillis dans les communes riveraines du W selon les informations recueillies auprès des agroéleveurs sédentaires. Nigéria Burkina Niger 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 Communes d'accueil Nombre d'avis Figure 15 : Pays de provenance des transhumants étrangers séjournant dans ou aux environs des communes riveraines du parc W 2.2.2.4.1. Pratiques majeures des transhumants Burkinabé Les éleveurs Burkinabé accueillis dans la zone riveraine du W côté Goumori (Commune de Banikoara) pratiquent, en majorité, une transhumance commerciale. Avant de quitter leur pays d'origine, les bouviers que nous avons rencontrés se font délivrer un laissez-passer sanitaire par les services d'élevage. Sur le territoire béninois, l'un de leur itinéraire est le suivant : frontière entre le parc W au Nord-Est et la zone de chasse de la Mékrou au Sud-Ouest - Pont sur la Mékrou - Oroudoussi n'kourou - Kakourogou - marché à bétail de Goumori. Ceux qui n'arrivent pas à écouler tous leurs animaux dans ce marché continuent vers d'autres marchés du territoire béninois ou vers le Nigéria. Leurs mouvements au cours de l'année ne cessent que lorsque les crues rendent impraticable le pont sur la Mékrou. Les populations des localités traversées ne trouvent rien à leur reprocher ; ils ne font d'escale que juste le temps de se reposer et ne causent du tord à personne. Par contre les populations riveraines du parc W, surtout du côté des communes de Banikoara et Kérou, signalent la présence d'une autre catégorie de transhumants Burkinabé. Ces derniers restent à l'intérieur du parc ; leur contact avec les populations riveraines est très limité. Ce contact a lieu quand ces transhumants viennent s'approvisionner en produits alimentaires ou en médicaments pour leurs animaux qu'ils troquent souvent contre de jeunes taurillons. Ils sont presque toujours armés et donc très dangereux. Il arrive que certains d'entre eux soient délogés par les équipes de patrouille. Les riverains signalent qu'avec cette traque forestière de ces dernières années, leur présence dans le parc a diminué. 2.2.2.4.2. Pratiques majeures de transhumance des Nigériens et Nigérians 2.2.2.4.2.1. Dans la commune de Karimama La commune de Karimama accueille majoritairement des transhumants Nigériens. Pendant que le fleuve Niger est encore en crue, ces transhumants font escale dans les localités nigériennes comme Albarkaysé, Boumba. Certains s'arrêtent momentanément sur l'île de Barou où ils profitent de la bourgoutière ; d'autres préfèrent payer le service des piroguiers à Boumba pour vite accéder à leurs zones de pâturage au Bénin. Avec la décrue, plusieurs localités sont identifiées comme étant des zones d'entrée de prédilection des transhumants Nigériens dans le territoire béninois ; c'est le cas des localités telles que Tillawa, Pékinga, Danfrasitounga, Birni-lafia, Farantounga et Kargui. A leur arrivée sur le territoire béninois, nuitamment en majorité, ils entrent directement dans le parc W et vont s'installer à des endroits inaccessibles aux équipes de surveillance. Pour échapper à ces dernières, ils bénéficient de la complicité de certains locaux qui font de cette activité un fond de commerce. Conscients de l'interdiction de la transhumance dans le parc W et sur le territoire béninois en général depuis 1995, il y en a qui évitent de prendre contact avec les populations locales, notamment les élus locaux et les chefs coutumiers. 2.2.2.4.2.2. Dans les communes de Malanville et de KandiLes Nigériens et les Nigérians sont les principaux acteurs de la transhumance transfrontalière. Au nombre des zones d'entrée qu'on leur connaît dans ces communes, nous pouvons citer celles de Molla, Katatounga, Garou, Madécali. Selon un agent du CeCPA10 Malanville en poste à Madécali, la transhumance dans sa zone d'intervention se déroule en deux vagues au cours de l'année : - Pour la première vague, les transhumants étrangers qui ont réussi à être au Sud du Fleuve Niger avant la période de crue, quittent les bas-fonds dudit fleuve entre midécembre et fin janvier. Ils effectuent de longs déplacements pour des destinations comme Gogounou, Yara, Sinendé, Bétérou, Djougou, Bassila, Ouèssè et même le Togo. Ils ne reviendront qu'entre juin et juillet. - La deuxième vague de transhumants quitte les bas-fonds entre mi-mars et avril pour des destinations proches : Kassa, Sendé, Alfakoara, Ségbana, Kandi et Gogounou au maximum. Ils vont profiter des premières pluies et reviennent entre août et septembre. Ceux qui sont restés dans le bas-fond repartent au Niger avant la crue sur le fleuve Niger. Certains ne rentrent plus avec les animaux au Niger ou au Nigéria ; ils les laissent au Bénin à une partie de la famille et retournent eux-mêmes pour les travaux champêtres. Pendant la saison pluvieuse, les transhumants Nigérians venus de Lolo s'installent sur les collines de Trougo et Sendé et ne retournent chez eux qu'après les récoltes. Certains transhumants en provenance de Simbé et Sindji (Nigéria) occupent les brousses de Godjékoara, Ségbana et Kandi pour éviter les dégâts dans les champs. En ce qui concerne les petits ruminants, c'est entre novembre et décembre qu'ils arrivent du Niger (par le pont de Malanville) et du Nigéria; ils retournent entre fin mars et mai parce qu'ils supportent mal l'humidité. 2.2.2.4.2.3. Dans les autres communes riveraines du parc W La présence des transhumants Nigériens est signalée dans la commune de Banikoara. Ils se déplacent suivant l'axe Karimama - Founougo. La figure 16 résume les mouvements des transhumants étrangers dans la zone d'étude selon les avis recueillis auprès des agro-éleveurs sédentaires. 10 Centre Communal de Promotion Agricole. Figure 16 : Périodes d'arrivée et de départ des transhumants étrangers en zone riveraine du PNW 2.3. Les impacts de la transhumance transfrontalière dans la zone riveraine du W La transhumance transfrontalière est diversement vécue par les différents acteurs intervenant dans la zone du parc W. Pratique cyclique, elle est accueillie, selon l'appartenance socio-professionnelle des différents interlocuteurs, tantôt comme des moments de cauchemars à cause de son cortège de problèmes aux conséquences fâcheuses, tantôt comme une période de haute portée culturelle, de retrouvailles, de prospérité dont on ne peut se passer pour des raisons de vie et de survie. C'est pour ces raisons que les uns pensent qu'il va falloir l'interdire à tout prix, les autres proposent qu'on lui accorde de meilleures possibilités spatiales et infrastructurelles. Pour comprendre ces différentes attitudes vis-à-vis de la transhumance, il va falloir analyser les impacts de celle-ci sur les zones concernées. 2.3.1. Impacts socio-culturels Dans la zone riveraine du W, les impacts socio-culturels de la transhumance transfrontalière sont connus et décrits par les populations. En effet, parmi les sources de conflit et d'insécurité les plus citées dans la zone, la transhumance transfrontalière occupe une place non négligeable. D'autre part, par leur mode de vie, les pasteurs étrangers impriment à la zone d'accueil, ce qui les caractérise ; c'est-à-dire leur habitat, leurs conditions de vie, leur niveau d'instruction, les rapports cordiaux entretenus avec certains riverains du parc W ou les pactes d'amitié ou d'alliance conclus avec ceux-ci. 2.3.1.1. Les conflits et agressions Des conflits et des tensions ont toujours existé entre les peuples pasteurs et agriculteurs. L'origine de ces différends est la divagation des animaux dans les champs des paysans. Dans un contexte où la transhumance souffre d'un manque d'organisation, de contrôle et d'une absence de dispositifs d'accueil, la plupart des pasteurs étrangers font fi des périodes de départ, des itinéraires et des périodes de retour fixés par la loi pour la transhumance. Le souci des transhumants est de satisfaire, au mieux, les besoins de leurs animaux. Certains, par plaisir ou par contrainte, le font au détriment des intérêts paysans, tantôt en laissant les animaux brouter dans des champs en cultures, tantôt en feignant de ne pas voir leurs animaux sur les récoltes des cultivateurs. Ce comportement qui frise la méchanceté ou l'égoïsme ne passe pas toujours inaperçu. Quand ils n'ont pas été surpris pendant leur forfait, ils laissent derrière eux des querelles entre agriculteurs et pasteurs locaux avec tout ce que cela peut impliquer comme fausses accusations, défense vaine, imposition d'amende. Les vrais conflits surviennent quand ils sont surpris en fragrant délit. Pour la plupart des transhumants étrangers, il n'est pas question de reconnaître leur tord ; un durcissement de ton de la part des paysans victimes se terminent presque toujours mal. On signale très souvent des affrontements directs qui se soldent par des coups et blessures avec mort d'hommes. Ces transhumants étrangers étant généralement armés, ils en sortent régulièrement victorieux et réussissent à s'enfuir. De même, la transhumance transfrontalière occasionne parfois des conflits entre pasteurs étrangers et locaux. En effet, à certaines périodes de l'année (fin saison sèche), les pasteurs se livrent à une course à la recherche de pâturages et des derniers points d'eau. Parfois, la règle du premier occupant n'est pas respectée et on assiste à des batailles rangées, souvent dramatiques. Dans plusieurs cas de braquage, des transhumants
étrangers ont été soupçonnés. Selon ne date pas de si longtemps, déjà trois cas de braquage ont été signalés sur la route Banikoara - Kérou. Certains indices ont prouvé, la plupart du temps, qu'il s'agissait d'étrangers et d'autres laissent soupçonner les Peul (chaussures plastiques ou lambeau de tissu nylon retrouvés sur les lieux de braquage). Les causes de ces conflits sont multiples et variées ; elles varient d'un milieu à l'autre et selon les différents interlocuteurs. La figure 17 présente les causes des différends qui opposent les agro-éleveurs riverains du W aux transhumants étrangers. Les dégâts des animaux transhumants étrangers dans les champs est la cause la plus évoquée (60% des agriculteurs et 34% des éleveurs enquêtés) ; les autres causes sont par ordre d'importance décroissante les vols de bétail par certains transhumants étrangers qui profitent de l'infiltration d'animaux locaux dans leur troupeau au moment de repartir dans leurs pays d'origine (28% des agriculteurs et 31% des éleveurs), la concurrence sur les aires de pâture (20% des agriculteurs et 34% des éleveurs), d'autres vols (céréales, tubercules d'ignames), l'apport de nouvelles maladies dans les zones traversées, la création de foyers de tension, la compétition en zone tampon et le non respect des couloirs de pâture. Avis exprimes (%) 100 60 40 20 90 80 70 50 30 10 0 Dégâts Concurrence sur aires de pâture Vols de bétail Autres vols Non respect des couloirs de pâture Compétition en zone tampon Apport de nouvelles maladies Création de foyers de tension Autres Agriculteurs Eleveurs Kérou Banikoara Kandi Karimama Malanville Groupes socio-professionnels et communes Figure 17 : Origines des différends entre transhumants étrangers et agro-éleveurs sédentaires Les dégâts et les vols sont plus
déplorés dans la commune de Malanville qui reçoit
les leurs causent les transhumants étrangers, alors que les éleveurs locaux se plaignent plus des vols et de la concurrence que leur livrent ces transhumants sur des pâturages déjà pauvres au moment de l'arrivée de ces derniers. Dans la commune de Banikoara qui reçoit plus de transhumants commerçants Burkinabé, les plaintes sont les moindres en général. Dans la zone riveraine du W, seulement pour l'année écoulée (2005), 43% des personnes interrogées ont été confrontées à au moins un conflit ; 34% de ces conflits ont trouvé de solution, alors que 9% sont demeurés sans solution. Personne n'a signalé avoir eu de problème avec des transhumants locaux tandis que 7% déclarent avoir déjà été opposés à des transhumants étrangers. Pour illustration, il nous paraît intéressant de résumer ici quelques conflits et agressions vécues par certaines populations en zone riveraine du W. i' Récit d'un conflit entre transhumants étrangers et agriculteurs à Kompa Le 15 juin 2004 a eu lieu dans l'arrondissement de Kompa (commune de Karimama), une scène qui a tourné au drame. Un transhumant Nigérien et deux de ses enfants ont mis leurs animaux dans le champ d'un cultivateur. Le propriétaire du champ est arrivé sur les lieux et les a surpris en flagrant délit de destruction de ses cultures. Il s'en est suivi une altercation au cours de laquelle le transhumant indélicat n'a pas hésité à poignarder un jeune voisin du cultivateur qui était sur les lieux et qui a cru devoir témoigner des faits ; ce dernier est mort des suites de sa blessure. L'affaire ne s'est pas arrêtée là. Les populations de Kompa se sont révoltées ; elles reprochent aux éleveurs du village de Illa (arrondissement de Kompa) d'être les complices de ces transhumants étrangers en les hébergeant. Pour montrer leur désaccord ces populations révoltées ont brûlé plusieurs greniers appartenant aux présumés complices... i' Récit d'un braquage sur la route inter-Etats Niamonga - Mékrou Le braquage a eu lieu le 08 avril 2006, un peu avant la chaîne de l'Atacora, à 10 km du campement de chasse de la Mékrou, sur la route inter-Etats Niamonga (Burkina Faso) - pont sur la Mékrou (Bénin). Les braqueurs au nombre de huit n'ont été identifiés que par leurs langues ; ils parlaient Gourmantché, Peul et Haoussa, langues à priori étrangères ; le Peul rappelle la langue des pasteurs transhumants. La scène a commencé avec un véhicule gros porteur communément appelé "dix tonnes" qui revenait de Banikoara avec des commerçants Burkinabé. Les braqueurs ont réussi à immobiliser le véhicule et à dépouiller les passagers de leurs biens. Après leur forfait ils mettent le cap sur la zone de chasse de Konkombri ; là leur opération n'a pas été fructueuse et deux d'entre eux ont été "abattus" par une équipe de chasseurs. 2.3.1.2. L'habitat des pasteurs et leurs conditions de vie Les mouvements du bétail entraînent incontestablement la mobilité d'une partie au moins des hommes. Cette mobilité implique aussi un habitat précaire : tentes et autres logis de fortune construits à l'aide de branchages ou de « secco » dressés et défaits d'un moment à l'autre (photos 1 et 2). Ainsi, l'habitat de l'éleveur transhumant, malgré son adaptation à son mode de vie, reste peu confortable et n'assure aucune protection vis-à-vis des conditions climatiques (vents, pluies, températures, ...). Il est même fréquent de voir le bouvier supporter la pluie dans les mêmes conditions que ses animaux. D'autre part, cette mobilité éloigne l'éleveur des centres de ravitaillement en biens de première nécessité, l'obligeant souvent à compter uniquement sur la production du troupeau pour survivre. Dans la zone riveraine du W, ces habitats modifient momentanément l'architecture globale de l'environnement social par endroits. Nous avons fait ce constat dans la zone de Djamoni (arrondissement de Founougo, commune de Banikoara), en plusieurs endroits sur l'axe Kompa-Pékinga, en bordure du fleuve Niger (commune de Karimama), dans la zone de Madécali, non loin du fleuve Niger (commune de Malanville). Au niveau des localités de Monsey-Dendi et Monsey-Haoussa, nous avons dénombré 51 tentes en mars 2006. Dans un grand nombre de ces installations, les habitants se réclament être des nationaux ; certains sont sincères mais d'autres font "économie de vérité" par crainte de répression. Source : Byll KPEROU GADO Photo 1 : Habitats des transhumants Peul en bordure du fleuve Niger Source : Byll KPEROU GADO Photo 2 : Déplacement d'habitat par une famille de
transhumant. Ce cadre de vie doit A l'intérieur du parc, ces habitats existent aussi ; ils donnent la preuve de la présence de ces transhumants. En effet, de janvier 2003 à août 2004, les rapports des équipes de patrouille de la DPNW font état de 50 campements détruits en périphérie comme à l'intérieur du parc. Les pasteurs ont du mal à comprendre ce phénomène. Cette incompréhension est peut-être liée à leur niveau d'instruction globalement bas. Irv:pacts soci-o-ecovomiztt,tes de La traiSltvSice travsfroita1We 0121/LS La ove riveraike du. 'parc W du, B, ein.i.in, 2.3.1.3. La scolarisation Sur le plan scolaire, nous avons noté un très faible taux de scolarisation des transhumants ; seuls 15% des bouviers enquêtés ont été scolarisés. Le niveau d'instruction est généralement bas ; en effet, à cause des travaux d'élevage (photo 3), les parents s'abstiennent d'envoyer les enfants à l'école et, même s'ils sont à l'école, ces parents les retirent au moment de la transhumance, les campements étant de plus en plus éloignés des écoles. Ceci montre que la mobilité des pasteurs entrave leur instruction. Source : Byll KPEROU GADO Photo 3 : Bouviers au pâturage dont certains sont en âge d'aller à l'école Cette situation a un grand impact sur la zone riveraine du W, une zone en mutation, une zone où l'on appelle les uns et les autres à une gestion participative. En effet, les responsables ont beaucoup de difficultés à collaborer avec un peuple pasteur qui a du mal à comprendre qu'on veuille interdire l'accès de ses animaux à un espace potentiellement pastoral au profit d'une faune sauvage qui ne donne ni de son lait, ni de sa viande à l'homme comme le ferait ses bovins. Pour certains, seul Dieu a créé la nature et en est propriétaire. Même la concession qui autorise l'utilisation de la zone tampon moyennant des taxes annuelles n'est pas acceptée par certains pasteurs dont la mentalité n'est pas assez évoluée pour leur permettre de comprendre que l'on veuille rompre avec la gratuité des ressources pastorales. Irv:pacts soci-o-ecovomiztt,tes de La traiSltvSice travsfroita1We 0121/LS La ove riveraike du. Parc W du, B, ein.i.in, 2.3.1.4. Les rapports cordiaux et de complicité nés de la transhumance transfrontalière Les rapports de bon voisinage ont toujours existé entre l'éleveur et l'agriculteur, tant que chacun se garde de faire du tort à l'autre. Ils se traduisent par des échanges réciproques de services. Par exemple, l'agriculteur peut autoriser le bouvier à faire paître ses animaux dans ses champs après les récoltes pour bénéficier de la fumure issue de la déjection des animaux (c'est la transhumance parcage), ou moyennant d'autres avantages comme le lait, de l'argent ou même un veau. En effet, 22% des agriculteurs enquêtés, dans la zone riveraine du parc W, citent la fertilisation de leurs champs par les animaux transhumants comme un avantage. Dans une localité, lorsque les rapports de bon voisinage se développent et deviennent des rapports de confiance, si la zone est bien pourvue en eau et en pâturages, l'éleveur ne la quitte plus et décide d'y rester définitivement (c'est la transhumance migration). Ce type de transhumance est très fréquemment rencontré dans les localités béninoises situées le long du fleuve Niger. Parmi les transhumants qui ont répondu à nos questions, 19% ne pensent plus retourner dans leur zone d'attache ; tous ont été rencontrés dans les bas-fonds du fleuve Niger. Parmi eux, seuls 5% des transhumants béninois ont opté pour ce choix, contre 65% des transhumants nigériens ; par contre tous les transhumants burkinabé rencontrés pensent rentrer chez eux à la fin de la saison de transhumance. Rappelons que la transhumance transfrontalière est officiellement interdite au Bénin depuis 1995, mais elle persiste pour des raisons diverses. En effet, les transhumants étrangers sont toujours présents sur le territoire béninois et certains d'entre eux continuent de semer la terreur au sein des populations. Ces transhumants bénéficient de la complicité de certains locaux et particulièrement certains élus locaux qui exploitent cette situation pour en faire un fond de commerce. Ces différents rapports ont des impacts économiques certains sur la vie des ménages et des différents acteurs intervenant dans la zone riveraine du W. Achat animaux à prix concurrentiel Activités économiques prospères Fertilisation champs Système de confiage-don Abondance lait Aucun Autres 2.3.2. Impacts économiques de la transhumance transfrontalière La transhumance transfrontalière a des incidences économiques dans la zone riveraine du parc W, notamment sur la vie des ménages, l'animation des marchés de bétail, la création d'emplois, le fonctionnement des structures de conservation de la réserve. 2.3.2.1. Impacts économiques sur la vie des ménages d'agro-éleveurs Dans la majorité des ménages, les personnes enquêtées pensent que la transhumance transfrontalière n'a aucun intérêt ; c'est l'avis de 48% des agriculteurs et 38% éleveurs enquêtés. De même, à Malanville, 90% des personnes rencontrées ont la même opinion. Par contre, dans la commune de Banikoara, 46% des riverains disent, qu'avec l'arrivée des transhumants, il y a une prospérité des activités économiques notamment celles des femmes qui vendent à manger ; d'autres (39% des enquêtés) dans la même commune citent le bénéfice des déjections d'animaux transhumants pour la fertilisation des champs (figure 18). 100 90 Avis exprimes (%) 80 70 60 50 40 30 20 10 0 Agriculteurs Eleveurs Kérou Banikoara Kandi Karimama Malanville Groupes socio-professionels et communes Figure 18 : Impacts économiques de la transhumance au niveau des ménages d'agroéleveurs en zone riveraine du W A Kérou 42% des agro-éleveurs disent qu'avec
l'avènement de la transhumance, il y a moment avant de replier chez eux. A Kandi, l'opportunité d'acheter des animaux à des prix concurrentiels est l'avantage économique évoqué par 33%. La possibilité que donnent certains transhumants à leur bienfaiteur de se constituer un troupeau par un système de don11 est un avantage économique selon 5% des agro-éleveurs à Karimama. L'autre incidence économique qu'offre la transhumance transfrontalière, c'est l'occasion qu'elle donne aux éleveurs d'acheter des reproducteurs sahéliens (bovins ou petits ruminants) de grande qualité génétique pour améliorer leurs races locales. 2.3.2.2. La transhumance et l'animation des marchés de bétail de la zone du W Au cours de nos enquêtes, nous avons visité six marchés de bétail dans la zone d'étude ; il s'agit :
H.I. = Hôte intermédiaire
Source : Byll KPEROU GADO Source : Byll KPEROU GADO Photo 7 : Poste forestier frontalier de Photo 8 : Poste d'élevage frontalier de Monsey Monsey Irv:pacts soci-o-ecovomiztt,tes de La traiSltvSice travsfroita1We 0121/LS La ove riveraike du. Parc W du, B, ein.i.in, - le PADEB qui est arrivé à sont terme, mais qui très certainement remplacé par un projet aux objectifs similaires. 2.4.1.3. Le cadre législatif et réglementaire Plusieurs textes et lois en faveur de la bonne gestion des activités de transhumances existent au Bénin et dans la sous-région ouest africaine. Au niveau de la Direction du parc national du W, il y a l'accord spécial provisoire d'exploitation pastorale de la zone tampon de la réserve de biosphère transfrontalière de la région du W - Bénin (annexe 4). 2.4.2. Les faiblesses Les atouts sus-cités n'ont pas permis de régler de façon satisfaisante les problèmes liés à la gestion de la transhumance transfrontalière en zone riveraine du W à cause d'un certain nombre d'obstacles. 2.4.2.1. Situation des infrastructures d'accueil et de contrôle des transhumants Le poste forestier n'est occupé qu'occasionnellement par les équipes de patrouilles après quoi il ne sert plus à rien ; quant au poste d'élevage, il manque d'agent pour être valorisé. La délimitation du parc n'est pas encore achevée et les problèmes de limites continuent d'opposer éco-gardes et éleveurs transhumants et locaux. Le balisage des couloirs de transhumance n'a concerné qu'une zone limitée de la commune de Karimama. 2.4.2.2. Obstacles à la mise en oeuvre des politiques d'encadrement des activités d'élevage - Manque de moyens financiers pour accompagner les politiques de développement. - Faible collaboration entre la Direction du parc W et les différentes structures qui ont des compétences certaines en matière d'encadrement des activités d'élevage (services d'élevage), de gestion des conflits éleveurs-agriculteurs (organisations structures de promotion de l'élevage comme la SNV, UDOPER, ...) |
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