1.3. Zoom sur les activités agricoles et
agroalimentaires dans la région Centre-du-Québec 1.3.1.
Comprendre l'évolution du secteur primaire au Québec
De la naissance de l'agrobusiness au Québec
à la doctrine dominante
L'agriculture au Québec a subi une première
vague d'industrialisation au cours des années 1940 et 1950; le nombre
d'exploitants de fermes a temps complet est alors passé de 133 000 en
1941 à 109 000 en 1951. L'exode rural de la campagne vers la ville a
suivi le même rythme. Le secteur primaire au Québec de même
que le monde rural Québécois est longtemps resté sous
l'influence de l'Église qui a eu très tôt la volonté
de freiner l'industrialisation de l'agriculture. En effet, déjà
en 1926, pour freiner ce mouvement d'industrialisation, l'Église avait
réussi a prendre le contrôle de l'Union des cultivateurs
catholiques (UCC), qui allait devenir l'Union des producteurs agricoles (UPA)
en 1972, en évinçant de l'organisation les agriculteurs
progressistes des Fermiers unis du Québec, rattachés aux Fermis
unis des l'Ontario et de l'Ouest Canadien. En 1951, cependant, devant le retard
qu'accuse l'agriculture Québécoise par rapport a celle de
l'Ontario, une commission d'enquête est créée : la
commission Héon. Il y a alors 140 000 fermes au Québec. Le
verdict de la commission est sans appel : il y en a 100 000 de trop. Selon la
commission Héon, 40 000 fermes bien équipées et bien
gérées étaient plus en mesure de relever des nouveaux
défis plutôt que 140 000 petites fermes aux méthodes
obsolètes qui pénalisaient par leur faible rendement et l'absence
de contrôle de qualité, ceux qui avaient accepté
d'investir. La commission propose alors de faire disparaitre 100 000 fermes en
exigeant des standards de qualité et de sécurité sanitaire
plus élevés pour décourager les petits fermiers qui s'en
tiennent aux pratiques traditionnelles et en soutenant le modernisation par des
programmes d'aides aux semences certifiées, aux troupeaux de race, aux
fosses a fumier... La méthode continue d'être appliquée; en
effet, il ne reste a peine plus de 30 000 fermes au Québec en 2002.
Toutefois, c'est au début des années 1990 avec la globalisation
de l'économie et l'introduction des produits agricoles dans les
négociations du GATT (Accord général sur les tarifs
douaniers et le commerce), de l'ALENA, et de l'UPA, de pair avec les
gouvernements et les grandes entreprises agroalimentaires, s'engagent
résolument dans une orientation productiviste et un modèle
industriel et marchand, pourtant vivement dénoncé lors des
États généraux du monde rural tenus en 1991. L'industrie
porcine devient alors le fer de lance de ce modèle agricole industriel
basé sur la « méga-entreprise
spécialisée». Ce développement rapide et intensif
bouleverse les équilibres traditionnels de la campagne et de la
cohabitation rurale par le développement des méga-porcheries avec
fumier liquide vis-à-vis de la qualité de l'eau, de
l'environnement, des sols, des cultures.... La croissance de l'industrie
porcine est favorisée par une série de politiques agricoles
votée sous la pression des producteurs de porcs : la loi sur la
protection du territoire et des activités agricoles (loi 23) en 1996,
qui confère un droit de produire prioritaire aux producteurs agricoles
en zone verte; un règlement sur la réduction de la pollution
d'origine agricole négocié a la baisse; une restriction
sévère des pouvoirs d'aménagement et de la
réglementation des municipalités concernant les activités
agricoles (la loi 184 de juin 2004, empêche systématiquement les
élus locaux de poser des contraintes réglementaires au
développement agricole industriel)...Le sommet des décideurs en
agroalimentaire a SainteHyacinthe 1997 et 1998 a donner a l'agrobusiness
québécois sa charte de officielle. L'agriculture est alors
considérée comme une industrie majeure et doit devenir le fer de
lance assurant le positionnement québécois sur les marchés
mondiaux. On ne parle plus de
qualité de l'alimentation, d'autosuffisance
alimentaire, ni de vitalité du monde rural, on se fixe comme objectif de
doubler les exportations agricoles d'ici 2010 et plutôt de viser
l'exportation de produits diversifiés et transformés. Le
Québec exporte actuellement 50% de sa production de porc, or cette
proportion pourrait s'élever à près de 70% si on en croit
les rapports du Forum de l'automne 2005. Devant la pression croissante des
citoyens, soutenus par l'Union paysanne en juin 2002, le gouvernement
négocie avec l'UPA et les unions municipales un ensemble de mesure
visant a permettre l'accalmie :
> Des consultations du bureau d'audiences publiques sur
l'environnement (BAPE) sur le développement durable dans l'industrie
porcine
> Des moyens supplémentaires de contrôle pour le
ministère de l'environnement (accès aux dossiers de la
Financière agricole sur les animaux assurés)
> Un règlement révisé sur les
exploitations agricoles qui inclut comme outil de contrôle des plans
de fertilisation basés sur le bilan phosphore, ferme par ferme.
Le financement par l'État, un domaine significatif
du changement de la politique agricole
L'agriculture est un secteur majeur de l'économie
Québécoise, mais elle est aussi le secteur le plus
subventionné par l'intermédiaire d'un grand nombre d'outils et de
programmes destinés aux producteurs agricoles : crédit agricole,
aide a l'établissement et a l'amélioration des terres, assurances
pour les récoltes, le bétail et le revenu, aide en
agroenvironnement (fosses a fumier, bandes riveraine, retrait des animaux des
cours d'eau, haies brise vent et haies brise odeur, clubs
agroenvironnementaux...). On estime actuellement à plus de un milliard
de dollars par année ces contributions publiques à l'agriculture
québécoise, ce qui équivaut d'après les
données du ministère de l'agriculture a 50% du revenu net moyen
des agriculteurs. Jusqu'à présent il y avait peu de soutien pour
les exploitations marginales, l'agriculture biologique, la transformation et la
mise en marché locale. Or depuis deux ans, suite à la publication
du rapport de la commission de la Commission sur l'avenir de l'agriculture
et de l'agroalimentaire québécois en janvier 2008, un virage
s'est opéré. Le ministère de l'Agriculture, des
Pêcherie et de l'Alimentation du Québec (MAPAQ) est le premier
à promouvoir ces domaines qui apparaissent comme novateur avec le
programme provincial : « la fierté d'en vivre, le plaisir de s'en
nourrir ». En effet, le rapport de la Commission sur l'avenir de
l'agriculture et de l'agroalimentaire québécois, à
mis en lumière la nécessité de changer les pratiques
agricoles Québécoises, de les rendre plus respectueuses de
l'environnement et de relocaliser l'agriculture. Le gouvernement a souscrit a
une vision d'un secteur agricole et agroalimentaire qui a pour mission
première de contribuer à nourrir les Québécois et
les Québécoises tout en tirant profit de son plein potentiel sur
les marchés d'ici et d'ailleurs, d'offrir des aliments sains, de
respecter les principes du développement durable et de diversifier les
entreprises et les productions. Ce programme a été repris en
parti, au niveau régional avec la campagne lancée le 4 mai 2009 :
« Le Centre du Québec, goutez-y! », le but de cette campagne
de communication est d'inciter le consommateur a acheter des produits locaux.
La démarche est différente au niveau du financement, on ne
subventionne pas directement le producteur, on est plus dans une
démarche de communication; on essaie avec ces nouveaux programmes de
changer les habitudes du consommateur, on cherche a le sensibiliser au pouvoir
qu'il possède sur son territoire en tant qu'acheteur qui a le choix dans
les produits qu'il met dans son panier d'épicerie.
1.3.2. Une agriculture intensive, spécialisée et
productive avec circuits longs
Le portrait de l'agriculture Centricoise
L'agriculture centricoise est assez bien répartie sur
l'ensemble du territoire. Dans la région Centre-du-Québec, on
compte 3 448 entreprises qui cultivent près de 240 000 hectares. En
2006, la superficie moyenne des terres en culture dans la région
était de 89 hectares par entreprise, alors que la moyenne
québécoise était de 81 hectares. Cette superficie moyenne
a fortement augmenté depuis 1981. De façon
générale, ce sont les cultures annuelles telles que le maïs
grain et le soya qui ont pris le plus d'expansion. On observe une diminution du
nombre d'exploitations, mais une augmentation évidente de la taille des
exploitations, comme le montre le tableau ci-dessous :
Tableau 2 : évolution de la taille des
fermes
1956
|
45 ha
|
1961
|
56 ha
|
1981
|
68 ha
|
1991
|
81 ha
|
2006
|
89 ha
|
Source : MAPAQ Cette croissance est observée
principalement dans les MRC de Bécancour, d'Arthabaska et de
Nicolet-Yamaska. En somme, 37 % de la zone réservée a
l'agriculture est cultivée. Le reste de la zone agricole est
principalement en forêt. De fait, les entreprises agricoles sont moins
nombreuses, mais plus spécialisées, plus performantes et plus
productives. Le secteur agricole représente un marché important,
il crée à lui seul quelque 6 500 emplois sur la région.
Selon le portrait agriculture et agroalimentaire dans la région
Centre-duQuébec, réalisé par le MAPAQ en 2008, les
productions animales dominent dans la région du Centre-du-Québec.
Près de 65 % des revenus agricoles de la région proviennent de la
production de lait, de porcs et de volaille.
Tableau 3 : Répartition des types de productions
végétales dans la région
Centre-du-Québec
Au sein de la région Centre-du-Québec, on retrouve
principalement les productions suivantes :
> La production laitière
La production laitière constitue la principale production
agricole du Centre-du-Québec, avec 1153 entreprises laitières et
un cheptel de près de 63 000 vaches.
Cette production génère plus du tiers de
l'ensemble des revenus agricoles de la région. Depuis 1981, la
région a enregistré une diminution du nombre de fermes
laitières de l'ordre de 66 %. Performantes, ces exploitations ont
néanmoins augmenté de 12 % leur production de lait.
> La production porcine
La production porcine est la deuxième en importance
dans le Centre-du-Québec. En 2005, les 360 entreprises de la
région possédaient un cheptel de 698 000 têtes en
inventaire (truies, porcelets et porcs d'engraissement). Cependant, cette
croissance a été ralentie par certains événements
tels que le moratoire sur la production porcine, les nouvelles normes
environnementales, l'augmentation des investissements nécessaires et
l'éclosion de nouveaux foyers de maladies.
> L'aviculture
En 2005, 11 % du cheptel de poulet québécois
était produit dans le Centre-du-Québec. Le nombre d'entreprises
avicoles pour tout type de volailles se situait a 127. Au cours des vingtcinq
dernières années, la production avicole a connu une fluctuation
qui s'est traduite par une diminution du tiers du nombre de fermes avicoles et
une augmentation de 50 % du nombre de têtes.
> La production bovine
La production bovine se situe au second rang dans la
région en ce qui concerne le nombre d'entreprises agricoles. En 2005, ce
secteur dont le nombre de fermes est en croissance comptait 884 entreprises. Le
Centre-du-Québec occupe le premier rang provincial en ce qui a trait au
nombre de veaux de lait produits et le second rang pour la production de veaux
de grain. Néanmoins, la taille des troupeaux demeure restreinte, avec
une moyenne de 38 bêtes. Étant donné que le modèle
de production pour faire vivre une famille est d'environ 105 vaches, les
propriétaires exploitent souvent leur entreprise bovine à temps
partiel.
> La production ovine
La production ovine a connu une forte expansion. Avec ses 27
300 bêtes, le Centre-duQuébec détenait 10 % du troupeau de
moutons québécois en 2005. La spécialisation des
entreprises et le regroupement de la mise en marché de leurs produits
ont permis aux producteurs de quadrupler la taille moyenne de leur troupeau par
rapport à 1981.
> La production caprine
La production caprine a connu une forte expansion. La taille
du cheptel caprin total a grossi de sept fois entre 1981 et 2006. La
région produit 37 % des chèvres du Québec. Ce
développement exceptionnel de la production a amené les acteurs
de la région à définir cette production comme un des
secteurs prioritaires du Centre-du-Québec en ce qui a trait aux produits
laitiers de spécialité.
> Les productions végétales
La région du Centre-du-Québec se classe au
deuxième rang des régions productrices de céréales
et de protéagineux au Québec. Les superficies de ces cultures ont
augmenté considérablement depuis 1981. Plusieurs facteurs
expliquent ces changements, comme la consolidation de la production
laitière, qui a eu pour effet de libérer une quantité
importante de terres qui furent récupérées par ce type de
culture et la mise en valeur des
terres abandonnées, le défrichement et l'abandon
des cultures pérennes comme le foin et les pâturages.
Parallèlement, la superficie des prairies et des pâturages a
diminué de 27 % depuis 1981.
> La canneberge
La canneberge s'est fortement développée sur des
sols jugés peu propices a d'autres cultures parce qu'ils étaient
situés a proximité des milieux humides et sablonneux acides. De
1992 a 2002, le nombre de producteurs est passé de trois a plus d'une
trentaine, et les superficies cultivées, de 127 à près de
1 200 hectares. Le Centre-du-Québec s'est taillé une position de
chef de file dans la production de canneberges. Globalement, cette industrie a
généré quelque 500 emplois dans la région au cours
des dix dernières années. La croissance de ce secteur
d'activité a amené des investissements de l'ordre de 12 millions
de dollars pour l'année 2005-2006. On considère aujourd'hui cette
production comme étant aussi importante pour le Centre-du-Québec
que le bleuet peut l'être pour le Lac-Saint-Jean. La région
détient le plus grand nombre de superficies destinées à la
culture de canneberges biologiques a l'échelle mondiale. Cette
production de créneau a pu se développer notamment grâce
à des investissements importants dans la transformation de ce petit
fruit.
> Les fruits et légumes
Quoique moins présente dans le Centre-du-Québec
que dans les autres régions environnantes, la production de fruits et de
légumes s'est développée sur de petites surfaces dans la
région centricoise, à partir de la vente à la ferme et
dans les marchés publics.
La culture des arbres fruitiers et des petits fruits, excluant
la canneberge, a connu une certaine expansion durant les vingt-cinq
dernières années. Malgré la diminution du nombre de fermes
productrices de fruits, le nombre d'hectares consacrés a ce type de
culture a plus que triplé de 1981 à 2006. En 2005, les
superficies cultivées pour les fruits occupaient près de 380
hectares dans la région du Centre-du-Québec. Avec ses 43
hectares, la culture du bleuet en corymbe dans le Centre-du-Québec
équivaut à 18 % du territoire québécois
alloué à cette culture. La fraise occupe la deuxième plus
grande superficie réservée à la culture des petits fruits
dans la région, ce qui correspond à 5,3 % des superficies totales
du Québec.
Les superficies servant a la culture de légumes a
l'état frais dans la région du Centre-duQuébec
représentent 3,6 % des superficies au Québec. La production de
légumes de transformation est en déclin depuis 2005 en raison de
la forte compétition internationale.
> L'acériculture
La superficie des érablières de la région
du Centre-du-Québec représente 10 % de celle de l'ensemble des
érablières exploitées au Québec.
L'acériculture s'est développée considérablement
dans la région, et le nombre d'entailles est passé de 2,1
millions à 3,2 millions entre 1981 et 2006, soit une augmentation de 52
%. En 2006, on dénombrait près de 800 producteurs dans le
Centre-du-Québec. Ils produisaient plus de 7 millions de livres de sirop
d'érable, ce qui permet a la région d'occuper le quatrième
rang québécois en la matière. L'agriculture biologique,
sur laquelle reposaient les activités de 17 transformateurs et de 91
entreprises en 2005, connaît une croissance de l'ordre de 20 % depuis
2002 en termes de nombre de producteurs. La plus grande proportion de fermes
biologiques est localisée dans la MRC de L'Érable.
L'acériculture est d'ailleurs le secteur qui présente le plus
fort taux de production biologique de la région.
Description des pratiques agricoles au
Centre-du-Québec
L'exploitation industrielle moderne est une entreprise
commerciale, elle n'a plus la fonction d'autosuffisance de la ferme familiale
traditionnelle de 100 arpents (40 hectares environ). Il est intéressant
de voir qu'au Québec on ne parle pas d'exploitation agricole mais bel et
bien d'entreprise agricole, ce trait au niveau du langage est évocateur,
l'entreprise agricole doit dégager des bénéfices, alors
que chez nous l'exploitation agricole vise en premier lieu à mettre en
valeur un terroir. L'agriculture dans ce contexte revêt un aspect
industriel qui n'a alors plus aucun lien avec la nature. La tailles de ces
méga-exploitation ne cesse d'augmenter depuis les années 1950,
comme en témoigne le tableau ci-dessous, les exploitations sont de plus
en plus grandes, elles sont aussi de plus en plus chères, elles
deviennent ainsi inabordables pour la relève. De fait, une tendance
s'est amorcée, les fermes sont rachetées par les grandes
compagnies du secteur agroalimentaire. Les exploitations modernes au
Québec et qui plus est dans la région Centre-du-Québec, se
spécialisent dans une super production en respectant des règles
strictes. Les méga-élevages intensifs de poulets, de porcs, de
bovins, sont la plupart du temps des élevages dit « sans sol »
ou « hors sol », les animaux ne sortent plus aux pâturages, on
les parque dans des bâtiments agricoles a longueur d'année, si
bien que le stress, l'enfermement et la non stabulation les rend
vulnérables aux maladies. Au cours de mon stage, j'ai eu la chance de
visiter, la ferme Landrynoise, une entreprise agricole laitière qui
comptait plus de mille vaches, l'organisation de l'exploitation est
impressionnante, toutes les opérations (traites, nettoyage,...) sont
robotisées, le plus frappant est que les bêtes ne sortent pas de
la stabulation.
Fig. 8 : Photographie ferme automatisée
Source : ferme landrynoise-mai 2009-photographie
personnelle
Les antibiotiques et les hormones sont couramment
utilisés pour accélérer la croissance des animaux, les
inséminations artificielles et la sélection
génétique sont utilisées systématiquement.
L'alimentation des animaux obéit aux contraintes de l'automatisation et
du rendement. J'ai eu la chance de visiter une exploitation agricole parmi les
plus grande du Québec, il s'agissait d'une entreprise laitière
qui comptait 600 vaches, chaque vache a un collier qui indique a un robot de
délivrer tant de nourriture à cette bête, les rations sont
calculées par ordinateur en fonction du rendement de chacune; la
bête ne dispose alors que de quelques minutes pour manger. On cherche
à maximiser les rendements par l'ajout de céréales et
d'ensilages riches en protéines. Les vaches ne sont plus des animaux
mais des machines à lait. Un autre robot racle en permanence les fumiers
semi-liquides. En effet, on utilise relativement peu de litière, pour
éviter de manipuler les déjections on installe les animaux sur
des matelas fait à partir de pneus, les déjections sont
évacuées avec des jets d'eau, l'épandage doit s'effectuer
sur de grandes étendues de terres, tout ce qui ne peut être
absorbé par les plantes risques de polluer l'eau et l'environnement. Le
compostage des fumiers solides, mélangés à une
litière permettrait de résoudre les problèmes de pollution
de l'eau et les problèmes d'odeur (le fumier composté avec
litière ne sent pas, il ne contamine pas l'eau parce que l'azote et le
phosphore y sont intégrés a la matière organique, de plus
ainsi les volumes diminuent). De plus, comme les animaux sont en
captivité et que l'on a de moins en moins besoin de pâturages et
de fourrages, on élimine les rotations de culture nécessaires a
la régénération des sols, en faveur du maïs parce
qu'il peut absorber plus du double de lisier. Les pesticides sont
utilisés en abondance par les producteurs comme j'ai pu le constater
lors d'une formation que le club agroenvironnement Bois-Francs avait
organisée pour apprendre aux producteurs à gérer les
mauvaises herbes. Les agronomes eux-mêmes préconisent des
traitements d'herbicides préventifs pour améliorer les
rendements, toutefois l'utilisation des pesticides chimiques provoque de graves
pollutions. Les riverains ne peuvent souvent pas boire l'eau de leur puits de
surface. L'agriculture au Québec agit depuis depuis plusieurs
décennies selon un mode de production industriel qui est
préoccupé par la conquête de grands marchés
d'exportation. De fait, tout l'écosystème rural est
bouleversé, les paysages ne sont plus entretenus par les agriculteurs
(déboisement massif pour la culture de la canneberge, disparition des
animaux des pâturages, disparition des clôtures, des haies...), la
terre est envisagée comme un outils de production et non plus comme une
ressource organique nécessaire a la vie; l'eau et les sols sont les
premières ressources affectées par la surexploitation, par
l'abandon des rotations de cultures, par la destructions des bandes
riveraines... De plus, au niveau de la commercialisation des produits, la
majorité des agriculteurs passent par les circuits longs pour diffuser
leurs produits et suivent cette logique de filière :
Tableau 4 : les circuits longs de distribution
Compagnie Négociant Grossiste Distributeur Consommateur
Source : schéma personnel
Dans ce système, le producteur apparaît comme un
simple rouage d'une grande entreprise. Il ne gère, en fait, qu'une toute
petite partie de l'activité globale de production. Il n'a plus en
charge, ni le choix des aliments pour les productions animales, ni le choix des
intrants pour les productions végétales. Le choix des
variétés et races lui échappe également, car la
nature de la production doit correspondre à la demande du marché.
Par ailleurs, il ne suit pas son produit jusqu'au bout de la chaîne. Il
devient, en fait, un spécialiste de l'activité de production.
Cette organisation, en circuits longs, convient tout particulièrement
aux producteurs possédant des surfaces d'exploitation assez importantes.
Ce sont, majoritairement, de grandes exploitations industrielles.
En raison du caractère majoritairement intensif et donc
très productif des exploitations, la règle est donc d'utiliser
les circuits longs de distribution. Pourtant depuis quelques années de
nouvelles tendances s'amorcent dans le domaine touristique et
agroalimentaire.
1.3.3. De nouvelles tendances dans le domaine touristique et
de l'agroalimentaire : sortir des circuits de distribution
institutionnalisés, diversifier les modes de productions et valoriser
les productions
La croissance de l'intérêt pour l'agrotourisme
n'est pas étrangère à l'augmentation importante de la
demande pour les aliments santé et biologiques et de la recherche d'une
alimentation saine.
Les tendances dans le domaine de l'agroalimentaire : a la
recherche d'une alimentation saine
Le retour à la terre et les produits provenant
directement de la ferme constituent une nouvelle tendance dans le domaine de
l'agroalimentaire. Le consommateur demande de plus en plus une agriculture
alternative, à taille humaine. En effet, les consommateurs
développent une curiosité accrue au sujet de la provenance et des
méthodes de fabrication des produits. Le vieillissement de la
population, l'augmentation du niveau de scolarité, une plus grande
diffusion de l'information, l'accroissement du taux d'obésité
chez les jeunes, les reportages à sensation (p. ex. : ((Supersize Me))),
le phénomène de (( malbouffe )) et les scandales liés
à la sécurité et à la salubrité des aliments
ont largement contribué à cette tendance qui progresse dans la
société vers la recherche d'une alimentation plus saine. Par
ailleurs, le mouvement croissant du ((slow food)) (par opposition au ((fast
food)) et à la production de masse industrielle) a contribué
à promouvoir les produits frais, les produits, locaux, les productions
artisanales, l'agriculture durable et le plaisir de cuisiner et prendre son
temps pour manger. Tout cela dans une perspective que l'on peut bien manger
tout en réservant l'environnement. Ce courant ne peut qu'être
bénéfique à l'agrotourisme. Les consommateurs sont de plus
en plus conscients du rôle majeur d'une alimentation saine dans
l'amélioration de leur santé et celle de leur famille. Dans cette
optique, ils ont de plus en plus tendance à se méfier des
produits de masse, à rechercher davantage les produits santé,
biologiques, de meilleure qualité, frais et à fréquenter
les marchés publics, les fermes, les kiosques en bordure des routes et
les événements champêtres pour découvrir et se
procurer des produits frais de qualité. Dans un tel contexte, le secteur
de l'agrotourisme peut saisir cette opportunité pour se positionner
comme une alternative crédible pouvant répondre aux besoins et
attentes ces consommateurs. De plus, on assiste à un engouement
sans précédent pour les aliments biologiques :
aux États-Unis ; selon une enquête de Zins Beauchesne et
associés effectuée auprès de 600 consommateurs
québécois, 84,6% d'entre eux achètent au moins
occasionnellement des produits biologiques, et environ un cinquième des
ménages prévoient augmenter leur consommation de produits
biologiques au cours des prochains mois. Pour leurs achats de produits
biologiques, les consommateurs de produis biologiques ont davantage tendance a
se tourner vers d'autres canaux que les supermarchés traditionnels, dont
les marchés publics, les kiosques en bordure des routes, les
réseaux d'agriculture soutenue par la communauté (ASC).
Cette tendance est favorable au développement de
l'agrotourisme puisque, pour leurs achats de produits biologiques, les
consommateurs se tournent vers d'autres canaux que les supermarchés
traditionnels en achetant, notamment, directement à la ferme et dans les
marchés publics.
|
La montée des canaux alternatifs de distribution en
réponse à la concentration du secteur de la distribution
alimentaire
|
Fig. 9 : photographie chèvres au
pâturage
Source : photographie MAPAQ-26 mai 2009
La récente vague de fusions qui a transformé le
secteur de la distribution alimentaire au Québec et au Canada a
poussé bon nombre de producteurs a se tourner vers d'autres canaux de
distribution, dont la vente directe aux consommateurs. Alors que les trois
géants de l'alimentation, Loblaws, Sobeys et Métro, occupent plus
de 80% du marché au Québec, l'accès aux
supermarchés est devenu véritablement problématique pour
plusieurs petits producteurs qui n'arrivent plus à satisfaire aux
exigences élevées de ces grands distributeurs (p. ex. : pression
sur les prix, quantités minimums requises, spécifications
relatives à l'emballage, etc.). Afin de pallier cette situation,
plusieurs producteurs se tournent vers la vente directe aux consommateurs, dont
notamment : la vente à la ferme, les kiosques en
bordure des routes, les marchés publics, et y trouvent
leur compte. Les exploitants qui intéressés par ces tendances
misent sur la qualité de leurs produits, ils ne sont pas
forcément en production biologique toutefois, ils recherchent une
agriculture alternative de type agriculture raisonnée. Au cours de mon
stage j'ai par exemple visité une ferme caprine dont les exploitants
avaient à coeur d'envoyer les bêtes au pâturage pour la
qualité de la viande. Ce type d'expérience est encore
relativement rare au Centre-du-Québec, si bien que cet exploitant
était vu par sa profession comme un avant-gardiste.
Par ailleurs, les consommateurs qui fréquentent ces
réseaux alternatifs s'attendent à vivre une expérience de
« magasinage » agréable et aiment y prendre davantage leur
temps comparativement aux magasins d'alimentation plus traditionnels. Le
gouvernement du Québec a bien compris cette problématique
puisqu'il a lancé en 2008 la campagne publicitaire « Mettez le
Québec dans votre assiette » (voir le logo ci-dessous), l'objectif
de cette campagne est de sensibiliser le consommateur à acheter pour de
30$ canadiens par an par foyer de produits locaux afin de soutenir
l'économie l'agriculture locale.
Fig. 10 : logo « mettez le Québec dans votre
assiette »
Source MAPAQ, campagne de communication lancée en
2008
La région Centre-du-Québec a décliné
cette idée provinciale, en lançant le 4 mai dernier la campagne
régionale : « Le Centre-du-Québec, goutez-y ! ».
Fig. 11 : logo le Centre-du-Québec, goutez, y !
»
Source : MAPAQ, Campagne de communication lancée le
4 mai dernier
L'idée est de sensibiliser le consommateur au pouvoir
d'acheteur qu'il détient sur l'économie de sa région,
l'objectif est aussi d'amener le consommateur a faire son «
épicerie » dans des lieux différents des supermarchés
et à connaitre les producteurs et les produits de sa région. Si
cette mouvance se met en place c'est aussi grâce à de nouvelles
tendances sociales.
De nouvelles tendances sociales : le consommateur citoyen entre
recherche d'authenticité et sentiment de nostalgie
Paradoxalement, le phénomène de mondialisation
qui s'est intensifié au cours des dernières décennies et
la consommation de masse qui en découle, ont contribué à
accentuer l'intérêt des consommateurs envers les produits plus
authentiques, spécialisés et personnalisés : les produits
régionaux et du terroir qui impliquent le travail d'un artisan (ou
artisan-producteur) répondent a des besoins d'authenticité, de
tradition, de qualité, de spécificité et de provenance.
Afin de protéger ces produits, une nouvelle Loi sur les appellations
réservées et les termes valorisants (sanctionnée le 19
avril 2006) permet d'encadrer l'utilisation des appellations
réservées et de termes utilisés dans la désignation
de produits régionaux et de niche afin de les mettre en valeur, par
exemple pour les termes comme « terroir », « fermier » ou
« artisanal ». L'intérêt des Québécois a
l'égard de ces produits est bien réel. Selon une étude
mandatée par Solidarité rurale du Québec au printemps
1999, 61% de la population québécoise s'est dite
intéressée aux produits du terroir, dont 24% très
intéressée. En outre, les offres considérées comme
authentiques, traditionnelles, enracinées, vraies, augmentent fortement
leurs impacts sur les clientèles. Les produits régionaux et du
terroir sont ainsi intimement associés à l'agrotourisme : la
nostalgie pour les mets maison et le savoir-faire d'antan devient donc une
tendance très favorable. Conséquence d'une couverture
médiatique accrue, la société nord-américaine se
préoccupe de plus en plus des causes environnementales. Les valeurs
émergentes liées à cette tendance de société
sont notamment : le retour aux sources (Essences ou Going backto-basics); les
préoccupations environnementales (Earth); la consommation de produits
«équitables» provenant de compagnies ayant une éthique
sociale et directement du producteur (Ethics). Les produits alimentaires
citoyens découlent de cette tendance émergente. Ces derniers sont
généralement caractérisés par la présence
d'une certification (ex. : certification biologique), le respect des conditions
de travail du personnel ou des fournisseurs (p. ex. : commerce
équitable), le respect de l'environnement, le respect du bienêtre
des animaux, et/ou l'appartenance à la communauté (par ex. :
produits locaux, marchés de solidarité). Les activités
encourageant l'agriculture locale et durable (à petite échelle),
tels que l'agrotourisme ou les marchés locaux, s'inscrivent
favorablement dans cette tendance. De plus, les fêtes champêtres et
les circuits régionaux semblent connaître un regain
d'intérêt. En effet, plusieurs apprécient fréquenter
les multiples fêtes champêtres et gourmandes offertes dans les
régions du Québec ou visiter les nombreux circuits
agrotouristiques, et ce, principalement pendant la saison estivale. Ces
événements et circuits offrent une excellente visibilité
aux producteurs régionaux auprès des consommateurs tout en leur
permettant de créer des liens avec les autres intervenants du milieu.
Très précisément ce sont ces nouvelles
tendances dans le domaine touristique et de l'agroalimentaire qui
m'intéressent pour ma vie professionnelle future. D'autant plus, que les
tendances rencontrées au Québec se déroulent certes dans
un contexte et dans une culture nord américaine, toutefois, les
problématiques autour de ces sujets sont très proches des
problématiques rencontrées en France.
II. Un stage au coeur des problématiques
agricoles modernes, une expérience enrichissante pour ma vie
professionnelle future
Le ministère de l'agriculture, des pêcheries et de
l'alimentation du Québec est un acteur essentiel et incontournable du
monde rural, d'autant plus qu'il travaille avec plusieurs intervenants du
milieu.
|