PARAGRAPHE I : LES MODELES THEORIQUES DE LA SPHERE
REELLE
Dans ce paragraphe, nous présentons les modèles
de détermination du TCRE les plus pertinents dans la littérature
économique. Il s'agit des modèles de type :
macroéconomique : FEER et DEER (A) ; économétrique- BEER
(B) et dynamique NATREX (C).
6 Dans la version absolue de la PPA, sous
hypothèse d'absence d'entrave au commerce international, le TCN est
déterminé par le rapport des niveaux de prix entre deux pays
selon la LPU et qui implique donc que le TCR est égal a un.
Empiriquement, l'hypothèse de PPA absolue est en général
rejetée dans l'âpres BRETTON WOODS au regard de l'importance des
fluctuations observées dans les parités réelles. En
présence d'entrave au commerce international notamment les
barrières à l'entrée, la version relative de la PPA
rejette la LPU. Une variation du TCN vient compenser les écarts
d'inflation entre pays de sorte que les déviations du TCR de son
d'équilibre de la PPA sont transitoires.
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A- Le modèle- FEER de Wlliamson et d'Edward
(1994)
Les modèles de type FEER (Fondamental Equilibrium
Exchange Rate) qui s'inspirent de la définition du TCRE proposée
par Nurkse dès 1944, posent que le TC d'équilibre d'une
économie est celui qui permet la réalisation simultanée
des équilibres interne et externe. A l'origine, l'équilibre
interne représente le plein emploi et l'équilibre externe
correspond à un solde commercial nul (version de Nurkse). Par extension,
les définitions des équilibres interne et externe ont
évolué mais s'inscrivent dans cette logique. Aujourd'hui, sous
hypothèses de fixité des prix et des salaires à court
terme et de flexibilité à moyen terme, le FEER ou le taux de
change d'équilibre fondamental, définit le TCR comme le prix
relatif des biens échangeables par rapport aux biens non
échangeables qui pour des valeurs soutenables de certains fondamentaux
de l'économie, a pour résultat un équilibre
simultané interne et externe. Dans cette approche, l'équilibre
interne est atteint quand le marché des biens non échangeables
s'équilibre dans le présent et est anticipé pour
s'équilibrer dans le futur. Par contre, l'équilibre externe est
atteint quand le solde du compte courant est compatible avec les flux des
capitaux soutenables de long terme. L'économie est supposée
être au plein emploi (équilibre interne) et le solde courant
correspond à des flux de financement soutenables (équilibre
externe).
Par ailleurs, une analyse du FEER dans une approche
macroéconomique définit le TCRE comme la valeur du change
compatible avec la réalisation simultanée de l'équilibre
interne (réalisation du niveau potentiel ou soutenable de production) et
de l'équilibre externe (défini par l'égalité du
compte courant à une "valeur d'équilibre",
généralement reliée à la soutenabilité des
paiements extérieurs) à moyen terme.
Détermination analytique du TCR d'équilibre
fondamental
Au regard des développements précédents,
le TCR d'équilibre est donc la valeur du change réel assurant une
cible donnée du compte courant, sachant que l'équilibre interne
est réalisé. Il est possible d'écrire le compte courant
comme une fonction du PIB domestique (Yd), du PIB étranger (Ye), du TCR
(E) et d'un ensemble de diverses variables exogènes (X) : Cc = F(Yd,;Ye
;E ;X)
Le TCRE, noté E*, est alors simplement défini
par : C*c = F (Y*d ; Y*e ;E* ;X) ; où C*c ; Y*d; Y*e représentent
respectivement les valeurs d'équilibre du compte courant, du PIB
domestique et du PIB étranger.
En log-linéarisant le modèle, on obtient :
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? Cc ?Yd ?Ye * ?E
=- á +á* +
â
Yd Yd Ye* E (1)
, * et ß étant des paramètres liés aux
élasticités du bloc du commerce extérieur et ?Z = Zd-
Ze.
L'écart relatif du TCR à sa valeur
d'équilibre est donc donné par :
; (2)
? E 1 ?Cc
E â Yd
= +áOG -á*OG *
où OG et OG* désignent respectivement l'output
gaps domestique et étranger. Finalement, on peut donc écrire
:
c
Ed Ee
- 1 Ccs - C *
=
Ed â Y (3)
où Ed est le TCR domestique ; Ee son niveau
d'équilibre et Ccs désigne le compte courant
structurel défini par :
*
Ccs
Cc
= +á
OG -OG
Yd Yd (4)
Les équations 3 et 4 nous permettent de dire que ;
l'écart relatif du TCR à sa valeur d'équilibre est
fonction de l'écart en part du PIB domestique, du compte courant
structurel à sa valeur d'équilibre. Ainsi, un compte courant
structurel inférieur à sa valeur d'équilibre correspond
à une surévaluation du TCR par rapport à sa valeur
d'équilibre. Toutefois, il reste maintenant à déterminer
précisément la valeur de cette cible de compte courant. Il est
à noter que l'estimation des taux de change d'équilibre
fondamentaux nécessite de connaître deux éléments :
l'écart entre la production réalisée puis la production
potentielle (l'équilibre interne), et l'écart entre le solde
courant observé et le solde courant soutenable (l'équilibre
externe). Cependant, la définition de ces deux cibles, ou niveaux de
référence, pose un certain nombre de problèmes et ne fait
pas l'unanimité [Borowski et al. (1998)].
Les limites les plus exacerbées du modèle FEER
concernent les hypothèses qui le régissent. Cette
hypothèse n'est généralement pas vérifiée
dans la réalité. Ce modèle émet implicitement
l'hypothèse selon laquelle le TC courant va converger vers sa valeur
d'équilibre, mais que la dynamique de retour à l'équilibre
n'est pas explicitée. Cette approche ignore donc les modalités du
retour du TC à son niveau d'équilibre [J-Hoarau, (2006)].
Conscients de cette faiblesse, Taylor et Al (1993) ont proposé le
concept de TC d'équilibre désiré (DEER = Desire
Equilibrium Exchange
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Rate). En effet le DEER analyse le TCRE en fonction des
niveaux désirés du solde courant et d'emploi. Les auteurs
étudient la trajectoire du DEER quand le montant initial des actifs
étrangers nets est différent du niveau désiré par
les autorités. Le modèle nous enseigne que les autorités
peuvent choisir la trajectoire sous la contrainte de stabilisation de la
balance courante et compte tenu de leurs objectifs de politique
économique.
Remarquons que, au regard du dilemme de politique
économique qui s'impose aux décideurs dans leur choix de
politique économique face aux instruments, la vérification de la
condition de la stabilisation de la balance courante pourrait se
réaliser sur un fil de rasoir. Ceci limite ainsi la portée de ce
modèle dans la détermination du TCR d'équilibre.
B- Le modèle - BEER de MacDonald
(1998)
Le taux de change d'équilibre comportemental (BEER ou
Behavioral Equilibrium Exchange Rate) est un modèle
économétrique composite. Celui-ci a moins pour objet d'expliquer
théoriquement la détermination du TCR que de rendre compte
empiriquement de son évolution. Cette approche consiste à retenir
un ensemble de variables fondamentales de l'économie pouvant influencer
le TCR de long terme, puis de chercher des relations de cointégration
entre le TCR et ces variables afin de déterminer son niveau
d'équilibre. Pour cette fin, Sterdyniak et Al (1992) utilisent des
techniques économétriques notamment le filtre de HodrickPrescott
(1997) pour dissocier le TCR permanent du TCR courant. Toutefois le BEER
souffre de l'absence d'un modèle théorique explicite,
c'est-à-dire qu'il n'est pas toujours mis en oeuvre dans un cadre
d'équilibre général [Soto et Elbadawi, (2008)]. Ce qui en
limite la rigueur. Ainsi d'autres approches ont vu le jour pour y corriger les
insuffisantes ainsi constatées.
C- Le TCR naturel (NATREX) de Stein (1997)
Le NATREX (Natural Real Exchange Rate) ou le TCR naturel est
défini comme le TCR qui assure l'équilibre de la balance des
paiements en l'absence de facteurs cycliques notamment la production (à
son potentiel), les flux de capitaux spéculatifs et de variation de
réserves de change. Cette approche distingue trois horizons du TC : le
court, le moyen et le long terme. A court terme le TCR dépend
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des fondamentaux (F), du stock d'actifs nets
(A) et de facteurs cycliques et spéculatifs (C). Le
NATREX de moyen terme ne dépend que des fondamentaux de
l'économie et du stock d'actifs nets. A l'état stationnaire, le
NATREX de long terme ne dépend que des fondamentaux de
l'économie. La dynamique de court et moyen terme du modèle repose
sur la convergence du TCR vers sa valeur d'équilibre de moyen terme par
l'égalisation des rendements financiers et l'absence de flux de capitaux
spéculatifs. A moyen terme, deux variables ne sont pas
stabilisées. Il s'agit du stock de capital par tête et la position
extérieure nette7. Par extension, le modèle incorpore
des effets de stock à travers la dynamique de la position
extérieure nette, le progrès technique, le rapport de la somme
des consommations privée et publique au PIB et le q de Tobin8
qui sont en fait les seuls fondamentaux du TCR. L'innovation majeure de cette
approche est qu'elle permet de calculer une trajectoire d'équilibre du
moyen au long terme9. Selon l'approche de STEIN, outre le taux
d'intérêt mondial, exogène dans le cas d'un petit
pays, il existe principalement deux fondamentaux de
l'économie qui influencent les flux de capitaux et, in fine, le taux de
change réel d'équilibre.
Le premier est le taux de consommation ou la
"préférence pour le présent", qui désigne la
propension des ménages et du gouvernement à consommer le revenu
national. Par exemple, lorsqu'une hausse des dépenses publiques n'est
pas compensée par une réduction de celles des ménages, le
taux de consommation s'accroît : ceci entraîne une diminution de
l'épargne soit, à investissement inchangé, une
augmentation des flux de capitaux entrants.
Le deuxième facteur fondamental est le progrès
technique, dont l'accroissement élève le niveau d'investissement
: ici encore, à épargne inchangée, il s'en suit une
amélioration du solde de la balance des capitaux.
En somme, les déterminants «structurels» de
l'épargne et de l'investissement engendrent un solde des flux de
capitaux de moyen terme. Ce dernier détermine le
7 En effet l'investissement continue de gonfler le
stock de capital et les déséquilibres courants font varier la
position extérieure nette. À long terme, le stock de capital et
la position extérieure nette qui s'identifie par le solde de la balance
courante cumulée sont, par définition, stables.
8 C'est un indicateur d'aide à la
décision d'investissement. Il est le rapport de la valeur
boursière sur la valeur comptable du titre. Pour Tobin, si Q > 1 ;
Investissement augmente et si Q<1, Investissement diminue.
9 Dans cette approche, il existe donc un lien de
causalité dans le modèle, que l'on peut schématiser comme
suit : « Fondamentaux » => Epargne et investissement => Solde
courant => NATREX.
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solde de la balance courante ex-post qui est atteint par le biais
d'un ajustement du change réel.
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