Paragraphe 2 : Les autres acteurs
Les administrations publiques et les autres institutions
concernées par la conservation de la nature ont pendant longtemps
considéré que la délimitation de sites
protégés a l'intérieur desquels toutes les formes
d'exploitation seraient interdites, suffirait a garantir une bonne conservation
des ressources naturelles. Cette fa~on de procéder reste certainement le
seul moyen véritablement efficace pour assurer la protection de certains
sites en situation critique ou d'importance fondamentale. La
réalité cependant nous conduit aujourd'hui a penser que la
conservation de la nature ainsi que l'exploitation durable des ressources
renouvelables ne sont possibles qu'avec la participation responsable du plus
grand nombre. De cette conviction est née la notion de gestion
participative, laquelle peut être définie comme un processus
dynamique permettant aux populations locales de contribuer a la conception et a
la mise en application des programmes d'action visant la conservation de la
biodiversité148.
La mise en oeuvre de cette approche de conservation doit tenir
compte des caractéristiques propres a chaque région ou groupe de
population. Elle passe avant tout par la connaissance et donc par un
régime d'information, postérieure ou concomitante, mais aussi et
surtout préalable a la prise de décision ; elle passe ensuite par
la mise en place de mécanismes de participation authentique aux choix.
On a de ce point de vue estimé que les associations et les ONG sont
les
147 ROMI (R.), Droit et administration de
l'environnement, op. cit., pp. 176 et s.
148 FOTSO (R. C.); COMPAGNON (D.) et CONSTANTIN
(F.) - Sous la direction de- : Risques écologiques, projets
intégrés et préoccupations locales, in Administrer
l'environnement en Afrique, Karthala - IFRA, 2000, p. 241.
institutions idoines pour répercuter a qui de droit,
les opinions des citoyens149. Sur ces derniers points, en matiere de
gestion et de protection de l'environnement, le role des associations et
l'appel ou le recours a des personnes privées y est peut'étre
plus frequent et en tout cas plus divers que dans d'autres domaines
(A)150. Mais celui des Organisations Non Gouvernementales (ONG)
l'est certainement encore plus (B).
A- Les associations et les personnes privées
C'est l'Agenda 21151 dont les dimensions sociales
se concrétisent surtout par un appel a la mobilisation et a
l'implication du plus grand nombre possible d'acteurs sociaux (des femmes aux
syndicats en passant par les jeunes et les associations), qui reconnait leur
place a cette categorie d'acteurs de la protection de l'environnement. Comme
l'écrit opportunément un auteur : « L'opinion publique joue
egalement un role de surveillance dans l'application des regles
établies. Le role des associations environnementales dans l'application
du droit de l'environnement ne fait pas de doute que ce soit au plan national
et m'éme au plan international : il s'agit au minimum d'un travail de
sensibilisation et d'information du public, servant souvent a mettre en cause
les pouvoirs publics face a une carence d'information, de prevention ou
m'éme d'action suite a une catastrophe »152.
Cependant continue cet auteur plus loin, Une exclusion formelle
de cette categorie serait percue par beaucoup comme "une raison majeure
de l'ineffectivité de ce droit''. En effet, conclut-il, si
nombre d'instruments consacrent la protection de
149 GN'NTEDEM LOWE (P. J.): "Les ONG et la
protection de l'environnement en Afrique Centrale, Memoire de Master 2 en Droit
international et compare de l'environnement, Universite de Limoges, Juillet
2003, p. 8.
150 ROM' (R.) : L'administration et les acteurs du droit de
l'environnement: l'exemple francais, cours polycopie de Master 2 en Droit
international et compare de l'environnement, Universite de Limoges, 2009-2010,
p. 5.
151 Le plan d'action "Agenda 21" (Action 21) adopte
par les Chefs d'Etats lors du Sommet de Rio de Janeiro ouvert du 03 au 14 Juin
1992 consacra ses chapitres 24 a 27 a la participation des jeunes, des femmes,
des associations et des ONG a un developpement durable et equitable.
152 MAZAUDOUX (O.), op. cit., p. 30.
l'environnement comme un intérêt supérieur
de l'humanité, il faut bien se résoudre a accorder une place aux
Etats bien stir, mais également aux populations, individus et personnes
morales153. Quoi qu'on dise, l'environnement ou sa protection
intéresse au premier chef, tout d'abord l'individu qui de ce fait
devrait également être le premier et le meilleur protecteur de
l'environnement. Ce n'est donc pas incongru quand la Déclaration de Rio
stipule que « La meilleure fa~on de traiter les questions d'environnement
est d'assurer la participation de tous les citoyens concernés, au niveau
qui convient. Au niveau naturel, chaque individu doit avoir dument acces aux
informations relatives a l'environnement que détiennent les
autorités publiques, y compris aux informations relatives aux substances
et activités dangereuses dans leurs collectivités, et avoir la
possibilité de participer aux processus de prise de décision. Les
Etats doivent faciliter et encourager la sensibilisation et la participation du
public en mettant les informations a la disposition de celui-ci...
»154. L'information et la participation des citoyens et des ONG
en matiere d'environnementale se sont tellement
généralisées ces dernieres années que le principe
10 de la Déclaration de Rio est en voie d'être codifié
puisque les Etats ont décidé d'en faire, au moins a
l'échelle européenne une véritable convention
internationale155
La Convention africaine sur la conservation de la nature et
des ressources naturelles de Juillet 2003 reconnait quant a elle des droits
procéduraux notamment le role du public dans son article XVI en ces
termes : « 1. Les parties contractantes adoptent les mesures
législatives et reglementaires nécessaires pour assurer a temps
et de maniere précise :
a) La diffusion d'informations sur l'environnement
b) L'acces du public aux informations sur l'environnement
c) La participation du public a la prise de décisions
pouvant avoir un impact important sur l'environnement... ».
153 Ibidem, p. 59.
154 Principe 10 de la Déclaration de Rio
précitée.
155 PRIEUR (M.) et alt., « L'information, la
participation et l'évaluation environnementale », cours
audio-visuel de tronc commun de Master 2 en Droit international et
comparé, Université de Limoges, 2009 - 2010.
Ces dispositions sont pour l'essentiel reprises en droit
national en Afrique Centrale156. On imagine bien comme d'ailleurs
l'indiquent ces diverses dispositions, que ce droit d'acces a l'information,
permet a chaque citoyen de demander des informations en matiere
environnementale sans avoir a justifier d'un intérêt
particulier157. Etant ainsi nantis des informations de derniere
minute sur l'état de l'environnement, le public qui est touché,
ou risque de l'être par les décisions, dispose de tous les atouts
pour déclencher des processus de prévention ou de
précaution selon le cas.
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