Conclusion
On peut retenir que l'absence de rattachement est tout autant
liée à la volonté des individus qu'à la
défaillance de l'Etat. Beaucoup de Burkinabé
préfèrent jouir de la nationalité de leur pays d'accueil
et d'autres n'ont ni l'une ni l'autre. L'important c'est qu'ils comprennent que
leur coeur doit battre pour leur pays d'origine, le Burkina Faso : rester
peut-être national du pays d'adoption de droit, mais Burkinabé de
coeur. Il y a près d'un siècle que des Burkinabé
résident à l'extérieur. Le réalisme voudrait que
l'on ne demande pas à ceux-ci de récuser les avantages qu'offre
une naturalisation ou une quelconque acquisition de la nationalité du
pays de résidence. L'acquisition de la nationalité du pays
d'accueil dispense par exemple du titre de séjour (par exemple la carte
de séjour a valu le départ de bon nombre d'immigrés de la
Côte d'Ivoire) ou du visa résident. Cependant, la
solidarité doit demeurer le ciment du peuple et de la nation
burkinabé. Car, comme le dit un adage, là où il y a le
coeur, les pieds n'hésitent pas à y aller.
Fort de ce constat, l'Etat burkinabé pourrait se
déployer partout où de besoin en augmentant le nombre de ses
représentations diplomatiques et consulaires, ce qui permettra d'avoir
une situation statistique exacte de la diaspora et de canaliser ses
investissements en vue d'utiliser une bonne partie de l'épargne
migratoire pour financer le développement du Burkina Faso. Mais
au-delà de toutes ces considérations, l'augmentation du nombre de
représentations signifie un accroissement de l'intérêt que
porte l'Etat pour les Burkinabé de l'étranger. Il sied aussi que
l'Etat prenne fait et cause pour ses ressortissants à l'extérieur
à travers l'accroissement de leur protection et la prise de
décisions politiques tenant davantage compte d'eux. Il pourrait de ce
fait encourager les Burkinabé de l'étranger à participer
activement à l'oeuvre de construction nationale en les aidant d'abord
à mieux s'organiser comme ils le demandent souvent. Cette participation
est un devoir moral qui peut être interprété comme un signe
de rattachement. Elle peut être appréhendée sous deux
angles : la participation à la gestion des affaires publiques, à
travers les élections auxquelles ils doivent prendre part en tant
qu'électeurs et candidats, et la
participation au processus de développement par des
apports divers, c'est-àdire par co-développement.
La notion de co-développement exprime aujourd'hui
l'implication, la participation des migrants dans le développement
économique de leur pays d'origine, quels que soient la nature, le
secteur d'intervention ainsi que les modalités de cette participation :
valorisation de l'épargne au service d'investissements productifs,
transferts de compétences, ou apports d'expériences sociales et
culturelles.
Quel peut donc être l'apport de la diaspora au
développement du Burkina Faso ?
PARTIE II : L'APPORT DES BURKINABE DE L'ETRANGER
AU DEVELOPPEMENT DU BURKINA
Qu'entend-on par développement ? Ce concept tant
usité ne rencontre pourtant pas l'unanimité des
économistes quant à sa définition. Selon les uns, il
s'agit de « la combinaison des changements mentaux et sociaux d'une
population qui la rendent apte à faire croître cumulativement et
durablement son produit réel global »42.
La définition de l'OCDE (Organisation de Coopération et de
Développement Economique) qui se veut plus positive explique que
« le développement sur le fond consiste en
l'amélioration par les hommes et les femmes de leur capacité
à réaliser leur potentiel humain individuel et
collectif »43. Pour l'ancien ministre des Affaires
étrangères du Burkina Faso, Ablassé OUEDRAOGO, «
le développement correspond à l'ensemble des
transformations techniques, sociales et culturelles qui permettent l'apparition
et la prolongation de la croissance économique. C'est un
phénomène irréversible ne pouvant s'observer que sur une
longue période. D'où le processus de développement peut se
définir comme tant la combinaison évolutive des changements
touchant les structures économiques, sociales,
culturelles et démographiques »44. Pour le
Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), le
développement doit non seulement engendrer la croissance
économique mais aussi permettre une répartition plus
équitable des bénéfices de cette croissance de sorte
à conférer aux individus la capacité d'agir. On parle de
développement humain durable. Il s'agit, dans le sens commun, de
l'amélioration de l'avoir, du savoir et du pouvoir.
Il apparaît donc intéressant d'appréhender
les incidences de la migration sur le développement du Burkina Faso
à travers l'épargne rapatriée par les Burkinabé de
l'étranger (chapitre I) et ses implications sur des agrégats
assez significatifs comme la consommation et l'investissement (chapitre II).
42 F. PERROUX cité par le Lexique
d'économie, 7e édition, Dalloz, 2002, p.225-226
43 SMOUTS M.C., BATTISTELLA D., VENNESSON P.,
Dictionnaire des relations internationales, 2eme édition, Paris, Dalloz,
2006, p.123
44 Extrait d'un document de travail d'un
séminaire tenu à Goundi du 31 août au 5 septembre 1994 ;
cité par BITIE Yaya « Diaspora burkinabé et
mécanismes de transferts monétaires pour un développement
national », mémoire de fin de cycle, IDRI, 2007, p.9
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