Paragraphe II : Les recettes culinaires
Parmi les plats spécialités culinaires
consommées par les Burkinabé de l'étranger, certaines sont
rencontrées plus couramment que d'autres.
- Les recettes courantes
Se séparer de son terroir et des siens comporte
toujours des désagréments, du moins moraux, manifestés par
une nostalgie plus ou moins prolongée. Le séjour à
l'étranger serait moins pénible et plus agréable si l'on
gardait sur soi le microclimat national. L'un des remèdes reste
la consommation des mets de son pays d'origine. Est-ce pour dire que la recette
du bonheur se trouve dans les spécialités culinaires
nationales ? La vérité est que la nourriture constitue un certain
rattachement.
Les mets varient en fonction des régions d'accueil et
des facilités d'accès ; mais on rencontre en
général les plats faits de riz et le to23. Le riz en
tant que tel est assez répandu mais l'usage qu'on en fait diffère
d'une région à une autre. Par exemple le « riz au soumbala
», connu sous le nom de « mouikolgo » demeure une
spécialité burkinabé bien convoitée. S'il est
aimé de l'intérieur, il va de soi qu'il le soit par les
Burkinabé de l'extérieur. L'exemple le plus éloquent vient
d'Abidjan où à l'hôtel Ibis, ce plat est prisé par
des Burkinabé et des non Burkinabé. Outre ce riz spécial,
on compte de nombreux plats de riz avec des sauces diverses comme la sauce
cacahouète, la sauce claire, la sauce feuilles...
Quant au to, beaucoup d'interviewés avouent l'adorer
particulièrement. Son originalité dépasse les plats de riz
et compte des sauces aussi variées. Il s'agit de sauces faites
d'extraits de plantes qui, pour la plupart, ne poussent pas du tout ou presque
pas dans beaucoup de pays. On peut citer le gombo, l'oseille, le baobab, le
kapok, etc. Compte tenu de la rareté relative de ces produits, le to
à l'étranger est fait d'ingrédients quasi-exclusivement
importés du Burkina.
L'approvisionnement en condiments se fait par les compatriotes
qui viennent du pays. Lorsque cet approvisionnement est fait, il procure de la
joie aux familles burkinabé à l'étranger. Ne dit-on pas
que ce qui est rare est cher ! C'est certainement cette rareté des
ingrédients qui fait qu'il n'y a pas une grande variété de
plats burkinabé à l'étranger. Néanmoins, hormis les
plats précités, on en compte d'autres.
23 Met local fait à base de farine de maïs
ou de mil accompagné de sauce.
- Les autres spécialités
culinaires
Il n'y a pas que les mets ci-dessus évoqués qui,
du reste, constituent l'essentiel des habitudes alimentaires de la grande
majorité des habitants du Burkina Faso, que l'on trouve à
l'étranger. Il y en a aussi de moins courants. Les Burkinabé de
Côte d'Ivoire et du Ghana offrent des exemples frappants. Dans ces pays
où les premières vagues de migrants voltaïques sont
installées depuis près d'un siècle, on se croirait au
Burkina Faso dans les régions où ils vivent.
Le quotidien L'Observateur Paalga rapporte par exemple ceci :
« AnoumaboSans fil24 a, malgré tout, ses charmes. En
fait ce petit coin paumé, en y regardant de plus près
est en quelque sorte un Burkina en miniature avec bien sûr en moins son
insalubrité. Le week-end tout le monde se retrouve pour recréer
l'ambiance si chaleureuse des villages burkinabé. Si le coeur vous en
dit vous pouvez manger du gonré25, du
baabenda26, du zamnin27, etc.,
il y a aussi le porc au four que vous pouvez déguster avec du bon
dolo lobi, samo, bobo, mossi, etc. ; toutes
les sonorités traditionnelles distillées ça et là
vous donnent vraiment l'impression d'être au Burkina.
»28 C'est l'exemple typique de la vie en communauté
des Burkinabé résidant dans ces pays où souvent
l'organisation sociétale de la diaspora est la même que celle en
cours dans les villages burkinabé, ce qui corrobore ce qu'affirmait
Reynald BLION en ces termes : « L'existence d'entités
géographiques en Côte d'Ivoire portant le nom de villages
burkinabé témoigne de l'intégration de cette population.
En ces lieux les chefs de la communauté burkinabé
désignés en fonction de l'ancienneté de leur installation
constituent de véritables relais d'information tant pour les
autorités ivoiriennes et burkinabé que pour le migrant
fraîchement arrivé. C'est par leur intermédiaire que ce
dernier pourra trouver un responsable de sa communauté, un
membre de son clan ou de sa famille »29. Cette vie en
24 Quartier d'Abidjan où la communauté
burkinabé est la plus ancienne et la plus importante
25 Met local burkinabé fait à base de
feuilles et de céréales (mil, maïs, riz...)
26 Met local burkinabé fait à base de
feuilles et de céréales (mil, maïs, riz...)
27 Met local burkinabé fait à base de
graines d'un arbre épineux
28 L'Observateur Paalga n°7249 du mercredi 29
octobre 2008, page 14
29 REYNALD BLION in Les Burkinabé de
Côte d'Ivoire entre « intégration » et
circulation
migratoire, Mondes en développement, Tome 23,
n° 91, 1995, p.85 -86
communauté avec la solidarité qui la
caractérise exprime un fort rattachement de la diaspora aux valeurs
nationales.
Malgré cette intégration, le retour au pays, bref
ou définitif, peut être vu comme un signe de rattachement.
Section II : Les retours périodiques au pays
et la vie associative
Peut-on seulement proclamer son rattachement si l'on
n'entretient quelque relation que ce soit avec la société
à laquelle on appartient ? Vus sous cet angle, on peut considérer
les retours au pays (paragraphe 1) et l'organisation associative (paragraphe 2)
des Burkinabé de l'étranger comme un facteur de leur rattachement
au Burkina.
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