III.2- Les facteurs explicatifs de la sous-évaluation
initiale
Plusieurs hypothèses peuvent expliquer la
sous-évaluation initiale, on s'intéressera dans ce qui suit
à présenter les facteurs les plus importants qui sont au nombre
de huit.
2.1-Hypothèse des bulles
spéculatives :
Cette hypothèse suggère que les rendements
anormaux positifs constatés sur le marché des titres
récemment introduits en bourse s'expliqueraient par les achats
spéculatifs des investisseurs qui n'auraient pas reçu de titres
à l'introduction. En d'autres termes, les prix d'offre des titres
introduits seraient en rapport avec leur vraie valeur économique, mais
la spéculation s'empare de ces titres après qu'ils soient
introduits et poussent leurs prix à des niveaux
déraisonnablement élevés. L'hypothèse des bulles
spéculatives implique pour être vraie que les rendements anormaux
positifs soient suivis de rendements anormaux négatifs, une fois le
« soufflé retombé », ce qui ne correspond
à aucune évidence empirique comme l'ont montré Jacquillat,
Mac Donald et Rolfo pour le marché français et Ritter pour le
marché américain.
2.2-Hypothèse d'aversion au risque des
banquiers :
Selon cette hypothèse, les banquiers introducteurs qui
conseillent les sociétés sous-évalueraient le prix des
titres des sociétés dont ils conseillent l'introduction afin de
réduire leurs risques et leurs coûts. En d'autres termes, la
sous-évaluation aurait pour objet de réduire la
probabilité que la demande de titres soit inférieure à
l'offre et les risques qui en découlent.
2.3-Hypothèse d'assurance des banques
introductrices :
Selon Tinic (1988), la sous-évaluation sert d'assurance
implicite aux banquiers introducteurs qui engagent leur responsabilité
civile auprès des investisseurs. La sous-évaluation est donc
considérée comme une forme d'assurance contre les poursuites
éventuelles que pourraient encourir conjointement l'entreprise
émettrice et le courtier de la part d'acheteurs d'émissions mal
évaluées.
2.4-Hypothèse de pouvoir de monopsone du
banquier introducteur :
Certains auteurs dont Ritter (1984) ont montré que la
sous-évaluation des titres à l'introduction résultait du
pouvoir de monopsone qu'exerceraient les grandes banques introductrices
vis-à-vis des petites et moyennes entreprises. En effet, les banques ont
tendance à sous-évaluer les titres de ces sociétés
dans le but de les placer ultérieurement auprès d'institutions
avec lesquelles les banques entretiennent des relations d'affaires.
2.5-Hypothèse d'asymétrie
d'information :
Une première explication théorique, due à
Rock (1986), de la sous-évaluation est basée sur
l'asymétrie de l'information qui existe entre les demandeurs de titres
informés et non informés. Rock a aboutit à partir de son
modèle à démontrer que si un investisseur non
informé reçoit des actions lors d'une introduction en bourse, il
a des chances supérieures à la moyenne de recevoir des actions
qui se négocieront ensuite sur le marché à un cours
inférieur au prix d'introduction.
Le modèle de Baron (1982) repose sur un type
d'asymétrie de l'information totalement différent puisqu'il
s'agit de celle pouvant exister entre la société qui s'introduit
et son banquier. Ainsi, il cherche à voir s'il existe un contrat optimal
entre la firme émettrice et son banquier sachant que :
· La firme émettrice ne peut pas observer
l'effort réalisé par le banquier pour placer ses titres. Or, la
demande pour l'émission va dépendre de cet effort de distribution
dans la mesure où le banquier peut persuader les investisseurs d'acheter
des titres et peut influencer leurs anticipations à travers
l'information qu'il donne sur l'introduction.
· Le banquier possède avant de signer le
contrat, des informations privilégiées sur le marché des
capitaux et donc sur le marché futur des titres.
Sachant cela, l'entreprise émettrice aura pour objectif
de trouver une fonction de compensation pour le banquier qui le poussera
à augmenter son effort de placement et à utiliser ses
connaissances sur le marché des titres. Le contrat prendra donc en
compte le partage du risque entre la firme émettrice et son banquier
avec une compensation payée au banquier pour ses conseils sur le prix
d'offre et pour les efforts qu'il fait pour vendre les titres émis.
En premier lieu, Baron (1982) arrive à conclure que, si
la firme émettrice et son banquier possédaient des informations
équivalentes sur le marché des capitaux, un prix
d'émission optimal pourrait être obtenu. Par contre, si la firme
émettrice ne connaît pas les conditions du marché, elle est
obligée de compenser le banquier afin de le pousser à faire
état de ses informations privilégiées. Ceci va
éloigner le prix d'offre et l'effort de placement du banquier de
l'optimum trouvé précédemment.
De plus, Baron montre que la valeur de la
délégation au banquier du choix du prix d'offre est une fonction
croissante de l'incertitude de la firme émettrice en ce qui concerne la
demande future pour ses titres. Ainsi, le prix d'offre est une fonction
décroissante de l'incertitude ce qui implique que plus l'incertitude est
grande, plus l'émission est sous-évaluée.
Beatty et Ritter (1986) ont, quant à eux essayé
de tester les hypothèses concernant la sous-évaluation en
utilisant des données empiriques sur les émissions.
Bien que ses modèles sont différents, les
implications sont les mêmes en ce qui concerne la sous-évaluation
des titres à l'introduction.
2.6-Hypothèse de la dispersion de la
propriété et de liquidité du
marché :
Cette hypothèse suggère que la
sous-évaluation provient de la volonté du propriétaire de
disposer le capital offert lors de l'introduction en bourse pour assurer au
titre une liquidité plus importante sur le marché. De plus, la
liquidité supplémentaire promise devrait contribuer au fur et
à mesure de la cotation du titre de faire progresser le cours. Le taux
de rendement requis par les investisseurs baisera en raison d'une
réduction du risque de liquidité.
2.7-Hypothèse de
signalisation :
Welch (1989) Grinblatt et Hwang (1989) et Allen et Faulhaber
(1989) expliquent la sous-évaluation par l'hypothèse de la
signalisation. En effet, les entreprises introduites en bourse recourent
à la sous-évaluation pour refléter le signal non apparent
de leur qualité récupérant ainsi le coût de la
signalisation sur le marché boursier. N'oublions pas de signaler selon
cette même hypothèse que les performances positives correspondent
à des entreprises de bonnes qualité et susceptibles de
performances à long terme.
2.8-Hypothèse du comportement
stratégique :
Les performances anormales à court terme sont dues
d'une part, au choix de la période propice d'introduction et d'autre
part, à la sélection de la méthode de cotation la plus
appropriée.
Conclusion :
Au cours de ce premier chapitre, nous avons
présenté les conséquences de l'introduction en bourse en
expliquant les principaux avantages et inconvénients liés
à cette décision stratégique. Ensuite, nous avons
étudié la rentabilité initiale et en particulier la
rentabilité initiale anormale des nouvelles émissions. Enfin,
nous avons présenté les facteurs explicatifs de la
sous-évaluation initiale lors de l'introduction en bourse.
Dans la première section, nous avons
présenté les principaux avantages liés à la
décision de l'introduction en bourse dont les plus importants
sont : le renforcement de la notoriété, l'assurance de la
pérennité, la diversification des sources de financement,
l'acquisition d'un pouvoir de négociation plus important avec les
banques, la motivation du personnel et l'amélioration du degré de
liquidité des titres nouvellement introduits en bourse. Parmi ces
inconvénients : la perte de contrôle la dilution du capital,
les coûts préalables à l'introduction, la perte de
confidentialité la sélection adverse et le risque moral et enfin,
la sous-évaluation initiales des titres.
Au niveau de la seconde section, nous avons défini la
rentabilité initiale lors de l'introduction en bourse tout en ayant
recours à plusieurs études déjà effectuées
concernant ce sujet afin de mettre en évidence sur la rentabilité
initiale anormale.
Au cours de la dernière section, nous avons
présenté les facteurs explicatifs de la sous-évaluation
initiale. Les principales hypothèses qui peuvent expliquer ce
phénomène sont : l'hypothèse des bulles
spéculatives, l'hypothèse d'aversion au risque des banquiers,
l'hypothèse d'assurance des banques introductrices, l'hypothèse
du pouvoir de monopsone du banquier introducteur, l'hypothèse de
l'asymétrie d'information, l'hypothèse de la dispersion de la
propriété et de liquidité du marché,
l'hypothèse de signalisation et l'hypothèse du comportement
stratégique.
Enfin, il faut noter que le facteur principal de la
sous-évaluation initiale est que cette dernière améliore
la liquidité des titres nouvellement introduits en bourse. Cette
hypothèse fera l'objet du deuxième chapitre.
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