III.2. Exposition des
agriculteurs au risque des prix
Alors que la libéralisation de la filière a
augmenté le prix au producteur dans plusieurs pays, elle a
augmenté en même temps la volatilité des prix. Dès
lors, les producteurs qui attendent une production future, les transformateurs
(Usines à thé) qui achètent les matières
premières brutes pour les revendre ainsi que les négociants qui
fixent un prix pour une livraison différée font face à un
risque permanent lié à l'incertitude quant à l'avenir.
III.2.1. Risques liées
aux imprévus climatiques et temporels
La production est toujours menacée par les
intempéries ou tout autre changement brusque des conditions climatiques.
Avant la récolte, le prix auquel le produit sera vendu est inconnu.
Entre la date d'achat des matières premières et la fin du
processus de traitement de thé, le prix du produit fini aura
changé occasionnant des pertes ou des gains. La COOTHEGIM et l'usine
à thé Gisovu, qui prend des engagements sur un produit dont elles
ne disposent pas encore, espèrent que les prix vont baisser au moment de
l'achat pour les revendre ensuite plus cher. Le risque de prix est le facteur
important que ces opérateurs doivent gérer afin de maintenir
leurs marges.
Tout le long de la filière, de la production à
la vente, des risques persistent même s'ils ne se présentent pas
de la même façon. La grêle, les insectes, et la
sécheresse restent les principaux facteurs de risques qui
empêchent une bonne qualité/quantité de la
récolte.
Les planteurs de thé membres de la COOTHEGIM au nombre
de 2500, disposent de petites exploitations (environ 1 ha) comme nous l'avons
vu dans le chapitre II. Les fluctuations de prix, si elles s'appliquent sur les
revenus des producteurs, ont un impact sur le bien être d'un grand nombre
de personnes, étant donné que tous les membres de la famille
participent aux activités d'entretien et de récolte comme nous
l'ont révélé les théiculteurs.
Les interviewés ont montré qu'ils ne sont pas en
mesure de supporter le risque de prix en plus du risque agronomique lié
à l'alternance entre les années de bonnes récoltes et les
années de mauvaises récoltes.
III.2.2. L'usine, la COOTHEGIM
et les exportateurs face au risque de
prix
Dans l'entretien que nous avons eu avec le Représentant
de l'usine à thé de Gisovu, nous avons retenu que la
totalité de la production du thé produit dans la région de
Gisovu-Muko est vendue par l'usine en collaboration avec la COOTHEGIM, aux
enchères à des exportateurs privés. Les enchères,
qui ont lieu à l'OCIR, permettent de rassembler en un seul lieu la
récolte nationale pour la vendre aux exportateurs. Les adjudications
permettent d'assurer la transparence des prix. Néanmoins, elles ont
comme inconvénient d'empêcher l'Usine et la COOTHEGIM de faire des
prévisions sur les quantités. Ils ne peuvent donc pas contracter
des engagements sur le long terme. Les exportateurs eux aussi ignorent le prix
auquel ils devront payer le produit qu'ils ont vendu d'avance. Tous ces
éléments montrent la nécessité pour les deux
parties de se protéger contre la fluctuation des prix sur le
marché mondial.
Cet état de chose renforce l'instabilité des
prix car tout un chacun veut minimiser les coûts et maximiser les revenus
car ils ignorent le prix réel qui sera en vigueur sur le marché.
Selon le Représentant de l'usine, les contrats qu'ils
continuent d'utiliser ne suffisent pas pour protéger leurs recettes
futures en négociant d'avance un prix fixe. « L'Usine et
la COOTHEGIM encourent des risques en cas d'évolution défavorable
des cours. Ce climat de négoce augmente le risque de contrepartie et les
exportateurs à faible surface financière ont des
difficultés à honorer leurs engagements ».
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