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Le refus de la linéarité dans l'adaptation cinématographique de la Rue Cases-Nègre de Joseph Zobel

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par Théophile Muhire
Université Natinale du Rwanda - Licence en Lettres 2004
  

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CHAPITRE II :

LES PERSONNAGES

2.1 La consistance et l'itinéraire des personnages principaux

Comme nous l'avons vu le personnage occupe incontestablement une place prépondérante dans n'importe quel récit. Dans La rue Cases-Nègres de Zobel, les personnages sont bien plus nombreux que dans le film de Palcy, qui a quelque peu simplifié l'intrigue. Le film fait un tri parmi les personnages présentés par le roman et semble privilégier les adultes, alors que le roman met une emphase sur le monde des enfants. Ainsi, de tous les compagnons de José tant à la rue Cases qu'à la Cour Fusil ou au lycée Schoelcher, Palcy n'évoque que ceux qui avaient une affinité très marquée avec le personnage principal. Dans le livre, Zobel accorde une place beaucoup plus importante à ses compagnons de bas- âge, « son plus émouvant souvenir d'enfance ». D'autre part, les personnages n'ont pas toujours la même psychologie. Ainsi, certains semblent plus humains, plus émotionnels ou plus fragiles dans le roman que dans le film ou vice versa. Nous allons essayer d'entrer dans leur fort intérieur pour découvrir la force qui les anime.

2.1.1 José : approche socio-historique

Personnage principal, José est omniprésent aussi bien dans le roman que dans le film. Tout le récit est écrit à la première personne et le narrateur n'est autre que le personnage principal. Cependant, aucune description minutieuse qui pourrait se comparer à un gros plan n'existe dans le roman, d'où certaines spéculations sur sa morphologie. Cependant, on sait que c'est un garçon de cinq ans au début du récit, et de dix-sept à la fin (cf. la référence temporelle : LRCN, p.204). L'idée générale qu'on se fait sur le personnage du José du roman c'est qu'il est un garçon beau, intelligent, bavard, qui grandit de l'enfance à l'adolescence (de cinq à dix-sept ans).

Dans le film, ce personnage est interprété par un garçon de onze ans et qui ne grandit pas, ce qui diminue l'effet du temps qui s'écoule, un thème pourtant très prisé dans le roman. Ce manque de croissance du personnage principal ôte un caractère autobiographique à l'oeuvre filmique, tandis que dans le roman beaucoup d'indices conduisent sur le terrain de l'autobiographie surtout dans la première édition de La rue Cases-Nègres, celle sortie en 1950. Elle met l'emphase sur la vie de l'auteur et sur celle des siens. Les éléments paratextuels renforcent les liens entre l'auteur, le narrateur et le personnage comme l'atteste la dédicace :

A MA MERE,

Domestique chez les Blancs.

A MA GRAND'MERE,

Travailleuse de plantation,

Et qui ne sait lire. (LRCN, 1950)

Les allusions généalogiques à la lignée maternelle de l'auteur correspondent de façon allusive à celle du protagoniste José dans le récit. Outre les éléments paratextuels, un certain nombre de rapprochements entre le contexte et le texte, entre le vécu de l'auteur et celui du protagoniste dans La rue Cases-Nègres sont à considérer. D'abord, les repères spatio-temporels à la fin du texte, « Fontainebleau, le 17 juin 1950 (LRCN 240) » se rapporteraient non au temps de l'histoire mais au temps de l'écriture. Ces indications temporelles jurent avec l'ancrage temporel du récit qui relate une enfance de l'entre-deux-guerres. Dans le récit, le système de plantation, même en voie de transition, demeure toujours intact. Si on considère la chronologie de l'auteur (né en 1915), l'ancrage spatio-temporel de l'histoire de José correspond au pan de vie de l'auteur. La proximité des prénoms, Joseph (auteur) / José (protagoniste) ainsi que l'expérience rurale dans cet univers de plantation ajoutent un autre élément à la relation autobiographique. Somme toute, la première édition invite à une lecture autobiographique de La rue Cases-Nègres. Par ailleurs, le changement du nom du Lycée Thoraille à Rivière-Salée en celui de Lycée Joseph Zobel en dit long à ce propos.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore