Métissage avec l'Inde
L'évolution musicale du rural vers l'urbain lance un
débat social sur l'identité culturelle et sur la notion
d'authenticité. Certains revendiquent la conservation et la valorisation
d'un patrimoine Malbar, même créolisé, lié aux
origines populaires. Les pratiques musicales et religieuses des milieux de
plantation traduisent une volonté d'inscrire la malbarité dans
cet espace socioculturel. Elles sont basées sur la
répétition du geste et sur une conception philosophique. Il
apparaît que la musique des plantations, par l'aspect
répétitif du rythme, lié au respect des règles
ancestrales, s'apparente à une représentation mythique de
l'expression humaine.
Les tenants de l'indianité préconisent une
philosophie qui tourne le dos aux pratiques villageoises des premiers
engagés indiens. Il s'agit là aussi d'un retour aux sources, mais
où le cadre de référence n'est plus la
société de plantation à La Réunion, mais l'Inde
où la musique est considérée comme un moyen artistique
d'honorer les dieux. Des instruments comme l'harmonium et les tablas,
associés aux cultes des grands temples, peuvent donc être vus
comme des symboles identitaires. La musique ne renvoie pas au collectif et
à la répétition du geste, mais à
l'individualité et à la créativité. La place
qu'elle laisse à l'individu, la diversification de son répertoire
et surtout, la part importante de créativité lors des
improvisations la rapproche davantage d'une représentation artistique de
l'activité humaine.
Deux mondes qui répondent à des logiques
sociales, religieuses et culturelles distinctes s'édifient. Cette
tendance est due aux changements sociaux et au changement du mode d'insertion
des originaires de l'Inde dans toute la société insulaire. Chacun
des deux groupes est soucieux d'authenticité et engagé dans un
projet identitaire. Bien que distincts, chacun des deux groupes montre une
cohérence qui assure une pérennité au projet identitaire.
Sans cette cohérence, aucune identité culturelle ne peut
vivre.
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