C. État des lieux général et
enjeux
La politique éducative définie par la
société française l'amène à tendre vers la
conduite de 80% la classe d'âge au niveau Baccalauréat
(Humanité). Résultat, en 2004, la France compte 61,80 % de
bacheliers. Ensuite, les raisons démographiques prévisibles ont
conduit une certaine stagnation des effectifs universitaires, qui atteint
quand même environ 1.312.141 étudiants (repartis sur 80
établissements), l'année universitaire 2004-2005. Cela signifie
que sur
les 2.268.423 étudiants français,
universités en absorbent à elles seules la moitié, contre
499.439
pour les filières sélectives (Classes
préparatoires aux grandes écoles, STS, IUT, IUFM) et
190.626 aux grandes écoles. Il reste alors 266.217
étudiants repartis dans divers établissements d'enseignement
supérieur.
À cette morphologie démographique, l'on
s'attend logiquement à ce que la répartition
budgétaire suive aussi le même schéma. Or, la
réalité est exactement inverse. Sans s'attarder sur ce point,
peu d'éléments suffisent pour en donner une image exacte.
En effet, si l'université dépense 6.695 € en moyenne par
étudiant, les classes préparatoires en dépensent le
double, soit environ 13.757 €. Les classes préparatoires
avec les grandes écoles réunies accaparent 30 % du
financement, pour 4 % d'étudiants. Pour en finir avec les
références quantitatives, voici encore une dernière
bizarrerie de notre système éducatif. Si dans la moyenne
des pays de l'OCDE, la dépense consacrée à
l'enseignement primaire et secondaire atteint 3,7 %
du PIB en 2002 contre 1,3 % pour l'enseignement supérieur
(soit 2,4% d'écart), en France, l'écart
est le plus grand puisqu'elle dépense 1% pour le
supérieur contre 4,1 % pour le reste (soit 3,1%
de PIB d'écart). Cela dit, relater les chiffres n'a
rien d'argumentatif. Le débat s'ouvre donc sur un terrain plus vaste que
celui de l'enseignement stricto sensu puisqu'il s'insère dans une
réflexion globale en interaction avec le système
économique ou, tout de moins, avec le choix de la gestion
du budget national. De telles descriptions ont le
mérite déjà de planter les décors que les
professionnels les plus compétents servant dans un
établissement n'ont pas toujours en
perspective.
Où se situe cette université sur la scène
internationale ? De nombreuses études comparatives, aboutissant
à la hiérarchisation internationale des
universités, placent les meilleures des universités
françaises en queue des classements. Études douteuses, sujettes
aux réserves ? C'est possible. Il reste tout de même une
certaine unanimité de ces résultats de classement qui
méritent de véritable recherche de voie d'amélioration
plutôt que de s'attarder sur
des contestations. En somme cet état des lieux
peut servir à stimuler la volonté des acteurs
concernés par la gouvernance de l'université de se lancer
dans une recherche tous azimuts d'orientations nouvelles en vue d'une
réussite rapide. Pour ce faire, l'Université de Nantes
s'oriente vers des efforts en matière d'offres de formations,
d'accueil d'étudiants et de grands chercheurs de renommée
internationale et de mobilité des étudiants comme des
enseignants. Une plus grande attractivité en somme avec,
comme résultat attendu, plus de rayonnement international.
D'autres établissements préconisent le renforcement et
l'officialisation d'une certaine forme de sélectivité (qui
existe déjà dans beaucoup de filières
universitaires même si l'hypocrisie de son application, puisque
non légale, la rend plus sournoise et contribuent à
l'explication des 45% d'échec en premier cycle). Mais plutôt que
sélection, ils préfèrent utiliser le terme orientation et
la révision à la hausse de la participation financière des
étudiants. Une des propositions, par exemple, de B. de Montmorillon
plaide que "Le rayonnement international de l'enseignement supérieur
français passe par le renforcement de l'autonomie des
universités, l'orientation sélective au moins à partir de
la Licence [Licence 3], et de nouveaux moyens, dont
la modulation des droits d'inscription et la mobilisation des
entreprises et des anciens." 71 En tout cas, deux points font
l'unanimité : le rayonnement international et l'autonomie des
établissements. Mais de multiples initiatives voient jour,
partout sur le territoire: mode de gestion, renforcement de la recherche,
regroupement en pôle universitaire pour plus de visibilité,
démarche qualité en rentrant dans une logique
d'accréditation aux labels prestigieux, recrutement
de plus en plus d'enseignants de grande qualité...etc.
Mais, plutôt que de retranscrire les
différents textes existants ou en faire de longs commentaires,
quittons la généralité pour découvrir une
université unique et pluridisciplinaire : celle de la capitale
ligérienne. L'Université de Nantes rentre dans cet état
des lieux qui vient d'être fait. Nous ne reviendrons donc plus sur ces
points. Cette partie va plutôt la situer dans son contexte historique
et organisationnel. Étant soumises aux mêmes enjeux que
l'ensemble des universités françaises, ce sont ses
contextes historique, géographique et organisationnel qui pourront
lui servir de leviers pour se distinguer.
71 In Enjeux Les Échos, N° 223,
avril 2006.
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