3.4 Approches stratégiques de la localisation
Les techniques de localisation peuvent être introduites
pour élaborer de véritables stratégies
de développement au niveau de réseaux de
magasins. Dans un contexte favorable et avec à l'esprit une
stratégie spatiale bien définie, un réseau de distribution
en croissance cherchera à s'étendre par addition de nouveaux
points de vente 601. La recherche de croissance par simple
accroissement de la surface commerciale de magasins existants est en effet bien
vite limitée et
601 MERCURIO J. (1984) Store Location Strategies,
dans Store Location and Store Assessment Research cité par
CLIQUET G. dans Valeur Spatiale des Réseaux et
Stratégies d'Acquisition des Firmes de Distribution, in
Valeur, Marché et Organisation, Ed. J-P. Brechet,
Presses Académiques de l'Ouest.
modifie d'autre part le concept initial et
éventuellement porteur du magasin dont la taille est l'un des
éléments. Outre un pouvoir de négociation accru
vis-à-vis des producteurs, une extension d'un réseau de
points de vente apporte une meilleure couverture géographique.
Cette couverture géographique est en effet importante car,
agissant comme un phare, elle permet aux consommateurs de
repérer leur enseigne en tous points du territoire et les
producteurs de voir en elle un moyen d'écouler en plus grandes
quantités leurs produits et de réaliser des
bénéfices accrus. Cliquet a effectué un état
de l'art des différents types de
stratégies spatiales et de leur
classification602. Six stratégies principales sont
offertes aux
distributeurs pour croître, dont les trois
premières seulement mettent en scène la
problématique de localisation spatiale 603:
1) Conquérir de nouvelles aires de marché par
ouvertures de nouveaux points de vente, mais
en conservant l'assortiment existant. Ce scénario augmente
la couverture spatiale du réseau,
2) Etendre son réseau dans des aires de
marché déjà occupées toujours en conservant
son choix de marchandises,
3) Conquérir de nouvelles aires de marché en
ouvrant et en diversifiant ses nouveaux points
de vente avec un nouvel assortiment,
4) Ouvrir de nouveaux points de vente avec de nouvelles
marchandises, mais sur des aires de marché déjà
conquises,
5) Augmenter sa part de marché avec les mêmes points
de vente et le même assortiment,
6) Diversification en améliorant l'assortiment dans des
points de vente existants.
La conquête de nouvelles aires est susceptible de se
réaliser par contagion, les points de vente s'implantent alors sur un
large front ou bien par diffusion hiérarchique ou par stratégie
de tête
602 CLIQUET G. (1998) Valeur Spatiale des
Réseaux et Stratégies d'Acquisition des Firmes de Distribution,
in
Valeur, Marché et Organisation, Ed. J-P. Brechet,
Presses Académiques de l'Ouest.
603 GHOSH A. et McLAFFERTY S. (1987) Location
Strategies for Retail and Service Firms, Lexington Books, p.10.
de pont604. Les points de vente s'implantent
alors dans les villes principales puis dans les villes de moindre
importance comme le décrit la théorie des places
centrales605. Par analogie avec le monde animal, un autre classement
des types de stratégies distingue l'évitement dans
l'esprit du principe de différenciation minimale de
Hotelling (voir § 2.1.4) qui consiste à s'installer loin des
concurrents, la recherche de concurrents et en particulier la
prédation qui
au contraire recherche l'affrontement souvent par une guerre des
prix en visant la proximité
des compétiteurs 606. Davidson, Sweeney et
Stampfl utilisent la méthode d'analyse de portefeuille
(décriée par certains auteurs - voir § 2.2.3) en croisant
les décisions sur les points
de vente, sur les aires de marché et sur les
segments de consommateurs à privilégier et dégagent
trois grandes catégories de stratégies 607 :
1) la stratégie d'expansion de
marché, par contagion, établissement de têtes de
ponts, constitution de grappes et recyclage de sites et l'acquisition de sites
concurrents ;
2) la stratégie de remplissage : on conforte
les positions acquises en agrandissant les points
de vente, en conquérant des marchés
secondaires et également comme précédemment, en
prenant le contrôle de sites concurrents ;
3) le downsizing : les performances sont
améliorées en réorganisant le réseau par la
fermeture des points de vente à la traîne et en en relocalisant
d'autres ainsi qu'en revoyant le mix produit.
Le choix d'une stratégie spatiale particulière est
dicté par le niveau d'ambition du réseau qui,
si elle est internationale ou même nationale,
nécessite l'établissement de têtes de pont avec
éventuellement des hiérarchies d'implantation à respecter.
Un niveau d'ambition modeste avec une volonté régionale
uniquement ne nécessitera qu'une stratégie de diffusion par
contagion. D'une manière générale, les
stratégies spatiales se découpent simplement en deux
grandes
604 LAULAJAINEN R. (1987) Spatial Strategies in
Retailing, Dordrecht, Holland, Reidel.
605 CHRISTALLER W. (1935) Die Zentralen Orte in
Süddeutschland, G.Fischer, Germany, Jena.
606 BROWN S. (1992) Retail Location : A
Micro-Scale Perpective, Aldershot : Avebury, p.170-171
607 DAVIDSON W.R., SWEENEY D.J. et STAMPFL R.W.
(1988) Retailing Management, 6th Ed., New York : Wiley, cité
par Cliquet G. dans Valeur Spatiale des Réseaux et
Stratégies d'Acquisition des Firmes de
Distribution, in Valeur, Marché et Organisation,
Ed. J-P. Brechet, Presses Académiques de l'Ouest, p.234.
catégories, les stratégies de
développement externe où le développement passe
par l'absorption d'autres chaînes ou par la coopération
avec les concurrents pour l'ouverture de centrales d'achat ou de
référencements communs et d'un autre côté, les
stratégies de développement interne608.
Cette variété de stratégies peut
s'observer effectivement sur le terrain. Le centre d'étude de
l'activité commerciale (Centre for the Study of
Commercial Activity) au Canada a réalisé une étude
à l'été 2000 sur les orientations stratégiques
pressenties auprès d'un échantillon de 475 décideurs, en
majorité présidents et directeurs généraux
appartenant à 226 réseaux de distribution canadien 609
représentant 32000 points de vente de l'alimentation,
l'habillement,
de l'équipement ménager et de grands magasins
plus généralement (voir figure ci-dessous).
Arrivent en tête des décisions que ces responsables
envisagent pour environ 80 % d'entre eux,
la modernisation et la rénovation des points de
vente (refurnishment), la relocalisation (relocation) puis
l'extension des réseaux de distribution et de façon moindre le
changement d'enseigne. L'extension du réseau de points de vente est
envisagée en majorité par l'ouverture
de nouvelles surfaces pour 74 % des décideurs (opening an
established format) ou de façon accessoire par l'acquisition d'un groupe
de points de vente appartenant à un autre réseau pour
35 % d'entre eux. Enfin, 10 % des décideurs pensent
à fermer des points de vente.
608 CLIQUET G. (1998) Valeur Spatiale des
Réseaux et Stratégies d'Acquisition des Firmes de Distribution,
in
Valeur, Marché et Organisation, Ed. J-P. Brechet,
Presses Académiques de l'Ouest.
609 HERNADEZ T., BIASIOTTO M. (2001) The Survey of
Corporate Planning : Summary Findings, Research
Letter 2001-2, Centre for the Study of Commercial Activity,
p.1-8.
Fig. 3.42 - Type de Décisions prise par les
décideurs dans un avenir proche pour leur réseau de
distribution610
Cette enquête a montré également que 40
décisions impliquant la notion de localisation étaient
prises par an dans chaque réseau comptant en moyenne 437 magasins.
Les décisions impliquant la localisation des points de
vente tournent d'une manière générale autour de:
- la création pure d'un réseau de points de vente
;
- l'extension d'un réseau par création de nouveaux
points de vente ;
- l'extension d'un réseau par acquisition de points de
vente concurrents ;
- la relocalisation de points de vente ;
- la suppression de points de vente.
Ces décisions ne sont pas, comme on l'a vu,
forcément contradictoires entre elles. On peut par exemple envisager
l'extension d'un réseau tout en supprimant certains points de vente et
en relocalisant d'autres. D'autre part, nous avons vu en introduction
que les réseaux peuvent adopter une organisation différente,
en franchises pour bénéficier d'une réactivité plus
élevée
610 HERNADEZ T., BIASIOTTO M. (2001) The Survey of
Corporate Planning : Summary Findings, Research
Letter 2001-2, Centre for the Study of Commercial Activity,
p.2.
et une connaissance du marché plus fine au niveau local
611 612, en succursales pour asseoir le contrôle du
franchiseur sur son réseau ou bien sous forme mixte associant
les deux types d'établissements. Cette dernière forme
d'organisation présente un intérêt indéniable
pour accroître la souplesse stratégique de l'ensemble pour
faciliter l'acquisition de nouveaux points
de vente en proposant aux propriétaires
différentes formules de rachat ou de franchise ainsi que pour animer le
réseau en bénéficiant des efforts d'innovation et de
promotion des deux catégories d'établissements commerciaux
613. Le point important qui nous concerne est surtout que
cette organisation mixte permet de trouver un compromis entre le
développement
du réseau et l'assimilation du concept du groupe.
Ainsi, le développement du réseau peut se faire assez rapidement
et à moindre prix par la création de franchises alors que les
filiales plus sous contrôle permettent de mailler le territoire tout en
assimilant graduellement le concept.
Le choix de tel ou tel type d'organisation dépend plus
des vues stratégiques du manager et de l'activité commerciale
considérée. La méthode associant modèle
p-médian et traitement du signal pourra, après avoir
délimité la zone de chalandise, spécifier la localisation
idéale des points de vente et hiérarchiser l'intérêt
des différents sites. Mais, ce n'est qu'au cas par cas et selon les
moyens financiers du groupe que l'on pourra décider de la
configuration en succursalisme, franchise ou de bâtir un réseau
mixte. Sans doute, les sites sans trop de risques liés à la
concurrence ou à l'environnement, établis depuis longue
date et qui peuvent ainsi contribuer majoritairement à
l'amélioration des résultats financiers tout en structurant
le réseau, bénéficieront plus facilement de la
structure en succursales ce qui leur permettra d'assimiler plus
aisément l'identité du groupe. Une identité commune
au réseau facilite et
fluidifie en effet les efforts de promotion et de communication
vis-à-vis de l'extérieur. Elle
611 BRICKLEY J.A., DARK F.H. (1987) The Choice of
Organizational Form : The Case of Franchising, Journal
of Financial Economics, 18, 401-20.
612 CAVES R.E. , MURPHY II W.F. (1976)
Franchising : Firms, Markets, and Intangible Assets,
Southern
Economic Journal, 42, 572-86.
613 CLIQUET G. (2000) Plural Form in Store
Networks : A Model for Store Network Evolution, The
International Review of Retail, Distribution and Consumer
Research, vol. 10, n°4, pp 369-387.
constitue en quelque sorte un signe de ralliement pour
une masse de clients fidèles ou potentiels qui chercheront alors
à fréquenter les points de vente du réseau où
qu'ils soient. La structure en franchise conviendrait sans doute mieux
à des implantations récentes, plus risquées où
il s'agit d'avoir une grande capacité d'innovation pour s'adapter au
marché local. Les managers des franchises à l'esprit
entrepreneurial, sans doute plus motivés car plus responsables de
leur affaire, défricheront en pionniers les territoires non
encore conquis et plus en proie à la concurrence. Une plus grande
marge de manoeuvre dans le marketing et la gestion souple quotidienne du point
de vente leur sera nécessaire pour conforter la position du groupe dans
ces régions. A plus long terme, ces franchises pourront
éventuellement être converties en succursales de manière
à renforcer globalement le concept du groupe et pour transformer une
simple chaîne de points de vente en "un dispositif de forme
éclatée permettant de mettre en oeuvre simultanément
en plusieurs endroits un ensemble d'actions
avec une adaptation souple sur le
terrain"614.
L'ouverture ou la réorganisation d'une chaîne de
points de vente est un art difficile qui consiste, comme on l'a vu, à
choisir au mieux le nombre et la localisation des magasins ainsi que leur
type d'organisation (en succursales, en franchises ou mixte). Mais une
stratégie d'implantation peut être beaucoup plus
élaborée, sans se limiter à ces deux paramètres.
Ainsi, faut-il par exemple ouvrir tous les points de vente en même temps
ou bien adopter un ordre séquentiel de création judicieusement
conçu ? Nous avons d'autre part sous-entendu lors de la construction du
modèle p-médian précédent, que les points de vente
devaient se situer au plus proche des clients, d'autres paramètres
liés à la notion de distance méritent d'être
examinés. Certes le modèle p-médian peut incorporer
un coût d'ouverture des activités en chacun des
différents noeuds du réseau correspondant. Mais d'un autre
côté, les modèles de localisation- allocation prennent
d'une manière générale l'hypothèse, on l'a dit au
début de cet exposé, que
614 BOULANGER P., PERELMAN G. (1990) Le
réseau et l'Infini, Nathan, Paris, Cité par Cliquet G.
dans
CLIQUET G. (2000) Plural Form in Store Networks : A
Model for Store Network Evolution, The
International Review of Retail, Distribution and Consumer
Research, vol. 10, n°4, pp 369-387.
le futur site du point de vente que l'on cherche
à implanter devra se situer au plus près de clients
potentiels. Une manière d'aborder le problème consiste à
localiser ses points de vente non seulement par rapport aux clients, mais aussi
par rapport à la concurrence. La stratégie d'évitement
615 décrite précédemment
privilégiera dans les choix de localisation les zones encore peu
exploitées par la concurrence. Sur le plan stratégique,
on se situe alors dans la première étape du principe de
différenciation minimale correspondant à la phase
primaire
d'implantation d'une activité dans un territoire
vierge de concurrence (voir §2.1.4). Notre méthode
est tout à fait apte à cerner de telles régions qui, si
elles s'avèrent comporter un fort potentiel de clients, constituent des
mines d'or sur le plan commercial. S'installer en un lieu à
la fois riche en clientèle et dépourvu de
concurrence est un avantage stratégique indéniable que les
compétiteurs surmonteront sans doute (phase 2 du principe de
différenciation minimale616), mais au bout seulement
d'un certain temps. Nous nous proposons de décrire dans le
prochain paragraphe comment développer cette stratégie
d'évitement à partir de la méthode associant
traitement du signal et modèle p-médian.
3.4.1 La stratégie d'évitement ou
rechercher les zones non exploitées par la
concurrence
Considérons l'exemple où la première carte
représente cette fois l'ensemble de ces magasins associés
à leur chiffre d'affaires sur un territoire vaste
(région, pays) et que la deuxième
représente la même cartographie mais filtrée
par deux filtres Nagao :
615 BROWN S. (1992) Retail Location : A
Micro-Scale Perpective, Aldershot : Avebury, p.170-171
616 Source : BROWN S. (1992) Retail Location : A
Micro-scale Perspective, Ashgate, England.
Fig. 3.43- Adresses de magasins associées à leur
chiffre d'affaires, Fig. 3.44 - suivies de deux filtres Nagao
Dans ce cas, pour trouver la localisation la plus
éloignée et remplir les trous ou interstices de zones non
encore exploitées, il suffira de considérer la
cartographie "inverse" (c'est-à-dire celle obtenue en prenant pour
nouvelle valeur en chaque point la valeur maximale représentée
retranchée de la valeur actuelle du point: Vmax - Vactuelle =
Vnouvelle valeur). On obtient alors en reprenant l'exemple
précédent les figures 3.45 et 3.46 :
Fig. 3.45 - Cartographie inverse, Fig. 3.46 - Cartographie
inverse filtrée par deux filtres Nagao
En procédant à une délimitation par
transformation morphologique, on obtient la figure 3.47 :
Fig. 3.47 - Délimitation des zones vides de concurrence
Les zones vides où la concurrence est rare sont
bien délimitées. Il faut néanmoins prendre garde aux
effets de bords: la cartographie, mal ajustée, a ici coupé des
zones vides en limite
de représentation ce qui fait que celles-ci sont
limitées par des segments rectilignes (voir dessin ci-dessus).
D'autre part, certaines zones vides d'activités (ou
à faible nombre d'activités) ne correspondent peut-être
pas à des zones d'implantation possibles pour un point
de vente mais à des barrières naturelles
(bois, lac, rivière, aéroport) qu'il s'agit d'identifier.
Cette dernière approche reprend en fait la théorie des secteurs
proximaux (voir § 2.1.1) qui cherchait à cibler les lacunes
spatiales au niveau desquelles résident des opportunités
d'implantation (zones dépourvues de concurrence). Dans cette
perspective, il est intéressant de comparer les deux approches à
savoir la délimitation des zones de chalandise (à forte
densité
de clients) et la délimitation de zones vides (à
faible densité de concurrents) pour sélectionner
les régions cumulant les deux avantages.
3.4.2 La recherche de concurrents ou la
prédation
Certaines activités ont cependant au contraire
tendance à se regrouper pour augmenter leur pouvoir
d'attractivité dans une stratégie de recherche de concurrents ou
pour se lancer dans un affrontement direct par exemple à travers une
guerre des prix dans l'optique d'une stratégie de prédation
617 618 619. Il sera alors intéressant de délimiter
les zones de chalandise de clients potentiels pour rechercher les emplacements
qui leur sont les plus proches et en parallèle, de délimiter les
zones d'implantations de concurrents pour également
détecter les régions géographiques où ceux-ci ont
tendance à se concentrer pour également s'en rapprocher le plus
possible. La démarche cherchera alors à être
à la fois proche des clients et proche des concurrents en
procédant à une délimitation à la fois des
zones de chalandise et des zones
commerciales du secteur. Dans la pratique cependant, au niveau
local, les concurrents ne sont
617 HOTELLING H. (1929) Stability in Competition,
The Economic Journal, vol. 39, p. 41-57.
618 DELOZIER M.W. et LEWISON D.M. (1986)
Retailing, 2nd ed., Merill.
619 BROWN S. (1992) Retail Location : A Micro-Scale
Perpective, Aldershot : Avebury, p.170-171
pas en général suffisamment nombreux pour
pouvoir clairement définir par traitement du signal les zones de
leur implantation. On cherchera, dans ce cas, à
sélectionner par simple examen les emplacements de
préférence à proximité des regroupements de
concurrents. L'identification des zones de concurrence peut être
intéressante dans le cadre d'une stratégie
de recherche de concurrents parfois aussi car ces zones
d'implantation sont révélatrices d'une activité
florissante du secteur et sont donc porteuses commercialement. C'est en
particulier le
cas dans la filière du tourisme (hébergement,
restauration, centres de loisirs). Par exemple, un terrain de camping
souhaitant accueillir une clientèle de touristes n'aura pas
intérêt à s'installer dans les régions à
fortes populations puisque durant les saisons touristiques, celles-ci migrent
vers d'autres lieux. Géocoder les implantations de campings et
délimiter leurs régions d'installation comme nous l'avons
fait ci-dessous, paraît dans ce cas assez intéressant. La
même procédure s'appliquerait pour une stratégie de
prédation.
Fig. 3.48 - Représentation des campings sur le
territoire national par des points Source des données : CD
Stratégie & Localisation de J.Baray et Société
Articque Géocodage par Logiciel Carte & Données
d'Articque
Fig. 3.49 - Délimitation des zones d'implantation de
campings par filtre Sobel
Fig. 3.50 - Numérotation des zones d'implantation de
campings
Après avoir délimité les zones
d'activité par traitement du signal (filtre Sobel), nous avons
identifié 16 zones d'implantation principale de campings qui
correspondent chacune à des zones touristiques comme la logique
le veut, souvent à proximité du bord de mer: Côte
d'Azur, côte vendéenne, Bretagne, Bouches du Rhône,
Pyrénées Orientales,... Il convient donc
de rechercher pour un camping touristique une
implantation au sein même de l'une de ces zones denses en
concurrents en évitant tout de même les régions
saturées en offre. Une approche encore meilleure serait
d'établir ce même type de carte sur plusieurs années et de
cibler les zones d'implantation de camping en
développement (ayant un nombre de concurrents en croissance ou
s'étendant) et d'éviter celles ayant tendance à
régresser.
3.4.3 Stratégie d'ouverture des points de
vente
Un réseau de points de vente peut adopter
différentes stratégies d'ouverture, en se déployant
rapidement sur un territoire ou bien en créant ses magasins, tour
à tour, selon un ordre bien déterminé. Les modèles
de localisation multiple de points de vente ont longtemps passé sous
silence les effets des délais d'ouverture. Il est rare qu'une
société décide l'ouverture simultanée
de plusieurs magasins que ce soit pour des raisons de budget
ou même par souci de prudence afin de mesurer le succès des
premières créations initiales sur un marché
donné et de se conforter dans l'idée dans lancer d'autres
ultérieurement. Ceci dit, dans le choix même des
localisations, il est possible soit de sélectionner les
meilleures localisations de manière itérative, soit de
chercher à implanter un réseau de manière globale. Dans le
premier cas, le décideur identifiera une première
localisation optimale en essayant de maximiser le chiffre d'affaires du
magasin, puis un peu plus tard va ouvrir de la même façon un
certain nombre
d'autres sites en tenant compte des magasins existants et de la
concurrence 620. Ce processus
se poursuivra jusqu'à ce que le marché ait atteint
son point de saturation en terme d'offre. Le
620 KAUFMANN P.J., DONTHU N. et CHARLES M.B.
(2000) Multi-unit Retail Site Selection Processes : Incorporating Opening
Delays and Unidentified Competition, Journal of Retailing, Vol.76(1),
p. 113-127
problème est qu'en suivant cette procédure, le
fait de placer au départ un point de vente entre deux localisations
potentiellement très intéressantes va condamner ces
opportunités à moyen terme621. Il est en effet
impensable pour des raisons de coût, d'ouvrir ultérieurement ces
deux nouvelles surfaces commerciales après avoir fermé le magasin
existant devenu inutile et sans doute non-rentable, sans avoir au minimum
rentabilisé l'investissement souvent onéreux de la
création de ce dernier.
Il est donc presque indispensable de choisir les sites optimaux
en une étape unique 622 623 624
ce qui permet en outre d'avoir ultérieurement une
meilleure couverture du marché 625. Même
s'il existe un délai d'ouverture entre les points de vente
sélectionnés de cette manière globale,
le chiffre d'affaires de ces différentes entités
sera en général plus équilibré et meilleur à
long terme que ne le seraient des localisations déterminées
séquentiellement. Dans ce dernier cas,
le premier magasin avec sa localisation très centrale
par rapport au potentiel du marché aura tendance à avoir un
revenu excellent alors que les magasins suivants devront se contenter des
restes et seront moins performants 626. Mais si, pour
différentes raisons, les délais d'ouverture entre les premiers
magasins à ouvrir et les suivants doivent être longs, il
est préférable d'adopter le processus séquentiel de
décision afin d'amasser durant cette période les profits sur
ces premiers magasins possédant un potentiel commercial
plus intéressant. Cette stratégie est également
confortée par le fait que plus le délai d'ouverture est long,
plus le risque que les
meilleurs emplacements soient préemptés par un
concurrent est élevé 627. Kaufmann, Donthu
621 KAUFMANN P.J., DONTHU N. et CHARLES M.B.
(2000) Multi-unit Retail Site Selection Processes : Incorporating Opening
Delays and Unidentified Competition, Journal of Retailing, Vol.76(1),
p. 113-127
622 GHOSH A., CRAIG S. (1991) Fransys : A
Franchise Distribution System Location Model, Journal of
Retailing, 67, p. 466-495.
623 GOODSCHILD M.F. (1984) Ilacs : A
Location-Allocation Model for Retail Site Selection, Journal
of
Retailing, 60, p. 84-100.
624 ACHABAL D.D., GORR W.L. et MAHAJAN V.
(1982) Multiloc : A Multiple Store Location Decision
Model, Journal of Retailing, 58, 5-24.
625 SCOTT A.J. (1971) Combinatorial
Programming, Spatial Analysis and Planning, London: Methuen and
Company Limited.
626 GHOSH A., TIBREWALA (1992) Optimal Timing
and Location in Competitive Markets, Geographical
Analysis, 24 (4): 317-334.
627 GHOSH A., CRAIG S. (1983) Formulating Retail
Location Strategy in a Changing Environment, Journal of
Marketing, 47, p. 56-68.
et Brooks ont vérifié toutes ces hypothèses
assez logiques en simulant l'implantation de deux réseaux de magasins
à travers un modèle MCI 628.
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