La garantie des droits fondamentaux au Cameroun( Télécharger le fichier original )par Zbigniew Paul DIME LI NLEP Université Abomey-Calavi, Bénin - DEA en Droit international des Droits de l'Homme 2004 |
B.- Le rejet de la thèse de la supra-constitutionnalité du préambuleLe principe selon lequel la constitution a valeur de loi suprême dans l'Etat est accepté par l'ensemble des Etats92(*). Le Cameroun ne déroge pas à cette règle qui, même si elle n'est pas clairement énoncée, ressort du contenu du texte constitutionnel. Le principe de la supériorité de la constitution sur toutes les autres normes au sein de l'Etat suppose que celle-ci est placée au sommet de la hiérarchie des normes juridiques. La constitution est à ce titre considérée comme la loi de référence et c'est par rapport à elle qu'est appréciée la conformité ou la non-conformité d'une norme inférieure. C'est la base même du contrôle de constitutionnalité des textes qui est un examen de la conformité par le juge d'une loi à la constitution, examen pouvant donner lieu, le cas échéant à une sanction de la loi incriminée93(*). Le préambule est le lieu d'énonciation des droits fondamentaux et eu égard à la fragilité de ces derniers, la thèse d'une supériorité du préambule qui les mettrait à l'abri de toute violation a pu sembler ``séduisante''94(*) à plus d'un auteur. La thèse de la supra-constitutionnalité des libertés a été soutenue notamment par Léon DUGUIT95(*) et visait à placer les droits fondamentaux ``hors hiérarchie''. Le Pr MINKOA estime que cette thèse peut difficilement être acceptée, car il est inconcevable que le pouvoir constituant puisse être lié par une règle juridique supérieure à la constitution96(*). Il serait effectivement contradictoire de placer la constitution au sommet de la hiérarchie des normes au sein de l'Etat afin de la soumettre par la suite à l'empire d'une autre norme. Il en résulterait une atteinte au principe de la suprématie constitutionnelle97(*) et tout l'ordonnancement juridique au sein de l'Etat ne pourrait qu'en être affecté. Qui plus est, vouloir protéger le préambule constitutionnel de toute violation en le plaçant au-dessus de la constitution est une illusion, car les violateurs d'une règle de droit ne se préoccupent généralement pas de sa place dans l'ordonnancement juridique. Au total, l'alignement des dispositions du préambule sur le même régime juridique que l'ensemble des autres dispositions constitutionnelles implique que celui-ci ne soit plus un document extra-constitutionnel ou infra-constitutionnel. Selon M. OLINGA, le préambule perd par la même occasion toute possibilité qu'il y'aurait eu d'en faire un document supra-constitutionnel, surplombant et irradiant tout l'environnement normatif du pays98(*). S'il n'est plus désormais considéré que comme une partie de la constitution, le préambule camerounais laisse voir, tout au long de l'évolution constitutionnelle de l'Etat, un souci majeur dans l'édification d'un bloc de constitutionnalité favorable aux droits fondamentaux. Le Pr MINKOA estime du reste que même sans admettre le principe d'une supra-constitutionnalité, et indépendamment du point de savoir si les lois constitutionnelles sont soumises ou non au contrôle de constitutionnalité de la même manière que les autres lois, on pourrait inclure l'ensemble des dispositions du préambule, en l'occurrence les droits fondamentaux dans l'ensemble constitué par les ``principes démocratiques qui régissent la République''. Cela permettrait de leur garantir une certaine permanence et d'éviter toute régression en la matière99(*). * 92 P. F. GONIDEC, op. cit., p. 100. * 93 Ch. DEBBASCH et alii, op. cit., p. 593. * 94 A. MINKOA SHE, op. cit., p. 26. * 95 In Traité de droit constitutionnel, Tome 2, 1911, p. 12. * 96 A. MINKOA SHE, op. cit., p. 26. * 97 M. KAMTO, Pouvoir et droit en Afrique, Paris, L.G.D.J., 1987, p. 446. * 98 A. D. OLINGA, ibid., p. 120. * 99 A. MINKOA SHE, op. cit., p. 26. |
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