SECTION 2 : LA NECESSITE D'UNE PROTECTION DURABLE DE
LA DIVERSITE BIOLOGIQUE
Les organismes produits à l'aide de la biotechnologie
présentent des risques pour l'Homme et pour l'environnement. Sur le plan
environnemental notamment, le développement des OGM peut conduire
à l'érosion de la base génétique du potentiel
biologique existant. Dans le cadre de la résistance aux herbicides, le
transfert des caractères de résistance aux plantes non
ciblées pourrait entraîner une prolifération inopportune de
ces plantes.
Il conviendrait donc de mettre en place un mécanisme de
régulation approprié pour s'assurer que les produits issus de la
biotechnologie moderne soient sécurisants pour l'Homme et
l'environnement.
Pour une protection durable de la diversité biologique,
il conviendrait donc de prendre en compte les risques liés aux OVM (
paragraphe 1) afin d'appliquer des règles
prévisibles et sûres (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La prise en compte des risques
liés aux organismes vivants modifiés
Toute technologie nouvelle est susceptible d'entraîner
des risques directs ou induits. Depuis plusieurs années
déjà, des plantes transgéniques sont déjà
commercialisées et cultivées en Amérique du Nord.
L'Europe, elle, a choisi d'évaluer les risques potentiels de cette
nouvelle méthode de création qu'est la transgenèse, avant
toute exploitation à grande échelle.
Nous étudierons dans ce paragraphe la pollution
génétique (A) ensuite les éventuels
périls pour l'environnement (B).
A- La pollution
génétique
Implanter une semence hors de son écosystème
peut entraîner des problèmes graves. Les OGM fabriqués pour
mieux résister aux attaques des prédateurs, disposeront d'un
avantage sélectif sur les autres plantes, qui en souffriront. Des
croisements spontanés sont aussi envisageables, les plantes
cultivées croisant leurs gènes avec des espèces sauvages
apparentées. Un colza transgénique transmettrait son gène
de résistance aux herbicides à une mauvaise herbe, qui
deviendrait ainsi une « super mauvaise herbe » insensible
aux pesticides. Cette pollution génétique est
irréversible34.
Les plantes transgéniques contiennent des gènes
qui y ont été transférés à partir
d'espèces avec lesquelles elles n'ont aucun lien de parenté. Les
gènes peuvent provenir de bactéries, de virus, d'autres plantes
ou même d'animaux. Si ces
gènes « étrangers » se
transfèrent à leur tour dans d'autres organismes, cela produit
une pollution ou une contamination du patrimoine génétique
naturel.
En effet, la transgène est radicalement
différente des procédés traditionnels de sélection
ou d'amélioration. En ce qu'elle consiste à introduire des
gènes d'un organisme vivant dans le patrimoine génétique
d'un autre organisme vivant, elle élimine les barrières entre les
espèces. Elle se traduit ainsi par la création de nouveaux
organismes, inconnus de la biosphère, sans passé évolutif
ni prédateurs naturels.
34. BASTIN (Juliette), principe de
précaution, Jeune Afrique l'Intelligent no 2196 du 09 au 15
février 2003 page 77
Une telle introduction dans l'écosystème des
gènes capables de survivre, migrer, muter et se déplacer vers des
organismes auxquels ils ne sont pas destinés représente un
redoutable saut dans l'inconnu, qui fait assurément courir de graves
risques de ``pollution génétique''35.
La contamination génétique peut se
produire dans 4 situations :
· si une plante sauvage apparentée poussant
à proximité se croise avec une plante
transgénique ;
· si une plante non-transgénique conventionnelle
ou biologique présente dans un champ voisin se croise avec une plante
transgénique ;
· si une plante transgénique survit dans
l'environnement naturel ou agricole et que se développe une population
de plantes transgéniques semi-sauvages (mauvaises herbes ou
plantes « retournées à l'état
sauvage ») .
· si des micro-organismes présents dans le sol ou
dans les intestins d'animaux ayant mangé des plantes
transgéniques acquièrent des gènes étrangers.
Contrairement à d'autres formes de pollution, la
contamination génétique est susceptible de se multiplier au fur
et à mesure que les plantes et les micro-organismes poussent et se
reproduisent. Par conséquent les dégâts écologiques
causés par les OGM ne peuvent être circonscrits à l'habitat
dans lequel ils sont originellement introduits.
En définitive, la pollution génétique est
, selon l'avocate internationale et ancien ministre de l'environnement
Français Corinne Lepage « la seule qui soit exponentielle,
c'est-à-dire qui s'auto-entretient et qui
s'augmente »36, toute pollution va
elle-même engendrer une succession de pollutions. On ne peut aller que
vers une explosion de la pollution génétique et jamais vers une
régression.
A- D'éventuels périls pour l'environnement
Sous l'angle agro environnemental, les biotechnologies posent
des problèmes de sécurité qui sont principalement de 2
ordres. Il y a ainsi d'une part, des questions qui relèvent de la
sécurité biologique, qui concernent les risques liés
à la dissémination des OGM.
Les plantes conventionnelles cultivées aujourd'hui ont
été élaborées par des générations
d'agriculteurs et de producteurs à partir d'espèces sauvages.
Dans les régions où elles ont
évolué, on trouve des espèces apparentées capables
de se croiser entre elles et de produire des hybrides.
Dans le cas des plantes transgéniques, ce croisement
peut impliquer le transfert de gènes étrangers (« flux
génétique ») vers les plantes apparentées. La
probabilité d'une hybridation dépend de la compatibilité
des deux espèces en présence et de la performance de l'hybride
(sa capacité à pousser et à se reproduire). Du fait de la
diffusion des OGM, par pollinisation et par les bactéries du sol,
progressivement, les cultures non OGM deviennent OGM. En second lieu, la
culture intensive des OGM , qui donne un avantage biologique aux
espèces OGM sur les autres, permet une diffusion, voire une destruction
des autres espèces. La Chine a proposé, le 22 Mai 2000, que les
OGM soient inclus sur la liste des espèces envahissantes lors de la
convention de la biodiversité.
35. Les industries agro-alimentaire sous la direction
deMichel PRIEUR et Soukéinatou BOURAOUI page 22
36. Corinne LEPAGE in La politique de précaution, PUF,
2001 page 38-39
La menace que le flux génétique depuis des
plantes transgéniques fait peser sur la biodiversité est
mondiale. Ainsi :
En Amérique du Sud, région d'origine du
maïs, les variétés sauvages de maïs sont en danger
En Asie, des espèces apparentées du riz
poussent à proximité des rizières
En Amérique du Nord, les espèces sauvages
apparentées de la courge sont courantes
En Europe, le colza et la betterave sucrière peuvent se
croiser avec des plantes sauvages apparentées.
Si une contamination se produisait, non seulement le
patrimoine génétique serait irrémédiablement
modifié (avec des conséquences encore inconnues), mais
l'acquisition des caractéristiques de la plante transgénique
pourrait, comme nous l'avons dit plus haut, transformer les plantes sauvages en
« super mauvaises herbes » que les agriculteurs auraient
beaucoup de mal à éradiquer. Les plantes résistantes aux
substances chimiques qui détruisent les mauvaises herbes (herbicides),
résistantes aux insectes et résistantes aux malades.
En plus de pouvoir contaminer les plantes sauvages et les
cultures non-transgéniques par croisement, les semences des plantes
transgéniques elles-mêmes peuvent poser des problèmes.
Certaines semences peuvent se répandre au moment des
moissons, rester dans le sol et germer les années suivantes. Quand les
plantes émergent dans les cultures d'autres espèces, elles
deviennent des mauvaises herbes non voulues qui doivent être
enlevées par l'agriculture.
Du colza transgénique spontané ayant acquis une
résistance à deux ou trois herbicides différents
(phénomène connu sous le nom d' «accumulation de
gènes») a été repéré au sein d'essais
expérimentaux, au Royaume-Uni, ou des cultures commerciales, au
Canada37.
C'est aujourd'hui un grand problème au Canada, des
distances de séparation de 175 mètres entre les cultures
transgéniques et non transgéniques se montrant inefficaces. Le
colza pouvant rester dormant dans le sol pendant 5 à 10 ans avant de
germer, tout problème avéré de durer très longtemps
et constituer un important problème de gestion pour les agriculteurs.
Les problèmes de contamination de cultures conventionnelles par des
cultures OGM sont la réalité. Il ne s'agit pas que d'une
contamination du produit mais aussi de l'apparition de mauvaises herbes
spontanées posant de nombreux problèmes.
Les semences peuvent aussi être
disséminées lors du transport des plantes du champ vers d'autres
parties de l'exploitation agricole, ou se planter dans le bas-côté
des routes quand elles sont transportées pour être stockées
ou transformées. Les populations sauvages de colza sont courantes et
peuvent survivre de nombreuses générations. Si ces plantes
transgéniques persistent dans l'environnement, elles ne causeront pas
seulement un problème de mauvaise herbe mais deviendront une source
perpétuelle de contamination génétique des cultures et des
plantes sauvages.
Par ailleurs, les organismes OGM vont entraîner bien
évidemment des réactions non désirées sur d'autres
espèces : transfert de gènes aux bactéries par des
abeilles, toxicité du pollen sur le papillon monarque, apparition d'une
pyrale résistante aux maïs censés la tuer, émergence
de mauvaises herbes résistantes aux herbicides totaux, voire même
repoussée de plantes non
désirées38. (cf. CL p 37-38 ou
« les OGM entrent en résistance » in Le Figaro,30
octobre 2000
37.Voir le site
www.monde-solidaire.org/article.php3 ?id_article=575
38. Voir « Les OGM entrent en
résistance » in Le Figaro, 30 Octobre 2000
En plus de ces cas de risques pour l'environnement, plusieurs
cas de figures peuvent être répertoriés . On peut
trouver des risques suivants : l'apparition d'insectes résistants
aux plantes transgéniques, l'éventuel impact sur les insectes
utiles comme l'abeille, l'impact sur la rhizosphère etc...
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