Protection Juridique du personel Humanitaire en Situation de conflit armépar Nicole TCHOMTCHOUA TAGNE Université Catholique d'Afrique Centrale - Master 2004 |
A- L'impartialité douteuse de certains jugesEn Afrique, la tendance générale est à la politisation de la justice. C'est en ce sens que Jean P. MASSARON a dit : « quels que soient les principes constitutionnels et idéologiques, il y'a en Afrique une tendance manifeste à politiser la justice. »133(*) Le principe de séparation des pouvoirs n'est pas la chose la mieux respectée sur le continent africain. Le judiciaire est subordonné à l'exécutif, ce qui entrave gravement l'application d'une bonne justice. Les issues des procès qui ont un lien avec le pouvoir central (ou lorsque ses intérêts sont directement mis en cause) sont souvent connues d'avance. Les juges usent de tous les moyens pour que l'image de l'Etat ne soit pas ternie. La justice en Afrique est un instrument au service des politiques en place134(*). C'est pour pallier à ce problème que, les avocats au Tribunal Pénal International pour le Rwanda ont fait valoir que les membres du Front Patriotique Rwandais actuellement au pouvoir au Rwanda, étant conformément aux dispositions du statut du Tribunal, des justiciables potentiels de ladite juridiction, ne devaient pas faire partie du TPIR de peur de porter atteinte à l'impartialité dont doit faire preuve cette juridiction. Dans ces conditions, il est difficile pour un personnel d'une organisation humanitaire porté devant un juge interne de jouir de l'administration d'une justice équitable. Surtout s'il s'agit de la juridiction de l'auteur de l'infraction et que les autorités veulent disculper.
B- Les classements sans suiteC'est un procédé judiciaire par lequel, le ministère public en vertu du principe de l'opportunité des poursuites décide d'abandonner la poursuite d'une affaire dont il est saisi. C'est l'oeuvre du procureur de la république. Comme l'a si bien relevé le Dr Nicole Claire NDOKO : « cette procédure constitue dans son essence une source d'injustice et d'abus. »135(*) Ce système est généralement visible dans des procès où la responsabilité d'un membre des forces armées est engagée pour avoir commis un crime ou un délit. Alors, c'est un moyen utilisé par les tribunaux pour disculper certains auteurs de crimes. Cela pose un réel problème lorsqu'on sait que dans certains pays, l'opportunité des poursuites devant le tribunal militaire est reconnue au seul ministère public. C'est le cas en Belgique où, la loi du 16 juin 1993 relative à la répression des infractions graves au droit international humanitaire est venue à juste titre permettre de déroger à cette règle. Elle permet dorénavant aux victimes de mettre en oeuvre l'action publique par une plainte en se constituant partie civile devant le tribunal militaire. Le classement sans suite certes rend service aux juridictions en ce qu'il permet de les désengorger, mais il n'en demeure pas moins que c'est une entrave à la revendication des droits des justiciables car elle étouffe la mise en oeuvre de leurs actions. * 133 J.P MASSARON, Le pouvoir et la justice en Afrique noir francophone et à Madagascar, Paris, Pédone, 1966 P.156. * 134 C.ANYANGWE, the magistracy and the bar in Cameroun, CEPER, Yaoundé, 1989. * 135 N.C. NDOKO, Procédure pénale, tome II, cours polycopié de 3eme année de licence en droit privé francophone, faculté de droit et des sciences économiques, Université de Yaoundé, non daté, p.33 |
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