Protection Juridique du personel Humanitaire en Situation de conflit armépar Nicole TCHOMTCHOUA TAGNE Université Catholique d'Afrique Centrale - Master 2004 |
INTRODUCTION GENERALEConçu et édifié pour limiter les souffrances en période de conflit armé, le droit international humanitaire revêt la forme d'une série d'obligations. C'est l'ensemble des règles qui, en temps de conflit armé, visent d'une part à protéger les personnes qui ne participent pas ou qui ne participent plus au conflit et d'autre part, Il limite les méthodes et moyens de faire la guerre1(*). Il permet certains actes militaires, pourvu qu'ils n'infligent pas de maux superflus aux civils. Les parties aux conflits ne respectant pas très souvent ces règles de droit international humanitaire, les dégâts sont presque toujours aussi énormes tant en vies humaines que sur le plan matériel. Dans ce cas, l'intervention du personnel humanitaire ne peut être que louable dans la mesure où celui-ci apporte aux populations civiles ainsi qu'aux soldats une assistance. Ce personnel dans l'exercice de cette mission est confronté à de nombreux problèmes qui peuvent aller des menaces verbales à l'élimination physique. L'actualité récente fait état d'un nombre assez important de personnels humanitaires tués au cours des conflits armés internationaux et non internationaux. Au vu de cette actualité et au regard de tous les instruments juridiques traitant de la protection dont doit jouir le personnel humanitaire, il paraît pertinent de mener une réflexion sur la problématique de la protection juridique du personnel humanitaire en situation de conflit armé non international . Notre étude portera sur la protection juridique du personnel humanitaire de manière générale. Il s'agira des organisations non gouvernementales à vocation humanitaire, des organismes humanitaires internationaux, de l'organisme humanitaire de l'union européenne encore appelé ECHO, ainsi que du bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA) qui réunit sous la direction de son coordonnateur les agences des Nations Unies (l'UNICEF, le HCR, le PAM, FAO, OMS). I- Contexte de l'étude L'après guerre froide va connaître un sérieux bouleversement au niveau mondial. Les conflits ne vont plus opposer des Etats entre eux, mais se déroulent désormais au sein d'un territoire. A partir des années 90, le continent africain va connaître un grand bouleversement politique et économique. Sur le plan politique, le vent de la démocratie va traverser la plupart des Etats africains, occasionnant des revendications de divers ordres à savoir : la liberté d'expression, le multipartisme, la conférence nationale souveraine etc. Le processus démocratique va être engagé sur le continent, mais freiné par des gouvernants aux ambitions égoïstes manifestées par la mise en oeuvre de diverses manoeuvres en vue de confisquer le pouvoir. Les biens publics sont gérés par une fraction de personnes au détriment des populations. L'Afrique va être minée de guerres civiles (Angola, somalie, soudan, Tchad, Congo, Namibie, RDC, Mozambique etc.) occasionnant des violations massives et successives des droits de l'homme et du droit international humanitaire. Le démarrage économique tarde à être effectif, l'industrialisation demeure limitée, l'économie reste rentière, le taux de chômage croissant avec une dette publique galopante. En plus de cela, la volonté manifeste de certaines puissances occidentales à contrôler les ressources minières contribue à la déstabilisation des régimes politiques. Le contexte social n'est guère mieux, une misère progressante, des maladies telles que le paludisme, le VIH-sida déciment les populations, des écoles sans instituteurs et sans infrastructures, des salaires modiques et souvent impayés (RCA). Les revendications sont faites à plusieurs niveaux, les étudiants revendiquent le paiement et l'amélioration de leurs bourses, de leurs conditions de vie et d'études. Les fonctionnaires réclament de meilleures conditions de travail. La population civile est laissée pour compte. Las de ne pouvoir se faire entendre, elle va opter pour la voix des soulèvements armés ou rébellion , au mépris des règles relatives au déroulement des conflits armés. Par ailleurs, on assiste à une montée des particularismes et des revendications identitaires. Ces comportements s'appuient sur la peur de l'autre pour déboucher sur le rejet de l'autre, sur l'exclusion et le tribalisme. Ce phénomène touche à des degrés différents presque tous les pays africains et débouche à des manifestations virulentes2(*). Sur un plan juridique, ces conflits ne sont pas sans conséquence dans la mesure où, ils font apparaître de nouveaux acteurs jusqu'ici pas très connus. Il s'agit des civils qui désormais ne subissent plus passivement les affres de la guerre mais y prennent part. Dans ce contexte, il devient difficile de respecter la réglementation relative à la gestion des conflits. On doit dès lors s'interroger sur la mise en oeuvre des règles du droit international humanitaire dans ces nouveaux types de conflits.
II- Délimitation de l'étude Nous délimiterons notre étude au continent africain, plus particulièrement à l'Afrique subsaharienne. Cette partie du continent est depuis quelques années le théâtre de nombreux conflits internes ayant occasionné de violation graves du droit international humanitaire. Nous nous attarderons sur les cas de conflit du Rwanda, de la République Démocratique du Congo, du Libéria, la Sierra Léone, la République Centrafricaine, la Cote d'Ivoire, le Darfour. III- Définition des concepts Il s'agit ici au regard des concepts suivant de voir en quels termes faut-il finalement comprendre le sujet. Le dictionnaire du droit international des conflits armés3(*) définit la protection comme un ensemble de mesures destinées à protéger certaines personnes. Il s'agit de mettre à l'abri d'un danger, d'un incident. Nous pouvons en déduire que, protéger c'est garantir la sécurité d'un individu vis a vis d'un autre individu, d'une chose. Ceci de part le mal que peut lui causer ledit individu ou ladite chose. La protection juridique concerne toutes les mesures concrètes qui permettent de faire bénéficier les personnes en danger des droits et des secours prévus pour elles par les conventions internationales L'expression personnel humanitaire désigne des personnes exclusivement affectées de manière temporaire ou permanente à des taches humanitaires. Dans la pratique, on les retrouve généralement exerçant sous l'égide d'une organisation non gouvernementale (ONG), d'une organisation internationale, ou alors comme fonctionnaires à l'Organisation des Nations Unies4(*). L'action humanitaire dans un contexte de conflit armé est mise en oeuvre par ce personnel dont le statut juridique varie ainsi que la protection qui leur est due Les ONG5(*) sont des associations de volontaires ou de bénévoles agissant généralement à but non lucratif. Elles exercent dans une large variété de domaines : protection de l'environnement, défense des droits de l'homme, aide humanitaire. Leur but est la défense et la protection de la société civile en général. Les organisations internationales sont créées par plusieurs états sur la base d'un traité ou de conventions internationales ou transnationales. Elles ont pour but de défendre ou alors d'organiser la mise en oeuvre de ce traité ou de ces conventions. Selon Patricia BUIRETTE, Les conflits armés internes sont : « des affrontements armés qui se déroulent dans les limites du territoire d'un seul Etat où les combats opposent le gouvernement et les insurgés armés »6(*) La protection juridique du personnel humanitaire repose en droit international sur le principe fondamental selon lequel il faut toujours établir une distinction entre les combattants et les non combattants ; principe clairement établi par les conventions de Genève de 1949. Les premiers sont définis par le protocole additionnel I comme étant « les membres des forces armées d'une partie à un conflit »7(*) . Les non combattants quant à eux constituent la catégorie dite des personnes protégées. Il s'agit des populations civiles, ainsi que des militaires blessés qui ont cessé de combattre.
IV- Intérêt de l'étude Nous avons porté notre choix sur le thème « protection juridique du personnel humanitaire en situation de conflit armé non international » pour plusieurs raisons. En effet, divers instruments juridiques internationaux sont prévus pour réglementer la pratique de la guerre. Cependant, face à l'émergence de nouveaux types de conflit mettant aux prises des acteurs aux ambitions et motivations diverses, on s'est demandé si les règles du droit international humanitaire peuvent encore humaniser la guerre. Par ailleurs, certaines dérives des pratiques d'assistance humanitaire, ont suscité en nous une réflexion quant à l'éthique humanitaire. Enfin, il a été constaté dans la pratique que certaines ONG humanitaires se créent à l'occasion de certains évènements bien précis et sitôt ces évènements passés, elles disparaissent. Dans ces conditions, on s'est interrogé sur le sort du personnel humanitaire employé par de telle ONG en cas de dommage corporel grave. Sur un plan personnel, étudier la protection juridique du personnel humanitaire est un avantage certain. En effet, ayant pour ambition de faire carrière dans l'assistance humanitaire il est important pour nous de voir quelles sont les garanties juridiques qui entourent une telle fonction. V- Revue de littérature La protection juridique du personnel humanitaire en zone de conflit armé interne est une préoccupation majeure sur le plan international. Les attaques délibérées contre le personnel participant à une mission de l'ONU ainsi que contre le personnel humanitaire compromettent gravement leurs activités dans les régions du monde. Il en va de même pour le nombre grandissant de personnels humanitaires tués ces dernières années dans les zones de conflit8(*). Cette protection a été traitée en droit international ainsi que par d'autres instruments juridiques de protection. C'est le cas des conventions de Genève, de la convention sur la sécurité du personnel de l'ONU et du personnel associé, adoptée par le conseil de sécurité de l'ONU le 09decembre1994 et entrée en vigueur le 30septembre1997. Pour EVERT Maréchal9(*) et son homologue canadien ANDRAS VASMOS GOLDMAN, la première responsabilité quant à la sécurité du personnel humanitaire de l'ONU et du personnel associé incombe à l'Etat accueillant une mission de l'ONU ou une puissance occupante10(*). Cependant l'on pense que la sécurité du personnel humanitaire ne saurait être à la charge des seuls Etats. Conformément aux conventions de Genève de 194911(*) les parties au conflit sont tenues de respecter scrupuleusement les règles et principes du droit international relatifs à la protection des civils en général et du personnel apportant assistance en particulier. Alors il revient aux Etats de respecter et de faire respecter les règles du droit international humanitaire. Tel est le sens de l'article premier des conventions de Genève et des protocoles additionnels. Mais, l'on se rend compte au regard de la pratique actuelle que, ce principe fondamental du droit international humanitaire qui demande que les différents belligérants fassent une distinction particulière entre civils et combattants est de plus en plus violé. Les tirs ne sont plus portés seulement sur des objectifs militaires. C'est ce que Cornnelio SOMMARUGA a appelé de « criminalisation »12(*) de la guerre. D'après lui, l'évolution de la nature des conflits armés dans les relations internationales a ébranlé la pratique du CICR ainsi que celles des autres organismes humanitaires. Les défis majeurs que devraient relever les humanitaires sont de connaître et comprendre l'enjeu de tel ou tel conflit. Mais la question que nous pouvons nous poser est celle de savoir si la maîtrise de l'enjeu du conflit peut résoudre le problème de la sécurité du personnel humanitaire. Dans la mesure où, la criminalisation dont parle SOMMARUGA laisserait plutôt entrevoir une méconnaissance des règles du droit humanitaire. Ces personnes qui se transforment en prédateurs des populations civiles et du personnel humanitaire ne sont pas à même de mesurer la gravité des actes qu'ils posent. Les conflits de nos jours étant devenus des conflits déstructurés, ne répondent plus toujours aux normes ordinaires et classiques des conflits armés tels qu'il a toujours été observés dans la pratique des guerres. C'est en ce sens que Jean-Daniel TAUXE, parle des : « guerriers ayants pris la place des soldats »13(*). Pour décrire le fait que, les chaînes de commandements attributs des armées traditionnelles sont remplacées par des structures décisionnelles beaucoup plus difficiles à identifier. Le résultat est que l'on se retrouve face à une certaine anarchie c'est la raison pou laquelle, le Conseil de Sécurité de l'ONU en juillet 1999 a décidé en RDC de mettre sur pied un mécanisme en vue de désarmer toutes les milices et les groupes armés car cet état de chose ne pouvait que rendre précaire la situation des humanitaires agissant sur un tel terrain. Dans la mesure où c'est chaque groupe armé qui fait désormais sa loi, au détriment des règles reconnues et consacrées par le droit international humanitaire. L'illustration parfaite est celle des types de conflits de plus en plus observés en Afrique tels que les guerres de libération nationale, les génocides, les conflits dits identitaires où, la population civile devient un objectif militaire, l'ennemi à abattre. Mary B. ANDERSON14(*), se fonde beaucoup plus sur le profil des forces en présences. Il apparaît que, les conflits armés de nos jours font intervenir un certain nombre d'acteurs mal identifiés tels que les milices, les jeunes gens recrutés dans le tas et n'ayant aucune notion de respect des droits de l'homme, les civils devenant eux mêmes acteurs au conflit15(*). La pertinence de ce propos tient du fait que, ce n'est qu'une suite logique du caractère dit déstructuré des « nouveaux » conflits. Ces jeunes gens qu'on retrouve au sein de ces factions armées sont généralement recrutés dans l'informel. Ce sont des « militaires » de circonstance, recrutés pour une situation ponctuelle. Le fait qu'ils n'aient jamais reçu des enseignements sur les règles devant régir un conflit armé, ne peut que rendre précaire la sécurité des civils en général et du personnel humanitaire en particulier. C'est en ce sens par exemple que le but de la résolution 155616(*) de l'ONU était de procéder au désarmement des milices et groupes armés au Soudan. Certes, l'article 3 commun aux quatre conventions de Genève de 1949 demande à chaque partie au conflit de respecter scrupuleusement les règles de droit international humanitaire. Mais il n'en demeure pas moins que le fait que ces groupes armés ne soient pas reconnus sur le plan international pose un réel problème. C'est le cas du Rwanda où Roméo DALLAIRE17(*) fait part de l'existence au sein des populations d'un pouvoir parallèle dû au fait que les milices s'étaient infiltrées au sein des populations civiles. Ce qui, non seulement semait une confusion totale mais aussi permettait à ces milices d'opérer en toute quiétude. Il est évident qu'une telle opération est de nature à compromettre gravement la sécurité des populations civiles ainsi que celle du personnel humanitaire exerçant sur le terrain car le droit international exige que, les porteurs d'armes ainsi que les forces régulières puissent s'identifier à travers des signes. Ralph ZACKLIN au cours du cinquième sommet de l'ONU sur la sécurité du personnel humanitaire affirmait que: « Les pays où le personnel humanitaire court souvent les plus grands risques sont ceux qui ne sont pas parties ni au statut de Rome, ni à la convention de 1994, ces parties n'ayant pas d'obligations juridiques vis à vis des instruments internationaux existants » 18(*). L'on dira que, le fait pour les pays de ratifier les textes internationaux ne constitue en aucun cas une garantie de sécurité pour le personnel humanitaire. Le personnel humanitaire est pris pour cible même dans les pays ayant ratifié les conventions de Genève. Nous en voulons pour preuve les cas du Darfour, de l'Irak, de l'Afghanistan et de la Côte d'Ivoire. Mais, il n'en demeure pas moins vrai qu'en matière de sécurité du personnel humanitaire, l'Etat détient un rôle primordial. Le fait cependant pour un Etat de ratifier ces textes marque une volonté certaine d'assurer leur mise en oeuvre. Pour ce qui est de la Résolution 150219(*) du conseil de sécurité en vertu de laquelle celui-ci se déclare résolu à prendre les mesures requises pour assurer la sécurité du personnel humanitaire ainsi que du personnel des Nations Unies et du personnel associé, elle souligne les efforts antérieurs déployés par ledit conseil pour attirer l'attention sur les engagements que doivent prendre les parties à un conflit relativement a la sécurité du personnel humanitaire. Il ressort de cette analyse que la question de la sécurité du personnel humanitaire constitue une réelle préoccupation à l'échelle internationale. C'est la raison pour laquelle toute attaque délibérée portée contre le personnel humanitaire est constitutive de crime de guerre20(*). Par ailleurs, la création de la Cour pénale internationale est une initiative louable en matière de sécurité du personnel humanitaire. Dans la mesure où, comme l'a si bien relevé Kofi ANNAN : « il est particulièrement troublant que si peu d'auteurs de crimes aient été traduits en justice pour les crimes commis contre le personnel de l'ONU. L'application rapide de la justice pourrait avoir un effet de dissuasion réel contre une telle impunité »21(*). Il serait cependant utile de souligner que, la seule mise sur pieds de cette Cour ne suffit pas. Les Etats devraient par la suite veiller à ce que toute menace proférée ou tout acte de violence commis à l'encontre du personnel humanitaire opérant sur leur territoire fasse l'objet d'une enquête approfondie. Après quoi, ces Etats devront prendre toutes les dispositions voulues, conformément au droit international et à la législation nationale, pour que les auteurs de tels actes soient poursuivis. Pour empêcher tout risque d'instauration d'impunité, il revient impérativement aux Etats de reprendre les dispositions des textes internationaux en matière de crime de guerre. Ainsi, ils pourront prévoir les mécanismes permettant de juger les personnes coupables ainsi que les peines et sanctions y afférentes. Edwige AVICE parle « d'une meilleure organisation ainsi que d'une forte mobilisation des Etats » 22(*) car aucune mesure de sécurité ne peut être efficace sans l'entière participation des Etats. Alors, la sécurité du personnel humanitaire est un travail de longue haleine. Elle doit être considérée aussi bien en temps de paix qu'en temps de guerre car comme l'a si bien fait remarquer Marie José DOMESTICI -MET traitant de la question de l'aide humanitaire : « Il ne s'agit donc pas d'une sorte d'immunité diplomatique mais de faire respecter leur travail et leur intégrité physique par tous les moyens utiles. » 23(*) C'est la raison pour laquelle, on assiste de plus en plus au cours des conflits armés à des situations d'assistance physique. C'est le cas de l'assistance militaro humanitaire, où les humanitaires font recours aux forces armées question de protéger leur intégrité physique. L'auteur précité parle du passage du couplet « assistance juridique- protection concrète » à celui de « protection physique- assistance ». C'est une conséquence logique du non-respect par les belligérants de leurs obligations d'accorder protection aux non combattants comme aux combattants mis hors de combat. Cet état de choses ne peut que dénaturer le fondement même de la mission des humanitaires qui ne devraient en principe pas travailler avec des armes. C'est dans le même sens que Koffi ANNAN a affirmé que, « lorsqu'on ajoute une assistance humanitaire à une opération militaire, on modifie la nature de la mission »24(*). Il faut dire que, l'aide humanitaire s'est avérée quelque fois être à l'origine de la fragilisation de la sécurité du personnel humanitaire. Pierre KRAHENBUEL affirme à ce propos que l'insécurité du personnel du CICR serait une conséquence de la politisation et de « l'instrumentalisation »25(*) de l'aide humanitaire. Alors que celle ci devrait être complémentaire à l'action politique et ne saurait en aucun cas s'y substituer. Contrairement à cet auteur, nous pensons plutôt que, l'aide humanitaire pourrait avoir un impact sur le conflit en présence mais pas vraiment sur la sécurité du personnel humanitaire. Ceci dans la mesure où, le problème de l'aide humanitaire a souvent été cette tendance à alimenter le conflit. Bien plus, on lui a souvent reproché son inadaptation aux réalités locales ainsi que le fait qu'elle constitue une sorte de fuite de responsabilité des Etats par rapport aux tâches qui leur incombent. Par ailleurs, l'on doit tout de même admettre le fait que, de manière indirecte, l'aide humanitaire soit source d'insécurité du personnel humanitaire. Il s'agit ici des situations où ceux ci cherchant à s'opposer à des pilleurs trouvent la mort suite à des tirs. Mais, Jacob KELLENBERGER par contre parle plutôt de la polarisation et de la radicalisation26(*) qui font en sorte que certains les assimilent au monde occidental qu'ils rejettent. C'est notamment le cas en IRAK où, tout porte à croire que le malheur des humanitaires serait lié au fait que ceux -ci sont assimilés aux américains par les populations locales. Il se pose donc à ce niveau un réel problème de sensibilisation et d'information quant à l'action humanitaire, Il serait indiqué pour le personnel humanitaire en général de procéder pendant leurs interventions à un sérieux travail d'écoute et de persuasion. Expliquer aux populations et aux forces en présence le bien fondé de leurs missions qui consiste à oeuvrer pour leur mieux être car comme l'a si bien souligné Jean Luc BLONDEL : « l'humanitaire ne concerne pas des actions particulières mais le souci de mettre le bien de l'homme et la préservation de sa dignité au coeur de toute action » 27(*). En somme, il convient de rappeler que la protection juridique du personnel humanitaire, est une protection fonctionnelle28(*) en ce sens que les différentes conventions de GENEVE s'appliquent exclusivement en temps de guerre. Il s'agit donc d'une protection qui ne couvre pas le personnel de façon permanente et absolue, mais seulement dès qu'il est engagé dans les opérations de secours. * 1 M.TORELLI, Le Droit international humanitaire, PUF, « que sais je ?», n° 2211, Paris, 1985. * 2 F. BUGNION, «Le droit international humanitaire à l'épreuve des conflits de notre temps », in RICR n° 835 septembre 1999, pp. 487-498. * 3 P.VERRI, Dictionnaire du droit international des conflits armés, CICR, Genève, 1988.147p. * 4 Il s'agit ici des organes humanitaires spécialisés de l'ONU, des ONG humanitaires locales, des organisations humanitaires internationales et de l'organisme humanitaire de l'union Européenne (ECHO). * 5 ONU, « Les organisations non gouvernementales et le département de l'information de l'ONU » in www.un.org (consulté le 21novembre 2005) * 6 P.BUIRETTE, le droit international humanitaire, édition la découverte, paris, 1996, p.65. * 7Art 43 al 2 protocole n0 I de 1977 aux quatre conventions de Genève de 1949. * 8 Site Internet www.cicr.org document préparatoire du CICR pour la 1ere réunion périodique sur le droit international humanitaire. (Consulté le 14decembre 2004 a 9h 20mns) * 9 Premier secrétaire de la mission permanente de la Belgique au nom de l'union européenne. Allocution prononcée le 09octobre 2001 lors de la 6eme commission de l'ONU * 10ONU, Assemblée Générale, Résolution 57/155, « Sécurité du personnel humanitaire et protection du personnel des Nations Unies » le 26 Août 2003 Cf. site Internet www.un.org . (Consulté le 19 décembre 2004) * 11 4eme convention de Genève du 12 août 1949 relative à la protection des populations civiles contre les effets de la guerre. * 12 C. SOMMARUGA « Réflexion sur l'humanitaire aujourd'hui et demain » in Revue internationale de la croix rouge n° 838, juin 2000, p. 305-327. * 13 J. D. TAUXE, « L'humanitaire face à de nouvelles parties au conflit mal identifiées », in Actes du colloque L'humanitaire en échec? CICR, Paris, 199, pp 95 -100. * 14 M. B. ANDERSON, « Aujourd'hui vous me sauvez la vie mais pour quel avenir ? » in Des choix difficiles (Les dilemmes moraux de l'humanitaire), Gallimard, Saint Armand, 1999, pp 81- 104. * 15 F.GRUNEWALD, Sécurité du personnel en mission humanitaire ; entre compréhension, dissuasion et acceptabilité. Quelques éléments de stratégie, groupe URD, août 1999. Site Internet ( www.urd.org consulté le 20/05/05 à 9H) * 16 ONU, Conseil de Sécurité, Résolution 1556, « L'instauration de l'embargo sur les armes à destination des 3 Etats du Darfour », adoptée le 30juillet 2005. ( www.un.org consulté le 19 décembre 2004) * 17 R. DALLAIRE, « La fin de l'innocence » in les choix difficiles op. Cit. , p.141. * 18 ONU, Assemblée Générale, Résolution 52/167, « La sûreté et la sécurité du personnel humanitaire » adoptée le 16 Décembre 1997 ( www.un.org consulté le 19 décembre 2004) * 19ONU, Conseil de Sécurité, Résolution 1502, « La protection du personnel de l'ONU dans les zones de conflits » adoptée le 26 août 2003 ( www.un.org consulté le 19 décembre 2004) * 20 Résolution 1502 op. cit. Paragraphe 5. * 21Koffi ANNAN, Rapport du millénaire à l'Assemblée générale de l'ONU, 2000. * 22 Edwige AVICE, « Les relations entre le monde politique et le monde humanitaire », in L'humanitaire en échec? Actes du colloque organisé par le CICR dans le cadre du cinquantenaire des conventions de Genève de 1949, avril 1999, p.55. * 23 M. j. DOMESTICI -MET, Aide humanitaire international : Un consensus conflictuel ? Centre d'étude et de recherche internationale et communautaire université d'AIX-Marseille III p.191. * 24 /K. ANNAN, « Maintien de la paix, intervention militaire et souveraineté nationale dans les conflits armés internes », in Les choix difficiles, Gallimard, Saint Armand, 1999, pp. 105-124. * 25P. KRAHENBUEL, « Une stratégie du CICR face aux défis contemporains en matière de sécurité : un avenir pour l'action humanitaire neutre et indépendante » in RICR n° 855, septembre 2004, pp 505-514. * 26 J. KELLENBERGER, « Et la sécurité ? », in RICR n0 1, janvier 2004, pp.7-9 * 27 J.L. BLONDEL, « l'humanitaire appartient-il a tout le monde ? », in RICR n° 835, juin 2000 pp.339-350. * 28 J.L. BLONDEL op. Cit. , p. 337. |
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