Subjectivité et intersubjectivité dans la conversion indiviuelle masculine à l'islam en France au XXI siècle( Télécharger le fichier original )par Marie Bastin Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, Paris - 2002 |
Partie IIILa conversion à l'islamDe l'islam en OccidentComme « les déterminants qui déclenchent la conversion diffèrent d'une époque à l'autre, d'un pays à l'autre et même d'un individu à l'autre »89(*), connaître ce que furent des conversions à l'islam, la situation de l'islam en Occident et les thématiques individuelles nous permettra de dégager les dimensions qui ont lieu de se développer dans la société postmoderne et de faire les distinctions les différents angles d'élaborations des « conversions » contemporaines. L'islam n'a jamais été une entité structurée et cohérente, comme toutes les civilisations traditionnelles, il fut multiple et divers. Phénomène complexe, l'islam a d'une part, entretenu des relations avec l'entité Occident, de croisements, de rencontres et de fécondations mutuelles actives dans le théâtre commun de la Méditerranée, au point d'avoir « été à l'intérieur de l'Europe, il est interne à l'Occident. »90(*) D'autre part, « l'islam est pluriel, les formes qu'il a pu prendre historiquement sont variées, les réalités géo-culturelles qu'il a embrassées sont extrêmement diverses » ce qui permet de « considérer que l'islam des origines contient de nombreux principes parfaitement compatibles avec l'éthique laïque. »91(*) Qu'est ce qui caractérise l'islam en Occident aujourd'hui ? Sa présence en Europe, en France, en ce début de XXIème siècle, n'est pas le produit d'une conquête, mais le fruit de déplacements historiques, politiques et sociologiques de populations. Il se veut d'abord et d'emblée « désincarné » culturellement ou socialement. Effectivement, il refuse d'être une religion « ethnique » et l'expression d'une culture d'importation. Enfin, sa situation minoritaire en Occident, qui n'est pas inédite, a l'originalité de faire vivre à l'univers musulman traditionnel ainsi implanté, les affres et les merveilles de la mondialisation, autant que tous les autres univers religieux en présence. S'il est vrai que l'on identifie des phénomènes de réislamisation au sein des populations traditionnellement héritières de l'univers spirituel islamique, ils accompagnent plus qu'ils ne s'opposent aux processus d'acculturation qui traversent les sociétés occidentales postmodernes. Cette réislamisation, en tout cas dénommée comme telle, est en fait l'expression de « la conscience que l'identité musulmane, jusqu'ici simplement considérée comme allant de soi, parce que faisant partie d'un ensemble culturel hérité, ne peut survivre que si elle est reformulée et explicitée en dehors de tout contexte culturel spécifique, qu'il soit européen ou occidental. »92(*) Cette réislamisation pour les uns et cette « islamisation » pour les autres, les quelques rares convertis, « est liée à la volonté de définir un islam universel [...] dont la fragilité et l'historicité deviennent soudain évidentes. » * 89 ibid, p. 26 * 90 A. Meddeb, La maladie de l'islam, Seuil, Paris, 2002, p. 196 * 91 A. Lamchichi, Islam, islamisme et modernité, l'Harmattan, Paris 1994, p. 80 * 92 Esprit, Aout-septembre 2002, article « L'islam est passé à l'ouest », Olivier Roy, p. 115 |
|