2.4. Les associations ethniques comme services de
renseignement
Les associations ethniques font également office des
services secrets non seulement des instances académiques mais aussi des
organes étatiques et des organisations politiques. Leurs membres se
chargent de glaner les renseignements, talonnent les suspects, ou dispatchent
des tracts, font circuler les rumeurs, etc. C'est par ces associations que
passe la politisation de l'université que décrie toute la
communauté universitaire. Kawele, mutuelle informelle des
étudiants ngbandi, tribu du feu président Mobutu, à
laquelle se joignaient d'autres étudiants de l'Equateur, s'est
superbement illustrée en cette matière. Elle est passait pour un
service d'intimidation et de dissuasion. Au cours d'une perquisition
menée par les éléments de l'AFDL au home 30 après
la chute du régime Mobutu, quelques effets militaires ont
été retrouvés dans les chambres des étudiants
membres de cette mutuelle.
Les renseignements qu'elles glanent permettent aux
destinataires d'anticiper sur les actions à mener dans le monde
étudiant. Ce service d'intelligence exercé par les associations
ethniques explique en partie l'étiolement du mouvement estudiantin
à l'Université de Kinshasa. C'est par elles que sont
brisées et étouffées dans l'oeuf les contestations
estudiantines.
La fonctionnalité latente des associations ethniques
atteste la crise multiforme de l'institution universitaire et de la
société congolaise dont elle émerge. Reine longtemps
couronnée du diadème de
l' « excellence » et hissée au sommet de la
colline inspirée, elle a été destituée par son
propre géniteur (mari) (l'Etat congolais) et sa propre
progéniture. Et faute de mourir du dénuement dans lequel elle est
désormais condamnée, elle se prostitue pour assurer sa survie. Si
ses bâtards ne s'aperçoivent pas de sa condition marginale, le
verdict populaire est néanmoins sans complaisance : la reine est
nue, la colline inspirée s'est expirée, raillent les kinois.
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