Section 4 Détermination de la loi applicable au
contrat cyberspatial
Selon les principes du droit international privé
béninois, la loi applicable
à un contrat est déterminée par
référence aux règles « conflit de loi ». A
défaut
de conventions internationales, la jurisprudence a fixé
les règles élémentaires
en la matière.
Les parties peuvent déterminer dans leur contrat de
façon claire la loi qu'elles entendent voir appliquer à leur
contrat. Dans ce cas, cette loi sera appliquée par les
juridictions compétentes ou par les juridictions désignées
par
les parties. C'est le principe de l'autonomie de la
volonté126.
125 SOSSA (D.), Cours de droit du commerce international,
op. cit. p. 27.
126 Art. 3&1 de la convention de Rome du 19
juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles. Pour plus de
détail sur l'autonomie de la volonté des parties dans le
contrat international voir SOSSA (D.C.), cours de droit du commerce
international op. cit., p. 26.
A défaut d'indication sur ce point - ce qui est
souvent le cas dans le cyberespace -, il sera fait application de la loi avec
laquelle le contrat en cause présente les liens les plus
étroits127.
Les critères de rattachement d'un contrat à une loi
sont notamment la nationalité des parties, le lieu de conclusion ou
d'exécution du contrat128.
Le plus souvent, dans le cyberespace les nationalités
seront différentes et ne pourront donc pas fournir un
critère utile. Seuls les deux critères de rattachement que
sont le lieu d'exécution et de conclusion du contrat feront donc
l'objet d'un examen.
Paragraphe 1 Détermination du lieu effectif
d'exécution du contrat cyberspatial.
A. LES PROBLEMES SOULEVES PAR LE CYBERESPACE.
L'exécution du contrat en dehors des réseaux ne
pose pas de véritable problème. En effet, bien qu'il ait
été conclu en ligne, ce contrat renvoie aux règles
ordinaires de localisation du lieu d'exécution. Ainsi, en cas de vente
en ligne d'un bien matériel, le lieu de l'exécution sera
généralement celui où le bien commandé devra
être livré129.
Il en va tout autrement de l'exécution du contrat en
ligne qui pose un vrai problème de détermination du lieu de
l'exécution. En effet, dans toutes les hypothèses de mise
à disposition d'informations ou de biens informationnels, tels que des
logiciels, il convient de déterminer si le vendeur livre l'information
sur la machine de l'acquéreur ou, si ce dernier "se déplace" pour
récupérer le
bien sur la machine de son cocontractant130.
127 Art. 4 &1 de la convention de Rome du 19 juin 1980
sur la loi applicable aux obligations contractuelles : a défaut
de
choix par les parties d'une loi ayant vocation à
régir leurs relations contractuelles, la détermination de la loi
applicable
doit résulter d'une localisation purement objective
effectuée sur la base des liens les plus étroits qu'entretient le
contrat
avec tel ou tel Etat. Voir à cet effet MAYER (P.),
Droit international privé, 6è éd. Montchéstien,
1998, n° 721.
128 Art. 3 al 3 C. Civ. Voir aussi MAYER (P.), Droit
international privé, op. cit. n° 726 ; LOUSSOUARN (Y.), BOUREL,
(P.), Droit international privé, Précis Dalloz, 7ème
éd. 2001, p.459.
129 COUTELLIER (S.), DURINDEL (L.), La loi applicable
aux contrats conclus sur Internet, mémoire de DESS droit de
l'informatique et de la communication, Université d'Orléans
2000-2001.
130 La question du lieu d'exécution a
été largement développé par GUILLEMARD (S.), Le
droit international privé face au contrat de vente cyberspatial, op.
cit.
Ainsi, si on prend l'exemple du téléchargement d'un
logiciel depuis un site Internet, le lieu d'exécution de la prestation
pourra être celui où se trouve
le serveur du site marchand sur lequel la transaction
a été conclue, le lieu d'hébergement du serveur depuis
lequel le logiciel est téléchargé ou encore, le lieu
où se trouve l'ordinateur à destination duquel le logiciel est
téléchargé.
B. LES SOLUTIONS POSSIBLES.
En l'absence de textes réglant le problème
de la localisation d'un contrat exécuté en ligne, une
solution peut être trouvée au travers d'un raisonnement par
analogie avec la vente de marchandises, pour laquelle le lieu
d'exécution est celui du lieu de livraison de la chose131.
Ce raisonnement amène à hésiter
entre deux solutions. Ainsi, dans l'exemple du
téléchargement d'un logiciel, il faudra distinguer selon
que le logiciel s'installe directement ou, selon que le fichier
téléchargé devra être exécuté pour
s'installer. Dans le premier cas, le lieu où se trouve l'ordinateur sur
lequel le logiciel a été installé sera retenu comme lieu
effectif d'exécution. Mais, dans le second cas, il faudra tenir
compte du lieu de livraison, ce qui implique, compte tenu du format
numérique du logiciel, de retenir le lieu où est
hébergé l'ordinateur qui va réceptionner le produit. Il
s'agira alors du lieu où
est situé l'ordinateur qui permet à
l'acquéreur d'accéder au réseau. A savoir soit le lieu
où se trouve son ordinateur de réception, soit, le lieu où
se trouve son fournisseur d'accès si l'acquéreur n'est pas
directement relié au réseau Internet.
Le raisonnement par analogie ne permet pas de dégager
une solution pleinement satisfaisante, notamment eu égard au
développement des techniques de connexion au réseau Internet
par le biais de la téléphonie mobile. Il est en effet
très difficile de déterminer la localisation effective
du
téléphone au moment de la réception du
logiciel132.
131 La doctrine retient notamment que le lieu
d'exécution du contrat constitue « le centre de gravité et
la fonction socio
économique du contrat » : LOUSSOUARN (Y.),
BOUREL, (P.), Droit international privé, op. cit. p. 459.
132 La question de la localisation dans le
cyberespace a été largement développée par
GUILLEMARD (S.), Le droit international privé face au contrat de
vente cyberspatial, op. cit.
Une meilleure solution peut être trouvée en se
référant à la loi type sur
le commerce électronique, adoptée le 16
décembre 1996 par la CNUDCI. Ce texte préconise en effet de
retenir que les données échangées sont
réputées avoir été expédiées du lieu
où l'expéditeur a son établissement133, et
avoir été reçues au lieu où le destinataire a son
établissement. Le lieu d'exécution d'un contrat
réalisé en ligne sera alors soit celui du principal
établissement du vendeur, soit celui de la résidence de
l'acquéreur. Mais la détermination du lieu
d'établissement se heurte à l'existence des entreprises
virtuelles qui ne peuvent être localisées que par rapport
à leur site internet. Or, le site Web s'analyse en une
combinaison de logiciels et de données électroniques. Il
constitue ainsi une entité dématérialisée non
localisable qui ne peut représenter par elle-même un
établissement stable 134 . La preuve de ce
caractère éphémère et non localisable réside
bien dans le fait qu'un site Web peut être hébergé chez un
prestataire tiers sans considération de frontière et que le
responsable du site peut changer de prestataire à tout
moment135.
Les parties à un contrat cyberspatial devant être
exécuté sur le réseau ont donc tout intérêt
à prévoir dans leur convention qu'elle sera réputée
être exécutée en un lieu déterminé.
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