4. La
problématique
On prend normalement la décision d'investissement selon
des critères financiers telles que la VAN et le TRI qui sont des
critères objectifs quantitatifs. Mais dans certains cas, on trouve que
la décision d'investissement ne est pas prise même si les
critères financières sont compatibles. Ce qui nous conduit
à chercher d'autres critères subjectifs qualitatifs
influençant la décision d'investissement au sein de
l'entreprise.
De ce fait, est- ce que les facteurs culturels
influencent la décision d'investissement ?
Si oui, comment et jusqu'à quel point cette
décision sera influencée par ces facteurs ?et quelle est
l'importance relative de chaque variable culturelle dans la décision
d'investissement ?
Est - ce que les critères financiers de la
décision d'investissement sont les mêmes dans toutes les cultures?
G.Charreaux(2001) montre que l'asymétrie d'information
est considérée habituellement comme la source principale de
conflit d'intérêt entre les parties prenantes. Cette
asymétrie d'information est, selon l'auteur, susceptible de créer
des distorsions en matière d'investissement.
La question qui se pose, est - ce que la
différence culturelle provoque une asymétrie d'information entre
les partenaires ? cette différence peut-elle expliquer
le mauvais choix d' investissement ?
Dans ce cadre se pose aussi la question de
l'homogénéité culturelle de groupe qui entoure le
dirigeant et qui participe à la prise de décision. Est-
ce que cette homogénéité culturelle contribue à
expliquer le mauvais choix d'investissement du dirigeant ?
Enfin, La culture nationale du pays
d'origine influence le choix du mode d'entrée sur les marchés
étrangers(U. Mayrhofer, 2002). L'analyse effectuée par l'auteur
confirme la nécessité d'intégrer la variable culturelle
dans les modèles explicatifs du mode d'entrée. Dans ce
cadre, est- ce que la création d'une entreprise en Joint
Venture International est considérée comme mode d'entrée
dans un pays culturellement diffèrent ?
5. L'objectif poursuivi
Nous analyserons, dans ce travail, la décision
d'investissement dans sa dimension culturelle et nous montrerons que le
dirigeant peut, sous l'influence des facteurs culturels, choisir le mauvais
choix d'investissement, tout en refusant le bon.
Après avoir montré la place des facteurs
culturels dans les théories économiques et
organisationnelles (partie (1)), nous aurons essentiellement
deux objectifs à poursuivre (partie (2)):
1-) Comment la culture est- elle
considérée comme un filtre de choix
d'investissement ?
2-) Quelle est l'influence de la
culture nationale des entreprises sur le choix du mode d'entrée sur les
marchés étrangers ?
Dans le premier objectif, nous analyserons la
culture de l'entreprise en tant que facteur de stabilité et de
performance de celle- ci, mais aussi en tant qu'un facteur de limitation de la
rationalité de la décision, en particulier la décision
d'investissement. Dans ce cadre, nous montrerons que le dirigeant est
influencé par son contexte social, ses expériences, son histoire,
sa formation initiale ....etc. Ce qui nous conduira à dire que sa
décision sera prise selon des représentations subjectives de la
réalité dans lesquelles interviennent les facteurs culturels .
Dans le deuxième objectif, nous
montrons que la culture est un facteur d'inertie de l'évolution des
systèmes des gouvernements des entreprises et que la variation de ces
systèmes a des racines socioculturelles. Ce qui nous conduira à
préciser les éléments de la différenciation
culturelle des pays et leur impact sur le choix du mode d'entrée sur les
marchés étrangers.
Partie(1) : L'évolution de la culture
à travers les théories économiques et
organisationnelles
Dans la théorie économique classique,
l'entreprise était une boîte noire ou une fonction de production
à laquelle s'impose de toute façon le marché. L'individu
Homo oeconomicus est considéré comme unité de
décision autonome. Les individus agissent indépendamment de toute
contrainte sociale ou culturelle. Le critère de la décision
était le profit. La firme est ainsi conçue comme un acteur
individuel en ce qu'elle est considérée comme une unité de
décision rationnelle dont l'objectif est de maximiser le profit sous des
contraintes technologiques.
Dans les théories organisationnelles qui ont remis en
cause les hypothèses de la théorie économique classique,
la dimension humaine et culturelle a été prise en
considération dans les décisions effectuées au sein de
l'entreprise. Dans la théorie des relations humaines, on trouve, selon
Mayo, que le profit n'est pas la motivation ultime et unique des acteurs des
organisations. L'objectif de maximisation est remis en cause et celui de
satisfaction lui est substitué dans les approches béhavioriste de
Cyert et March. Lawrence et Lorsch conçoivent, dans leur approche
contingente, l'organisation comme un système ouvert composé de
trois sous systèmes scientifique, commercial et techno-
économique qui ont chacun des caractéristiques structurelles
telles que la nature de leurs objectifs, leur orientation temporelle, leur mode
relationnel et leur degré de formalisation. Enfin, dans la
systémique, Fons Trompenaars a considéré l'organisation
comme système socioculturel dont les membres sont dotés
d'objectifs propres.
Mais, dans l'économie institutionnelle, la notion de la
culture semble plus claire. Or, dans l'ancien institutionnalisme, la culture
était comme une synthèse d'institutions dont chacune couvre son
propre domaine et sa propre fonction (Walton H. Haamilton,1932). Mais, la
perspective néo- institutionnelle va plus loin dans l'analyse de son
impact sur les coûts de transaction, d'agence et de la sélection
des structures de gouvernance.
Ainsi, pour montrer l'évolution de la culture à
travers les théories économiques et organisationnelles, nous
analyserons, dans un premier chapitre, la place du facteur culturel dans ces
théories et nous montrerons, dans un deuxième chapitre, le
rôle de ce facteur selon les approches institutionnelles.
Chapitre I. La place du facteur culturel dans les
théories économiques et organisationnelles
Après avoir constaté, en premier lieu, l'absence
de la prise en compte de la variable culturelle ou institutionnelle dans les
théories classiques, nous passerons, en deuxième lieu, rapidement
en revue l'évolution des théories de l'organisation à
travers les principales révisions qu'elles opèrent sur les
hypothèses qui fondent l'économie standard. Nous tenterons alors
d'éclairer ces révisions avec la perspective culturelle et les
éléments de contingence supplémentaire qu'elle propose au
modèle standard.
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