5.1. Défis liés à l'intégration
économique des immigrants
L'intégration économique des personnes
immigrantes au Québec représente une dimension essentielle du
processus général d'intégration (Piché & al.,
2002 ; Malambwe, 2017). Les immigrants, récents et non occidentaux,
présentent des taux d'emploi et des revenus plus faibles que les
personnes nées au Québec et les immigrants occidentaux (blancs)
(Posca, 2016; Levert & Fakhoury, 2021 ; Piché & al., 2022). Des
facteurs, tels que les obstacles liés à la reconnaissance des
diplômes étrangers et de l'expérience acquise hors Canada,
les pratiques discriminatoires et les préjugés raciaux,
représentent certains des défis que posent l'intégration
économique des immigrants (Posca, 2016 ; Malambwe, 2017). Plusieurs de
ces facteurs ont été mentionnés par les participants aux
entretiens. Les participants aux entretiens ont également
mentionné les défis liés à l'accompagnement et au
soutien en recherche d'emploi et à l'insertion socioprofessionnelle et
aux barrières linguistiques présentes chez certains immigrants,
en
54
particulier les réfugiés, les demandeurs d'asile
et les conjoints des travailleurs et étudiants étrangers. Les
données de la littérature ainsi que les résultats
d'entretiens tendent à soutenir que ces facteurs contribuent non
seulement à une plus faible employabilité des personnes
immigrantes non européennes, mais aussi à des taux plus
élevés de surqualification professionnelle.
5.1.1. Reconnaissance des diplômes
étrangers et de l'expérience professionnelle acquise hors
Canada
Certains participants interviewés ont rapporté
que cet obstacle représente une contrainte non négligeable dans
l'accompagnement à l'insertion économique des immigrants non
européens.
Mais il y a certains défis que ces intervenants qui
accompagnent et soutiennent les immigrants qui viennent d'arriver dans la
recherche d'emploi vont être confrontés comme par exemple la
non-reconnaissance des qualifications de ces immigrants, il y a aussi leur
expérience de travail hors Québec qui n'est souvent pas reconnue
par les employeurs, ce qui va être un défi de taille pour ces
intervenants, mais aussi pour les immigrants... Oui, certainement, ça
diffère en fonction qu'on est de culture occidentale ou non, les gens
qui viennent, je dirai, d'Afrique, d'Asie ou des Caraïbes vont vivre plus
défis que ceux qui viennent par exemple de la France, de la Belgique...
Puisque déjà, il n'y aura pas vraiment de choc culturel, au
niveau du climat aussi c'est presque pareil, la reconnaissance des
diplômes sera plus facile, disons que les diplômes burkinabé
et français n'ont pas la même valeur auprès des employeurs
québécois. Bref, oui, la plupart des défis que j'ai
décrits précédemment seront plus présents chez les
immigrants des pays non occidentaux que ceux qui viennent des
sociétés occidentales (Entrevue 6, 17 juillet 2023).
Les efforts déployés par divers intervenants des
services d'accompagnement visant l'insertion socio-professionnelle de ces
immigrants s'avèrent généralement peu fructueux et peu
efficaces. D'autres participants au projet ont déclaré que ces
contraintes représentaient l'une des principales raisons pour lesquelles
de nombreux immigrants récents acceptent des emplois précaires,
peu rémunérés ou encore ne correspondant pas à leur
niveau de scolarité : « ...à cause de tout ça,
plusieurs personnes vont se plaindre du fait qu'ils vont être
obligés de postuler et d'accepter des jobs moins bien
rémunérés à cause de la pression de la vie au
Québec, juste pour payer les factures et parfois envoyer des sous
à la famille restée au pays (Entrevue 6, 17 juillet 2023)
». En effet, ces emplois
55
peu rémunérés et la surqualification
contribuent en ce sens à accroître les taux de faible revenu chez
les populations migrantes, ce qui a un impact sur la qualité de leur
alimentation et aussi sur leur qualité de vie de façon
générale.
Surtout des familles à faible revenu. Faut
comprendre que les gens, même ceux qui ont des diplômes, les
diplômes ne sont pas toujours reconnus ici, donc ils doivent faire des
emplois moins rémunérés pour arriver à gagner des
sous, le coût des loyers a explosé dans les dernières
années puis donc ça laisse très peu de budget pour
l'alimentation, alors c'est certain que c'est quand même un défi
de ce côté-là aussi... mettons le manque de ressources
financières. Ben des fois, un 2e parent va chercher à travailler
alors qu'auparavant, c'était seulement un des 2 qui travaillait, donc
des fois ils vont essayer d'aller chercher un 2e salaire. Des fois le
père va cumuler plusieurs emplois ou même la mère, donc les
parents peuvent cumuler plusieurs emplois pour avoir des sous ils vont des fois
aussi aller dans les ressources communautaires chercher de l'aide des fois au
niveau financier des fois au niveau matériel, vêtements pour les
enfants, articles scolaires, nourriture et cetera, et cetera... Donc ouais,
veut veut pas c'est cher. c'est cher des légumes, c'est cher des fruits.
Puis d'en consommer les quantités qu'on devrait, Ben ça
coûte des sous fait que pour les familles à faible revenu c'est
pas évident (Entrevue 2, 26 juin 2023).
La surqualification qui touche, majoritairement les personnes
immigrantes originaires d'Afrique, des Caraïbes et d'Asie du Sud, n'a pas
uniquement des impacts sur l'intégration économique. Elle a
également de nombreux effets délétères sur la
santé mentale, le bien-être psychologique et l'estime de soi de
nombreux immigrants.
Ces emplois ne correspondent souvent pas à leur
niveau d'étude, ce qui va leur donner l'impression d'être
dévalorisés et de ne pas être considérés
à leur juste valeur. Bah ouais, c'est une source de stress et de
dépression pour plusieurs immigrants. Et on le remarque souvent chez les
immigrants d'Afrique, des Caraïbes et d'Asie du Sud. C'est ça on ne
l'observe pas beaucoup chez les immigrants d'Europe. Comme ça, on verra
beaucoup de médecins, d'ingénieurs et de professeurs
d'université occuper des postes de caissier, travailler dans les centres
d'appel, dans les entrepôts manufacturiers ou encore faire les taximen
(Entrevue 6, 17 juillet 2023).
|