4.2.4. Transition nutritionnelle et hypertension
artérielle
L'hypertension artérielle représente le
principal facteur de risque cardiovasculaire modifiable et le principal facteur
de risque de décès à l'échelle mondiale (Leung
& al., 2019). Selon des données récentes, l'hypertension
artérielle toucherait près de 25% des canadiens et sa
prévalence serait légèrement plus élevée
chez les hommes que chez les femmes (24,5% vs 21,5%) (Leung & al., 2019).
Les hommes ont en outre tendance à présenter davantage des
facteurs de risque associés à l'hypertension que les femmes. Par
ailleurs, celles-ci rapportent être physiquement moins actives que les
hommes (Leung & al., 2019). Au sein des communautés migrantes, les
populations migrantes non européennes, particulièrement les
immigrants d'origine africaine et chinoise, semblent présenter un risque
accru d'hypertension artérielle comparativement aux populations
migrantes blanches (occidentales) et aux personnes nées au Canada
(Patterson & Veenstra, 2016; Zou, 2017; Modesti, 2004). Les facteurs de
risque modifiables associés
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à l'hypertension artérielle sont entre autres la
sédentarité, l'obésité et une alimentation riche en
sel et pauvre en fruits et légumes (Leung & al., 2019).
Comme nous l'avons mentionné antérieurement, les
environnements alimentaires canadiens exposent les immigrants récents
à une variété d'aliments et de boissons
ultra-transformés et favorisent un accès accru aux
établissements de restauration rapide (Lane & vatanparast, 2023). De
plus, les contraintes financières et de transport auxquelles font face
les populations migrantes récentes entraînent une réduction
de la consommation d'aliments sains dont les fruits et légumes (Girard
& Sercia, 2014; Sercia & al., 2018; Lane & Vatanparast, 2023). Or,
cette transition nutritionnelle peut contribuer à un risque accru de
développer une hypertension artérielle. En effet, certaines
données suggèrent qu'un régime alimentaire riche en
sodium, en aliments ultra-transformés et pauvre en fruits et
légumes est significativement associé au développement de
l'hypertension artérielle (Ozemek & al., 2018). En revanche,
d'autres données soutiennent qu'un régime alimentaire primitif ou
traditionnel généralement riche en potassium, magnésium et
calcium et pauvre en sodium peut non seulement contribuer à
réduire le risque d'hypertension artérielle, mais aussi favoriser
un meilleur contrôle de la tension artérielle (Houston &
Harper, 2008). Le sodium présent en grande quantité dans le
régime alimentaire moderne (occidental) peut contribuer à
l'augmentation de la tension artérielle via deux voies physiologiques :
soit au niveau du microbiote intestinal par la régulation de la
synthèse de la corticostérone dérivée de l'intestin
(Yan & al., 2020), soit par le biais de l'interaction des mécanismes
neurohumoraux et rénaux (Hall & al., 2015). En ce qui concerne
l'interaction des mécanismes neurohumoraux et rénaux, une
consommation accrue de sodium peut d'une part conduire au déclenchement
de l'obésité et à la hausse de la pression
artérielle par l'augmentation de la réabsorption tubulaire
rénale de sodium entraînant ainsi une altération de la
natriurèse et de diverses autres réactions hormonales et
enzymatiques (Hall & al., 2015). D'autre part, la prise de poids
causée par la consommation accrue de sodium pourrait entraîner une
compression des reins par la matière grasse présente dans et
autour de ceux-ci, ce qui aurait pour effet d'activer le système
rénine-angiotensine-aldostérone, d'augmenter l'activité du
système nerveux sympathique et de conduire à une hypertension
artérielle (Hall & al., 2015). La consommation accrue des aliments
gras et sucrés peut également contribuer au développement
du surpoids ou de l'obésité (Martí Del Moral & al.,
2021; Nardocci & al.,
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2019), ce qui pourrait favoriser l'activation des voies
physiopathologiques susmentionnées et liées à
l'hypertension artérielle.
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