7- CADRAGE THÉORIQUE
En science sociale tout comme en science de gestion, le
chercheur ne choisit pas une théorie sur la base d'un simple hasard. Il
est influencé par les courants de pensées dominants dans son
domaine de recherche. Autrement dit, pour être pertinentes, les approches
choisies doivent faire référence à ce qu'Avenier et
Gavard-Perret (2008) appellent « des visions du monde partagée
par une communauté scientifique ». En d'autres termes, il
s'agit pour le chercheur d'identifier le paradigme dans lequel se
réfèrent les choix théoriques et méthodologiques
qu'il souhaite mobiliser pour expliquer son objet d'étude. Cette section
présente le cadre épistémologique et théorique de
notre recherche.
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7-1- Cadre épistémologique
Dans le cadre de cette recherche, nous avons fait recours au
paradigme constructiviste qui est de plus en plus mobilisé dans les
recherches en entrepreneuriat. Sur la base d'une analyse qualitative, il
s'agissait pour nous de collecter auprès de notre population cible les
perceptions, et les représentations socialement construites que ces
derniers se font du système tontinier. Autrement dit il était
question de se placer dans une logique de découverte afin d'identifier
et d'apprécier le rapport qui existe entre le système tontinier
et l'entrepreneuriat pastoral Jeune à Yaoundé. En effet, dans une
épistémologie constructiviste, l'objectif n'est pas de
présenter la réalité de manière iconique mais il
est davantage question de comprendre comment les acteurs concernés
interprètent la réalité. En somme, le paradigme
constructiviste a permis de comprendre à terme la contribution du
système tontinier dans la gestion des activités
entrepreneuriales.
7-2- Cadre théorique
Le choix d'une théorie dépend du principe de
pertinence et de motif stratégique. Selon Depelteau, (2000), la
théorie choisie, modifiée ou construite doit être une
construction intellectuelle servant à expliquer des
phénomènes réels. Cette théorie doit pouvoir
expliquer une partie de notre réalité et paraitre la meilleure ou
la plus adéquate pour investiguer, expliquer et comprendre son objet
d'étude. Dans le cadre de ce travail, trois théories ont
été mobilisée, elles ont permis de comprendre, expliquer
et interpréter le phénomène étudié à
savoir le système tontinier. Il s'agit plus précisément de
la théorie représentations sociales, la théorie des
réseaux sociaux et la théorie du don/contre-don.
7-2-1- La théorie des représentations
sociales
Le concept de représentations sociales apparait pour la
première fois en sciences sociales dans les travaux du sociologue
français Durkheim (1912) qui étudiait les mentalités
archaïques, les mythes et les représentations religieuses et
magiques des sociétés traditionnelles. Ce dernier faisait une
distinction entre « représentations collectives » et
« représentations individuelles ». Pour lui, la
conscience individuelle n'existe qu'à travers la conscience
collective.
À la suite de Durkheim, les représentations
sociales vont être théorisées par les travaux du
psychologue Moscovici (1961) à qui reviendra le mérite d'avoir
élaboré cette théorie. En s'inspirant des travaux de
Durkheim, il définissait les représentations sociales dans une
approche constructiviste comme étant des formes de savoirs naïfs
destinées à organiser les
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conduites et orienter les communications. Dans cette
définition, il met en exergue trois dimensions des
représentations sociales à savoir l'attitude, l'information et le
champ de représentations. Obéissant à des processus de
mutations et d'évolution dans le cadre des interactions sociales
quotidiennes qui se situe au niveau de la société et des groupes
sociaux. Pour Moscovici, la perception de la réalité sociale
dépend ainsi donc des interprétations que les membres de la
société en font.
Les représentations sociales sont d'après
Jodelet (1984 : 361), « une forme de connaissance spécifique de
savoir et de sens commun, dont les contenus manifestent l'opération de
processus génératifs et fonctionnels socialement marqués
». Il s'agit donc d'une forme de connaissance socialement
élaborée et partagée ayant une visée pratique
à la construction d'une réalité commune à un
ensemble social qui oriente et organise les conduites sociales. Il s'agit plus
précisément d'un savoir naturel que l'individu reçoit par
le biais de la communication, la culture, la religion, la tradition. Par
ailleurs, Wagner (1994 : 199) définit les représentations
sociales pour sa part comme : « un ensemble de croyances, d'images de
métaphores et de symboles collectivement partagés par un groupe,
une communauté, une société ou une culture ».
Autrement-dit se sont des modalités de connaissances permettant à
chaque groupe une appropriation du monde extérieur. En somme, la
théorie des représentations sociales permet de mieux comprendre
les individus et les groupes en analysant la façon dont ils se
représentent eux-mêmes les autres et le monde.
Dans le cadre de cette recherche sur le système
tontinier et l'entrepreneuriat pastoral, cette théorie a permis de mieux
cerner l'image ou les perceptions que se font les entrepreneurs des
associations EMERCOM et ADJAS sur la finance informelle. Ensuite, à
partir des entretiens de terrain, elle a permis de saisir le rapport qui existe
entre le système tontinier et le développement de
l'entrepreneuriat pastoral jeune à Yaoundé.
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