1-2-2- En Amérique
L'origine du système tontinier en Amérique
pourrait se situer dans les sociétés traditionnelles de la
côte nord-ouest américaine telles que la nouvelle
Calédonie, le Trobriand et la Nouvelle-Guinée que Mauss
qualifiait de société de don-échange (1924). Les tribus
antiques indiennes qui y vivaient pratiquaient une forme archaïque de
contrat appelé le Potlatch. Ce principe était une forme de
contrat social entre deux individus ou un groupe d'individu fondé sur
« la triple obligation de donner, rendre et recevoir »
(Mauss, idem : 18). Les échanges transitaient autour des
biens matériels et consommables tels que des maisons, des meubles et des
denrées alimentaires. Par exemple, un agriculteur venait déposer
ses produits devant la maison de son partenaire pêcheur, celui-ci
à son tour après une grande pêche avait l'obligation de
céder une partie de celle-ci à son ami agriculteur. Dans les
sociétés Mélanésiennes pour leur part, un parent
qui donnait sa fille en mariage, se voyait attribuer des richesses
matérielles telles que des cauris, des perles, et autres objets de
valeurs. Dans ce système, les biens et objets donnés
n'étaient pas gratuits. En effet, Il s'agissait avant tout d'une
prestation totale dans laquelle les individus en interactions avaient
l'obligation de donner d'une part, de recevoir et de rendre d'autre part. En
outre ces sociétés pratiquaient des échanges non marchands
fondés sur la solidarité et la réciprocité. Il
s'agissait d'un système de tontines qu'on pouvait qualifier de tontines
de denrées, tontines immobilière, tontines d'entraide.
1-2-3- En Europe
D'après la thèse de Moulin (1903) le mot
Tontine vient de son initiateur le banquier napolitain Lorenzo Tonti. Au
XIIème siècle, en 1963, il proposa au cardinal Mazarin une
combinaison d'emprunt fondée sur un principe nouveau. Il s'agissait d'un
emprunt d'Etat en contrepartie de rentes viagères. À
l'époque, Louis XIV roi de France demanda à Mazarin de
réapprovisionner les caisses de l'Etat, c'est ainsi que le premier
ministre sollicita le banquier napolitain afin de trouver une nouvelle
méthode pour financer les caisses publiques. Lorenzo Tonti inventa un
emprunt qui réunissait des épargnants pour recueillir et faire
fructifier les
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cotisations des adhérents. Son procédé
venait à point nommé à une époque où le
royaume de France connaissait un véritable dépérissement
du crédit de l'Etat. C'est ainsi qu'en novembre 1963, Mazarin fit
paraitre un arrêt du conseil instaurant la première tontine
royale, c'est dans ce sens qu'elle fut alors nommée. Cette année
marqua pour ainsi dire, le début de l'histoire de la
tontine6.
Après la défaite de Napoléon en
Angleterre, la France dû verser un lourd tribut aux anglo-saxons. Ces
indemnités de guerre se traduisaient par des titres de rente qui
pesèrent lourd sur l'économie française. C'est alors que
deux ingénieux français, Eugène Riffault, censeur de la
banque de France et le général Fréderic Riffault,
commandant de l'école polytechnique trouvèrent un moyen de
racheter ces titres de créances, grâce à la tontine. Durant
cette période, la tontine connue un véritable essor, et en 1844
sur ordonnance royale, les frères créaient « le conservateur
de tontine ». Groupe vieux de près de 170 ans, le conservateur a su
s'adapter pour affronter toutes les crises, et moderniser le produit pour le
rendre intéressant au cours des décennies d'existence (La famille
des 8, 2014). Ce principe a également existé en Angleterre
où à partir de 1692, l'Angleterre fit de nombreuses applications
du principe tontinier à ses emprunts publics. Mais, il a connu des
dérives et fut interdit car, certains participants de tontines avaient
décidé d'éliminer les autres associés de la tontine
pour en récupérer une plus grande part7. Selon
Pairault (1990), le terme semble avoir été utilisé pour la
première fois par un juriste français en 1905, l'année
même où une nouvelle loi sur les tontines fut promulguée en
métropole. Les juristes ont fini par se rendre compte que dans les pays
voisins, ces pratiques étaient les mêmes et donc une appellation
commune serait beaucoup plus simple. Cette explication laisse cependant sans
réponse à la question de savoir comment l'expression est
passée du continent asiatique au continent africain.
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