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Les territoires de mobilité pastorale: Quelle mobilité dans un contexte de pression sur le territoire rural en zone soudano-sahélienne du Nord-Cameroun?


par Natali KOSSOUMNA LIBAA
Université Paul Valéry Montpellier III France - Habilitation à Diriger des Recherches 2014
  

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V.3.2. La phase d'analyse

Les systèmes d'élevage au Nord-Cameroun sont peu intensifiés et reposent essentiellement sur les parcours naturels et la vaine pâture. Le maintien de cet élevage de ruminants se heurte à la réduction de la surface des parcours du fait de leur mise en culture. Les usages des résidus de culture se diversifient (construction, combustible, plus rarement couverture du sol) même si le droit de vaine pâture demeure fortement ancré dans les campagnes. La crise de l'élevage est diverse : spatiale par la réduction des surfaces exclusivement réservées aux troupeaux, écologique par la dégradation des parcours naturels, sociale par l'accroissement de la fréquence des conflits entre éleveurs et agriculteurs et aussi en termes de gouvernance, avec la dualité des décideurs, publics et coutumiers (CIRAD et GCG Consultants, 2013).

Les problèmes de gestion des ressources naturelles, non directement liés à l'agriculture et l'élevage, sont aussi à prendre en compte dans une gestion systémique des écosystèmes. Le Nord-Cameroun est internationalement reconnues pour la richesse de leur faune sauvage mais le maintien de pratiques de gestion non participatives des aires protégées et des ZIC et l'augmentation des surfaces protégées depuis les années 1960, sont mal vécus par les populations.

Plus globalement, les producteurs du Nord-Cameroun doivent faire face à un faisceau d'insécurités. Alors que la question de l'insécurité des biens et des personnes semble moins prégnante aujourd'hui, les autres formes d'insécurité demeurent : insécurité foncière, insécurité juridique et fiscale, insécurité économique.

Sur le plan institutionnel, les appuis et services pour le monde rural sont fournis et coordonnés par trois types de structure : les services de l'État mais ils manquent de moyens et d'engagement sur le terrain, les entreprises et les banques contribuent peu au développement du secteur primaire sauf la SODECOTON qui demeure l'acteur principal du développement régional, et enfin, le secteur associatif et les organisations de producteurs qui prennent de plus en plus d'importance mais restent fragiles. Hormis l'intervention dans la durée de la SODECOTON (depuis 1974) et des services de

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l'État (surtout en santé vétérinaire) l'appui au monde agricole est orchestré depuis des décennies par les projets de développement.

Le processus de décentralisation est ancien au Cameroun mais le transfert de compétences entre l'État et les Communes est partiel. La Commune devient un nouvel acteur du développement local et un partenaire incontournable des projets de développement. Les autorités coutumières restent dans toutes les situations une force politique, sociale et décisionnelle à ne pas négliger, et continuent à jouer un rôle fondamental dans l'organisation du territoire. La mise en place des actions du programme et leur chance de réussite nécessite d'associer les autorités coutumières au plus haut niveau, dans le cadre d'un dialogue constructif et en toute transparence.

Trois facteurs vont peser fortement dans les années à venir sur le secteur de l'agriculture et de l'élevage du Nord-Cameroun d'après Cirad et GCG Consultants (2013) : (i) les changements climatiques et leurs conséquences sur les systèmes de production, (ii) l'état des marchés (coton, produits vivriers) et (iii) la capacité de l'Etat camerounais à mener à bien des réformes (décentralisation, foncier, etc.) et à développer un climat de confiance et de sécurité propice au développement économique. Le bilan des expériences passées montrent qu'il existe une large gamme de solutions techniques mais que leur mise en oeuvre se heurte à des contraintes d'ordre social, culturel et organisationnel. Les approches sectorielles demeurent très fortes et chaque groupe d'acteurs (agriculture, élevage, environnement) travaillent le plus souvent séparément. L'intervention mal coordonnée de nombreux projets avec des méthodes d'intervention différentes voire divergentes, a développé une dépendance des acteurs publics et privés (OP, ...) par rapport à l'aide extérieure et étatique. Cette évolution limite l'initiative de ces différents acteurs et compromet même la durabilité des actions engagés par les projets.

Sur le plan socioculturel, de nombreux atouts peuvent être valorisés dans le cadre du processus : i) la fixation de plus en plus importante des éleveurs avec une emprise territoriale évidente. Cela permettrait de mieux les intégrer dans les négociations et dans la défense de leurs intérêts et points de vue. La proximité géographique et sociale avec les agriculteurs des villages voisins et le long des parcours concoure à la

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limitation des situations conflictuelles et peut être un atout pour trouver un consensus partagé entre les deux acteurs ; ii) De nombreux projets ont essayé de mettre en place un processus de gestion et de négociation des territoires pastoraux. Les acquis de ces actions ainsi que les échecs rencontrés peuvent être valorisés pour aller au-delà des problèmes rencontrés ; iii) Le processus de décentralisation en cours a été suivi de plusieurs formation et sensibilisation en matière de gestion des espaces et des ressources communes. Les outils utilisés par les différents projets, les actions déjà menés peuvent être également mobilisés ; iv) Certains projets ont été montés et ne sont pas encore mis en oeuvre. Il en est par exemple du programme d'appui à la sécurisation et à la gestion intégrée des ressources agropastorales au Nord-Cameroun (ASGIRAP). Les démarches adoptées par ces derniers peuvent aider à la mise en application du processus proposé dans le cadre de ce travail.

Les critères d'évaluation doivent également être clarifiés.

Par rapport au premier résultat attendu : des comités de concertation communaux et villageois sont créés, reconnus et fonctionnent de façon participative et inclusive : i) Nombre de communes dans lesquels un comité de concertation a été officiellement crée et fonctionne ; ii) Nombre de villages (à l'intérieur des communes retenues) où un comité de concertation a été créé et fonctionne ; iii) Nombre des réunions par an des comités et taux d'absentéisme ; iv) Participation dans les comités villageois de toutes les catégories d'acteurs concernés (transhumants, éleveurs non transhumants, agriculteurs, ...).

Par rapport au deuxième résultat attendu : les communes d'intervention se dotent d'un plan de zonage ; les villages d'intervention se dotent d'un plan d'utilisation des terres délimitant les espaces pastoraux et agricoles, de règles de gestion de ces espaces et d'un plan d'amélioration du terroir ; Ces plans et règles sont appliqués : i) Nombre de plans de zonage effectivement adoptés par les Communes ; ii) Nombre de villages dans lesquels un plan d'utilisation, gestion et d'aménagement des terres a été adoptés et entériné par la commune ; iii) Pourcentage des litiges soumis aux comités communaux et résolus ; iv) Satisfaction des acteurs (agriculteurs et éleveurs) quant à la

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délimitation des espaces dans les villages d'intervention ; v) Durabilité des délimitations des parcours : Respect des délimitations de zones 2 ans après le bornage.

Par rapport au troisième résultat attendu : la précarité des droits fonciers est réduite et un mécanisme d'enregistrement communal de ces droits est initié : i) Nombre de communes ayant testé l'enregistrement des droits foncier ; ii) Réduction de la précarité des contrats de faire-valoir dans les villages test.

Tous ces résultats et indicateurs sont évidemment conditionnés par l'acceptation par la chefferie traditionnelle d'une concertation sur ces territoires de mobilités pastorales.

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