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Les territoires de mobilité pastorale: Quelle mobilité dans un contexte de pression sur le territoire rural en zone soudano-sahélienne du Nord-Cameroun?


par Natali KOSSOUMNA LIBAA
Université Paul Valéry Montpellier III France - Habilitation à Diriger des Recherches 2014
  

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Conclusion

Au Nord-Cameroun, le territoire d'élevage correspond finalement à un assemblage de territoires complémentaires raisonné par l'éleveur pour alimenter son bétail sur le pas de temps minimal d'un an. Ces territoires évoluent au fil du temps en fonction de la disponibilité des biomasses végétales, des règles d'accès, de la date d'arrivée des pluies, et de l'avancée des parcelles agricoles. Les éleveurs y ont des droits d'usage plus ou moins affirmés selon les cas. Le droit de vaine pâture, déjà contesté, pourrait être complètement remis en question par les agriculteurs s'ils trouvent les appuis politiques suffisants. Dans ce cas, ils pourront contrôler la totalité des résidus de culture pour alimenter leurs animaux, produire plus de fumure organique ou développer les systèmes de culture sur couverture végétale (SCV).

Malgré la fixation des hommes, la mobilité reste ancrée dans les pratiques de la conduite du troupeau chez tous les éleveurs au Nord-Cameroun. Depuis quelques années, le renforcement des aléas climatiques (arrivée tardive ou précoces des pluies), l'insécurité et la résurgence des conflits avec les agriculteurs amènent les éleveurs à changer de stratégie de transhumance parfois chaque année même si les itinéraires et

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les lieux restent généralement les mêmes. Au niveau des pouvoirs publics, les mécanismes de régulation, de protection des éleveurs ne fonctionnent pas bien. Les éleveurs adoptent de plus en plus des stratégies individuelles pour accéder aux petits espaces de pâturages. C'est ainsi qu'on assiste à un amenuisement des décisions collectives autour de la transhumance à cause de la compétition entre éleveurs pour l'accès aux espaces de pâturage.

La pratique de l'agriculture avec le souci de fertiliser les parcelles a aussi amené les éleveurs à modifier le calendrier de transhumance et a favorisé le recours aux bergers salariés, le propriétaire du bétail cherchant plutôt à rester dans son village et près des parcelles cultivées. Le chef d'exploitation souhaite en effet garder un oeil sur ses champs et le développement des transports motorisés et de la téléphonie mobile lui permet de se rendre rapidement si besoin, sur les lieux de transhumance.

Même si l'élevage reste au centre des activités des éleveurs, la sédentarisation les pousse à s'occuper différemment du bétail. Le troupeau est de plus en plus confié à des salariés pour d'une part maximiser l'accès aux divers espaces de pâturage morcelés en scindant le grand troupeau en sous-unités, et d'autre part, pour scolariser les enfants traditionnellement affectés au gardiennage.

L'appui au pastoralisme passe par des incitations à une intensification partielle et progressive des systèmes d'élevage, en partant de l'hypothèse que la mise en culture de certaines portions des parcours à des fins de production fourragère peut être plus productive que sa conservation dans le statu quo de production primaire. Mais, pour cela il faut apporter des solutions techniques robustes (choix de plantes fourragères et d'itinéraires techniques) et une logistique adéquate (formation et information, disponibilité en intrants) pour accompagner les éleveurs qui acceptent d'investir dans ce nouveau modèle productif du temps de travail.

Aujourd'hui, la gestion des territoires d'élevage ne peut pas être séparée de celle des territoires ruraux et des autres acteurs. Les différents responsables coutumiers ne parviennent plus à régler seuls, les problèmes qui se posent sur ces espaces. Les processus actuels de décentralisation de la gestion du territoire doivent aboutir à l'élaboration de conventions locales et de règles de gestion consensuelle des

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ressources naturelles. Leur succès n'est possible que si les différents groupes d'usagers et d'intervenants sont suffisamment formés et impliqués dans cette gestion.

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Chapitre V. Démarche de concertation pour l'organisation et la
gestion des territoires de mobilité pastorale

Une partie importante des territoires ruraux fait l'objet de plusieurs usages, simultanés ou successifs : les champs récoltés deviennent accessibles pour la pâture des résidus de récolte ; les brousses servent à la fois au pâturage, à la chasse, à la coupe de bois. Calendriers et règles locales définissent alors l'utilisation des zones de parcours par les animaux, la répartition de la cueillette, de la pêche ou de l'exploitation du sel, etc. Ce partage de l'usage des ressources ne se fait pas sans conflits. Les droits d'accès sont souvent remis en cause, au gré des rapports de force.

La superposition de règles contradictoires fragilise également la stabilité des accords, dès lors que certains acteurs se revendiquent de normes coutumières et d'autres de la loi. Des conflits peuvent aussi émerger lorsque la ressource est surexploitée et que son renouvellement n'est plus assuré. Cette pression accrue peut être liée à la croissance démographique, à l'immigration ou au développement d'opportunités commerciales nouvelles, qui conduit à vendre des ressources autrefois seulement autoconsommées. La surexploitation peut aussi être la conséquence d'un échec des systèmes de régulation : des règles inexistantes, obsolètes ou contradictoires, des dysfonctionnements des instances de gestion (Benkahla et Hochet, 2013).

Le territoire local apparait comme un niveau privilégié de coordination des parties prenantes et de mise en oeuvre du développement durable (D'Aquino, 2002). Le développement territorial est alors un processus qualitatif de transformation des structures économiques, sociales, culturelles, environnementales d'un territoire.

Quelle est la réelle capacité qu'ont les acteurs concernés à piloter leur devenir, à élaborer et mettre en oeuvre, à cet effet, des actions de gestion et d'exploitation harmonieuse des territoires de mobilité pastorale au Nord-Cameroun ? Quelles outils et actions à mobiliser ? Comment pérenniser les résolutions prises tout en sachant que de nombreux projets d'appuis à la démarcation foncière et à la sécurisation des

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territoires pastoraux ont eu des résultats mitigés ? Quel rôle les autorités traditionnelles peuvent-elles jouer dans ce processus complexe et où l'État semble démissionner ?

Après avoir évoqué la notion de bien commun dans le contexte de territoire de mobilité, nous allons dérouler la démarche proposée.

V.1. Les territoires de mobilité pastorale comme bien commun : comment

cogérer ce qui est à tous ?

Les biens communs peuvent être définis comme des biens (au sens large : biens matériels ou immatériels et services) qui mobilisent une action collective dans un objectif d'intérêt commun, souvent associé à la soutenabilité (au sens large : respect des limites écologiques et justice sociale). Ils incorporent pour la plupart l'idée d'une construction simultanée d'un bien et d'une communauté. Leur mode de production et/ou de gestion (par l'action collective) les distingue des biens privés (produits par des individus pour eux-mêmes ou pour le marché) et des biens publics (produits et/ou gérés par les pouvoirs publics). Plus fondamentalement, le concept de « bien commun » nous invite à dépasser une définition économique de ce qu'est un bien (objet de production et de consommation) pour questionner notre sens philosophique du « bien » et de la « vie en commun » (Errembault, 2012).

Nous ne le savons que trop bien, notre civilisation planétaire se trouve prise dans des crises multiples : environnementale, sociale, économique mais aussi démocratique et culturelle. Nous n'avons jamais été aussi riches et pourtant les inégalités augmentent tous les jours. Nous avons atteint un développement scientifique et technologique élevé, mais au prix d'une dégradation environnementale sans précédent. La crise économique, principalement provoquée par l'irresponsabilité de certains acteurs privés financiers, rend les pays occidentaux endettés incapables d'entrevoir le bout du tunnel ailleurs qu'au sein du crédo habituel de la croissance et de l'austérité. Dans ce contexte, le repli sur soi, le recul des liens sociaux et de la démocratie semblent faire leur chemin, mettant à mal notre prospérité commune (Errembault, 2012). C'est dans ce contexte que de nombreuses pratiques collectives ont émergé, renouant parfois avec des pratiques très anciennes provisoirement délaissées, comme autant de résistances aux finalités que véhicule la logique capitaliste. Ces pratiques ne peuvent être rangées

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ni dans la catégorie de l'activité marchande ni dans celle de l'action publique traditionnelle (réglementations, politiques d'incitants), ce qui ne les empêche pas d'interférer avec l'une ou l'autre. Elles méritent une attention particulière car elles sont vraisemblablement porteuses d'une forme d'innovation sociale susceptible de répondre aux défis du XXIème siècle (écologie, justice sociale, finalités).

L'approche des biens communs (commons en anglais) nous offre des pistes de sortie face à ces nombreux obstacles. Elle a été développée depuis de nombreuses années, et popularisée notamment par les travaux d'Elinor Ostrom, prix Nobel d'économie. Ostrom a mis en lumière la façon dont des communautés dans le monde entier s'organisent pour gérer en commun des ressources naturelles (rivière, forêt, etc.). Pour en éviter la surexploitation, les communautés se donnent des normes et des règles, et, au rythme des expérimentations, parviennent non seulement à protéger durablement leurs ressources mais également à renforcer les liens sociaux qui les animent (Errembault, 2012). L'auteur ajoute qu'en dehors des ressources naturelles, l'approche des biens communs permet de repenser la production et la gestion de différents biens (culture, transport, logement, etc.) et leur réappropriation collective par les citoyens, au-delà de la dichotomie traditionnelle État/marché. Au carrefour du social, de l'environnemental et de l'économique, les biens communs sont un outil pour réinventer ensemble une prospérité partagée.

V.1.1. Histoire et clarification du concept de bien commun

Les biens communs ou commons en anglais couvrent une multitude de biens ou de ressources allant du plus tangible - exemple : l'eau - au plus virtuel - exemple : le logiciel libre -, en passant par le réseau de vélos partagés d'une ville. Ils sont caractérisés par une diversité de modes de production et de gestion relevant tantôt d'une communauté, tantôt des pouvoirs publics mais aussi de régimes hybrides. L'important est que les biens communs mobilisent une action collective qui émane d'une communauté ou de réseaux citoyens. Au travers des biens communs, les utilisateurs sont aussi codécideurs du mode de production et de gestion de ceux-ci. L'objectif qui sous-tend les biens communs est la soutenabilité écologique, sociale et économique (Errembault, 2012). Ce dernier précise que jadis, c'était une pratique

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courante pour gérer et utiliser les terres en commun. En effet, le berceau des biens communs se situe dans l'Europe du XIIème-XIIIème siècle. Il était alors question de gérer les usages concurrents du sol entre culture, prairie et bois, principalement lorsque la pression démographique poussait vers l'intensification de l'agriculture et du pâturage. Le concept de bien commun permettait également un arbitrage lors de différends entre seigneur et villageois. Des droits partagés sur un même lopin de terre étaient mis en oeuvre.

Les biens communs constituent ainsi une forme institutionnelle historique qui permet l'action collective par laquelle les protagonistes définissent eux-mêmes le bien commun et la structure institutionnelle qui en assure la pérennité ainsi que les règles d'accès et d'utilisation basées sur un principe de confiance mutuelle et de sanction en cas de transgression des règles communément admises.

V.1.2. Un concept longtemps oublié, revenant récemment sur le devant de la scène.

Plusieurs évolutions ont fait reculer le fait communautaire qui faisait la part belle à l'implication des citoyens et à l'ancrage local. D'abord, les Lumières qui firent de l'individu émancipé l'unité de base de la société. Ensuite, la constitution des Etats-Nations par laquelle la société devint centralisée. Ce fut désormais à L'État qu'échut de définir le cadre économique et les formes des institutions légalement acceptables. Enfin, le modèle de l'économie de marché qui allait mener à la surexploitation. Ces trois évolutions conduisirent, dans le milieu du XIXème siècle, à la dissolution des terres communales ou détenues en commun à travers toute l'Europe de l'Ouest (Errembault, 2012).

En 1968, le biologiste américain Hardin offrit au monde une puissante métaphore en publiant dans le magazine Science un article intitulé « The Tragedy of the Commons » (« La tragédie des communs », encadré 2). Pour lui, le destin inévitable d'un pâturage abandonné au commun est la surexploitation, qui pourra être évitée par la reconnaissance de la propriété privée ou par le recours à la gestion publique.

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L'encadré 2 présente la tragédie des communs de Hardin que nous illustrons avec le cas des espaces de pâturages commun utilisé à la fois par les éleveurs et les agriculteurs.

Encadré 2. La tragédie des communs de Hardin : analyse à partir des espaces de pâturage au Nord-Cameroun

L'image proposée par Hardin est celle d'un pâturage sur lequel les fermiers mènent leurs troupeaux. Chaque fermier a intérêt à laisser brouter son cheptel davantage que ne le fait le fermier voisin. Si chaque fermier agit de la sorte pour maximiser son profit, le pâturage se dégrade petit à petit, de manière imperceptible au début, mais de manière définitive au bout du compte. C'est la surexploitation. Tel est le destin inévitable d'un pâturage abandonné au commun, selon Hardin.

La tragédie du commun peut être appliquée au contexte des zones de pâturage au Nord-Cameroun. En effet, après la délimitation des zones de pâturage par l'Etat avec l'appui des projets de développement, les agriculteurs ont continué à y cultiver. Ne pouvant rien contre ces pratiques, les éleveurs ont commencé à installer leurs campements à l'intérieur et à leur tour à y cultiver. Les premiers venus invitent et accueillent même de nouveaux candidats à la sédentarisation qui à leur tour se mettent à cultiver. Ce qui contribue à l'amenuisement et à la longue à la disparition des espaces de pâturage de saison de pluie.

Le modèle de la tragédie des communs de Hardin stipule que, lorsqu'une ressource est en libre accès, chaque utilisateur est conduit spontanément à puiser sans limite sur la ressource, conduisant à sa disparition. L'exemple donné est basée sur la métaphore du pâturage communal en accès libre : chaque éleveur individuel, rationnel, est incité à y placé un nombre (trop) élevé d'animaux car le bénéfice qu'il en tire est privé alors que le coût de la surexploitation est collectif (et donc moindre que le bénéfice privé). En d'autres termes, chaque éleveur cherche à accroître son troupeau puisque, de toute façon, le prix à payer est quasi-nul par rapport au bénéfice immédiat obtenu. Mais, au terme de ce processus, tous les éleveurs sont perdants. En outre, si chaque éleveur partageant un pâturage prenait la décision économique, individuellement rationnelle, d'augmenter le nombre d'animaux qu'il fait paître, cela aurait l'effet global d'appauvrir ou de détruire le pâturage. Autrement dit, des individus multiples, agissant indépendamment et rationnellement selon leur intérêt personnel, finiront par épuiser la ressource limitée qu'ils partagent, même s'il est évident que cela va contre l'intérêt à long terme de chacun (Burke, 2011). On relève ici une parenté de cette « tragédie » avec la thèse de la surpopulation que Malthus avait énoncée à la fin du XVIIIème siècle. Selon Hardin, il n'y a que trois solutions à cette « tragédie » : la limitation de la population pour stopper la surconsommation, la nationalisation ou la privatisation. Émise à la veille du grand mouvement de dérégulation et de déréglementation de

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l'économie mondiale, on comprend que la troisième voie fut exploitée à fond pour justifier le recul de l'intervention publique (Harribey, 2011).

Le jeu du dilemme du prisonnier modélise grâce à la théorie des jeux la tragédie des jeux non coopératifs de Hardin : lors d'un jeu non coopératif (absence de communication) avec information complète, les joueurs sont toujours rationnellement incités à « trahir ». Rappelons ainsi que la théorie des jeux part de l'homo economicus et cherche à comprendre l'action collective. L'une des situations les plus connues est caractérisée comme « dilemme du prisonnier » qui constitue la représentation emblématique de situations où « des comportements individuels rationnels conduisent à des résultats collectivement irrationnels » (Ostrom, 1990 : 5). Le dilemme du prisonnier (encadré 3) a été appliqué à la question des ressources naturelles (Hardin, 1968). Ce dernier explique que les ressources qui sont en libre-accès ne peuvent être préservées qu'en maintenant dans une situation de sous-consommation, et donc de sous-population. Que la population augmente ou que les droits soient mal définis et nous assistons à la « tragédie des communs » : chaque acteur a intérêt à maximiser sa consommation et ce comportement conduit à la destruction des « communs ».

Encadré 3. Le dilemme du prisonnier : analyse à partir des relations entre agriculteurs et

éleveurs

On résume souvent cette situation de la manière suivante : Deux suspects sont arrêtés par la police. Mais les agents n'ont pas assez de preuves pour les inculper, donc ils les interrogent séparément en leur faisant la même offre. « Si tu dénonces ton complice et qu'il ne te dénonce pas, tu seras remis en liberté et l'autre écopera de 10 ans de prison. Si tu le dénonces et lui aussi, vous écoperez tous les deux de 5 ans de prison. Si personne ne se dénonce, vous aurez tous deux 6 mois de prison ». Si chacun poursuit son intérêt individuel, ils vont se dénoncer mutuellement et écoper de cinq ans de prison. S'ils coopèrent ils ne feront que six mois. Mais pourquoi coopèreraient-ils ? C'est là que la discussion commence, que l'on étudie le rôle de la confiance, des institutions, etc. Le fond du débat est qu'il existe des situations « gagnant-gagnant » qui ne sont pas immédiatement accessible, que cela vienne d'un défaut d'information (Herbert Simon, mais aussi Joseph Stiglitz sur les asymétries d'information), d'un défaut de confiance, d'attentes non-partagées, de défaut de sécurité juridique ou autre, tous ces biais générant des incitations à se comporter comme un « passager clandestin » : tirer les bénéfices Sans payer son dû (Flipo, 2010).

Si les suspects, au lieu de se dénoncer mutuellement, coopèrent, ils subiront des peines moins lourdes. Mais ils ne sont pas portés spontanément à la coopération, et, dès lors, tous ont tendance à se comporter en « passagers clandestins ». C'est la pertinence de ce modèle que va attaquer vigoureusement Elinor Ostrom sur la base d'une approche néo-institutionnaliste. Ostrom estime que cette « tragédie » n'est pas inéluctable comme le pensait Hardin. Au contraire, les éleveurs peuvent l'éviter s'ils décident de

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coopérer en instaurant une surveillance mutuelle de l'utilisation de la terre et des règles pour la gérer. Dans le même sens, Olson (1965) s'attaque à l'idée qu'une hypothèse de comportement individuel rationnel conduirait spontanément les groupes sociaux à agir collectivement conformément à leur intérêt. Pour lui, c'est précisément ce que la théorie des jeux tend à démentir. Les comportements de passager clandestin seraient au centre des défaillances de l'action collective : l'intérêt de chacun est de profiter d'un bien collectif, sans investir lui-même dans sa production et sa gestion. La logique de l'action collective telle que décrite par Mancur Olson est l'application de ces principes à l'action collective : il est, pour cet auteur, entièrement irrationnel de participer à une action collective, dans la mesure où il est plus efficace de laisser les autres se mobiliser tout en profitant des résultats de leur action (comportement du passager clandestin).

Ostrom et Basurto (2011) proposent une classification des règles, qui prend appui sur le langage de la théorie des jeux. Pour eux, toute « situation d'action » (à quelque niveau que ce soit, depuis une communauté jusqu'au niveau national ou international) s'analyse comme une interaction entre des acteurs qui ont certaines positions, des capacités d'action aux différentes étapes des processus de décision, liées au degré de contrôle et aux informations dont ils disposent, aux conséquences vraisemblables de leurs actions et aux coûts et bénéfices attendus de ces conséquences (Ostrom et Basurto, 2011 : 323).

D'ailleurs, des années après, Hardin fut amené à revenir sur son article et précisa alors qu'il s'agissait d'une analyse de la « tragédie des communs non gérés ». La métaphore de Hardin se révèle en fait erronée sur trois points : (1) il confondait bien commun et no man's land - ou open access - ; (2) il partait du principe que les fermiers ne parlaient pas entre eux or les personnes exploitant des ressources en commun échangent beaucoup entre eux. Ils établissent des règles d'accès et d'utilisation des biens communs pour les sauvegarder ; (3) il partait du principe que les hommes produisent dans le but de dégager un profit or la logique des biens communs vise avant tout la satisfaction des besoins de subsistance des utilisateurs (Errembault, 2012).

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Elinor Ostrom propose une vision très enthousiasmante des biens communs dans son ouvrage, paru en 1990, Governing the commons. The Evolution of Institutions for Collective Action. Ses années de recherche ont été récompensées par le prix Nobel d'économie en 2009. Elinor Ostrom a scruté de très nombreux biens communs. Les « ressources communes » sont en effet des biens dont la consommation est à rivalité élevée et dont il est difficile de limiter le nombre de bénéficiaires. Cela peut être le cas des pêcheries, des forêts, de l'eau des canalisations d'une vile etc. Le pêcheur qui prélève du poisson le rend indisponible pour les autres pêcheurs. Mais il ne peut pas exclure les autres pêcheurs. Et Ostrom constate que, contrairement à ce que disait Hardin, il existe de par le monde des dizaines de milliers de cas de gestion des ressources qui ne tournent pas à la « tragédie des communs ». Il existe aussi de nombreux cas où ce que Hardin prévoyait se produit effectivement. Sa recherche consiste à essayer de mettre en évidence les régularités qui expliquent quels sont les facteurs décisifs (Flipo, 2010).

Dans son troisième chapitre, l'auteur livre plusieurs monographies sur des études de cas qu'elle a menées ou dont elle fait la synthèse. Son objet d'étude est les ressources communes le plus souvent renouvelables dans une communauté de petite échelle. À partir de l'hypothèse que la connaissance des règles est totale pour chaque membre de la société, la conclusion est que la solution trouvée est la meilleure possible : l'optimum est toujours au rendez-vous de la coordination (Harribey, 2011). Elle a retenu puis analysé ceux qui étaient en bon état malgré leur utilisation intensive. Pour ceux-là, elle a identifié sept caractéristiques communes qui peuvent servir de principes pour maintenir des biens communs en bon état : (1) des frontières clairement définies qui soient reconnues ; (2) des règles d'accès et d'appropriation qui soient en adéquation avec les conditions sociales et environnementales locales ; (3) des règles collectives permettant aux utilisateurs des biens communs de participer à la prise de décisions ; (4) un monitoring de l'usage et de l'état du bien commun réalisé par des utilisateurs mandatés par la communauté ; (5) une échelle de sanctions graduelles à l'encontre de ceux qui outrepassent les règles communautaires ; (6) des mécanismes de résolution de conflit qui soient simples et accessibles facilement ; (7) l'auto-

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détermination de la communauté est reconnue et encouragée par les niveaux supérieurs successifs d'autorité. Ostrom cesse de se fixer sur la nature des biens qui déterminerait leur caractère de commun et elle se penche au contraire sur le cadre institutionnel et réglementaire qui préside à leur érection en tant que communs, mieux, qui les institue en tant que communs (Harribey, 2011).

Les facteurs qui rendent les systèmes socio-écologiques « robustes » sont au nombre de huit : des frontières clairement définies (qui a droit de pêcher) ; des bénéfices proportionnés aux coûts (la quantité permise dépend du travail fourni, des matériaux, du capital) ; des règles issues des individus qui en participent, au moins de leur élite ; une « surveillance » (ceux qui surveillent le comportement des individus et le niveau de la ressource peuvent eux-mêmes être surveillés, ce qui s'obtient notamment par le biais de rotation dans les tâches) ; des sanctions graduées (de la part des autres usagers ou autre) ; la présence de mécanismes de résolution des conflits rapides, accessibles et peu coûteux, que ce soit pour les conflits entre usagers ou les conflits entre usagers et autorités ; le droit des usagers à s'organiser eux-mêmes et à participer à l'évolution des règles ; et, dans le cas de systèmes de taille importante, des entreprises « imbriquées » (« nested ») dans le tissu local (Flipo, 2010).

L'auto-gouvernance peut fonctionner de manière efficiente. Elle vise à laisser la gestion du bien commun à ceux qui sont en prise directe avec lui. Finalement, en matière agricole, ce sont ceux qui travaillent la terre qui sont le plus à même de la connaître le mieux. Mais il y a certaines conditions préalables à la bonne gestion des biens communs, notamment celle de la reconnaissance et du soutien des niveaux successifs d'autorité de tutelle qui peuvent être rassurées qu'un tel mode de gestion peut faire face sereinement à la pression du mode de marché ou trouver avec lui des interactions intéressantes (Errembault, 2012).

Ostrom met en évidence cinq facteurs qui sont régulièrement présents dans les échecs : des changements exogènes rapides, qui ne permettent pas de changer les règles internes assez rapidement (exemple des pêcheries du nord de la Norvège) ; un déficit de transmission des principes opérationnels d'une génération à une autre ; les programmes qui reposent sur des « modèles » (« blueprint thinking ») et un accès aisé

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à des fonds extérieurs ; la corruption et d'autres formes de comportement « opportuniste » (qu'Ostrom définit comme) ; et enfin le manque de d'institutions permettant d'établir une information vérifiable, de la disséminer, de résoudre les conflits à un coût peu élevé, d'assurer l'éducation, le manque d'équipements pour faire face aux catastrophes naturelles et autres problèmes majeurs à l'échelle locale.

Par ailleurs, l'analyse d'Olson (1965) s'appuie sur l'importance donnée à la différenciation des groupes selon leur taille. Olson distingue en effet les petits groupes, les groupes « de taille intermédiaire » et les grands groupes. Et il considère que les comportements des agents et les conditions de coordination ne sont pas les mêmes, dans ces différents types de groupes. Sans entrer ici dans le détail de son argumentation, et des conclusions très discutables qu'il tirera de ses analyses, il estime que si, dans les grands groupes, seuls des systèmes d'incitation imposés aux agents peuvent assurer une coordination efficace, dans les petits groupes et, dans une certaine mesure dans les groupes de taille intermédiaire, les comportements sont tels que des mécanismes de coordination prévenant les comportements de passager clandestin pourront se mettre en place spontanément. Elinor Ostrom va reprendre et développer cette idée, à sa manière, pour expliquer ce qui est pour elle le constat majeur qui résulte de l'observation de l'organisation des pools communs de ressources : la capacité des acteurs privés à résoudre des problèmes d'action collective, en construisant par eux-mêmes des systèmes de règles, des « modes de gouvernance » adaptés aux problèmes précis auxquels ils sont confrontés. Cette manière d'aborder la question générale des communs délimite à notre sens assez strictement le champ d'application des analyses d'Ostrom : le cas de la gestion de ressources communes à un groupe aux frontières bien définies, et de taille limitée (Weinstein, 2013).

Toutes les situations de ressources communes sont confrontées à des environnements incertains et complexes. Par contraste, les populations de ces endroits font montre de stabilité, ont partagé leur passé et comptent partager leur avenir. Autrement dit, leur taux d'actualisation est faible. Si de lourds investissements sont à faire, elles sont susceptibles d'en récupérer les bénéfices. Les normes élaborées sont développées dans

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toutes les situations de manière précise. L'intérêt personnel prudent de long terme renforce l'acceptation des normes de comportement approprié.

Principes de conception : On peut s'attendre à ce que de tels individus s'engagent conditionnellement à suivre des règles, lorsque :

- les limites sont clairement définies : « les individus ou ménages possédant des droits de prélever des unités de ressources d'une ressource commune doivent être clairement définis, ainsi que les limites de la ressource en tant que telle » ;

- la concordance entre les règles d'appropriation et de fourniture et les conditions locales : « les règles qui restreignent, en termes de temps, d'espace, de technologie et/ou quantité l'appropriation des unités de ressources sont liées aux conditions locales et aux obligations en termes de main d'oeuvre, de matériel et/ou d'argent » ;

- des dispositifs de choix collectif : « la plupart des individus concernés par les règles opérationnelles peuvent participer à la modification des règles opérationnelles » ;

- la surveillance : « les surveillants qui examinent les conditions de la ressource commune et le comportement des appropriateurs rendent compte aux appropriateurs ou sont des appropriateurs eux-mêmes » ;

- des sanctions graduelles : « les appropriateurs qui transgressent les règles s'exposent à des sanctions graduelles (en fonction de la gravité et du contexte de l'infraction) par les autres appropriateurs et/ou agents travaillant pour le compte des appropriateurs » ;

- des mécanismes de résolution des conflits : « les appropriateurs et leurs représentants disposent d'un accès rapide à des arènes locales bon marché pour résoudre les conflits entre appropriateurs ou entre les appropriateurs et leurs représentants et agents » ;

- une reconnaissance minimale des droits d'organisation : « les droits des appropriateurs d'élaborer leurs propres institutions ne sont pas remis en cause par des autorités gouvernementales externes ».

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- des entreprises imbriquées pour les ressources communes appartenant à des systèmes plus grands : « les activités d'appropriation, de fourniture et de surveillance, d'application des règles, de résolution de conflits et de gouvernance sont organisés par de multiples niveaux d'entreprises imbriquées » (publiques et privées).

Après avoir fait les contours des démarches théoriques proposées par divers chercheurs et spécialistes dans le domaine de la gestion des ressources communes, nous allons faire le point sur les actions menées au Nord-Cameroun et proposer des scenarii de gestion et de concertation autour des territoires de mobilité.

V.2. De nombreuses interventions aux résultats mitigés en matière de

concertation et de sécurisation foncière

De nombreuses interventions se sont attachées, depuis les années 90, à la sécurisation et à la gestion intégrée des ressources agropastorales. Nous pouvons citer le projet de Développement du Paysannat et de Gestion de Terroirs (DPGT), le Projet d'Appui à la Gestion des Terroirs Villageois (PAGTV), le Projet d'Appui à l'Auto-Promotion Rurale (PAAR), le projet GESEP, le PDOB....

Ces projets ont développé trois grands types d'actions : i) Les premières concernaient la sécurisation d'une part, des limites villageoises, et, d'autre part, des parcours pastoraux et des pistes à bétail grâce à la délimitation de zones agricoles et pastorales au sein des terroirs. Elles ont aussi porté sur la définition de règles de gestion des espaces et des ressources (cahiers des charges) ; ii) Quelques expériences ont concerné la sécurisation des droits fonciers à l'instar du DPGT ; iii) Plus récemment le Programme de Développement Ouest Bénoué (PDOB), le Programme National de Développement Participatif (PNDP), le projet PAGEPA, le Projet de Gestion Durable des Terres et des systèmes agro-sylvo-pastoraux (PGDT) ont facilité la mise en place de cadre de concertation pour l'élaboration de Plans d'Aménagement et de Développement Locaux (niveau village) et communaux.

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V.2.1. Délimitation foncières des villages, des zones pastorales et des couloirs de transhumance

Des méthodes de négociation des limites villageoises d'une part et, d'autre part des zones pastorales et des couloirs ont été mises au point. Ces actions ont été engagées par le DPGT à partir de 1997 avec les notables de la chefferie chargés des questions d'élevage, notamment le sarkin saanu, pour identifier et statuer sur l'étendue des aires pastorales et sur les axes de circulation du bétail qu'il semblait nécessaire de préserver pour permettre le maintien des éleveurs face à la progression des espaces cultivés par les agriculteurs migrants. Ces méthodes s'appuient sur des négociations menées par « commission ». Celles-ci regroupent des représentants des différents villages concernés, des campements d'éleveurs, de la chefferie36, parfois de l'administration territoriale. Il faut noter l'importance du rôle de l'animateur, plus ou moins neutre, dans la préparation et la tenue des sessions de la commission. Une « descente » sur le terrain est systématiquement organisée.

La méthode a consisté à repérer le tracé des limites des aires pastorales ou des pistes à bétail après concertation entre agriculteurs et éleveurs, avec l'aval des autorités coutumières, dans l'espoir d'éviter des litiges quant à l'occupation de l'espace. Les différentes articulations des limites ont été matérialisées par l'implantation de bornes en ciment de grande taille pesant 100 kg. Les coordonnées géographiques de ces points ont été relevées au GPS. Ces bornes ont été peintes en blanc, les noms des villages y ont été inscrits en noir. De petites bornes de 20 à 25 kg, peintes en orange, ont été positionnées entre les grosses, à 100 m d'intervalle les unes des autres. Une peinture orange appliquée sur les arbres indique l'emplacement d'une limite entre territoires. Ensuite on a procédé à un bornage « lourd » des lignes de démarcation (bornes de 200 kg, théoriquement inamovibles pour des paysans). Rappelons que le bornage n'est pas l'aboutissement concret d'une procédure juridique d'immatriculation foncière, mais l'implantation après négociation entre les parties prenantes de bornes sur limites de

36 Les négociations ont eu lieu certes avec beaucoup de difficultés car au début, l'autorité traditionnelle s'était catégoriquement opposée à l'opération. Pour cette personnalité la procédure était un moyen d'immatriculation de la zone. Elle pensait en effet que les bénéficiaires devaient s'approprier cette zone et qu'il n'aurait plus un droit de regard dans sa gestion. Il a fallu plusieurs séances d'explication et de négociation pour avoir son adhésion.

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l'aire de pâturage ou de la piste à bétail utilisé par les campements des éleveurs mbororo. Enfin, les limites et les bornes ont été reportées sur une carte signée par les représentants des différentes communautés et diffusée auprès d'elles, de l'administration territoriale, des services techniques agricoles, pastoraux, forestiers et enfin des autorités traditionnelles, ces dernières lui ayant donné la caution nécessaire pour lui conférer une certaine applicabilité et légitimité.

Les décisions obtenues après débats ont valeur de nouvelles règles. Un procès-verbal est établi. Il reprend le contenu des accords et décrit les limites négociées. Un levé des contours et une représentation cartographique des espaces sont réalisés. Dans le cas des délimitations des aires pastorales et des pistes à bétail, une charte mentionne les droits et devoirs des éleveurs utilisant ces pâturages et des agriculteurs voisins. Les limites sont matérialisées par bornage.

Le report de la limite et des bornes est fait sur une carte signée par les parties. Une copie du procès-verbal, des cartes et des chartes est remise aux parties et, parfois, enregistrée auprès de la sous-préfecture compétente.

Les décisions sont dans un premier temps respectées. Elles doivent néanmoins être validées à la fois par les autorités coutumières et l'administration territoriale. Mais les accords sont soumis, avec le temps, à une certaine érosion. De manière plus conséquente, la délimitation ne peut rester figée : elle doit évoluer en fonction des pressions accrues sur la ressource. Le besoin de la pérennité des commissions de concertation se fait sentir pour accompagner les évolutions. Les méthodologies sont aujourd'hui largement diffusées. Mais la maîtrise est bien moins partagée. L'exercice demande une qualité et un engagement de la part des animateurs, qui doivent dépasser la simple mise en oeuvre de recettes "formalisées". Deux enseignements peuvent en être tirés de cette expérience :

- la sélection des animateurs doit être faite avec soin. Les animateurs devront toujours être capables d'adapter une "méthodologie de base" à la complexité des situations ;

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- La formation et l'accompagnement doivent être une préoccupation permanente. Ils se feront sur la base des retours d'expérience, d'abord des projets antérieurs puis des actions.

Un autre élément négatif est que la délimitation et, de manière plus générale, la concertation dépend trop des projets. Même les commissions officielles de conflits agro-pastoraux présidées par le sous-préfet, instaurées par la loi de 1978 ne fonctionnent que de manière précaire, compte tenu de leurs coûts, considérés comme exorbitants. Les projets les plus récents, sauf le projet GESEP, ne s'appuient plus sur ce dispositif, auxquelles les populations rurales font peu confiance.

Le projet GESEP (Gestion Sécurisée des Espaces Pastoraux) a contractualisé TERDEL-GIE37 pour réaliser un travail de médiation et de sécurisation des parcours dans trois unités administratives du Département de la Bénoué notamment dans les arrondissements de Ngong, Touroua et Lagdo (GESEP, 2006). Comme pour le DPGT, le travail de médiation et de négociation s'est appuyé sur une large consultation des acteurs concernés ainsi que d'autres personnes ressources. Cette consultation a permis d'avoir une meilleure connaissance du conflit et de mieux appréhender les enjeux dans le but de définir un cadre approprié de négociations. Une attention particulière a été accordée à la cartographie. Elle a fourni d'importants renseignements sur l'état des lieux et les différents modes d'occupation de l'espace. On a obtenu grâce à ce travail un support visuel qui permet d'amorcer les négociations sur la base d'éléments objectifs. Le travail de cartographie est intervenu également après les négociations. Il s'agissait alors de reporter sur les cartes le tracé des limites retenues de manière consensuelle. L'opération de cartographie a nécessité un important travail de terrain. Les activités ont démarré mi-août 2002 et se sont achevées fin janvier 2003.

Le GESEP a également mené des actions en faveur de l'évolution institutionnelle de la commission paritaire. La commission paritaire a été mise en place dans le cadre des activités du projet DPGT. Elle a été mise en place pour faire face aux nombreuses demandes d'interventions dans le domaine de la médiation foncière au regard de la

37 Territoire et Développement Local-Groupement d'Intérêt Économique.

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multiplication des conflits agro-pastoraux suite à la création des villages ex-nihilo par des migrants. La commission consultative d'arrondissement étant difficile à mobiliser et à déplacer, il a fallu trouver une solution « provisoire » pour répondre aux nombreuses demandes afin de régler des conflits là où ils existent ou d'intervenir par anticipation afin d'éviter que les conflits ne se produisent. La commission a été placée sous la présidence du Chef de District, ce qui lui confère un caractère formel. Toutes les activités menées dans le cadre de cette convention ont bénéficié du concours de la commission paritaire.

Trois innovations ont été introduites pour favoriser l'évolution de la commission paritaire :

- Une session de formation a été organisée avec pour de fournir aux éleveurs tous les outils et informations nécessaires pour leur permettre de participer activement aux négociations qui seront organisées par la commission paritaire. Jusque-là, on constatait que c'était les agriculteurs (qui bénéficient d'un meilleur encadrement en matière d'organisation notamment) qui réagissaient rapidement pour défendre leurs intérêts.

- Les responsables des services régionaux des domaines et du cadastre ont été déplacés sur les sites à borner pour travailler avec la commission paritaire. L'objectif était d'établir une passerelle entre la commission paritaire et la commission d'arrondissement. Si ces types de mission étaient concluants, on pourrait proposer que la commission paritaire intervienne comme « une annexe » de la commission d'arrondissement ;

- Des modèles de nouveaux documents d'officialisation et de contractualisation ont été proposés pour appréciation aux autorités départementales. Ces documents avaient pour finalité d'officialiser et de légaliser les travaux de la commission paritaire.

Si ces innovations avaient été menées à terme, elles auraient permis à la commission paritaire d'évoluer dans le sens du renforcement de sa légitimité et de conférer à ses actions un caractère légal.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld