L'administration coloniale allemande et les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamun (1884-1916): une analyse de l'histoire politique du Camerounpar Winnie Patricia Etonde Njayou Université de Douala - Doctorat 2023 |
2. ÉdouardSchmidt - La maison de commerce allemande Jantzen et ThormählenJantzen & Thormählen est une entreprise coloniale allemande fondée à Hambourg en 1874 par WILHELMJANTZEN et JOHANNTHORMÄHLEN.Elle exploite les ressources de la colonie du Kamerun établie en 1884.Wilhelm JANTZEN et JohannTHORMÄHLEN ont travaillé pendant plusieurs années pour WOERMANN-LINIE, JANTZEN au Libéria et THORMÄHLEN au Cameroun. En 1874, ils décident de fonder leur propre maison de commerce à Hambourg et ouvrent une première succursale sur le fleuve Wouri. La maison contrôle des factoreries sur les côtes occidentales de l'Afrique à Grand Batanga, Campo, Bata, Eloby, Ogowe et au Gabon. Ses principaux produits sont l'huile de palme et le palmiste. La société est dissoute en 1907 après le retrait de THORMÄHLEN. JANTZEN prend la succession en tant que CFW Jantzen Im-und Export, jusqu'à sa mort en 1917415(*). Édouard SCHMIDT et Johannes VOSS, représentants respectifs des firmes Carl Woermann et Jantzen und Thormählen, qui reçurent la lettre comportant les instructions le 20 juin 1884, n'eurent pas la tâche facile en raison de la résistance de certains chefs Duala à l'Anschluss, c'est-à-dire au rattachement de leur territoire à l'Empire allemand. Le 12 juillet au matin, les chefs Duala adressèrent à EmilSCHULZE un texte connu désormais sous le titre de « Wunsche der Kamerun Leute »416(*) et insistèrent qu'il fut inclus dans le traité Germano - Duala dont l'ébauche était en préparation. Dans ce texte, les chefs Duala affirmaient leur droit de propriété exclusive dans l'estuaire du Wouri et leur monopole commercial absolu dans l'arrière - pays. Poursuivant les pourparlers, les commerçants allemands réussirent le 12 juillet 1884 à signer le fameux traité par lequel les chefs Duala cédaient, sous certaines réserves, leur territoire et tous leurs droits de souveraineté à la maison Woermann.La cérémonie de signature de cet acte se déroula dans la factorerie Woermann. GustaveNACHTIGAL, l'envoyé de BISMARCK, n'eut plus qu'à l'officialiser le lundi 14 juillet, en hissant, pour la première fois, le drapeau allemand sur cette partie de la côte camerounaise qui devint Kamerunstadt417(*). Gustave NACHTIGAL devait accomplir le même geste à King WILLIAMS TOWN418(*) le 21 juillet, à King PASSAL'S TOWN419(*) le 22 juillet, à Small - Batanga le 23 juillet,à Plantation et à Kribi le 24 juillet, à Campo le 30 juillet, à Benita le 02 août, à Awouni le 06 août, à Bapouko le 07 août et à Hickorytown420(*) le 28 août421(*). Il s'agit des localités dont les chefs avaient déjà signé des traités avec les agents des maisons CarlWoermann et Jantzen und Thormählen, traités par lesquels ces chefs cédaient aux commerçants allemands tous les droits qu'ils détenaient422(*). JANTZEN et THORMÄHLEN s'intéressèrent aussi aux plantations pour leur propre compte ; mais, ils n'y rencontrèrent que des échecs. S'ils ne partagèrent pas toujours les idées de Woermann sur la manière d'accorder des crédits aux indigènes, ils furent au contraire, de son avais chaque fois qu'il fallut envisager les moyens pratiques d'ouvrir l'arrière-pays à un commerce sans intermédiaires. Quoique de beaucoup moindre envergure que celles de WOERMANN, les affaires de THORMÄHLEN prospéraient au fur et à mesure du développement de la colonie. Quand fut fondé le Comité économique ou « Kolonialwirtschaftliches Komitee », THORMÄHLEN en fut élu membre ; mais, à ce poste, il se montra davantage partisan des méthodes de coercition ; il partait en effet du principe que le Noir était paresseux et qu'il fallait absolument adopter à son égard, une politique beaucoup plus autoritaire, en vue de l'amener à travailler dans l'intérêt du Blanc. Son discours au Congrès colonial en 1902 traduit très nettement cette conception des rapports entre colonisés et colonisateurs. Avant de quitter la côte camerounaise, GustaveNACHTIGAL installa son compagnon MaxBUCHNER comme représentant civil de l'empereur dans cette nouvelle acquisition423(*). Par la suite, plusieurs traités seront signés entre les commerçants allemands et les chefs Duala dont le plus célèbre est celui du 12 juillet 1884. * 415 H.- D. LOOSE, Wilhelm Jantzen de la Neue Deutsche Biographie (NDB), Duncker & Humblot, Berlin, 1974. * 416 « Les voeux des populations du Cameroun ». Traduction faite par nous. * 417 Bundersarchiv Berlin, R 1001, Nr. 4202, Band 1, 1884 - 1885, ff 34 - 39, « Hissung der deutschen Flage in Kamerun ». M. BUCHNER, Kamerun. Skizzen und Betrachtungen, Leipzig: Duncker & Humboldt, 1887, p. 67. * 418 Bimbia. * 419 Malimba. * 420 Bonabéri. * 421 Bundersarchiv Berlin, R 1001, Nr. 4447; Deutsche Kolonialzeitung, 1886, pp. 130, 175 - 176; M. BUCHNER, Aurora Colonialis, op. cit., p. 68. * 422 V. J. NGOH indique dans Cameroun 1884 - 1985 : Cent ans d'histoire, Yaoundé, CEPER, 1990, p. 27, qu'il s'agissait des « contrats de vente » et des « traités négociés ». * 423 A. P. TEMGOUA, Le Cameroun à l'époque des Allemands (1884 - 1916), L'Harmattan Cameroun, 2014, pp. 18 - 19. |
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