CONCLUSION DU CHAPITRE
IV
Nous avons voulu par ce chapitre qui
s'achève, apporter modestement des manifestations certaines de
l'adaptation de l'administration coloniale allemande aux réalités
de la société traditionnelle BamounBamun. En effet, le Roi NJOYA
s'est opposé aux pratiques religieuses chrétiennes et a entretenu
des relations ambivalentes avec le missionnaire GÖRING. Il s'est notamment
opposé à la polygamie qui était le socle d'un statut
privilégié dans la société BamounBamun. Par
ailleurs, le fait de l'acceptation de la polygamie par le Coran va consolider
la pratique de l'islam au détriment du christianisme en pays
BamounBamun. Du fait de cette prééminence, les
missionnaires allemands se verront obligés de s'adapter à la
polygamie et de maintenir cette institution indigène comme une union
agréée par Dieu. A ce titre, l'ambigüité du
missionnaire GÖRING est révélatrice de cette confusion. Nous
parlons à ce stade d'hybridité selon le concept d'Homi BHABHA. Ce
fait est aussi observé pour le Roi NJOYA qui souhaite baptiser ses
sujets suivant la culture traditionnelle BamounBamun en incluant du vin de
palme à la place de l'eau bénite. De plus, la perception de
l'administration coloniale allemande par le Roi NJOYA a également mis en
évidence une certaine ambivalence voire méfiance vis-à-vis
de cette dernière. Pour manifester son amitié, il a eu à
échanger des cadeaux avec les agents coloniaux allemands. Il y eut
d'ailleurs des marques d'admiration et de respect mutuels.Toutefois, le
RoiNJOYA a émis des jugements parfois contradictoires vis-à-vis
de ses amis allemands. Il avait aussi mis en place une stratégie du don,
pour obtenir les faveurs des Allemands et ne pas se heurter à leurs
représailles. Il se comportait en homme rusé et stratège.
C'est pourquoi nous nous sommes interrogés en posant
la question suivante : ces jugements étaient-ils faits
à l'emporte-pièce ou au contraire pouvaient-ils être
justifiés ? Nous répondrons par l'affirmative dans la mesure
où, bien qu'il fut très apprécié par ses amis
Allemands, le Roi NJOYA subit l'interdiction de la pratique de la langue
Shumom. De plus, il avait mis en place de grandes oeuvres comme la
pharmacopée, la cartographie, la fabrication de machines, la
création d'une religion syncrétique, la publication d'ouvrages ou
encore la construction d'un splendide palais. Il mettait ainsi en
déroute toutes les théories racistes et
ségrégationnistes de son temps. Comment un roi nègre
avait-il pu entreprendre de telles choses sans l'aide des Blancs ? Cette
question nous invite à l'observation du génie encore inconnu de
ce royaume d'Afrique Centrale.
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