1.2 Intégration vs sentiment
d'intégration
Comme je l'ai précisé, l'intégration est
un processus difficilement mesurable, notamment parce qu'il s'agit d'un
processus continu et inachevé sur lequel il est difficile de statuer
:
« C'est un processus dont on constate le terme, le
résultat, mais qu'on ne peut saisir en cours d'accomplissement car il
engage tout l'être social des personnes concernées
(i.e. toute leur identité) et aussi la
société dans son ensemble » (Sayad, 1994 :
8).
En effet, un projet de cette ampleur aurait
nécessité de réaliser une étude longitudinale et de
prendre en compte d'une part, l'évolution sur le long terme des parcours
individuels de mes enquêtés car : « le processus
migratoire est non seulement un voyage à travers l'espace mais
également un périple dans le temps » (Biichlé,
2007 : 270) ce qui confirme bien que « L'intégration en tant
que processus introduit l'importance de la dynamique temporelle
(historicité, construction, orientation) » (Tap cité
par Manço, 1999 : 17) et d'autre part, il aurait fallu mesurer
l'implication de la société dans ce processus car « les
processus d'intégration sociale concernent autant les structures de la
société d'accueil que la volonté des migrants de s'adapter
» (De Pietro & Matthey, 2003 : 144).
Cette étude prendra nécessairement une direction
qualitative et se penchera sur le sentiment d'intégration de mes
enquêtés car :
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« L'intégration désigne en effet un
processus multiforme, un ensemble d'interactions sociales provoquant chez des
individus un sentiment d'identification à une
société et à ses valeurs, grâce auquel la
cohésion sociale est préservée » (Weil, 2005 :
47).
En effet, l'idée de cette étude est de
comprendre d'une part ce que comprennent et ce que pensent mes
enquêtés de la notion d'intégration car souvent ce sont des
critères personnels qui leur permettent de penser l'intégration :
« ce qui frappe dans le point de vue immigré, c'est qu'il met
forcément l'accent sur la dimension locale de l'intégration et
qu'il associe volontairement intégration et réussite
personnelle » (Lamchichi, 1999 : 150). Ensuite, il s'agit
d'observer s'ils font un lien avec leur apprentissage du français, si
oui lequel, et ainsi d'analyser le rapport qu'ils effectuent entre
apprentissage de la langue et l'intégration.
Cette représentation prégnante qui constitue
à dire qu'apprendre le français c'est s'intégrer
(Biichlé, 2015) est devenu un lien quasi automatique entre maitrise de
la langue du pays d'immigration et intégration, ce qui représente
une source d'insécurité pour les apprenants. C'est
précisément ce point que je développerai dans la partie
suivante.
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