WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le rôle que joue l'apprentissage du français dans le processus d'intégration des migrants en structures associatives

( Télécharger le fichier original )
par Shazia Nazir
Université d'Avignon - Master didactique du FLE/FLS et éducation interculturelle 2017
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

1.3 Motifs de migration : entre volonté et obligation

En ce qui concerne mes enquêtés et leurs choix d'immigrer en France, je peux déjà dire qu'il ne s'agit pas de migrations touristiques à caractère temporaire mais plutôt de migrations politiques et économiques ayant une visée d'installation sur le long terme. Parmi ces types de migrations, deux nécessités ont motivé leur départ : les uns ont choisi de migrer pour améliorer leurs conditions de vie, les autres parce qu'ils y ont été obligés pour sauver leur vie. On distingue alors la migration volontaire de la migration forcée. En ce qui concerne la migration volontaire, il s'agit d'un départ préparé et organisé. Au sein de mon étude il y a des personnes ayant immigré en France pour du travail ou celles ayant bénéficié du regroupement familial :

« Il s'agit ici de familles où la décision d'émigrer a été prise dans le cadre d'une situation non extrême, où elles ont eu au moins le temps de préparer le déménagement. Les perturbations internes de la famille, ou externes à elle, qui déclenchent l'idée d'émigrer sont variées (raisons professionnelles, mariage avec un étranger, retour au pays après un séjour extérieur prolongé) mais la plupart du temps, elles relèvent d'une stratégie destinée à améliorer les conditions de vie » (Barudy, 1992 : 55).

La migration forcée se différencie de la migration volontaire car elle n'est pas voulue et qu'elle résulte souvent d'une décision prise en urgence, pour mon étude j'évoquerai le cas des demandeurs d'asile en attente du statut de réfugié :

« Dans ce cas, il s'agit de perturbations qui, par leur intensité ou leur durée, sont ressenties comme une catastrophe pour les membres de la famille. La décision d'émigrer émerge comme une réponse adaptative prise entre la vie et la mort. C'est le cas, par exemple, de la migration liée à des situations de répression politique, de guerre et de catastrophe naturelle » (Barudy, 1992 : 53).

38

Enfin, que la migration soit volontaire ou non, il y a les sans-papiers, ce sont des personnes entrées illégalement en France sans être en possession des documents nécessaires (passeports et visas) ou qui sont entrés légalement au début mais qui ont prolongé leur séjour au-delà du délai légal, on retrouve notamment les personnes déboutées du droit d'asile (Wihtol de Wenden, 2010 : 54).

Dans tous ces cas, à leur arrivée en France, les migrants sont confrontés à de nombreux changements en termes d'identité (vêtements, habitudes culinaires, langue(s), etc.). Ce voyage interroge de manière incessante les composantes de leur identité et de celle du pays d'immigration car cette immigration apporte des changements culturels (Sallaberry, 2009). Le changement linguistique apporte le changement culturel pour le migrant car il va devoir apprendre à penser par le discours de la nouvelle langue car « la pensée s'informe dans du discours, et le discours, c'est la langue mise en scène socialement, selon les habitudes culturelles du groupe auquel appartient celui qui parle » (Charaudeau, 2009 : 16) mais aussi à revoir les représentations propres à son pays et à sa/ses langue(s) d'origine car :

« la migration impose, dans la plupart des cas, la confrontation avec un ou des systèmes linguistiques différents, une sorte de (bi)multilinguisme « obligé », une remise en cause des représentations » (Biichlé, 2007 : 89).

En effet, quitter son pays, c'est aussi changer de langue et apprendre à se débrouiller avec cette langue : « c'est se trouver en présence non seulement d'un système linguistique différent, mais d'une nouvelle manière de communiquer, de se définir soi-même par rapport au monde » (Lüdi et Py, 1986 : 56). Les migrants se retrouvent ainsi dans une situation de conflit cognitif entre l'identité qu'ils avaient dans leur pays d'origine et celle qu'ils doivent reconstruire/réajuster dans leur pays d'immigration, c'est pour cela que : « La migration reste par excellence un lieu de conflit identitaire » (Lüdi, 1995 : 242). Ce conflit cognitif s'opère également parce que le migrant doit apprendre à s'adapter à un nouveau contexte et ainsi développer de nouvelles aptitudes ce qui bouleverse ses anciennes aptitudes conçues pour son environnement d'origine :

« la famille avant d'être bouleversée par les événements qui vont la pousser ou la décider à émigrer, avait développé dans son contexte des modalités adaptatives (comportements et croyances) dans le but de faire face à ses changements internes [...] et aux changements de son environnement naturel et social » (Barudy, 1992 : 52)

La diversité des facettes identitaires présentes chez un individu témoigne de

39

l'impossibilité de considérer l'identité d'un individu comme monolithique. Chez les migrants, il est encore plus difficile de parler d'identité unique car en plein processus migratoire, leur identité évolue sans cesse : « le positionnement identitaire dépendra des pratiques sociales dans lesquelles les individus évoluent, et l'identité prendra de nouvelles formes selon le contexte dans lequel se déroule le discours » (Barbier, 2008 : 5). Ainsi, en prenant en compte tous ces éléments, il me parait plus pertinent d'envisager l'identité des migrants comme plurielle : « L'identité complexe, plurielle, ne serait-elle pas la règle plutôt que l'exception dans des situations de migration ? » (Lüdi, 1995 : 247).

Les raisons pour lesquelles ces personnes émigrent jouent un rôle essentiel car elles conditionnent leur bonne installation en France. L'intégration de ces personnes en dépendrait même, tout l'enjeu pour ces personnes serait de passer outre ces barrières socioculturelles et de : « surmonter ses ruptures et conflits socioculturels afin de s'intégrer ou de se positionner dans la société globale » (Manço, 2002 : 71) car il se pourrait que ces premiers éléments puissent mettre :

« en péril le processus de détachement par rapport aux personnes et aux expériences connues dans le milieu d'origine et, en même temps, constituer un obstacle au processus d'ouverture au nouvel environnement » (Barudy, 1992 : 55).

L'intérêt d'évoquer ces profils de migrants c'est aussi de réaliser qu'en tant enseignants de FLE/FLS nous sommes en face d'apprenants mais surtout de personnes en situation de difficultés au quotidien car ils sont en plein chamboulement identitaire. La particularité de ce public en termes de didactique du FLE/FLS réside dans le fait que ces migrants en apprenant le français ont pour objectif de s'intégrer socialement « les migrants ont, en apprenant la langue du pays d'accueil, un projet et un objectif précis puisqu'il s'agit pour eux de s'intégrer dans la société » (Adami, 2012 : 20). Ainsi, la situation des migrants influencera le travail de l'enseignant qui s'orientera idéalement sur leurs besoins premiers au quotidien.

J'ai pu constater que la position intermédiaire de migrant pouvait être difficile à porter pour un apprenant de FLE/FLS, dans la partie qui suit, je montrerai en quoi l'apprentissage du français amène à la question de l'intégration et quels sont les enjeux qui reposent autour de ces questions.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius