II - Responsabilité envers l'enfant
203. La Cour d'appel de Paris, dans l'arrêt du 29
septembre 2000*, a accueilli l'action en responsabilité civile
intentée par l'enfant, représenté par sa mère en
qualité d'administratrice légale, à l'encontre de son
père pour lui avoir fait subir une opération de circoncision
rituelle lors de l'exercice de son droit d'hébergement.
204. Le bien-fondé de la réparation du
préjudice subi par l'enfant n'est pas explicité par la Cour
d'appel. Il faut donc s'interroger et tirer la portée de cette solution.
Les juges ont nécessairement retenu une faute à l'encontre du
père pour faire jouer l'article 1382 du Code civil. Mais en quoi
consiste la faute? quid du préjudice de l'enfant ?
205. Un commentateur explique que « ce qui est ici
sanctionné c'est en quelque sorte le choix éducatif du parent.
(...) Certes, les juges ont statué sous l'empire de la loi du 8 janvier
1993. Néanmoins, les dispositions issues de la loi du 4 mars 2002 sont
imprégnées de l'activité jurisprudentielle novatrice, la
résidence alternée en est un exemple. Et, en l'espèce, il
ne serait pas improbable que ces juges aient prématurément
illustré les devoirs parentaux du nouvel article 371-1 du Code civil :
le devoir de protéger l'enfant dans le respect dû à sa
personne et le devoir d'associer l'enfant aux décisions qui le
concernent, selon son âge et son degré de maturité
»124. Ces nouvelles dispositions revalorisent le statut de
l'enfant en mettant en avant sa qualité de sujet de droit. Parents et
enfants deviennent, à certains égards, débiteurs et
créanciers les uns des autres .
206. C'est précisément contre quoi s'insurge un
autre commentateur : « Parents et enfants ne sont pas débiteurs
et créanciers les uns des autres (...) Mettre, comme en l'espèce,
une réparation civile à la charge de père au
bénéfice de son fils revient alors à affirmer la
possibilité pour les enfants de critiquer devant les juges les choix
éducatifs faits par leurs parents et de demander, sur le seul plan
civil, la réparation des conséquences qu'ils jugeraient
dommageables de ces choix. Le raisonnement est dans l'air du temps (...). Il
est cependant permis de s'interroger sur le bien-fondé de ces solutions
qui envisagent les relations entre parents et enfants de moins en moins comme
des pouvoirs donnés aux premiers et de plus en plus comme une
responsabilité de laquelle ceux-ci devront dorénavant
répondre lorsqu'ils auront causé à leurs enfants des
dommages en ne les élevant pas « bien ». »125
207. En tout état de cause, il faut aussi se demander
pourquoi cette solution (qui porte sur une circoncision non traumatisante et
sans complications) n'a pas été reprise par la décision
suivante de la Cour d'appel de Lyon du 10 janvier 2011*. En effet, il a
été relevé par la Cour d'appel de Lyon que la circoncision
avait été, en l'espèce, « doulou-
124Stéphanie Pons, préc., page 240.
125 C. Duvert, note sous CA Paris, 29 septembre 2000*, D. 2001,
juris. Page 1585.
55
reuse » et « traumatisante » pour
l'enfant126.
208. La condamnation au versement de
dommages-intérêts est lourde de conséquences. Ne perdons
tout de même pas de vue que cette décision du 29 septembre 2000*
reste un cas isolé. Plus courante est la sanction du mésusage par
les parents de leur autorité parentale par la perte ou la
réduction des droits liés à l'autorité
parentale.
|