A - Le renvoi constant aux règles de
l'autorité parentale
139.La jurisprudence a qualifié la
circoncision rituelle de l'enfant d'acte non usuel de l'autorité
parentale. Il s'agit en conséquence d'une décision devant
être prise conjointement par les deux parents. Certains parents, ne
parviennent pas à se mettre d'accord sur la nécessité de
circoncire ou non l'enfant. Un conflit naît, faisant de l'enfant l'otage
des divergences culturelles de ses parents. Si le juge est saisi, c'est dans
l'espoir qu'il sorte la famille de l'impasse dans laquelle elle se trouve, en
interdisant ou en autorisant l'intervention.
140. Mais c'est à une justice évasive,
peut-être parce que mal à l'aise, à laquelle le couple
mixte est confronté. En effet, le juge refuse d'examiner la demande (CA
Aix 26 mai 1998*95, en l'espèce le refus est exprès ;
CA Grenoble 19 juin 2007*), ou parfois encore la rejette. Ce rejet est
motivé par le rappel des règles de l'autorité parentale
(CA Versailles 15 mars 2007* ; CA Paris 2 avril 2007*; CA Lyon 25 juillet 2007*
; CA Rennes 3 juillet 2008* ; CA Besançon 17 octobre 2008* ; CA
Besançon 14 novembre 2008* ; CA Nancy 5 octobre 2009* ; CA Bordeaux 27
mars 2012* ; CA Grenoble 23 octobre 2012*).
141. Ainsi, par exemple, dans un arrêt rendu le 14
novembre 2008*, la Cour d'appel de Besançon énonce que : «
Dans la mesure où les deux parents exercent en commun l'autorité
parentale, il convient de rappeler au père qu'il ne pourra faire
procéder à la circoncision de l'enfant sans l'accord
préalable de la mère ». Deux cours d'appel sont même
allées jusqu'à considérer la requête comme
étant « dépourvue de valeur juridique » (CA Paris 13
septembre 2000*96), ou « sans objet »
95 CA Aix 26 mai 1998* : le père demande notamment
l'autorisation de faire procéder à la circoncision de son fils.
La Cour d'appel rejette sa demande et refuse expressément de se
prononcer sur la question de la circoncision : « sans même qu'il y
ait lieu d'examiner le problème de la circoncision souhaitée par
le père pour son fils, qui n'est que l'un des nombreux points sur
lesquels les parents sont en conflit ».
40
(CA Riom 17 avril 2007*97).
142. En se bornent à rappeler que la circoncision est
un acte non usuel nécessitant l'accord des deux parents, le juge renvoie
le conflit entre les mains des parents ( à charge pour eux de trouver un
accord). Tel un dessin d'Ouroboros98 , il est renvoyé
à l'accord des parents, alors que c'est précisément parce
qu'il sont en désaccord que le juge a été saisi ! Ce
comportement des juges équivaut à une absence de décision
: le conflit n'étant toujours pas tranché. Tout porte d'ailleurs
à croire en la pérennité de ce conflit, surtout pour des
parents mixtes divorçants ou divorcés.
|