A. Public
Le public cible de cette recherche était, dès le
début, très limité : il s'agissait avant tout
d'enseignants de FLE débutants, ou en cours de formation. L'idée
du caractère néophyte de ces sondés résidaient dans
l'idée d'une absence relative d'habitus de pratique trop fermement
ancrés dans la pratique des enseignants. Nous nous sommes donc
adressés aux alentours du mois de Mars aux étudiants de M1
Didactique du Français Langue étrangère de
l'Université du Mans en prenant contact avec une enseignante afin
d'intervenir directement dans son cours. Cela représentait (après
participations aux questionnaires) dix-neuf personnes. Suite à la
demande de participation au module de formation, nécessaire à la
suite de cette recherche, seulement trois personnes sur les dix-neuf
participants au questionnaire se sont présentées. Elles ont
toutes accepté de réaliser l'entretien de fin d'étude. Si
nous limitons notre échantillons uniquement aux personnes ayant suivi
l'étude dans sa totalité, notre échantillon concerne donc
des étudiants de M1 Didactique des langues, de 20 à 25 ans, et de
nationalité française. Les informations les concernant ont
été regroupées dans le tableau ci-dessous et
anonymisées dans la transcription. Les références seront
ré-utilisées.
Référence
|
Âge
|
Nationalité
|
Expérience dans l'enseignement
|
E1
|
25 ans
|
Française
|
150h
|
E2
|
21 ans
|
Française
|
20h
|
E3
|
22 ans
|
Française
|
20h
|
50/109
B. Questionnaire
1. Réalisation de la grille
Lors de la création de nos questionnaires, nous avons
fait le choix de répondre à notre problématique en nous
concentrant sur trois items : déplacement, gestuelle et
proxémie . Ces questionnaires ont pour objectif une estimation
subjective de la part des participants à leurs actions dans le cadre de
la salle de classe. Nous envisagions de les utiliser comme
référence pour nos entretiens afin de contrôler les
réponses des enquêtés, et les avions alors
conçu comme une sorte de «diagnostic de pratique» : les
questions posées et les réponses apportées ont
été réutilisées lors des entretiens afin
d'approfondir non seulement la réponse apportée en l'état,
mais également fournir des éléments de réponses
à une comparaison avant/après.
Les questionnaires contiennent dix-neuf questions, alternant
questions ouvertes et questions fermées à annoter sur une
échelle de Likert de 1 (pas du tout) à 5 (beaucoup). Le
questionnaire se termine par un encadré «démographie»
qui propose aux participants de fournir des données
démographiques (âge, sexe, origine...). La grille des
questionnaires se trouve en annexe A1 de notre mémoire.
2. Collecte des données
Pour la collecte des données, nous avons fait le choix
d'intervenir dans la classe des M1 FLE en en faisant la demande auprès
de l'enseignante concernée. Nous nous sommes donc rendu sur place et
avons très rapidement présenté les raisons de notre
présence sans trop nous attarder sur la problématique et les
enjeux du mémoire afin de ne pas influencer les réponses des
sondés. Il a été fermement précisé lors de
la présentation du questionnaire et des raisons de notre présence
dans la salle que la participation à ce questionnaire n'était pas
obligatoire car elle nécessitait un engagement sur la durée : un
engagement à se présenter au module proposé, et un
engagement à répondre à un questionnaire final - choix
de
51/109
méthodologie qui sera modifié plus tard au
profit d'un entretien. Sous les encouragements de l'enseignante, de nombreux
étudiants ont souhaité participer.
La collecte des données aura duré environ 25
minutes, au terme desquelles nous avons relevé les informations de
contact des participants afin de les informer de la tenue du module de la suite
de la recherche par mail. L'objectif d'une participation dans leur classe, en
cours d'année et de la prise d'information de notre part soulignait un
besoin de pénaliser le moins possible les participants et ne pas leur
faire subir des contraintes quelconques.
C. Module de formation
1. Réalisation du module
Le module de formation proposé est un
élément clef de notre recherche : c'est lui qui conditionne
l'impact sur la pratique des enseignants. Afin de le réaliser, nous nous
sommes informés sur les tenants et les particularités de
l'andragogie, sous les conseils avisés de notre directrice de
mémoire, et ce dans le but de proposer aux étudiants de
l'université une formation qui réponde au plus près
à leurs besoins. Nous avons ainsi décidé de suivre une
approche interrogative avec les étudiants, et ce afin de nous appuyer
sur leur connaissance et leur expérience, et également leur
permettre d'eux-mêmes de développer une réflexion autour de
l'exercice proposé.
Nous avons élaboré notre module autour de
l'étude d'une vidéo en salle de classe, en faisant le choix de
sélectionner un enseignement non-allophone afin d'induire - même
de manière très superficielle - un retournement de situation pour
les étudiants (le français étant leur langue maternelle,
nous avons sélectionné un cours en anglais afin de leur permettre
de se «mettre dans la peau» de leurs apprenants).
Nous avons ensuite proposé le remplissage d'un tableau
comme exercice central de discussion : en regardant la vidéo, les
étudiants devaient remplir le tableau. Une fois le
52/109
visionnage terminé, nous proposions un regroupement des
idées et des échanges afin de comparer la pratique
observée et leur pratique, tout en faisant des parallèles avec la
pratique de leurs enseignants. Le cadre du module est disponible en annexe
2.
2. Enjeu et retour critique
La réalisation de ce module a été, pour
nous, une très bonne expérience d'enseignement que nous avons
filmé afin de permettre une observation ultérieure. Les
échanges réalisés avec les étudiants ont
été très riches et très intéressants, leur
participation était au rendez-vous et, bien que sur l'heure et demie
pensée à la réalisation de ce module, la présence
de seulement trois participants sur les dix-neuf originels a fortement
réduit la durée de cette formation.
Lors de la création de ce module, nous avons
essayé d'être tout particulièrement vigilant à notre
propre pratique paraverbale, non verbale et proxémique : nous avons tout
d'abord changé la disposition des meubles afin de créer des
îlots et ce, afin de permettre des échanges sociofuges entre les
étudiants. Nous avons ensuite essayé d'être attentif
à notre propre posture, notre ton et notre manière de nous
déplacer : une étude ultérieure de la vidéo montre
de notre part trois points steady. La zone située devant le
tableau est une zone de passage qui semble incontournable (pour écrire,
montrer des choses de la projection...). A la droite des apprenants, nous avons
également noté un point steady où nous nous asseyons sur
les tables, et enfin un dernier point, derrière les étudiants.
Nous avons tenté d'illustrer le concept de la
proxémie en nous plaçant très près d'un
étudiant afin de créer un certain inconfort de sa part. Nous
avons également tenté d'utiliser des gestes de manière
plus consciente : de façon personnelle, cet exercice s`est
révélé très significatif. Nous sommes donc
satisfaits de la «prestation» d'enseignement réalisée,
des bénéfices scientifiques qui en découlent et de la
réception de la formation proposée auprès des
étudiants.
53/109
D. Entretiens
1. Réalisation de la grille
Pour la collecte de ces données et étant
donné le faible nombre de participants au module, nous avons fait le
choix de modifier notre protocole de recherche originel - un second
questionnaire - pour privilégier des entretiens afin d'obtenir le plus
d'informations possibles et de pouvoir les détailler, les approfondir si
nécessaire. Nous avons fait le choix également de réaliser
une grille pour des entretiens semi-directifs afin de pouvoir s'adapter
à la conversation mise en place avec les enquêtes.
Pour ce faire, nous avons réalisé notre grille
autour des trois thèmes choisis comme angle de recherche pour la
réponse à notre problématique : communication, geste de
l'espace et cohérence approche réalisée/approche
pensée. A noter que ces éléments ne sont pas fixent :
comme précisé dans notre partie Protocole de recherche,
l'objectif des entretiens était de faire émerger des
éléments verbaux relatifs à des items particuliers. Nous
avons conçu notre grille autour de 3 items principaux, mais le cadre
semi-directif des entretiens encourageait à aborder des
éléments autres, voir à les ignorer.
2. Conduite des entretiens
Les entretiens se sont déroulées du 31 juillet
au 6 août. Un délai entre suivi du module et entretiens nous
apparaissait nécessaire afin de laisser le temps aux étudiants de
mettre en place, développer d'eux-mêmes les concepts
abordés. Afin de fixer les rendez-vous pour les entretiens, nous avons
contacté les trois étudiants par sms et leur avons proposé
de réaliser les entretiens via skype - nous étions à
l'étranger à cette période de l'année. Nous avons
voulu enregistrer les entretiens pour plusieurs raisons : tout d'abord, pouvoir
en garder une trace, afin de pouvoir les réécouter entre deux
entretiens afin de pouvoir changer les questions,
54/109
l'approche à prendre... en somme, améliorer la
performance «enquêteur». Nous avons donc utilisé le
logiciel MP3 Skype Recorder pour cela.
Pour illustrer les changements apportés à la
tenue des entretiens, il nous semble important de nous arrêter un instant
sur l'E1 ; Au cours de celui-ci, la première question posée
à l'enquêté a été celle-ci :
m : donc pendant la présentation que tu as suivi
dans le cadre de la recherche de mon master/de mon mémoire pardon nous
avons abordé différents concepts notamment celui de la
communication non verbale de la gestuelle et de la gestion de l'espace si tu te
rappelles bien est-ce que c'est quelque chose que tu as vu en cours
auparavant
Il s'est avéré, à la suite de
l'entretien, que l'enquêté de se rappelait pas du contenu et du
déroulé du module, ce qui rendait les questions suivantes
caduques. Nous avons donc souhaité commencé les entretiens
suivants par une remise en contexte, afin non seulement de nous assurer que
l'enquêté avait en effet été
«sérieux» dans le suivi du protocole de recherche, mais
également pour mettre en place un climat détendu. En effet, il
nous semblait important pendant ces entretiens de garder une ambiance sereine
pour ne pas mettre les enquêtés mal à l'aise.
Pour l'intégralité de nos échanges, nous
avons choisi le français comme langue de communication. Au cours des
entretiens, nous avons fait attention à rester le plus neutre possible,
à ne pas être dans une posture de jugement. Nous avons fait un
effort particulier de reformuler les propos des enquêtés de
manière régulière pour nous assurer de notre
compréhension ou susciter une réaction.
En ce qui concerne la transcription des entretiens, nous avons
choisi de ne pas mettre en place de ponctuation et n'avons utilisé que
très peu de marques paraverbales : nous avons fait le choix d'utiliser
un tiret (-) pour marquer une pause, une suspension. Nous utilisons les
étoiles entre crochets [***] pour marquer un moment
d'incompréhension de l'enregistrement. Nous utilisons enfin le slash (/)
pour marquer une coupure de parole ou un ton saccadé. Nous avons
également anonymisé les questionnaires par des xxxxxx en cas de
citation de nom.
55/109
Cette étude n'étant pas concentrée sur
les spécificités de l'oral, ces choix semblent raisonnables.
V. Analyse du corpus
A. Fiabilité des données
Avant de discuter de l'analyse des données
collectées, il semble important de nous arrêter un instant sur la
fiabilité des informations relevées. Dans notre partie Discussion
sur la méthode, nous approfondirons la question des méthodes
utilisées pour la réalisation de cette recherche, nous
reviendrons sur les erreurs commises, les choses apprises, les
éléments satisfaisants de notre étude. Comme nous l'avons
précisé dans notre partie sur les questionnaires, le nombre de
participants entre le début de cette étude et la fin de celle-ci
a grandement diminué, or, un facteur quantitatif semble pertinent pour
rendre valide les données collectées, ce qui, avec seulement
trois entretiens, ne semble pas le cas.
Pourtant, les informations relevées ont un certain
intérêt, et pourront peut-être paver la voie à de
futures recherches en proxémie didactique. Nous avons donc fait le choix
de les présenter tout de même, en nous attardant essentiellement
sur les éléments verbaux présents dans les entretiens
réalisés, tout en croisant les données recueillies dans
les entretiens (le «après») avec les données objectives
recueillies dans les questionnaires (le «avant»).
B. Formation suivie
Cette étude a été en partie fondée
sur l'assertion suivante : une initiation aux concepts de la communication non
verbale, de la gestuelle et de la gestion de l'espace est manquante dans la
formation des enseignants de FLE. Cette assertion s'est basée
intégralement sur notre
56/109
propre expérience d'étudiant de FLE à
l'Université du Maine et pouvait, à raison, ne pas être
avérée pour des étudiants d'autres villes. Il convenait
alors en premier lieu de nous assurer que ce «manque» était
également vrai pour les étudiants enquêtés. Nous
n'avons pas réalisé cette vérification dans les
questionnaires : ceux-ci ont été peu introduit afin de ne pas
influencer les réponses des enquêtés. Nous n'avons donc pu
aborder cette question qu'au cours des entretiens.
m : donc pendant la présentation que tu as suivi
dans le cadre de la recherche de mon master/de mon mémoire pardon nous
avons abordé différents concepts notamment celui de la
communication non verbale de la gestuelle et de la gestion de l'espace si tu te
rappelles bien est-ce que c'est quelque chose que tu as vu en cours
auparavant
e1: mhhh- j'pense pas non
Au cours de cet entretien, la question a été
posé un peu fermement et la réponse donnée est très
fermée. Nous avons déjà abordé les petits
problèmes survenus lors de l'entretien 1, problèmes qui nous ont
encouragé à repenser le déroulement de nos entretiens. Au
cours des entretiens suivants, la même réponse est apparue :
m : voilà tout à fait ça donc ces
concepts là ça a attrait à la communication non verbale
à la gestuelle et à quelque chose qui s'appelle les agencements
didactiques mais en gros c'est pour parler de la gestion de l'espace est-ce que
ce sont des choses que tu as vu en cours auparavant
e2 : euh-j'en ai pas le souvenir
m : pas du tout dans ta formation
e2 : je m'en j'en ai pas le souvenir d'avoir vu
ça avant après comme moi j'avais fait un campus
international avant on m'avait montré quelque trucs pour éviter
que ça fasse trop formel donc je savais quelques choses mais
après est-ce que après on me la redit en cours je suis pas
sûre quoi
L'E3 apporte une certaine nuance et un recul sur les concepts
abordés en précisant que ces notions n'ont peut-être pas
été le sujet in sine d'un cours, d'une UE, mais qu'elles
ont été abordées par les enseignants de la formation au
cours d'anecdotes. La question de l'anecdote
57/109
comme pratique de formation/de transmission est très
intéressante, surtout lorsqu'on parle de représentation ou de
pratique professionnelle, mais n'étant pas le sujet de notre
mémoire et ne connaissant que très peu de choses à ce
sujet, nous n'aborderons pas ce point trop longuement ici.
e3 : euh- très très vaguement c'est
très succinct on va dire
m : est-ce que tu peux me dire dans quel contexte ça a
été vu
e3 : c'était juste je crois des anecdotes que
les enseignants nous donnaient par
rapport à leur profession des choses comme
ça
m : d'accord donc ce n'était pas le sujet d'un
cours
e3 : non
m : c'est c'était vraiment dans le cadre du cours
l'enseignant ou les enseignants ont
raconté des petites anecdotes c'est ça
e3 : oui oui
Mais il semble important de souligner que notre
hypothèse de départ est vérifiée dans ces trois
entretiens, et ouvre la porte à une autre question : ce manque est-il
important pour les étudiants ? A cette question, les réponses
sont mitigées, et dépendent de la personnalité ou de
l'expérience des sondés. L'enquêté 1, un homme avec
une expérience relative de l'enseignement, ne semble par exemple pas
penser que cette formation serait importante pour lui : le reste de l'entretien
montre une personne relativement extravertie, qui parle beaucoup avec ses
mains, très joviale (il a beaucoup ri pendant les échanges). Il
est possible que sa personnalité plutôt extravertie lui permette
de prendre en charge les échanges en classe, ne pas avoir peur
d'être proche des apprenants et ne pas hésiter à
«chambouler» les espaces pour se les approprier. De la même
façon, l'E3, qui semble assez affirmée, aborde l'idée
d'avoir travailler cela toute seule de son côté :
e3 : je sais pas si c'est grave mais c'est quelque chose
enfin que je pense avoir travaillé toute seule de mon côté
en fait
58/109
A partir de ces suppositions, nous pouvons donc penser qu'en
effet, une initiation à de tels concepts ne soit pas pertinente pour les
étudiants. Pourtant, quand nous posons la question à des
étudiants moins extravertis, moins expérimentés, la
réponse est plus tranchée :
m : est-ce que `après toi c'est quelque chose qu'il
aurait été bien de voir dans ta formation initiale
e2 : définitivement je pense que ça
aurait été intéressant dans notamment le cours du
premier semestre où on doit donner un cours à des
élèves DELF je trouve que ça aurait été
intéressant car ça nous aurait permis de d'aller beaucoup
plus loin dans notre séquence et notamment de voir bah
qu'est-ce qu'on pourrait faire pour pour déplacer les
tables etc faire des groupes et tout et je trouve que
ça aurait été plus intéressant pour nous
plutôt que de rester au niveau du tableau et d'attendre quoi
Nous pouvons donc poser la question de la
légitimité d'une telle formation, surtout si elle semble
n'affecter positivement qu'un tiers des étudiants qui pourraient
potentiellement la suivre. Il convient donc de poursuivre notre analyse.
C. Sur la communication
Nous avons voulu vérifier si la prise de parole, suite
à une initiation aux concepts de la communication, semblait
facilitée pour les étudiants. Pour étudier cela dans les
propos des étudiants, et pour conserver de la cohérence avec
notre cadre théorique, nous avons relevé dans le discours la
présence d'éléments relatifs à trois aspects de la
communication :
1- le paraverbal
2- le verbal
3- le geste
Nous avons noté, au cours de notre étude des
propos rapportés, la présence de tels indicateurs :
59/109
m : donc t'essayes de moins rester au tableau d'accord
est-ce que donc on a parlé également de la distance avec les
apprenants est-ce que tu te rends compte que t'es beaucoup plus proche d'eux
que tu tu tu te permets peut-être pas de les toucher mais y'a une
distance moins importante avec eux
e3 : bah oui du coup je vois [qu'on peut mieux les aider?]
je me mets à côté d'eux enfin comment dire j'ai
j'ai baissé un peu la hiérarchie qu'on va avoir comment
dire dans une salle de classe traditionnelle mais c'est plus enfin je sais pas
plutôt camarade de classe
Dans cet extrait, il est ici question du paraverbal, et plus
particulièrement l'idée de la posture, mais nous trouvons
également des facteurs proxémiques (de distance avec les
apprenants). L'idée de hiérarchie est avancée : la place
de l'enseignant comme étant au sommet du triangle didactique est
questionnée par l'enquêté, qui change volontairement de
place pour briser ce schéma classique et encourager les interactions
avec les apprenants.
A la suite de cet échange l'enquêté 3 nous
a raconté son expérience de l'enseignante où il a
commencé par former des apprenants arabophones, très
réactifs (bavards), puis s'est retrouvé face à un public
coréen. Le changement a été assez difficile.
e3 : mais euh- c'est eux qui me posaient des questions et
tout ça alors que que avec les étudiants coréens
j'étais obligée de toujours faire le premier pas
en fait pour vraiment y'avait pas d'initiatives de leur
côté en fait c'était compliqué
m : d'accord là j'ai une question qui va donner
peut-être un peu l'impression de juger mais en fait c'est pas ton
rôle en temps qu'enseignant justement de faire ce premier
pas
e3 : bah du coup je me l'étais jamais je
m'étais jamais posée la question parce qu'en fait les premiers
étudiants que j'ai eu faisait ce premier pas
d'eux-mêmes
m : d'accord
e3 : ou alors je l'ai fait un tout petit pas et ils se
sont tout de suite ouvert alors que là avec ces étudiants
là il fallait que je fasse beaucoup plus d'effort en fait
Si la question que nous avons posé concernant son
«rôle» en temps qu'enseignant semble porteuse de jugement, ce
choix était conscient pour faire émerger les
représentations du métier d'enseignant de cet étudiant.
Ici, il semble que l'étudiant-enseignant n'a pas eu à
60/109
être dans une attitude proactive avec ses apprenants
pour encourager les échanges et susciter l'interaction : il lui aura
fallu une expérience secondaire avec un public à la culture
éducative très différente pour mettre en question cette
posture.
Nous avons ensuite voulu vérifier si ce changement de
posture n'était uniquement le fruit que de la pratique :
m : d'accord et ces choses là tu t'en rends compte
par la pratique en fait c'est pas ta formation qui te permet de voir
ça
e3 : non non non alors après enfin un petit
peu quand même on nous fait voir des études de cas sur les
différentes cultures éducatives et tout ça mais c'est trop
théorique pour notre activité
L'enquêté nous a ainsi confirmé que si la
pratique professionnelle est importante pour la création des
représentations, une étude au préalable au cours de la
formation est aussi très importante. Il critique le caractère
trop théorique de la formation en question.
Nous avons ensuite croisé cette information fournie par
l'E3 avec les questionnaires fournis : il s'avère que
l'enquêté 3 a répondu à la question 13 «j'ai
peur d'interrompre mes élèves quand ils travaillent» un 2/5.
Sa confiance semble avoir un peu évolué en ce sens. Il y a eu peu
d'évolution sur cet aspect pour l'E1. L'E2 semble quant à lui
avoir fait des efforts sur l'aspect communication :
m : d'accord est-ce que du coup tu as remarqué des
changements dans la manière dont tu t'adresses à tes
apprenants
e2 : --- un peu plus ouais je- je fais beaucoup
plus attention je faisais déjà très attention à
commencer je parlais etc mais beaucoup plus après je me suis dit faut
vraiment faire très gaffe au niveau de l'oral quoi donc euh- j'essayais
de parler de manière beaucoup plus posée de reformer de
reformuler beaucoup plus mes phrases des choses comme
ça
m : tu es beaucoup plus attentive à la
qualité de ta langue
e2 : exactement
61/109
Pour cet enquêté, la posture a également
changé :
m : d'accord et ta posture aussi ton ton ces
choses-là jouent
e2 : euh- j'pense que oui parce qu'après
j'étais euh- je pense que si t'en parles à mes
élèves DUARD ils te diront que j'étais pas une prof
très stricte *rires* mais au- au campus d'été ai
j'ai essayé d'être vraiment de de m'asseoir au même niveau
qu'eux beaucoup plus souvent DUARD comme j'écrivais beaucoup au
tableau je restais debout euh- j'ai fait donc de m'asseoir beaucoup euh- j'ai-
là avec le campus international euh- j'ai pas
hésité à m'accroupir pour pour regarder ce qu'ils
faisaient eux ils étaient un petit peu au dessus de moi comme ça
pour pour essayer de mettre une autre relation dans la classe que prof
élève quoi
m : et du coup pour toi ce changement de posture il fait
que tu es pas très sévère
e2 : en fait j'ai jamais été une prof
sévère en fait au final donc voilà mais ça
évite de surtout qu'en fait j'ai surtout j'ai tendance un petit peu moi
personnellement dans ma tête m'énerver alors Mr xxxxxx s'en
aperçoit pas il dit que je suis très calme avec mes
élèves donc c'est bien mais en fait moi dans ma tête je le
ressens là par exemple au travail là toute l'après-midi
y'a des moments où dans ma tête je vais être en train de
crier quoi en gros et euh- et le fait de changer de position assez
régulièrement ça m'aide moi aussi à m'éviter
de trop m'énerver quoi et de de de de par exemple donner une
réponse alors que je l'attends quoi
m : d'accord ça te permet de passer à autre
chose
e2 : exactement de pas euh- de pas dire bah la
réponse c'est ça et puis on passe à autre chose parce que
je commence à m'énerver moi intérieurement donc comme
ça j'attends un petit peu plus en changeant de position tout
simplement
m : d'accord euh- est-ce que tu as l'impression
d'être beaucoup plus détendue du coup dans ta pratique
e2 : oui
m : le fait de te déplacer et de changer ce
rapport avec les apprenants ça te détend beaucoup plus
d'accord
e2 : oui oui
définitivement
62/109
De même, quant à la question de la gestuelle,
elle semble n'avoir pas évolué au cours de tous les entretiens
:
m : t'utilises beaucoup les gestes de quelle
manière est-ce que tu choisis un sens particulier pour un geste
e1 : euh- ouais je enfin j'ai pas compris que que tu as dit
répète
m : d'accord est-ce que tu utilises des gestes
spécifiques dans des situations précises dans le sens où
tu vas utiliser un même geste pour dire une même idée de
manière continuelle e1 : //tu veux dire que c'est
cohérent et que ça change pas tout le temps et que j'utilise pas
le même geste pour exprimer plusieurs choses
m : voilà
e1 : euh ouais ouais c'est plutôt
ça
m : et d'autres type de gestes que tu utilises t'es est-ce
que tu es quelqu'un qui parle beaucoup avec ses mains de manière
générale ou qui parle beaucoup avec ses mains dans le cadre des
cours de fle
e1 : c'est une bonne question il faut que je m'en serve
*rires* mais je sais que quand j'explique des mots euh- je là
j'utilise beaucoup les gestes
m : t'utilises beaucoup les gestes d'accord est-ce que
c'est inconscient ou est-ce que c'est fait de manière consciente
e1 : ---- c'est spontanée
m : donc c'est pas fait de manière conscience
e1 : je je vois je me vois le faire mais je me dis pas
tiens maintenant je vais faire ce geste là ce / ça vient
naturellement
Pour l'E1, la question de la gestuelle n'a pas bougé :
l'étudiant confie lui-même qu'il utilise beaucoup ses mains pour
exprimer ses idées, et peu d'effort conscient semble avoir
été fait pour essayer de mettre en place une pattern pour la
gestuelle, ou choisir tel ou tel geste pour exprimer telles ou telles
idées de manière consciente. Pour l'E3, l'angle de travail ne
semble pas être le même : l'étudiant confie avoir
l'impression d'avoir déjà mis en place les concepts
abordés :
m : euh- d'accord pareil au niveau des gestes est-ce que
tu fais un peu plus attention à
ça
63/109
e3 : euh- bah non pas trop non enfin en
fait j'ai pas enfin j'avais l'impression de déjà
appliquer les conseils que tu nous avais donnés avant de faire
le module
Nous pouvons ainsi conclure que si notre module d'initiation
n'a pas apporté de grands changements pour nos sondés dans le
domaine de la gestuelle, il semble relativement avoir impacté les autres
traits de communication : niveau de langue et confiance pour aller vers les
apprenants (verbal et paraverbal), et l'espace mis entre les apprenants et les
enseignants. Les représentations en terme de posture semblent avoir un
peu évoluées.
D. Sur la gestion de l'espace
Nous avons abordé dans notre partie
précédente l'idée d'une évolution ressentie dans la
proxémie apprenant-enseignant pour les étudiants
enquêtés dans le cadre de cette recherche. En cela qu'elle
contient des éléments de déplacement dans l'espace
«salle de classe», nous pouvons considérer l'évolution
de cette posture comme une évolution de la gestion de l'espace. Nous
nous intéresserons à trois autres éléments de
gestion de classe qui sont apparus au fur et à mesure des entretiens
:
1- Déplacement dans l'espace didactique
2- Aménagement du mobilier
3- Décoration
Nous commencerons par les aménagements dans les espaces
didactiques en cela qu'ils font échos à la proxémie : le
changement de posture exprimé par les étudiants
enquêtés dénote d'une évolution des
déplacements dans l'espace didactique. Cette évolution est
fortement marquée dans l'entretien 2 :
e2 : [...] moi je me suis assise beaucoup plus sur
le bureau des choses comme ça pour euh- mais c'était
aussi dans un cadre différent c'est à dire que autant le DUARD
toi être très sérieux le campus d'été
international on peut se lâcher un peu plus
64/109
m : d'accord et du coup au niveau de la manière de
présenter tes cours maintenant que tu peux euh- que tu as un peu plus de
libertés est-ce que tu te rends compte que tu te déplaces un peu
plus dans la salle de classe par exemple
e2 : euh- là définitivement je pense
que je me suis beaucoup plus déplacée qu'avec le DUARD notamment
parce que et puis ce qui a beaucoup aidé le fait qu'on a j'avais pas une
classe moi avec des rangs perpendiculaires euh- voilà j'avais
fait des îlots alors en fait pour moi c'était beaucoup plus simple
même de travailler de traverser d'aller voir les élèves etc
plutôt que d'avoir de devoir limite pousser les élèves pour
aller voir quelqu'un qu'était au bout quoi
Cette évolution semble également
dépendante de facteurs extérieurs, à savoir les
impératifs de l'institution et les contraintes des locaux. Cela semble
également être le cas dans l'E3 :
m : d'accord est-ce que depuis qu'on a
réalisé le module tu as remarqué des changements dans les
activités que tu proposes euh- dans ton stage dans ta dans ta pratique
enseignante
e3 : euh- pas vraiment j'ai peut-être
essayé de bouger un peu plus euh- dans la salle euh- mais sans plus
enfin c'est un peu compliqué en même temps quand on peut pas
bouger le mobilier les choses comme ça
Pour l'E2, cette idée de déplacement joue aussi
sur les interactions avec les apprenants : comme nous l'avons cité dans
notre partie précédente, se déplacer semble affecter sa
psyché, son état d'esprit. Au cours de l'E3,
l'enquêté a mis en avant le fait que les apprenants semblent plus
à l'aise pour faire appel à lui si il est en déplacement
que si il est immobile :
e3 : et du coup enfin les apprenants étaient plus
enfin avaient plus envie de de d`apprendre enfin je sais pas comment expliquer
c'est juste j'allais les voir quand assez souvent pour voir s'ils
avaient des problèmes ou pas et que je les assistais un à un ils
étaient plus euh- ils nous demandaient plus de venir des choses comme
ça j'avais moins à j'étais moins loin pour
eux
65/109
m : d'accord comme tu es déjà en
déplacement ça leur pose moins de problème de te demander
de te déplacer
e3 : oui
L'aménagement de l'espace est un aspect qui a bien
évolué dans les entretiens : les enquêtés ont
tendance à déplacer les meubles, principalement pour faciliter
leur déplacement :
e1 : mh- euh- c'est vrai que je préfère
quand les tables sont disposées en U ça permet de
circuler plus facilement et- je sais pas y'a un/y'a un sentiment que la/que la
classe est plus unie en fait alors que quand c'est en rangée normale je
sais pas c'est/c'est un peu plus divisé et euh-- ouais à
part ça non je vois pas
m : la formation en U elle te permet non seulement de
passer plus facilement d'un apprenant à l'autre mais également
d'encourager les interactions entre les apprenants
e1 : ouais c'est vrai ouais y'a ça aussi ouais
ils/ils sont pas obligés de se retourner pour euh- ouais ouais et puis
c'est mieux en en îlot ouais ça je le fais quand je fais des trucs
en groupe bah c'est plus pratique de--
m : / c'est plus facile pour les observer pour les
surveiller et les aider même
e1 : oui
Ceci est également le cas pour l'E2 :
m : d'accord et du coup au niveau de la manière de
présenter tes cours maintenant que tu peux euh- que tu as un peu plus de
libertés est-ce que tu te rends compte que tu te déplaces un peu
plus dans la salle de classe par exemple
e2 : euh- là définitivement je pense que je
me suis beaucoup plus déplacée qu'avec le DUARD notamment parce
que et puis ce qui a beaucoup aidé le fait qu'on a j'avais pas
une classe moi avec des rangs perpendiculaires euh- voilà j'avais fait
des îlots alors en fait pour moi c'était beaucoup plus simple
même de travailler de traverser d'aller voir les élèves etc
plutôt que d'avoir de devoir limite pousser les élèves pour
aller voir quelqu'un qu'était au bout quoi
Les éléments concernant la décoration
sont apparus essentiellement dans l'E1 où l'enquêté
précise :
66/109
m : est-ce que tu envisages dans le futur maintenant qu'on
a eu cet entretien et que je t'ai remis un peu tout à l'esprit de faire
euh- je ne sais pas de de mettre en place des des des décorations dans
ta salle de classe uh- faire des
e1 : *rires* moi qui ai zéro
décoration dans ma chambre *rires* je ne crois pas
Pour les autres enquêtés, cet aspect de la
gestion de l'espace a été laissé de côté en
raison d'élément hors-propos : ils ont tout d'abord
pratiqué dans un cadre n'offrant pas cette liberté, puis dans un
cadre où ils n'ont pas pris cette liberté pour des raisons
temporelles (le campus international d'été se déroule sur
une période limitée). Cet élément n'est pas non
plus apparu dans les échanges de l'entretien, auquel cas nous aurions
tenté de l'approfondir. L'item décoration n'a donc pas
évolué, ce qui est cohérent avec la question 17 des
questionnaires.
Nous pouvons donc conclure que l'évolution des items
«gestion de l'espace» est mitigée dans les entretiens. Son
évolution semble fortement liée aux facteurs extérieurs,
notamment institutionnels.
E. Sur la cohérence
Nous nous sommes ensuite concentrés sur la
cohérence entre l'approche souhaitée à mettre en place et
l'approche actuellement mise en place, items pouvant s'exprimer au travers de
facteurs comme la gestion de l'espace et le type d'activités mises en
place. Les résultats de notre recherche semble plutôt concluant en
terme de gestion de l'espace, de distance avec les apprenants... mais analyser
la pratique effective semble difficile sans observation in situ, ce
dont nous discuterons dans notre Discussion sur la Méthode en partie
finale. Pour cette raison, notre partie sur la cohérence n'a
relevé, au cours des entretiens, aucun élément exprimant
une évolution des représentations, si ce n'est lorsque nous avons
abordé ce point de manière directe au cours de l'entretien
n°2 :
67/109
m : d'accord donc euh- euh- tu as répondu à
toutes mes questions donc si tu prépares une activité avec une
approche communicative tu vas pas euh- tu vas pas la présenter avec une
comme juste un cours traditionnel où tu donnes l'activité
à faire aux apprenants e2 : non
m : tu es beaucoup plus dans la gestion de classe tu te
déplaces tu communiques e2 : exactement
La réponse à cette question se base uniquement
sur les a priori de l'enquêté, ce qui la rend non-fiable.
F. Vers une proposition d'interprétation d'autres
éléments
verbaux
L'analyse proposée précédemment tient
compte d'items que nous avions prévu d'observer et de faire
émerger dans les entretiens. Pourtant, il semble intéressant de
se pencher également sur des éléments qui n'auraient pas
été prévus dans ces entretiens. Pour cette raison, cette
partie a pour ambition de repérer dans les données verbales du
corpus des éléments de changements dans d'autres
représentations des enquêtés.
1. Interactions sociales
Nous avons noté en premier lieu un glissement dans la
compréhension de l'impact de l'agencement didactique de la salle de
classe sur deux facteurs : premièrement, l'encouragement aux
interactions sociofuges. Secondement, une facilité de déplacement
qui engendre une impression de disponibilité. Nous notons ces
éléments dans les extraits suivants
:
e1 : mh- euh- c'est vrai que je préfère
quand les tables sont disposées en U ça permet de
circuler plus facilement et- je sais pas y'a un/y'a un
sentiment que la/que la classe est
68/109
plus unie en fait alors que
quand c'est en rangée normale je sais pas c'est/c'est un peu plus
divisé et euh-- ouais à part ça non je vois pas
m : la formation en U elle te permet non seulement de
passer plus facilement d'un apprenant à l'autre mais également
d'encourager les interactions entre les apprenants
1e : ouais c'est vrai ouais y'a ça aussi ouais
ils/ils sont pas obligés de se retourner pour euh- ouais ouais et puis
c'est mieux en en îlot ouais ça je le fais quand je fais des trucs
en groupe bah c'est plus pratique de--
m : / c'est plus facile pour les observer pour les surveiller
et les aider même e1 : oui
Ici, l'enquêté fait de lui-même le lien
entre l'organisation de l'espace et la facilité de déplacement.
Il évoque également l'idée d'une «unification»
de la classe. Nous supposons que cette idée d'unification induit une
facilité des échanges entre les apprenants. Dans le même
entretien, le lien entre organisation et échanges est fait de nouveau
:
e1 : bah j'essaye de pas euh-- soit pour équilibrer
les niveaux quand on fait des groupes pour pas que tous les bancs se
ressemblent [***J sur la même table et sinon et bah j'essaye euh- de
mélanger les groupes pour pas que- que ce qui se connaissent restent
tout le temps ensemble
Dans cet extrait, l'enquêté met en avant le fait
que l'organisation spatiale est une opportunité double :
opportunité pour l'enseignement de créer des groupes de niveau,
et opportunité d'effectuer un brassage des apprenants pour encourager
les interactions sociales.
Dans cette idée d'interactions sociales, on souligne un
dépassement de l'enseignement/formation/éducation comme pratique
de transmission des savoirs et accompagnement à la conceptualisation de
ces connaissances : les apprenants sont des êtres sociaux, dont les
interactions se poursuivent en dehors de la classe. Cet élément
s'avère très intéressant pour notre partie sur la
cohérence en cela que les approches modernes sont censées
encourager la création et la résolution de conflits
socio-cognitifs, mais n'ayant pas été approfondi, nous ne l'avons
pas inclu dans notre partie précédente.
69/109
Nous avons également noté que ces interactions
entre apprenants peuvent être dérangeantes si elles excluent
l'enseignant :
m : d'accord donc les déplacements que tu fais
semble encourager les interactions entre toi et les élèves est-ce
que tu penses qu'est-ce que tu pourrais faire d'après toi pour
encourager les interactions entre les élèves entre eux
e3 : euh bah j'ai pas eu besoin de le faire parce qu'ils
le faisaient d'eux-mêmes un peu trop facilement *rires*
m : *rires* d'accord je vois ce que tu veux dire
e3 : euh c'est un peu pour rappeler un peu les
étudiants que j'avais c'était surtout des réfugiés
tous ou pour la plupart arabophone et et du coup ils se donnaient les
réponses entre eux enfin ils se faisaient des blagues entre eux et
j'étais un peu toute seule à pas rigoler parce que je comprenais
pas tu vois
2. Formation par illustration
Nos entretiens semblent avoir également mis en avant un
besoin ou une envie de la part des enseignants en formation, notamment en
matière de formation. Nous avons précisé dans notre
première partie qu'une initiation aux concepts de ce présent
travail était manquante à leur formation, mais nous n'avons pas
précisé quelle forme cette initiation était censée
avoir : dans le cadre de notre module, nous en avons fait le sujet principal.
Or, ces éléments peuvent être travaillé
autrement.
L'enquêté 3 nous a par exemple expliqué
que son stage avait débuté par 20 heures
d'observation :
e3 : oui euh- pour mon premier semestre j'avais
fait vingt vingt heures d'observation à peu près
m : d'accord c'est pas mal du coup euh- tu as pu voir un
enseignant très expérimenté ou moyennement
expérimenté d'après toi
e3 : euh je dirai très expérimenté et en
plus c'était pas un enseignant natif
70/109
m : un enseignant quoi pardon
e3 : c'était pas un enseignant c'était un
enseignant non natif
m : ah d'accord
e3 : donc ça rendait encore plus
intéressant l'observation parce qu'on répondait
à
des problèmes que j'aurais pas
forcément vu en temps que native
m : d'accord ça t'a permis de remettre un petit peu en
question ta position
e3 : oui oui oui oui
Il conclut que cette observation, réalisée avec
un enseignant non-natif (ce qui soulève la question des
représentations du natif), lui a permis d'évoluer et de changer
ses perceptions. A cette idée d'évolution des perceptions via
l'observation, nous souhaitons ajouter cet extrait issu de l'entretien n°2
:
m : d'accord est-ce que vous avez eu l'occasion de voir
beaucoup de vidéo de pratique de classe dans le cadre de votre formation
pour voir comment les gens enseignent justement
e2 : euh je me souviens en sociolinguistique Mme xxxxxx
nous avait fait voir une vidéo d'un enseignant d'un enseignant dans le
sud je crois et c'était et qui avait des élèves
russophones arabophones et du coup ils travaillent sur le français et il
demandait comment ça se disait en arabe comment ça se disait en
russe et il faisait répéter à tout le monde en
fait
Nous souhaitons croiser cette réflexion à notre
propre expérience pour la création du module de formation en nous
concentrant particulièrement sur la difficulté à trouver
des vidéos de pratique de classe. Il nous semble que l'utilisation de
vidéos de pratique de classe comme support pédagogique dans la
formation des enseignants de FLE pourrait être intéressante, et
que les enquêtés partagent cette supposition avec nous.
71/109
72/109
VI. Discussion Finale
|