Normes IFRS, une décennie après: Bilan et état des lieux du projet d'harmonisation comptable internationale( Télécharger le fichier original )par Kouassi Sinan MOUMINI Université Paris Dauphine - Master II / DSCG 2016 |
II.3.4 Traitement ultérieur du goodwill : doit-on amortir le goodwill ?Le goodwill est représentatif d'un écart d'acquisition issu des avantages économiques futurs résultants des autres actifs acquis lors d'un regroupement d'entreprises qui ne sont pas identifiés individuellement et comptabilisés séparément. Selon qu'il s'agit d'un écart d'acquisition positif (Goodwill) ou négatif (Badwill) la comptabilisation de l'écart d'acquisition diffère. En effet, en IFRS le goodwill est inscrit à l'actif du bilan et le badwill est repris en résultat de l'exercice d'acquisition après confirmation des justes valeurs des actifs et passifs identifiables. 22 Le référentiel IFRS prévoit des dispositions particulières dans le traitement du goodwill : y' Le goodwill ne peut être amorti ni réévalué (norme IFRS 3R) ; y' Le goodwill fait l'objet d'un test de dépréciation au moins une fois par an à date fixe (pas nécessairement à la clôture). Toutefois un test supplémentaire peut être effectué en cas d'indice de perte de valeur en période intérimaire y' La dépréciation du goodwill est irréversible ; y' Le goodwill n'est pas déprécié directement mais dans le cadre de la dépréciation des unités génératrices de trésorerie23 (dans ce cas le montant de la dépréciation est affecté en priorité au goodwill en diminuant sa valeur). Selon le SYSCOHADA, l'écart d'acquisition positif (Goodwill) est amorti sans exception, selon un plan d'amortissement, dont la durée doit refléter, aussi raisonnablement que possible, les hypothèses retenues et les objectifs fixés lors de l'acquisition et doit pouvoir être justifié sur le plan économique, compte tenu du secteur d'activité (amortissement sur 1 à 5 ans, qui peut être porté exceptionnellement à 20 ans maximum). Le goodwill négatifest quant à lui inscrit au passifet est repris au compte de résultat soit : - Pour compenser une faiblesse attendue et constatée des résultats de l'entreprise consolidée ; - Pour couvrir des charges ou des moins-values d'évaluation non affectées, prévues lors de la prise de participation, et constatées au résultat ; - Selon le plan de reprise de provision en cas de plus-value potentielle Nous constatons donc que le traitement du Goodwill en IFRS et en normes OHADA met en évidence des différences assez significatives. 23 Une Unité Génératrice de Trésorerie (UGT) est le plus petit groupe d'actifs qui génère des entrées de trésorerie largement indépendantes des entrées de trésorerie venant d'autres actifs ou groupe d'actifs. (Norme IAS36). ENJEUX LIES AU PROJET D'HARMONISATION ET PERSPECTIVES D'EVOLUTION Chapitre III 23 A l'ère de la mondialisation, conscients de l'enjeu majeur lié au renforcement de la confiance des acteurs financiers sur les places financières internationales ainsi qu'à l'ouverture des économies aux capitaux étrangers par l'application des normes IAS/IFRS, les pays de l'OHADA s'interrogent quant à une éventuelle harmonisation du SYSCOHADA récemment adopté, aux normes internationales IAS/IFRS. En effet, soumis à un contexte socio-économique particulièrement différent de celui des pays avancés et des pays développés initiatrices des IAS/IFRS, l'harmonisation du SYSCOHADA requiert au préalable une appréciation raisonnable des avantages et inconvénients liés à ce projet. Tout au long de ce chapitre, nous dégagerons les enjeux liés l'harmonisation comptable internationale. Suite à cela, il sera question d'intégrer le projet de convergence du SYSCOHADA vers les normes IAS/IFRS à la dynamique de développement engagé en Afrique en mettant en évidence les avantages et obstacles à l'harmonisation du SYSCOHADA aux normes internationales. Enfin, nous discuterons des perspectives futures d'évolution de nos référentiels comptables. I. L'HARMONISATION INTERNATIONALE DES NORMESCOMPTABLES : HISTORIQUE ET ENJEUX I.1 Théories économiques de la valeur : échec d'une tentative précoce d'harmonisation de la comptabilisation des échanges ? La théorie de la valeur est la pierre angulaire de la pensée économique visant à définir un critère unique de détermination de la valeur des biens échangés à considérer lors de leur comptabilisation. Ainsi dès le 18e siècle, Adam Smith, précurseur de l'école classique énonce la première théorie de la valeur d'un bien fondée selon lui sur la quantité de travail commandée par ce bien. Cette théorie fut assez rapidement controversée du fait de la difficulté à percevoir cette notion de « travail commandé » auquel il faisait allusion ainsi que des failles qu'elle comprenait. Par la suite, David Ricardo, leader de l'école classique reprends la théorie d'A. Smith en y apportant un ensemble des réponses aux critiques à l'encontre de celle-ci. Ainsi, il propose une nouvelle théorie de la valeur d'un bien fondée sur la quantité de « travail incorporée » dans la production de ce bien. 24 Cette théorie sera ensuite reprise et améliorée par Karl Marx à travers sa théorie fondée sur la `valeur-travail' proposant ainsi une « comptabilité en heure de travail »24. Karl Marx dans ses études s'appuie sur les travaux de Ricardo tout en rejetant ceux des autres auteurs classiques. Il y apporte ainsi des améliorations et l'adapte aux concepts de l'économie Marxiste. En claire, Il intègre à cette théorie de la valeur une dimension sociale, proposant ainsi une théorie de la valeur fondée sur la quantité de travail socialement nécessaire. Transversalement à cette approche orientée sur le travail, l'école néoclassique remet en cause toute la théorie de la valeur travail précédemment développée à travers l'exemple des « huitres ». En effet, ce bien (l'huitre) fortement prisé pour ses vertus gastronomiques n'est pas fabriqué. En claire il s'agit d'un bien ayant de la valeur, sans avoir été préalablement travaillé (et donc sans travail incorporé). L'une des critiques portées à cet exemple des « huitres » concerne l'effort fourni pour la recherche des huitres, qui en lui-même constitue un travail, bien que non incorporé aux huitres. Selon les critiques, l'exemple des huitres n'est pas suffisant pour remettre en cause la théorie de la valeur travail (dans sa version marxiste). L'école néoclassique va par la suite opter pour une définition de la valeur fondée sur la valeur-utilité et non la valeur travail qu'elle considère comme étant limitée. En effet, selon l'école néoclassique, la valeur d'un bien dépend de l'utilité de celui-ci. Partant ensuite de l'exemple de l'eau (forte utilité et faible valeur) et du diamant (faible utilité, mais ayant une forte valeur), les économistes néoclassiques ont amélioré leur théorie prônant ainsi une redéfinition de la valeur fondée sur l'utilité et la rareté. En claire, la valeur d'un bien ne dépendrait non pas de la quantité de travail nécessaire à sa production, mais plutôt, de l'utilité de ce bien ainsi que de la rareté de celui-ci. Il s'avère donc claire au vu de toutes ces controverses théoriques que la définition de la valeur d'un bien à enregistrer lors des échanges ne fit pas l'unanimité. Ainsi, chaque économiste, suivant son adhésion à une école de pensée (classique, marxiste ou néoclassique) adopta une vision du concept de la valeur telle que prônée par son école. L'échec de la détermination unanime d'un critère unique de détermination de la valeur des biens à prendre en compte lors de la comptabilisation des échanges (qui est l'un des principes fondamentaux des systèmes de normalisation comptable) peut être perçu comme un premier échec dans la recherche d'une harmonisation des comptabilités. Loin de vouloir relancer le débat des controverses théoriques sur la notion de « valeur », on assiste aujourd'hui sous l'impulsion des IFRS et des référentiels comptables anglo-saxons à l'émergence d'un concept de détermination de la valeur des biens : le concept de la « juste valeur ». Ce principe comptable semble être mieux adapté aux exigences des investisseurs et intègre raisonnablement le principe selon lequel les états financiers doivent refléter une « image fidèle » de la situation financière des organisations. Le concept de la juste valeur devrait donc permettre le passage d'une comptabilisation au cout historique vers une comptabilisation basée essentiellement sur la valeur actuelle intégrant les réalités et fluctuations du marché. 24 Expression utilisée par ERNEST MENDEL (1963) dans : « Initiation à la théorie économique marxiste » page 8, [en ligne] L http://www.ernestmandel.org/new/IMG/pdf/Initiation_a_la_theorie_economique_marxiste.pdf 25 |
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