Introduction
La banque est l'un des piliers du financement indirect
1. A travers les prêts, les banques participent aux
financements des entreprises, mais elles supportent deux principaux types de
risques. Le premier est lié à l'état défavorable de
la nature, puisqu'il est impossible d'anticiper toutes les évolutions
futures de la relation contractuelle. Le deuxième type de risque
dépend du type et du comportement de l'emprunteur qui peut être
source d' :
- asymétrie d'informations : l'emprunteur possède
plus d'informations sur lui-même et sur le projet, que le
prêteur.
- antisélection : ce problème est
essentiellement basé sur l'incertitude concernant le type de l'agent, vu
que l'emprunteur possède des informations que la banque n'a pas en
totalité à la signature du contrat.
- aléa-moral : lorsque l'emprunteur risque d'utiliser
le crédit pour entreprendre un projet plus risqué que celui
prévu dans le contrat.
Les besoins de financement et la nécessité de
partage du risque, quelle que soit la taille de l'entreprise, les
amènent à chercher des partenaires solvables qui peuvent
accompagner leurs projets pendant les différentes étapes de leur
développement.
Selon la Banque de France, fin février 2017, les
crédits mobilisés par l'ensemble des entreprises atteignent 897,5
milliards d'euros, ce qui représente une augmentation de 3,9 % sur un
an. Cependant, les grandes entreprises2 elles seules atteignent un
cours de crédit de 101,2 milliards d'euros, avec un taux de croissance
annuel de 5,5 %. Le financement par les crédits bancaires
représente 62% des financements externes des entreprises non
financières en France.
Les banques proposent de plus en plus de prêts
syndiqués car ils leur permettent de diversifier leurs risques et de
mieux respecter les contraintes réglementaires. La syndication du
crédit permet aux créanciers -banques- le partage du risque et
aussi plus de pouvoir face à l'entreprise, qui risque de perdre
plusieurs partenaires en cas de défaut. Un crédit syndiqué
est financé par un pool de plusieurs établissements financiers,
réunis dans un syndicat bancaire pour financer un projet donné ou
une entreprise donnée. Les grandes entreprises avec un meilleur effet de
levier financier et des valeurs de liquidation plus élevées ont
tendance à choisir des prêts syndiqués.
1. La finance indirecte : des établissements
financiers, en particulier les banques, jouent le rôle
d'intermédiaires entre les propriétaires des fonds à
placer et ceux qui veulent en obtenir.
2. Au sens de la LME (n° 2008-776 du 4
août 2008), ayant un encours de crédit déclaré de
plus de 25 000 euros.
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Ces entreprises sont plus ou moins lucratives, mais ont moins
de possibilités de croissance par rapport à celles du
marché obligataire, d'après une étude européenne de
Altunbaþ, Kara & Marques-Ibanez (2010).
Selon Dennis and Mullineaux (2000), les banques à
contraintes de capital3 sont plus susceptibles de s'engager dans une
syndication, car l'information sur l'emprunteur devient plus transparente, et
l'agent de gestion du syndicat devient plus «réputé»,
à mesure que l'échéance du prêt augmente. Pour
Godlewski (2009), les syndicats bancaires en France sont plus grands et moins
concentrés, tout en prêtant des montants comparables aux syndicats
bancaires aux États-Unis et au Royaume-Uni. Les emprunteurs plus
endettés sont financés par des syndicats plus larges pour des
raisons de diversification du risque. Cela nous ramène à aborder
quelques caractéristiques des contrats des prêts syndiqués.
La banque chargée de former le syndicat de financement, ou le «pool
bancaire», doit d'abord analyser le risque encouru, puis le partager entre
les différents membres du syndicat pour ne pas remettre en cause la
réalisation du projet de l'entreprise. La formule contractuelle
dépend du niveau des actifs de l'entreprise, qui peuvent servir de
garanties, et peuvent être l'objet de clauses.
Plusieurs travaux théoriques et empiriques
évoquent la renégociation comme moyen d'atteindre une situation
Pareto-optimale, suite à l'apparition de nouvelles informations durant
la relation contractuelle.Aghion and Bolton (1992), Dessein (2005), Acharya et
al. (2006), Garleanu and Zwiebel (2009), Bourgeon and Dionne (2013), Godlewski
(2014 & 2015), Roberts (2015) ont démontré que la
renégociation des contrats de prêt est une pratique courante dans
les relations banque-entreprise, et sa prise en considération dans les
différentes analyses permet de mieux comprendre la relation de
financement, corriger, et faire évoluer le contrat vers un plus
complet.
Nous souhaitons remédier aux problèmes touchant
habituellement les études empiriques comme celui de
l'endogénéité, tout en prenant en considération la
non-linéarité du modèle. Pour modéliser la question
des renégociations avec la possibilité de plusieurs choix (les
termes à renégocier et/ou les combinaisons des termes), nous
avons besoin d'un modèle à multiple choix discrets, dit
multinomial. L'utilisation des modèles multinomiaux logit (MNL) est
répandue dans ce champ de recherche, comme chez Roberts and Sufi
(2009b).
3. Situation qui survient lorsqu'il existe plusieurs projets
avec une valeur actuelle nette positive, sans pour autant que l'entreprise ne
puisse les suivre, par manque de fonds ou du fait de considérations non
économiques.
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Intérêt et motivations
Les études portant sur les questions de financement des
entreprises sont multiples. L'accès des entreprises au financement avec
un moindre coût attire l'attention de plusieurs acteurs : le
gouvernement, les autorités des marchés financiers, les
institutions financières (banques), etc. Cette place qu'occupe
l'entreprise dans notre tissu économique vient de ses capacités
de création d'emploi, de création des richesses, de sa
participation à la croissance économique et la
prospérité du pays.
Le financement bancaire aux entreprises, sujet des contrats de
prêt, peut aussi être une limite aux opportunités de
financement futures pour ces entreprises. Les contrats du prêt
contiennent, entre autres, des droits et des obligations pour les parties
prenantes. Pour l'entreprise un contrat de prêt peut contenir :
- des restrictions sur certains de ses actifs, pour ne pas les
utiliser comme garanties pour un autre financement.
- des restrictions sur les niveaux d'investissement futurs.
Ces limites peuvent conduire l'entreprise à stagner
à un niveau de financement et d'investissement pendant la durée
du contrat.
Roberts and Sufi (2009b), Denis and Wang (2014), Roberts
(2015), et Godlewski (2014, 2015 & 2016) ont tous démontré
théoriquement et empiriquement la pratique des renégociations des
prêts bancaires en dehors de la situation de faillite ou de
détresse de l'entreprise, avant l'échéance du contrat. La
renégociation concerne un ou plusieurs termes de contrat tels que le
montant du prêt, le taux d'intérêt,
l'échéance, etc.
Le domaine d'études reste vaste et nécessite des
efforts supplémentaires de recherche afin de clarifier la relation, de
comprendre les déterminants de la renégociation et
d'établir des résultats valides robustes. Les efforts doivent
porter sur les éléments qui impactent la décision de
renégociation, et sur la précision des éléments du
contrat susceptibles d'être sujet des modifications suite à une
renégociation. Pour cette raison, nous avons élargi la gamme des
variables représentatives en variables qui caractérisent la
banque, l'entreprise, le contrat initial, la renégociation
elle-même, et autres variables de contrôle.
Problématique
Le contrat de prêt est un accord en vue de créer
une ou des obligations juridiques. Il a pour but de garantir les droits et de
renforcer les obligations des créanciers
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(les banques) et des débiteurs (entreprises) dans notre
cas.
Les grandes entreprises, sujet de ce travail,
bénéficient d'une plus forte visibilité et sont mieux
connues. L'information découlant de la décision bancaire serait
de ce fait plus pertinente. Les grandes entreprises ont un endettement plus
diversifié. Les travaux de Jain and Gupta (1987) et Rajan (1992 ) nous
apprennent que la multiplication des partenaires de crédit favorise
l'apparition d'un comportement "mimétique" selon lequel chaque banquier
peut être tenté de réduire son effort d'évaluation
et fonder sa propre décision sur celle des autres créanciers. Par
ailleurs, l'incapacité de la banque à appréhender
l'évolution de la situation de l'entreprise ne permet pas d'inclure dans
le contrat toutes les mesures correspondantes à chaque situation
potentielle dans un avenir incertain.
Notre objectif de recherche est de cerner les
déterminants des renégociations, en mettant en évidence
les caractéristiques et l'ampleur de ce phénomène. Pour
cela nous allons etre amenés à repondre à la question
suivante :
Quels sont les déterminants et les
probabilités de renégociation des termes des contrats de
prêt bancaires destinés au financement des grandes entreprises en
France?
Le choix des variables et des modèles empiriques a
été une vraie contrainte des travaux cités, connaissant
les relations complexes entre la banque et l'entreprise et aussi
l'environnement impactant ces agents économiques. La conception du
contrat de prêt lui-même dépend d'une multitude de facteurs.
L'objectif des différents travaux n'était pas la conception d'un
contrat uniforme, idéal, valable pour tous et dans tout le temps, mais
la détermination du degré de changement suite à une
renégociation ou une série des renégociations quelle que
soit la structure du contrat initial. Pour cela, ce travail se veut une
contribution à la littérature existante, et parmi nos apports
à ce sujet; un modèle économétrique en deux
étapes pour remédier au problème
d'endogénéité. Dans la première, on
détermine les résidus généralisés, et dans
la deuxième, on calcule les probabilités que chacun des termes ou
que les ensembles (packages) des termes des contrats soient
renégociés.
Ce sujet sera traité en quatre parties; une
première dans laquelle on présente les soubassements
théoriques, une deuxième pour les variables et la
méthodologie, ensuite une troisième pour les données et
les statistiques descriptives, et enfin une quatrième pour les
résultats.
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1 Revue de littérature 1.1 Le contrat de prêt
Un prêt bancaire à une entreprise fait l'objet
d'un contrat légal entre la banque et l'entreprise. C'est un acte
juridique qui a pour but de garantir les droits et les obligations des parties
prenantes. Avec les critiques de la théorie classique des contrats et de
l'hypothèse de rationalité parfaite, Williamson fut le premier
à mettre en évidence le caractère incomplet des contrats.
Viennent ensuite les travaux de Grossman and Hart (1986), Hart and Moore (1988
and 1990). Un contrat est dit incomplet s'il n'est pas possible de
prévoir ni d'écrire ce qui peut survenir dans tous les cas de
figure possibles, suite à la rationalité limitée des
agents économiques, et aussi à cause des coûts de la
recherche de l'information ou les coûts de transaction. Quand une
circonstance imprévue par le contrat se produit et en vue
d'interpréter ou de redéfinir les termes du contrat, il y a place
pour une renégociation.
La maturité, le montant et le taux
d'intérêt ou le coût du crédit, sont les principaux
éléments déterminer d'un contrat de crédit. Pour
Stiglitz and Weiss (1981), l'entreprise sélectionnera des projets
d'autant plus risqués que le taux d'intérêt est
élevé. La menace d'un rationnement du crédit pour inciter
l'emprunteur à sélectionner des projets peu risqués peut
ne pas être efficace vu la diversification des emprunteurs des grandes
entreprises.
Dans le contexte des contrats de prêt, les implications
de la théorie des contrats incomplets pour la "fréquence" et la
"nature" des renégociations dépendent de la mesure dans laquelle
les emprunteurs et les prêteurs sont symétriquement
informés de l'étendue des problèmes de l'aléa moral
et des coûts de la renégociation. Denis and Wang (2014)
distinguent deux cas :
- dans un contexte d'information symétrique et de
renégociation sans coût Garleanu and Zwiebel (2009) : le
théorème de Coase (1960) prévoit que l'allocation initiale
des droits de contrôle entre les emprunteurs et les prêteurs n'est
pas pertinente et que les renégociations se produisent souvent pour
assurer un investissement ex-post efficace.
- quand les renégociations sont coûteuses : si
les emprunteurs et les prêteurs sont symétriquement
informés comme pour Hart and Moore (1988), il peut être optimal,
pour les contrats de dette, d'être structurés de façon
à minimiser la probabilité de renégociation.
La théorie de l'agence des clauses, recommande
l'existence des covenants dans les contrats pour contrôler les managers.
L'importance de cette théorie dans notre
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cadre de travail est qu'elle justifie la présence de
certaines clauses qui feront l'objet des renégociations. Cette
théorie est le fruit des travaux de Mackling (1976), Myers (1977) et
Warner (1979). Le principe de cette théorie est de réduire les
coûts d'agence par la restriction des comportements des managers en
imposant des clauses dans le contrat. Le non-respect d'un engagement
contractuel ne mène pas forcément à un conflit judiciaire
entre la banque et l'entreprise, mais comme le souligne Jensen (1989) : «
les banques et les créanciers actifs préfèrent chercher
des solutions aux problèmes financiers des firmes (...) en recourant
à une gestion privée du problème ». Cette «
gestion privée du problème » peut prendre la forme d'une
renégociation du contrat de départ.
Gorton and Kahn (1993) ont démontré que la
banque peut demander une renégociation du contrat initial lorsque
l'emprunteur n'a pas respecté l'un de ses engagements. C'est à
dire une violation peut donner lieu à un « durcissement »
(réduction des encours, augmentation des taux d'intérêt ou
des garanties) ou au contraire à un « adoucissement » des
conditions de crédit. La renégociation des clauses en cas
d'amélioration de la situation du débiteur évite
l'apparition d'un problème de sous-investissement. En
général, la renégociation d'un contrat est
justifiée soit par le contenu du contrat lui-même, soit par la
situation financière de l'entreprise ou encore d'autres critères,
tels que le secteur de l'activité de l'entre-prise, sa
réputation, l'historique des relations,etc.
Pour Townsend (1979), les contrats de dette sont plus
optimaux, puisqu'ils conditionnent le financement au respect des engagements
conclus dans le contrat de départ, ce qui permet de limiter le conflit
d'intérêt mais aussi de freiner l'investis-sement en cas de perte
de capital et limiter les dégâts. Ce contrôle est
fondé sur la surveillance des données comptables.
Une autre théorie est présente dans le contexte
des renégociations des prêts bancaires; c'est la théorie du
signal (Aghion and Bolton, 1992). Elle repose sur l'analyse des rapports de
force entre l'entrepreneur et l'investisseur selon le signal émis par
l'entrepreneur. Le résultat de la renégociation du contrat
dépend de l'état du monde à un moment précis, ce
qui fait appel à la théorie des jeux, à la recherche d'un
équilibre optimal et stable comme celui de Nash entre les parties
prenantes.
1.2 La renégociation
Les Banques bénéficient de nombreuses
économies d'échelle (Topsacalian and Teulié, 2015) dans la
récolte et le traitement de l'information, et sont donc plus efficaces
que les préteurs directes.
11
La renégociation est définie par plusieurs
auteurs selon plusieurs optiques. Dans ce mémoire, on cherche à
présenter les renégociations des prêts bancaires d'une
façon plus amples. Pour Roberts (2015), « la renégociation
se produit lorsque les parties contractantes ne sont pas en mesure de tenir
leur accord à son terme. Ce manque d'engagement est une
conséquence d'une inefficience ex post découlant des termes du
contrat en vigueur ». Selon Godlewski (2015), « la
renégociation de la dette peut se produire lorsque les parties
contractantes ne peuvent pas ou ne veulent pas s'engager aux termes initiaux de
leur accord ». Comme le concluent Berlin and Mester (1992) et Garleanu and
Zwiebel (2009), la renégociation est susceptible d'être
bénéfique lorsque les conflits d'agence et d'information sont
plus présents.
La renégociation d'un contrat de prêt peut
être donc définie comme un processus de révision totale ou
partielle du contrat jugé incomplet. Les arguments sont multiples comme
la rationalité limitée, l'opportunisme des agents
économiques, les coûts de transaction, etc. Ainsi, la
renégociation est un moyen pour réadapter le contrat de
départ aux aléas conjoncturels et aux changements de
l'environnement de l'entreprise en premier lieu, notamment à cause de
l'impossibilité de maitriser tous les états du monde au fil du
temps, comme l'ont reconnu Hart and Moore (1988).
L'évènement de renégociation pour Roberts
(2015) est régi par trois facteurs : la santé financière
des parties prenantes, l'incertitude quant à la rentabilité
durable des emprunteurs et le résultat de la renégociation
elle-même. En pratique Denis and Wang (2014), Roberts (2015) et Godlewski
(2015) remarquent que le processus de renégociation est habituellement
initié par l'emprunteur en raison des restrictions du contrat initial,
car il souhaite augmenter ses dépenses d'investissements, faire une
acquisition ou augmenter les dividendes, etc. Ces activités peuvent
être restreintes par les diverses clauses financières et non
financières de l'accord de prêt initial. Et comme le soulignent
Denis and Wang (2014), une renégociation réussie nécessite
l'approbation des créanciers et résulte d'un processus de
négociation mutuelle.
Parmi les conclusions de Roberts (2015), les
renégociations fréquentes sont une partie intégrante des
prêts bancaires. Le rôle de la renégociation est un
remède ex-post aux contrats restrictifs ex-ante qui accordent aux
prêteurs des droits de contrôle forts lorsqu'ils sont
confrontés à un désavantage informationnel. C'est
précisément parce que les emprunteurs peuvent renégocier
les termes de leur contrat qu'ils ont accepté ces contrats restrictifs
au début. La renégociation est également
12
un moyen de mettre à jour le contrat et
d'intégrer le maximum de nouvelles informations qui rendent les contrats
plus complets. Les résultats des auteurs et des travaux cités
reposent sur des bases théoriques solides, tels que le démontrent
Hart and Moore (1988), Aghion and Bolton (1992) pour lequels, les
renégociations fréquentes soutiennent que les contrats de dette
sont incomplets. La fréquence de ces renégociations
suggère que les gains obtenus dépassent les coûts
associés (Fudenberg and Tirole 1990, Hart and Moore 1988). Le
résultat dominant des renégociations est un relâchement des
limites des covenants (Garleanu and Zwiebel 2009), contre de solides droits de
contrôle ex-ante aux créanciers (Dessein, 2005).
Au niveau empirique, les résultats sont
diversifiés est riches sur le plan méthodologique et le choix des
stratégies d'identification. L'accès aux données sur les
renégociations demande de grands efforts comme pour Nini, Smith and Sufi
(2009), puisque les facteurs qui peuvent impacter (en ex-ante comme en ex-post)
la décision de renégociation sont multiples : le contrat, les
parties prenantes, l'environnement économiques, les opportunités
présentes et futures d'investissement, de croissance de
l'économie, la qualité du projet financé, etc. L'un des
résultats de Roberts (2015) est que les renégociations sont
initiées par les emprunteurs principalement en réponse à
l'évolution des conditions, par opposition aux interventions du
prêteur en raison du défaut. Moins de 28% des
renégociations de l'échantillon sont dues à une violation
d'une clause ou à la prévision d'une violation. Pourtant, plus de
75% de toutes les violations des clauses entraînent une
renégociation.
Sur des données européennes, Godlewski (2015)
constate que des renégociations multiples se produisent pour un
prêt sur quatre, entraînant des importants changements dans les
termes contractuels initiaux. Par exemple, l'échéance moyenne
augmente de 25%, tandis que les montants des prêts évoluent de
13%. Les durées moyennes et médianes entre les "rounds" (le
nombre de fois qu'un prêt est renégocié) de
renégociation sont égales à 20 et 12 mois,
respectivement.
La duration avant la première renégociation des
contrats est d'environ deux ans chez Denis and Wang (2014) et un an et demi
chez Roberts and Sufi (2009b). En moyenne, un peu plus de 60% des contrats sont
renégociés au moins une fois.
Une autre conclusion de ces travaux est que la
renégociation d'un prêt est un moyen d'exercer un contrôle
par les créanciers bancaires, qui ont pour objectif la gestion des
conflits d'intérêt à moindre coût (Moraux and
Silaghi, 2014).
Les résultats de ces travaux montrent l'importance de
la pratique des renégociations des contrats de prêt dans la
relation banque entreprise.
13
2 Variables et méthodologie
2.1 Variables
Notre échantillon est un extrait de la base de
données de Godlewski (2016). L'échantillon de base est
composé de 15.781 prêts syndiqués accordés aux
grandes entreprises cotées en bourses, au niveau des pays de la zone
euro, pour la période 1999-2015.
La source de ces données est Bloomberg, Global
Financial Development Database de la banque mondiale et Orbis (Bureau van
Dijk). L'annexe A présente les détails la construction de cette
base de données.
Pour la même période 1999-2015, les grandes
entreprises françaises ont signé 1984 accords de prêt
classés par identifiant du prêt ou deal. Ces prêts ont
été renégociés de zéro à plusieurs
fois chacun. L'échantillon de Denis and Wang (2014), qui était de
1.000 contrats de prêts est extrait d'une base de données de 3.720
accords de prêt de Nini, Smith and Sufi (2009).
Compte tenu de l'endogenéité, nous avons
adopté le modèle de Wooldridge (2014) à deux
étapes. Les variables qu'on présente ici sont définies en
détails dans l'annexe B.
Pour les variables dépendantes :
· pour la première étape : la variable
binaire «x1» qui vaut 1 si le prêt
est renégocié 0 sinon.
· pour la deuxième étape : les groupes des
termes (packages) renégociés
«RenegGroup» , sur notre échantillon
.
Pour les variables explicatives, nous avons classé par
catégories, les variables qui caractérisent le prêt,
l'entreprise, la banque, la renégociation elle-même, et des
variables de contrôle :
- les variables qui caractérisent le contrat du
prêt lui-même et la relation contractuelle, que je nomme
«V
arLoan», dans cette
catégorie on trouve :
· maturité, montant, covenants, secured, lenders,
le choix de ces variables est justifié d'abord par plusieurs travaux
empiriques, comme Roberts (2015), qui ont démontré le rôle
de design du contrat de départ pour toute renégociation future,
puis le rôle de la réputation, du contact humain et de la
réussite des accords précédents captés par les
variables (Relationship, League, Same country).
- les variables qui reflètent l'état de
l'entreprise sont en majorité comptables, que l'on nomme
«V
arFirm», dont :
·
14
la rentabilité des actifs, l'indice de
Herfindahl-Hirschman, le score d'Alt-man, les capitaux propres,etc. Nini, Smith
and Sufi (2009), et aussi Denis and Wang (2014), ont adopté la
majorité de ces variables comptables comme des caractéristiques
des firmes de l'échantillon destiné à l'analyse des
renégociations aux USA.
- les variables qui caractérisent la banque, et
exactement la banque principale si le crédit est syndiqué,
«V arBank» :
· total des actifs, TCE Ratio, couverture de perte des
prêts, rentabilité des capitaux propres.
- les variables qui caractérisent la renégociation
elle-même, «V arReneg» :
· le but d'intégrer ces variables est de prendre
en considération l'un des constats empiriques de Roberts et de
Godlewski, selon lesquels; la majorité des prêts sont
renégociés au début de la relation contractuelle. On
cherche alors à voir l'impact des délais (origine du contrat -
renégociation) par la variable (Time to Renegotiation), et aussi le
nombre des éléments renégociés sur les variables
dépendantes par la variable NbreTermes.
Control».
- les variables de contrôles «Var
|