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Le placement de produit dans les films cinématographiques

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par Alexandre Chirouze
Université Montpellier 3 - DEA veilles et intelligence compétitive 2002
  

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Chapitre 2 : Les aspects économiques du placement en France

L'importance économique du placement de produit est plus faible en France qu'aux Etats-Unis : dix fois plus faible, disent certains.

Toutefois, les professionnels du cinéma français le considèrent de plus en plus sérieusement d'un point de vue économique 40(*).

I- Le poids économique du placement dans l'industrie cinématographique

Le placement de produit est une pratique en expansion qui n'en demeure pas moins difficilement mesurable. Les estimations varient d'une source à une autre.

Selon Ciné Finances Info41(*), en 1992, il contribuait annuellement à hauteur de 50 millions de FF au financement de films français, ce chiffre incluant les prestations en nature, et représentait un potentiel de 100 MF en France.

En 1995, le magazine Capital 42(*) considérait que 90% des films tournés dans le monde comportaient une ou plusieurs scènes qui faisaient l'apologie d'un produit. Le placement représentait 1 milliard de francs par an, tous films et pays confondus, dont une soixantaine de millions rien qu'en France.

En 1996, Joël Brée43(*) estimait le marché du placement de produit à environ 120 millions de francs. Montant qu'il jugeait marginal par rapport aux autres techniques classiques de hors média sachant que « même le sponsoring TV atteint un montant avoisinant les 800 millions de francs ». Il nous apprend également que dans ces 120 millions de francs, il faut entendre « toutes les aides financières ou en nature d'annonceurs, producteurs de biens ou services publics ou privés. Le volume financier stricto sensu est estimé à 60 millions de francs par an et les échanges (prêts, mise à disposition de décors..) représentent un volume équivalent estimé à près de 60 millions de francs ».

En comparaison, à la même époque, le marché du placement de produit aux Etats-Unis était estimé à 600 millions de francs.

Bien que la validité des dernières estimations soit difficile à juger, elles montrent toutefois une très forte augmentation des investissements en cinq ans. En juin 2001, selon Andrew Mueller44(*), « dans l'industrie cinématographique, l'activité secondaire du placement de produit représente 1 milliard de $ et prend des formes de plus en plus astucieuses ».

II- Le coût d'un placement pour un annonceur

Le montant des budgets que les annonceurs français consacrent au placement de produit par film est également, en moyenne, plus faible que celui des investissements des annonceurs américains. Selon Christophe Libilbéhéty, en France, les tarifs oscilleraient entre 20 KF et 200 KF selon les types d'apparitions, la qualité de la présence du produit dans le film, le potentiel du film et la notoriété des acteurs45(*). Dans certains cas, les budgets engagés sont nettement plus importants. C'est le cas lorsque les annonceurs sont des Régions dont les directeurs de la communication connaissent un véritable engouement pour le cinéma. Leur apport sur un film se situe entre 1 et 3 MF de FF, participations financières et facilités de tournage comprises.

Le coût du placement dépend principalement de trois catégories de facteurs :

- Les caractéristiques du film : la notoriété du réalisateur et des acteurs, la présence d'une vedette internationale, le casting...

- Le potentiel d'exportation, l'époque du film, la rediffusion télévisuelle (existence d'une co-production46(*))

- Le rapport de la marque avec le film. Les tarifs varient alors avec le type de présence (visuel, parlé et/ou d'utilisation), la visibilité, l'utilisation qui est faite de la marque, la mention au générique, la nature de l'oeuvre, le genre du film, etc.

Toutefois, la négociation entre le producteur et le fabricant est déterminante. Il n'y a pas de tarif média au sens propre du terme47(*). Donc, chaque placement est un cas d'espèce. Le ticket d'entrée pour apparaître dans une production française est de l'ordre de 3 000 euros et la fourchette de prix se situe entre 3 000 et 30 000 euros.

Ces chiffres sont, néanmoins, à prendre avec une certaine prudence. Selon Jean-Louis Douat48(*), Chef du soutien à la production et distribution au Conseil National de la Cinématographie, «Le domaine est secret, c'est un sujet que personne n'aborde, tout se fait caché, discrètement ». 

Aussi, alors que la plupart des constructeurs automobiles affirment qu'il n'y aucune participation financière mais seulement des prêts, de nombreux observateurs en doutent.49(*)

Exemples 50(*)

Film

Marque

Coût pour la marque

Nombre d'entrées Cinéma

Trois hommes et un couffin

Peaudouce

80 000 FF

8,5 millions

Ripoux contre ripoux

Gitanes, Lucky Strike

100 000 FF

5,5 millions

Les Ténors

Saumon Labeyrie

50 000 FF

 

Tombe du ciel

Sebago

50 000 FF

 

Opération Corned Beef

Alphapage de France Telecom

100 000 FF

 

Exemples 51(*)52(*)

Film

Marque

Coût pour la marque

Nombre d'entrées Cinéma

Cassettes vidéo

Nombre de téléspectateurs en 1ère diffusion

Fallait pas

René Veyrat Fleuriste

10 000 FF

900 000

 
 

Les visiteurs

Email Diamant

100 000 FF

14 millions

3 millions

11,5 millions

La cérémonie

Omo

30 000 FF

1 million

 
 

Les randonneurs

Nergisport, barre énergétique

30 000 FF

1,5 millions, soit 2 centimes par contact

 
 

La haine

Perrier

30 000 FF

1,2 millions

 
 

Le placement de produit est souvent considéré comme un outil de communication bon marché. Avec un budget très faible, il permet de toucher une audience importante ce qui fait de lui, l'un des outils de communication les moins onéreux au coût pour mille contacts. Selon

Tami Glenn, Président de Hollywood International Placements (une agence américaine spécialisée dans le placement de produits53(*)), qui répondait aux questions d'un journaliste du Wall Street Journal : « Le produit de placement est un outil publicitaire peu cher destiné à de nombreuses entreprises qui veulent améliorer l'identification et la mémorisation de leur marque, plus particulièrement si ces entreprises ne disposent pas de gros budgets de publicité ».

Comme l'écrit Dale Buss54(*) : « si vous le faites vous-même, les dépenses consisteront en marchandises, en coups de téléphone et en envois postaux. Votre investissement en temps, cependant, peut être énorme, à tel point qu'il peut être opportun d'utiliser les services d'une agence. En général, les agences spécialisées en placement de produits proposent une gamme de services allant du placement ponctuel (« one-time placement ») pour 500 dollars au contrat annuel pour un nombre de placements garanti pour 20 000 dollars ».

En France, l'Agence Marques et Films a proposé à la société Orangina d'être son agence exclusive et a négocié un contrat annuel de conseil aux honoraires mensuels de 20 000 FF hors taxes non compris les frais éventuels.55(*)

III- La contrepartie : financière ou en nature

Le placement de produits consiste à demander aux fabricants de produits utilisés dans un film de contribuer, financièrement ou en nature, à son budget.

Le produit ou, en général, toute apparition d'un élément caractéristique de l'image d'une entreprise, peut faire l'objet d'une mise en valeur variable dans un film : il peut être intégré au décor, utilisé par un des protagonistes ou renforcé par une mention verbale du produit.

Dans sa définition, le CSA parle de contrepartie au placement de produit en évoquant une contribution qui permet de financer une partie de la production. En fait, la participation des annonceurs peut prendre deux formes56(*) :

- la participation en nature

- la participation en argent.

Seule la participation en argent fera l'objet d'une rémunération pour l'agence de placement.

1- La participation en nature

Cette contribution est la plus ancienne et, encore, la plus courante.

Il existe plusieurs formes :

- La participation dans le film : par exemple, le prêt d'une voiture par le constructeur si l'histoire le nécessite.

Marque

Film

Prêt ou fourniture de

Coût estimé

Avis France

Le Bonheur est dans le pré

Véhicules Avis

 

Hewlett Packard

La Femme du cosmonaute

Ordinateurs et mise à disposition de techniciens

200 000 F

Chanel

Talons aiguilles

Tailleurs de Victoria Abril

 

Peugeot

Taxi (1) et Taxi 2

Plusieurs exemplaires de tous les modèles de la gamme57(*)

 

Hewlett Packard

Le Clone

Prêt d'ordinateurs

1,2 milliards de F à l'achat, 200 000 FF à la location pendant 6 semaines

Cette participation s'applique également aux produits dont la marque n'est ni visible, ni facilement reconnaissable comme, par exemple, les costumes, les bagages, etc. En contrepartie, l'annonceur est, le plus souvent, remercié dans le générique ou obtient en échange une avant-première réservée à ses clients. Ce fut le cas pour Lancel, fournisseur des bagages dans le film Les Misérables de Claude Lelouch, et pour Chanel qui a habillé Victoria Abril dans Talons Aiguilles.

- La participation pour la réalisation du film : le don de produits pour l'équipe de tournage. Par exemple, les marques d'eaux minérales sont souvent sollicitées pour désaltérer l'équipe du film. La participation concerne autant les biens que les services. Elle peut, par exemple, consister à concevoir les programmes informatiques qui seront utilisés pendant le tournage ou le montage du film, etc. Le matériel nécessaire à la régie (fax, téléphones, ordinateurs,) peut également être prêté ou donné par un fabricant qui sera mentionné dans le générique. En contrepartie de cette participation, l'annonceur peut obtenir des remerciements dans le générique.

- La participation aux éléments de décor. Par exemple, pour remercier Habitat, qui prête souvent des meubles, on dépose un catalogue dans le décor du film.

- La participation par des remises accordées. Par exemple, le fleuriste René Veyrat a fourni les fleurs pour le tournage de Fallait pas,  un film de et avec Gérard Jugnot en consentant une remise. Celle-ci est plus ou moins forte selon les films et le nombre de passages à l'écran. Patrick Veyrat, propriétaire du magasin, a demandé au minimum à être remercié au générique.

2- La participation en argent ou achat d'espace

Elle peut être associée ou non à une participation en nature. Ainsi, dans le film Fallait pas, le fleuriste Veyrat était présent dans une scène dans laquelle la camionnette de la boutique était filmée de côté en gros plan et en tant que fournisseurs des fleurs.

L'achat d'espace consiste à choisir dans le film, soit un gros plan, soit une citation, soit l'utilisation du produit par un acteur, etc.

La négociation des tarifs d'espace repose également sur le genre du film, la notoriété des acteurs et du réalisateur, les diffusions à la télévision (car la presque totalité des films sont achetés par les chaînes de télévision avant leur tournage).

La négociation est plus ou moins précise, éventuellement détaillée par scènes : 40 000 F. pour un gros plan, 20 000 F. pour une utilisation normale de l'appareil (comme ce fut le cas pour le téléphone portable Mitsubishi dans le film de Xavier Gélin, L'Homme idéal).

La participation peut être proportionnelle aux résultats d'audience : par exemple, une participation minimale de X milliers d'euros et une bonification en cas de succès du film (comme ce fut le cas pour les couches-culottes Huggies dans le film d'Arthur Joffé Que la lumière soit).

IV- Les modalités du placement

Une autre classification des participations est souvent utilisée. Elle distingue les participations non pas par leur nature, comme celle que nous venons de présenter, mais par leur modalité.

Trois modalités co-existent, en effet :

1- Le don de la part de l'annonceur : le bien ou le service est mis gracieusement à la disposition de l'équipe de tournage. Il peut s'agir d'un bien d'équipement de la personne (costumes, robes, etc.) ou de biens de grande consommation (sodas, etc.) ou encore d'un service (billets d'avion, chambres d'hôtel, etc.) ou d'une formation gratuite des comédiens58(*), ou d'une maintenance gratuite du matériel59(*).

2- Le prêt pendant une période déterminée : prêt d'un château, d'un musée, d'un institut de beauté, etc.. Par exemple, pour le film Les Rois mages, Mc Donald's a fourni le décor d'un de ses restaurants aux Inconnus.60(*)

3- Le prêt avec retour : cela concerne principalement les biens très chers : le prêt d'une rivière de diamants, d'un très gros matériel informatique, d'une collection d'automobiles, des habits et accessoires de Haute Couture.61(*)

* 40 Ciné Finances info, Le placement de produits : une source de financement à prendre au sérieux ?, Ciné Finances info, n°56, 3 juin 1992, pp 10-11

* 41 Ciné Finances info, Le placement de produits : une source de financement à prendre au sérieux ?, Ciné Finances info, n°56, 3 juin 1992, pp 10-11

* 42 Frédéric Brillet et Sylvain Courage, La pub clandestine à l'assaut du cinéma, Capital, Août 1995, pp. 96-97

* 43 Joël Brée, op cit, p. 66

* 44 Andrew Mueller - And the brand played on - The Guardian, June 30, 2001

* 45 Christophe Libilbéhéty, A vos marques !, Le Nouveau Cinéma, Décembre 1998, pp. 98-104

* 46 Le fait d'être coproduit par une chaîne télévisée rassure l'annonceur et fait, en conséquence, monter les tarifs.

* 47 Carat Cinéma a, ainsi, mis en place un barème pour fixer une grille des tarifs en fonction de la mise en valeur du produit, des acteurs principaux et d'une évaluation des contacts probables.

* 48 Entretien téléphonique du 8 avril 2002.

* 49 Première, Renault et le cinéma va va voumm..., N°293, 08.2001, p.146 : « D'Etienne Chatiliez à Jena-Marie Poiré en passant par Jean-Luc Besson ou Claude Zidi, on ne compte plus les réalisateurs sui font appel aux voitures à filmer pour leur confier un premier ou second rôle. Pour que les voitures soient prêtés gracieusement, il suffit qu'ils ne soient pas montrés accumulant des pannes, se précipitant dans le premier ravin venu ou servant d'abri à des scènes pornographiques. De plus, une équipe technique leur est adjointe, chargée aussi bien de remplacer les pièces abîmées que de faire brûler une Safrane avec un minimum de dégâts. Une anecdote tirée du tournage du film Le Bonheur est dans le pré dans lequel Eddy Mitchell tient le rôle d'un concessionnaire : avec trois échecs à l'examen du permis de conduire, Mitchell a dû céder (bien obligé) le volant à un conducteur caché sous le capot. Le moteur, lui, a été replacé à l'arrière. »

* 50 Données de l'Agence Cinémarketing et de Ciné Finances Info

* 51 Yves Villagines, Mettez vos produits sur grand écran, L'Essentiel du Management, septembre 1997

* 52 Frédéric Brillet et Sylvain Courage, La pub clandestine à l'assaut du cinéma, Capital, Août 1995, pp 96-97

* 53 http://hollywoodprops.com

* 54 Dale Buss, You Ought To Be In Pictures, BusinessWeek, June 25, 1998

* 55 Marques et Films est l'agence qui s'est chargé du placement dans le film « Le Boulet » dans lequel un camion de livraison à la marque Orangina est victime d'un accident.

* 56 Seule la participation en argent fait en principe l'objet d'une rémunération pour l'agence de placement

* 57 Pour le premier volet de Taxi, Peugeot a fourni notamment : - pour les représentants de l'Etat : des 309, des 405, des 406 ; - pour le ministre une 605 noire, - pour les bandits : une 106 XSI. Pour Taxi 2, voir plus loin.

* 58 Pour Vénus Beauté, la marque Mavala que l'on voit tout au long du film a non seulement prêté les éléments du décor mais a également formé les acteurs aux gestes des professionnels de la beauté.

* 59 Les constructeurs automobiles offrent souvent les compétences d'une équipe d'ingénieurs et de techniciens pour l'entretien ou la transformation des véhicules.

* 60 Melchior, Gaspar et Balthazr, débarquant au XXIème siècle, ne peuvent manger qu'un Big Mac. Mc Donald's a également régalé gratuitement toute l'équipe de tournage pendant une journée.

* 61 Dans la Haute Couture, les règles suivantes sont généralement respectées : les habits et accessoires sont restitués après le tournage, ils sont obligatoirement assurés, ils sont exclusifs de toutes autres griffes concurrentes, ils ont une place de choix dans les divers cadrages, ils sont réservés aux acteurs principaux voire à la vedette du film, etc.

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"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire