3.3. Modification des conduites
3.3.1. Septième séance : recherche
d'attention
Cette séance semble marquer un changement dans la
fonction des conduites d'escalade chez Jamil. La séance débute
toujours par le temps d'accueil, durant lequel Jamil participe de mieux en
mieux, bien qu'encore parasité par son besoin d'aller courir ou
escalader dans la salle. Je note cependant un élément important :
lorsqu'il est en haut de l'espalier ou des agrès, il cherche notre
regard. Habituellement, le monde extérieur semble disparaître pour
Jamil dans ces moments. Lors de cette séance, son regard est
porté sur nous, dans ce qui ressemble à une attente. Si je vais
le chercher pour lui demander de descendre, il le fait puis court dans la
pièce pour aller escalader à un autre endroit. Encore une fois,
il cherche le regard, la réaction. L'attention qui lui est portée
semble le satisfaire.
À ce moment, je me sens perdue sur la réaction
à avoir. Je sais que si je lui donne cette attention le risque est qu'il
généralise le fait de grimper comme un moyen de l'obtenir. Or,
LANDEAU (CC BY-NC-ND 2.0)
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ces conduites d'escalade perturbent son attention aux
activités qu'on lui propose et empêchent une continuité de
s'installer dans celles-ci. L'objectif est alors de diminuer ces comportements
tout en trouvant un moyen de répondre à ses besoins sensoriels et
attentionnels de façon plus adaptée. D'un autre
côté, cette recherche d'attention marque une forme
d'intentionnalité envers nous, que je ressens comme un appel.
Sur le temps d'accueil, Jamil a compris que la consigne est de
donner et non de lancer la balle à l'autre, et y parvient de
façon ajustée. Son regard n'est cependant pas encore porté
sur son action. Après avoir donné la balle, il retourne escalader
et cherche à nouveau l'attention, que nous ne pouvons lui donner
à ce moment, car nous sommes occupées avec les autres enfants sur
l'activité d'accueil. Jamil reste en haut de l'espalier et nous regarde,
jusqu'à ce que l'une d'entre nous réponde à son appel
silencieux.
Le temps sensoriel est toujours un moment que Jamil
apprécie. Il choisit toujours d'utiliser la balançoire et
commence à accepter de la partager avec un autre enfant. Nous lui
exprimons qu'il est temps de laisser la balançoire à un autre
enfant du groupe et après s'être stimulé encore un peu il
en descend. Les lieux pour se stimuler sur le plan vestibulaire ne manquent pas
pour Jamil, il court et escalade encore les agrès et l'espalier. Il me
paraît cependant moins extrême dans ses moments de stimulation
vestibulaire : il se balance moins fort sur la balançoire, ne place pas
sa tête en arrière, son excitation est moins forte.
Peut-être que ce jour-là Jamil a moins besoin de ces sensations
que lors d'autres séances.
Sur le temps de déplacements dans la salle, Jamil
court, mais ne va toujours pas au sol. Le temps de parcours psychomoteur est,
quant à lui, moins entrecoupé par les besoins d'escalade de
Jamil. Précédemment, durant un parcours, il pouvait partir quatre
à cinq fois, il ne le fait que deux fois ce jour-ci.
Durant le temps calme, il ne parvient cependant pas à
se poser, et montre encore une certaine agitation.
Globalement sur la séance, Jamil grimpe toujours
autant, mais il le fait à des moments plus adaptés,
principalement entre les activités. Ces conduites semblent aussi porter
une fonction différente : si précédemment j'y voyais
principalement un besoin sensoriel, sur cette séance c'est le besoin
d'attention qui semble primer. Je me questionne sur l'apparition de cette
intention envers nous, sur ce qui a permis ce changement. Est-ce que son besoin
de sensations est plus faible qu'à l'habitude, lui permettant
d'être plus
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disponible à la relation ? Est-ce que
l'intégration du cadre et des acteurs du groupe lui permet de se sentir
plus en confiance et de tenter une approche envers nous ?
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