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De la critique de la durabilité pour une justice environnementale participative.


par Tchilabalo Adjoussi
Institut Supérieur de Philosophie et des Sciences Humaines Don Bosco (ISPSH Don Bosco) - Master ès-Sciences de l’Homme et de la Société 2018
  

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6.3- La responsabilité du pouvoir politique dans la mise en oeuvre de la justice environnementale

L'écologie, destination de la responsabilité, est la voix qui pourrait nous amener à atténuer les effets néfastes de nos activités sur l'environnement. Pour que cette entreprise advienne, nous ne pouvons pas faire fi de l'engagement des politiques.

Parmi les contradictions qui ont conduit à l'échec de la durabilité, nous avons souligné les désaccords politique et économique comme étant en partie, responsables; ces désaccords politique et économique ont consisté, rappelons-le, en une attitude de révolte de la part des pays en voie de développement qui ont vu dans les stratégies de réduction des émissions des gaz à effet de serre, et la reconsidération de la gestion de l'environnement pour une justice environnementale effective comme une stratégie de plus de la part des pays développés pour les maintenir dans un état de sous-développement.

Désormais, tournés vers l'avenir et avec au coeur le souci des générations futures, l'efficacité des actions aussi bien individuelles que globales doit naître d'une meilleure coordination politique afin d'éviter les pièges soulevés plus haut. Tout comme H. Jonas (1990), C. Grino (2001, p. 63) note également: « le véritable domaine d'application de la notion de responsabilité ainsi remaniée est la sphère publique, et non la sphère privée », et cette responsabilité qui revient au politique dans ce contexte est celle de « la prévoyance ». La prévoyance du politique dans la construction d'une société justice, revient quant à elle à la sagesse comme le préconisait Platon dans le livre III de La République; ce que H. Jonas (1999, p.47) reprendra: « la prévoyance de l'homme politique consiste donc dans la sagesse et dans la mesure qu'il consacre au présent ».

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Dans le contexte de la crise écologique qui est le nôtre, la responsabilité politique, de façon concrète renvoie d'abord à une prise de conscience de chaque Etat qu'il soit développé ou en voie de développement, de la menace réelle de l'environnement à cause de l'écart entre le rythme de restauration de l'environnement et celui des activités anthropiques de plus en plus polluantes. Cette prise de conscience entraine une attitude responsable qui débouchera sur la construction d'un meilleur état global, entendu ici comme un meilleur cadre de vie :

Egalement le meilleur à l'avenir, précisément parce que dans son équilibre interne de tout temps actuel il est le garant de l'avenir en tant que tel et qu'ensuite il est naturellement également le meilleur de l'avenir, parce que les critères d'un bon ordre ne changent pas » (H. Jonas, 1999, p.46).

Tout ceci rejoint l'idée de l'urgence d'un droit cosmopolite de l'environnement tel que porté par la conférence de Stockholm (1972), l'Acte de l'Union Européenne (1985) et le traité de Rio (1992) qui stipulait dans son préambule qu'il faudrait instaurer un partenariat mondial sur une base nouvelle en reconnaissant que la terre, berceau de l'humanité, constitue un tout marqué par la complémentarité.

La lutte pour la justice environnementale est de l'avantage de tous, aussi bien nous générations présentes que pour les générations futures. Cet intérêt bien que justifiée, a besoin de force juridictionnelle afin que le droit à l'environnement soit reconnu comme droit fondamental de l'homme. Pour ce faire, le droit de l'environnement doit reposer, Comme le dit si bien M. Prieur (2017), sur trois composantes complémentaire : la légalité, le service public de l'environnement et l'ordre public écologique.

Du point de vue de la légalité, la légifération sur l'environnement doit tenir compte d'un certain équilibre notamment:

Une opération ne peut légalement être déclarée d'utilité que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou écologiques qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente (...) a un moment où il est beaucoup question, et à juste titre, d'environnement et de cadre de vie, il faut éviter que des projets par ailleurs utiles viennent aggraver la pollution ou détruire une partie du patrimoine naturel et culturel du pays (M. Prieur, 2017, p.5).

Tout les pays devront donc unir leur force en s'engageant chacun sur cette voie de la préservation de l'environnement. Cet équilibre doit être recherché à envergure universelle. Une fois que ce principe est assimilé, il va de soit que les pouvoirs publics s'engagent dans la création de services publics spécialisés dans la prise en charge et la gestion de l'environnement. Ces services peuvent être matériels ou organique: matériels quand ces services sont entre autres des établissements publics spécialisés ou des agences de l'eau; et

organiques quand il s'agit plutôt des organismes de droit privé comme des associations de défense de l'environnement.

Tout ceci doit être soutenu par l'engagement responsable des populations en faveur des valeurs écologiques et seule la vulgarisation du débat écologique permettrait de parvenir à cette fin; vulgarisation qui est aussi du devoir des politiques. Vulgarisation qui s'avère très importante pour la bonne marche de la justice environnementale participative. Et cette vulgarisation consistera dans la mesure du possible à favoriser les actions en phase avec la protection de l'environnement. D'où l'importance du troisième maillon complémentaire de l'engagement des politiques; celui-ci est la préservation de l'ordre public écologique qui se résume à la nécessité d' « assurer les objectifs d'ordre public que sont traditionnellement la sûreté, la tranquillité et la salubrité publique» (M. Prieur, 2017, p.8) par une police de l'environnement. Dans cet élan, non seulement les dégradations de la biosphère sont réparées, mais ces réparations sont aussi sujettes à la protection dans le but de minimiser les risques environnementaux et donc d'éradiquer les inégalités environnementales. Tel est l'équilibre que doivent rechercher les politiques. Mais ce droit reste jusqu'aujourd'hui non reconnu par nombre de pays comme le souligne toujours M. Prieur (2017). D'où la nécessité d'accroître aussi la sensibilité écologique chez les populations.

Les données scientifiques de l'état de la dégradation de la biosphère et les conséquences qui lui sont inhérentes ne laissent personne indifférent. Pis encore, les projections à long terme de la dégradation de la biosphère et ses conséquences tourmentent plus d'un. Face à cette évidence, d'aucuns pensent que les politiques doivent choisir pour l'ensemble des populations, un choix averti qui élimine tout risque de pollution; ceci renvoie par exemple à restreindre la fourniture des machines polluantes ainsi que des produits toxiques pour éviter aux populations de polluer l'environnement. C'est la position soutenue par P. Fauquemberg (2002, p. 88) :

(...) Nous pouvons par exemple penser que des mesures politiques de restriction, notamment en ce qui concerne l'offre des mesures politiques de restriction, notamment en ce qui concerne l'offre de produits technologiques et donc polluants, sont nécessaires.

Mais une telle position est naïve car ce serait ignorer la force de phagocytose exercée par l'économie sur l'espace sociétal et politique qui fragilisent une telle option. La solution politique qui serait efficace constituerait, en plus de l'harmonie environnementale internationale recherchée entre l'égalité, le service de l'environnement et l'ordre public écologique, l'accroissement de la responsabilité des populations tout simplement comme nous

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l'avons énoncé plus haut; elles ont la capacité de former un blocus contre la pollution et les inégalités environnementales par leurs choix quotidiens. C'est alors que nous parviendrons à ce que H. Jonas (1990, p. 68) appelle « la seconde obligation éthique» c'est-à-dire « l'apprêtement personnel à la disponibilité de se laisser affecter par le salut ou par le malheur des générations à venir, quoique d'abord seulement imagée » (H. Jonas, 1990, p. 69).

Il est vrai que l'intervention politique reste incontournable dans la diminution des pollutions de toute sorte, mais en ce qui concerne l'éradication des injustices environnementales, elle l'est plus encore. Car, notons que la qualité environnementale que nous recherchons est aussi l'une des causes de l'accroissement des inégalités environnementales ; car, la qualité environnementale est de nos jours un argument de vente du côté des promoteurs immobiliers et de légitimation du côté des élus comme le dit C. Larrère (2017, p.77). La crise écologique a donc introduit une recherche effrénée de la qualité environnementale qui accentue toujours les injustices environnementales car le confort de l'environnement de qualité a son prix mettant donc à l'écart les populations vulnérables qui n'ont qu'a subir la crise écologique comme une fatalité. Cet acharnement environnemental qui laisse croire que les injustices environnementales semblent incontrôlables, serait atténué par le couplage entre : « la participation au changement de son environnement et de nouvelles modalités politiques travaillant le corps social plutôt que ses organes de direction» (C. Larrère, 2017, p. 79).

Etant donné que seules les populations qui réclament justice sont les seules aptes à oeuvrer au changement de leur sort, il revient alors aux politiques de donner à ces dernières les moyens d'oeuvrer à cette fin; c'est donc un appel au libéralisme solidariste où la justice consiste à : « Distribuer d'une certaine manière (c'est le critère de répartition) une variable dont la distribution interindividuelle importe directement (pas seulement au titre d'indicateur ou de facteur causal) c'est le distribuendum » (P. Van Parijs, 1991, p. 251). Dans notre contexte, la variable étant l'environnement, les politiques pourraient le distribuer de façon à ce que tous bénéficient de la même qualité environnementale et comme le notait C. Larrère (2017), ceci passe par exemple par la protection et l'interdiction d'occupation des zones immergées, l'aménagement équitable des quartiers, l'accès équitable aux technologies vertes etc. L'option de la théorie libérale solidariste de la justice dans la résolution de la crise écologique nous paraît efficace pour une raison bien énoncée par P. Van Parijs (1991, p. 278) :

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Le pluralisme interne aux diverses nations continue de s'approfondir, de se révéler, de s'affirmer, rendant toujours plus illusoire l'espoir de régler les conflits par l'appel à une conception englobante de la société bonne appuyée sur une tradition partagée par l'ensemble de la communauté nationale.

Vis-à-vis à cette évidence, pour que notre environnement devienne toujours plus viable et les inégalités environnementales atténuées indépendamment de la complexité des enjeux politiques, il faudrait veiller à une distribution réfléchie des qualités environnementales qui ne seraient en aucun cas entamée par les tourbillons politiques. D'où la place de la vulgarisation du débat écologique et de la croissance de l'harmonie du corps politique. Bref, la participation reste nécessaire dans la résolution de la crise écologique.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery