2. LES FONDEMENTS FORMELS DE L'ADJECTIF QUALIFICATIF EN
GRAMMAIRE STRUCTURALE
Le parcours que nous faisons a un double enjeu. Il s'agit
d'abord de découvrir la configuration de l'adjectif dans le temps, sa
perception dans les différentes options épistémologiques
de la linguistique française. Au-delà de cet objectif, nous
voulons voir si une hypothèse a été émise sur la
rection des propositions par l'adjectif qualificatif. Nous employons la rection
au sens où l'entendent Arrivé et al. (1986 : 593),
à savoir la relation qui s'établit entre deux constituants
quand la présence de l'un-le terme régissant-est indispensable
à la présence de l'autre - le terme régi. En d'autres
termes, la rection est une relation e dépendance univoque entre deux
termes, l'un subordonnant et l'autre subordonné. Dès lors, que
peut-on sommairement entendre par grammaire structurale ? Comment l'adjectif
qualificatif y est-il perçu ?
2.1. La grammaire ou linguistique structurale : bref
aperçu
Par grammaire ou syntaxe structurale, il faut entendre
l'intégration des retombées de la pensée saussurienne dans
l'analyse de la langue. En effet, dès la deuxième moitié
du XXè siècle, avec la publication du Cours de linguistique
générale et des théorisations qui y sont faites, les
études linguistiques connaissent un nouvel essor. La linguistique
structurale propose le principe de l'immanence de la langue et du signe
linguistique. La langue étant un système clos, son analyse
devrait se limiter à la description des rapports d'opposition qui lient
ses signes les uns aux autres sur les axes paradigmatique et syntagmatique.
Ainsi, la logique et la philosophie pour décrire la
langue ne suffisent plus. Nombreuses sont les théories qui,
d'obédience structurale et dotées d'un socle scientifique,
influencent l'apprentissage de la grammaire. On y trouve le fonctionnalisme, le
distributionnalisme, la syntaxe dépendancielle et la grammaire
générative entre autres.
La syntaxe structurale est une grammaire où la
scientificité est prouvée par un ensemble de tests
opératoires. Elle cherche à éliminer les autres sources
d'information jugées moins fiables. La grammaire traditionnelle
proposait des définitions philosophique,
logique et sémantique des constituants, mettant en
lumière la prééminence du mot en lui-même. Les
fonctions s'y reconnaissaient par les questions Qui ? Quoi ? Comment ?
Où ? C'est un cas où la grammaire traditionnelle utilisait
des tests opératoires. En dépit des lacunes que présente
ce test, il est adopté en linguistique structurale au même titre
que l'extraction, la passivation, la commutation, etc.
Relativement à la méthodologie, la syntaxe
structurale suit la voie inverse de la grammaire traditionnelle. D'après
Poulin (1980 : 30), la grammaire nouvelle a trois étapes :
manipulations, observations (de l'implicite à l'explicite), règle
ou catégorisation. La syntaxe structurale est une
méthode inductive, allant du concret à l'abstrait, du particulier
au général, de la manipulation à la règle, de
l'implicite à l'explicite, elle est une procédure de
découverte.
Par ailleurs, la syntaxe structurale remplace l'AG et l'AL par
des opérations linguistiques : la transformation, l'addition, la
soustraction, la permutation et la substitution. Poulin (op. cit. 31)
estime que ces cinq opérations constituent la pierre angulaire
du renouveau de l'enseignement de la grammaire. Car ces manipulations
permettent un enseignement plus concret et mieux adapté aux
capacités de l'enfant. L'enfant sera amené à faire
fonctionner les structures de la langue. On peut alors conclure que les
objectifs sont tout autres.
La grammaire d'inspiration linguistique vise à ne plus
de réciter la règle ou à apprendre la langue pour
elle-même. Il s'agit désormais de manipuler les structures pour
saisir le fonctionnement des éléments en contexte. L'objectif est
donc de donner aux élèves des connaissances
opérationnelles. Le mot n'est plus considéré dans son
unicité : le groupe s'impose comme constituant. Les analyses se font en
considérant la notion de groupe ou de syntagme. On étudie, non
plus l'adjectif en lui-même, mais le groupe adjectival dans son ensemble,
l'adjectif qualificatif étant une tête lexicale.
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