I.2 Conflit armé interne
Le conflit armé interne ou encore conflit armé
non international est synonyme de << guerre civile».65 Il
se caractérise par l'affrontement qui oppose les forces armées
d'un Etat
64 Critère d'intensité et
d'organisation Dans l'affaire Tadic' (IT-94-1-T, 7 mai 1997), la Chambre de
première instance du TPIY a décidé que « un conflit
armé existe chaque fois qu'il y a recours à la force armée
entre États ou un conflit armé prolongé entre les
autorités gouvernementales et des groupes armés organisés
ou entre de tels groupes au sein d'un État » (§ 561).
65 GUILLIEN, R., et VINCENT, J., Lexique des termes
juridiques, 13e éd., Paris, 2001, p. 285. La guerre civile est un
conflit armé ayant éclaté au sein d'un Etat et
dépassant, par son extension et sa promulgation, une simple
rébellion. . Certains autres auteurs renchérissent que la guerre
civile est un conflit armé mettant aux prises des citoyens <<
appartenant à un même Etat au moment où le conflit
éclate. Lire dans ce sens SMOUTS, M.C, BATTISTELLA, D et VENNESSON, p,
248.
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à des forces armées dissidentes ou rebelles. Le
droit applicable durant de tels conflits a longtemps été
considéré comme étant une question purement interne aux
Etats.
L'article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949 a
permis de dégager pour la première fois certains principes
fondamentaux devant être respectés durant de tels conflits.
Cependant, cet article ne définit pas la notion même de conflit
armé non international. L'article premier du Protocole additionnel II de
1977 a partiellement comblé cette lacune. Aux termes de celui-ci, est
réputé conflit armé non international tout conflit qui se
déroule sur le territoire d'un Etat, entre ses forces armées et
des forces armées dissidentes ou des groupes armés
organisés qui, sous la conduite d'un commandement responsable, exercent
sur une partie de son territoire un contrôle tel qu'il leur permette de
mener des opérations militaires continues et concertées et
d'appliquer le droit international établi par ce type de
conflit.66
Les situations de tensions internes et de troubles
intérieurs comme les émeutes, les actes isolés et
sporadiques de violence et les autres actes analogues ne sont pas
considérés comme des conflits armés.
Ce Protocole additionnel II s'applique aussi aux conflits
armés qui opposent de manière prolongée sur le territoire
d'un Etat des groupes armés organisés entre eux. Ainsi, un
conflit qui éclate sur le territoire d'un Etat entre deux ethnies
distinctes pour autant qu'il réunisse les caractéristiques
nécessaires d'intensité, de durée et de participation peut
être qualifié de conflit armé non international. Tel fut le
cas du conflit entre hunde et hutu dans le territoire de Masisi, chefferies des
Bahunde, Bashali et secteurs des Katoyi et Osso en 1993 où les uns
avaient pris des armes contre les autres au sujet du conflit foncier avec des
interférences politiques. Ce conflit s'était étendu dans
le territoire de Rutshuru, chefferie de Bwito.67
Rentre aussi dans cette catégorie, par exemple, le
conflit burundais opposant les forces loyalistes depuis l'assassinat du
président Ndadaye le premier président hutu
démocratiquement élu en octobre 1993 aux Forces pour la
Défense de la Démocratie (FDD) le bras armé du Conseil
National pour la Défense de la Démocratie (CNDD), le Front
National de Libération (FNL) et le conflit ivoirier1
éclaté depuis le 19 septembre 2002 mené initialement par
un mouvement politico-militaire occupant le Nord du pays le Mouvement
66 Article 1 du protocole additionnel II de 1997
67 Etienne RUSAMIRA, La dynamique des conflits ethniques au
Nord-Kivu : une réflexion prospective, Afrique contemporaine
2003/3(n° 207), p163
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Patriotique de Côte d'Ivoire (MPCI) et deux autres en
novembre le Mouvement Populaire Ivoirien du Grand Ouest (MPIGO) et le Mouvement
de Justice et de la Paix (MJP) tous s'opposant au régime élu du
Président Laurent Gbagbo un conflit armé non international (ou
conflit armé « interne »)68 le conflit opposant
l'armée congolaise contre le groupe rebelle Kamuina Nsampu dans les
provinces du Kasaï dans les années 2016-2017.69
Contrairement à un conflit armé international,
un conflit armé non international compte au moins un groupe armé
non étatique parmi les deux camps qui s'affrontent.
L'existence d'un conflit armé non international
entraîne l'application du droit international humanitaire (DIH),
également appelé droit des conflits armés, qui fixe les
limites que les parties doivent respecter dans la conduite des
hostilités et octroie une protection à toutes les personnes
touchées par le conflit.
Le DIH impose des obligations égales aux deux parties
au conflit, sans pour autant conférer un statut juridique aux groupes
d'opposition armés impliqués.70
Aux termes du DIH, deux critères doivent être
remplis pour qu'il y ait conflit armé non international :
Les groupes armés impliqués doivent montrer un
degré minimum d'organisation, et les confrontations armées
doivent atteindre un certain niveau d'intensité. Une analyse au cas par
cas doit être effectuée pour déterminer si ces
critères sont remplis, sur la base de plusieurs indicateurs concrets.
Le niveau d'intensité de la violence est
déterminé au regard d'indicateurs tels que la durée et la
gravité des affrontements armés, le type de forces
gouvernementales intervenant, le nombre de combattants et de troupes
impliqués, les types d'armes utilisés, le nombre de victimes et
l'étendue des dommages causés par les combats. Le degré
d'organisation du groupe armé est évalué sur la base de
facteurs comme l'existence d'une chaîne de commandement, la
capacité de donner et de faire exécuter des ordres, la
capacité de planifier
68 Jean-Marc Balencie et Arnaud de La Grange, Les
Nouveaux Mondes rebelles, Paris, Éditions Michalon, 2005, 4e éd.,
500 p. (ISBN 978-2-84186-248-1), p. 219-225
69 Rapport du représentant du bureau conjoint des Nations
Unies au conseil de sécurité sur la situation au KASAI, 2017
70« Règles du droit international humanitaire
relatives à la conduite des hostilités dans les conflits
armés non internationaux », conclusions de la XIVetable ronde de
l'Institut international de droit humanitaire, Revue internationale de la
Croix-Rouge, n° 785, septembre-octobre 1990, p. 41589
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et de lancer des opérations militaires
coordonnées, et la capacité de recruter, former et équiper
de nouveaux combattants. Nous soulignons que la motivation d'un groupe
armé n'entre aucunement en ligne de compte.71
Un conflit armé non international est à
distinguer des formes moins graves de violence collective telles que troubles
civils, émeutes, actes isolés de terrorisme ou autres actes
sporadiques de violence cela semble être une même chose entre
conflit interne et guerre civile. Il n'y a pas véritablement de
différence entre le terme « guerre civile » en tant que tel
n'a pas de signification juridique.
Il est employé par certains pour désigner un
conflit armé non international. L'article 3 commun aux Conventions de
Genève n'emploie pas ce terme de « guerre civile», renvoyant
plutôt à la notion de « conflit armé ne
présentant pas un caractère international ».
Le CICR évite généralement d'employer le
terme de « guerre civile » lorsqu'il communique publiquement ou avec
les parties à un conflit armé, et parle de conflits armés
« non internationaux » ou « internes », car ces expressions
reflètent les termes de l'article 3 commun.72
L'éclatement d'un conflit armé a d'importantes
conséquences au niveau des obligations juridiques qui incombent aux
parties, en particulier en ce qui concerne l'usage de la force. En effet, le
DIH autorise le recours à une force de plus grande intensité dans
les conflits armés que dans les autres situations de violence, ce bien
sûr contre des cibles légitimes et dans des limites strictes
destinées à protéger les civils.
Les parties à un conflit armé doivent notamment
respecter les règles suivantes dans la conduite des hostilités :
l'interdiction de mener des attaques directes contre les civils ;
l'interdiction de mener des attaques sans discrimination; l'obligation de
respecter le principe de proportionnalité dans l'attaque ; et
l'obligation de prendre toutes les précautions pratiquement possibles
dans la planification et l'exécution des opérations militaires en
vue d'épargner les civils.73
71. Idem, p.613
72KALALA ILUNGA, M , Droit international humanitaire,
UNILU 2018, p19 73 Idem, p 18
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