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Dette publique et croissance économique au Bénin.


par Zountchégnon Delphin DJOMAMOU
Université d'Abomey-Calavi (UAC) - Licence professionnelle en sciences économiques 2018
  

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2- Synthèses des travaux empiriques

De nombreuses études empiriques ont analysé l'impact de la dette sur les Pays en Développement (PED) avec des résultats divergents. Alors que certaines études soutiennent que la dette a des effets positifs sur la croissance économique des pays d'accueil, d'autres par contre pensent que la dette n'est pas une condition nécessaire ni suffisante.

Ø Effet de la dette sur la croissance

Ojo (1989), à travers une approche économétrique, montre que le rapport de l'encours de la dette/PIB d'une trentaine de pays africains durant la période de 1976 à 1984 a été déterminé par : la variation des exportations, le rapport des importations/PIB, le taux de croissance de la population et au taux de croissance du PIB. Les résultats statistiques lui permettent de conclure que le rapport de l'encours de la dette/PIB est lié négativement à la variation des exportations, au taux de croissance du PIB et positivement au rapport des importations /PIB, et à la croissance de la population.

Borensztien (1991), dans une étude sur l'endettement aux Philippines a conclu que la dette extérieure a un effet dissuasif sur l'investissement privé. Selon son étude, un taux d'endettement élevé freine indirectement l'investissement productif à travers une faible rentabilité et donc la croissance. Cette faible rentabilité de l'investissement est consécutive à une baisse de l'activité économique et une hausse des taux d'intérêts réels domestiques.

Cohen (1996), a montré empiriquement, que la dette a entravé la croissance dans les Pays en Développement (PED). Cependant, ce résultat général n'est pas obtenu pour tous les pays de l'échantillon, notamment pour les pays africains. L'impact de l'endettement sur la réduction de la croissance est faible pour le Burkina Faso, le Kenya, l'ile Maurice, le Rwanda, l'Afrique du Sud, le Zaïre, le Zimbabwe et le Mali. Pour le cas du Ghana et de la Tanzanie, l'impact de la dette publique sur la croissance économique est même positif ;

Coulibaly, Diarra et Keita (2001), dans un article sur l'endettement des pays les plus pauvres : cas du Mali, ont montré par des indicateurs statistiques, que le taux d'intérêt, le financement des importations, surtout de biens de consommation courante, et le processus cumulatif de l'endettement ont un effet positif sur le niveau d'endettement du Mali.

Yapo (2002), a trouvé dans une étude empirique, que le taux de croissance du PIB évolue dans le sens contraire de l'endettement en Côte d'ivoire. Donc, un taux de croissance économique assez élevé réduit les opportunités d'endettement ; ce qui amène à la conclusion selon laquelle les performances macroéconomiques ont tendance à limiter dans une certaine proportion les contraintes liées aux besoins en capitaux extérieurs.

Pattillo, Ricci etPoirson (2002), ont mené des études s'appuyant sur les analyses de régression multiple pour vérifier si la dette et la croissance sont liées. Cette étude a pris en compte les déterminants types de la croissance : le revenu par habitant (décalé), les taux d'investissement, de scolarisation dans le secondaire, de croissance démographique (tous en logarithme), la différence des politiques suivies (l'ouverture économique, le solde budgétaire) et les chocs extérieurs (les termes de l'échange). Sur la base de données de panel moyen sur trois ans pour 93 pays en développement couvrant la période 1969-1998, leur étude a permis de prouver que la dette publique aurait une relation en forme de U inversée (courbe de Laffer) avec la croissance. L'incidence de la dette extérieure sur la croissance du PIB par habitant commence à être négative à partir du moment où la valeur actuelle nette (VAN) de la dette dépasse 160 à170% des exportations et 35 à 40% du PIB. Pour eux, l'accroissement de la dette rend négative la croissance économique.

Zokouri (2004),affirme que les exportations et les investissements au Mali ont un impact positif sur la croissance économique du PIB et cet effet est significatif tant dans le court terme que dans le long terme. A court terme, une augmentation des investissements de 1% entraîne une hausse de la croissance économique de 0,02%. Cet effet devient plus important à long terme et est de 0,07%. Concernant les exportations, une hausse de 1% entraîne dans le court terme une augmentation du PIB de 0,26% et une augmentation de 0,43% dans le long terme.

Cléments, Bhattacharya et Nguyen (2005), ont fait une analyse empirique de la relation dette extérieure et la croissance à partir de données portant sur la même période 1970-1999 pour 55 pays à faible revenu. L'enseignement tiré de cette étude est : afin qu'un endettement élevé ne puisse freiner la croissance économique dans les pays à faible revenu, la dette ne pèse sur la croissance économique qu'à partir du moment où elle atteint un seuil, estimé à 50% du PIB environ pour la valeur nominale de la dette extérieure (ou à 20-25 % pour sa valeur actuelle nette).

Wejeweera et al. (2005), ont mis en évidence le lien entre la croissance économique et l'endettement au Sri Lanka durant la période 1952 -2002. Ils indiquent que le pays n'a pas un problème de surendettement et que l'endettement n'est pas le principal obstacle à la croissance économique, parce que probablement le stock de la dette totale n'est pas trop élevé.

Idlemounden et Raffinot (2005),pensent que la dette extérieure constitue un fardeau pour une économie. Ils affirment que le paiement du service de la dette tend à évincer les dépenses publiques menant à une baisse de l'investissement global et son poids futur décrit par l'encours de la dette, influerait sur les incitations des agents économiques privés via l'accroissement de la pression fiscale. Ensuite, cet effet, selon les auteurs, ne va se manifester qu'à partir d'un certain seuil, justifiant ainsi l'annulation partielle de la dette lorsque ce seuil est dépassé.

Diallo (2007), soutient dans une étude de la Guinée que le ratio du service de la dette est négativement corrélé à la croissance économique. Toutefois, de par son coefficient, l'accroissement du ratio de l'encours de la dette par rapport à la principale source de revenu (exportation) est la principale cause des faibles performances de la Guinée. De toutes les variables prises ensemble, ce sont le taux d'investissement et le développement du capital humain qui sont les sources de croissance tandis que le pays profite peu de son ouverture commerciale et de la dépréciation de sa monnaie bien qu'étant toutes positivement corrélées au taux de croissance du PIB par habitant.

Kumar et Woo (2010), ont analysé la corrélation entre le taux d'endettement initial et la croissance du revenu par habitant sur cinq années suivantes dans 38 pays industrialisés et émergents. Ils arrivent à la conclusion qu'indépendamment de l'approche économétrique appliquée, une forte dette publique réduit effectivement la croissance en raison notamment de la baisse du stock de capital. Ils estiment qu'une augmentation de 10 points de la dette publique réduit la croissance annuelle de 0,15 point de pourcentage.

Faye et Thiam (2015), utilisent un modèle à générations imbriquées pour étudier l'effet de l'endettement public sur la consommation, le PIB, l'épargne, les recettes budgétaires, l'investissement, et la dynamique du capital au Sénégal. Les résultats montrent qu'une hausse de 10% de la dette publique influence positivement les variables macroéconomiques mais dégrade le déficit de la balance courante. Pour être efficace, il faudrait intégrer une dette publique de 65% du PIB au minimum dans le processus d'accumulation du capital. Une hausse de la dette extérieure de 10% impacte positivement les variables macroéconomiques mais dégrade plus le déficit de la balance courante. Une augmentation de10% de la dette interne entraine une récession. Une augmentation des dépenses publiques financées par emprunt entraine une hausse de la dette publique léguée aux générations futures de 15% et une augmentation de la consommation future d'environ 2%.

Ø Effet de seuil dans la relation entre dette et croissance

Dans la littérature économique plusieurs techniques sont utilisées pour détecter l'effet de seuil dans la relation entre la dette publique et la croissance économique.

Reinhart et Rogoff (2010),ont analysé l'évolution de la dette publique et de la croissance réelle du PIB en se basant sur un ensemble de données relatives à 44 pays (20 pays développés et 24 pays en développement) sur une période couvrant environ deux siècles (1790-2009). Leur principale constatation est la suivante : jusqu'au seuil de 90 % du PIB, il n'y a pas de lien apparent entre la croissance économique et la dette publique, mais au-delà de ce niveau, la croissance se ralentie.

Checherita et Rother (2010), sur un échantillon de 12 pays de la zone euro et durant presque quatre décennies, ont considéré une relation quadratique entre la dette publique et la croissance économique. Les résultats obtenus prouvent que la dette a une relation en forme de courbe en U inversée avec la croissance et confirment ainsi, l'hypothèse de non linéarité. Au-delà d'un seuil de 90% à 100% du ratio dette / PIB, la dette publique est préjudiciable à la croissance économique. Toutefois, lorsque la dette atteint 70% du PIB, ses effets négatifs sur la croissance apparaissent.

Caner et al. (2010), utilisent des moindres carrées ordinaires, sur 101 pays (75 pays développés et 26 en développement) durant la période allant de 1980 à 2008, et montrent qu'il existe un effet de seuil entre la dette publique et la croissance économique. Les résultats obtenus au niveau de l'échantillon total montrent que jusqu'au seuil de 77%, la relation entre la dette publique et la croissance est affaiblie. Ce seuil est estimé à 64% pour les pays en développement.

Sur un échantillon de 18 pays de l'OCDE et durant la période 1980-2010, Cecchetti et al. (2011) examinent les données annuelles du PIB par tête et du stock de la dette du secteur non financier. Ils démontrent qu'à partir d'un seuil estimé à environ 85% du PIB, la dette publique affecte négativement la croissance économique.

Minea et Parent (2012), appliquent le modèle de panel à seuil à transition lisse ou PSTR sur un échantillon de pays développés pour la période 1945-2009. Leurs résultats confortent ceux issus de l'étude de Reinhart et Rogoff (2010). Lorsque le ratio de dette/ PIB passe de la tranche 60-90% a plus de 90%, la croissance ralentit. En outre, la relation le niveau de la dette publique et la croissance n'est pas toujours évidente. Les auteurs considèrent alors qu'il faut saisir les causalités complexes de l'endettement public, distinguant par exemple entre investissements productifs sur le long terme et dépenses fiscales stériles pour la consommation sur le court terme.

En adoptant la méthode d'effet seuil sur panel dynamique, Checherita et al. (2013) ont essayé d'analyser l'impact non linéaire de la dette publique sur la croissance du PIB pour un échantillon de 12 pays de la zone euro durant la période 1990-2010. Les résultats montrent qu'à court terme la dette publique a un effet positif et statistiquement significatif sur la croissance économique. Mais au-delà d'un seuil estimé à 67% du PIB, cet effet positif baisse et devient même nul. Au-delà d'un seuil de 95% du ratio dette/PIB, un niveau élevé de l'endettement affecte négativement l'activité économique.

Quant à Wade (2015), elle estime l'impact de la dette publique totale en pourcentage du PIB sur le taux de croissance du PIB par tête avec un PSTR et la méthode GMM. L'étude porte sur les huit (08) pays de l'UEMOA et couvre la période 1980-2011. Les résultats obtenus avec la méthode GMM indiquent un seuil optimal de dette publique de 48,8% du PIB, alors que le PSTR donne un seuil critique de 49,8% du PIB.

Bini, Yohou et Ouattara (2016), en utilisant le PSTR (Panel Smooth Transition Regression Model) sur la période 1989-2012, montrent que la dette influence négativement et de façon significative l'efficacité de la politique budgétaire. L'impact de la politique budgétaire sur la croissance diminue progressivement quand le niveau de la dette extérieure augmente. Ils estiment un seuil critique de 48% du PIB au-dessus duquel les effets deviennent négatifs. Les résultats indiquent l'existence d'une hétérogénéité entre les pays et d'une année à une autre.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci