1.4. ALTERNATIVES FACE A L'EXPLOITATION MINIERE DANS
LES
AIRES PROTEGEES
Dans l'histoire de la biologie de la conservation plusieurs
perspectives sur les relations entre les humains et le reste de la
biodiversité se sont succédé, pour tenter de limiter les
conséquences très négatives de l'augmentation des
populations et des activités humaines sur l'environnement (Dunn et al.
2006), mais l'on constate que le problème persiste toujours. D'autres
approches développées par le PNKB ont aussi
améliorées (par exemple la vulgarisation des foyers
améliorés mais qu'on ne retrouve pas partout autour du parc dans
la chefferie de Buloho). Cette absence, n'a pas contraint la population
à réduire les menaces qu'elle porte sur les bois du parc.
Le changement des paradigmes dans le cadre de la politique de
gestion d'aires protégées s'est développé depuis
les années 1970, suivant le constat des limites du modèle
étatique centralisé.
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Elle s'appuie sur la notion de développement durable et
envisage les espaces de conservation comme les principaux champs
d'expérience de la soutenabilité. Ces politiques d'articulation
entre conservation et développement ont suscité un très
fort engouement dans les années 1980 et 1990, avec le déploiement
d'un discours participatif dans le champ de la conservation, une multiplication
des expériences de gestion intégrée et la recherche d'une
synergie entre les politiques de protection de la biodiversité et des
politiques plus larges d'environnement et d'aménagement du territoire
(Mamadou, 2011. C'est ainsi qu'au PNKB, il s'y ait développé une
nouvelle approche nommée `Conservation communautaire' afin d'amener les
peuples autochtones à participer volontairement à la protection
de la biodiversité du parc.
Au niveau local, les premières expériences de ce
type ont été développées par l'UNESCO et son
programme Man And Biosphere (MAB), qui a mis en place, dès
1972, les « réserves de la biosphère ». Celles-ci ont
été conçues comme des espaces mixtes associant
différents types d'espaces avec plusieurs degrés de protection
où, schématiquement, une zone centrale intégralement
protégée est entourée de zones-tampons sur lesquelles
certaines activités sont autorisées, elles-mêmes
bordées de zones de transition (Aubertin et Rodary, 2008).
La Conférence des Nations-Unies sur l'Environnement et
le Développement ou « Sommet de la Terre », tenue en 1992
à Rio, constitue le sacré du développement durable. Elle a
amené la communauté internationale à prendre conscience de
l'ampleur et de l'enjeu des problèmes d'environnement et de
développement à l'échelle de l'humanité. Les
exploitations minières dans la chefferie de Buloho ne
représentent pas grande chose dans l'économie de la population du
milieu. Bien au contraire, ils en paient les prix au point où ils sont
victimes de plusieurs désastres (pollution des eaux qu'utilise la
population, affecte l'agriculture, etc.)
Le domaine de l'environnement s'est intéressé
aux connaissances écologiques traditionnelles lorsque les chercheurs ont
commencé à chercher des approches alternatives aux sciences et
technologies occidentales (ICD, 1993). Un pas en avant est
réalisé lorsque l'on envisage d'intégrer les connaissances
écologiques traditionnelles aux connaissances scientifiques. La
communauté scientifique adopte ainsi une approche de recherche
appliquée et cherche à comprendre et à faire partager les
valeurs, la philosophie et les pratiques durables des peuples autochtones
(Audrey Wu, 2002).
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Dans l'expérience du PNKB, certains membres des
populations autochtones ont été nommés « boussole
naturel » du fait de leur maitrise et connaissance du parc. Les
communautés locales et les populations autochtones comme celles de la
chefferie de Buloho dépendent en partie de ressources naturelles telles
que les produits de la forêt, le gibier et les minerais. Les forêts
renferment d'importantes valeurs culturelles que les aires
protégées peuvent aider à préserver à cette
communauté. Elles peuvent aussi contribuer de manière importante
à l'économie locale grâce au développement de formes
de tourisme durables et éco-compatibles (UNEP-WCMC, 2008). Mais
malheureusement, ce secteur a connu des ralentissements au PNKB depuis un
certain temps suite à l'insécurité.
L'impact des avantages et des bénéfices des
aires protégées sur les populations locales dépend en
grande partie de la gestion et de la gouvernance. Par exemple, des aires
forestières strictement protégées avec des structures de
gestion directives correspondant généralement aux
catégories de gestion I-II de l'UICN, peuvent avoir de lourdes
conséquences sur les conditions de vie des communautés locales
telles qu'un manque d'accès aux ressources et parfois même des
déplacements de population engendrant ainsi des conflits. En
comparaison, les aires protégées dont la gestion permet
l'utilisation durable des ressources forestières et qui sont
généralement classées dans les catégories V-VI de
l'UICN ont montré des bénéfices tangibles à
travers, par exemple, le tourisme et les marchés de produits
forestiers.
La distribution de ces coûts et bénéfices
étant de surcroît inégal selon la communauté, il
faudra inévitablement résoudre ce problème si l'on pense
que le PNKB doit être bénéfique à la
communauté locale de la chefferie de Buloho. Egalement, la collaboration
entre différents services, structure et population locale peut aboutir
à des bilans positifs en termes de protection de cette aire
protégée. A condition que des plans stratégiques
d'aménagement du parc soient mis en place et que ses services aient les
moyens humains et financiers nécessaires à l'accomplissement de
leur rôle.
Les facteurs qui peuvent compromettre fortement
l'efficacité de la gestion des aires protégées seraient
peut-être le manque de fonds personnel non qualifié, faiblesse
institutionnelle, absence d'appui politique, la faiblesse du cadre juridique et
de l'application de la réglementation, l'insuffisance de la
communication avec les résidents locaux et de leur participation
à la planification de la gestion, le manque de coordination entre les
organisations participant à cette gestion, l'absence de plans
d'utilisation des sols de portée générale et la
délimitation inadéquate des zones à protéger.
(UNEP-WCMC, 2008).
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Malgré les progrès réalisés dans
ce domaine, un travail considérable reste à faire pour mettre au
point des méthodes efficaces de suivi. Par exemple, l'utilisation
d'espèces témoins pourrait être d'un grand secours, mais on
connaît encore mal les rapports qu'elles ont avec la diversité
biologique totale et le fonctionnement des écosystèmes
(Lindemayer et al. 2000). En outre, tant que des méthodes simples et peu
coûteuses ne seront pas disponibles, il y a peu de chances qu'un suivi
soit assuré, surtout dans les cas où les ressources humaines et
financières pouvant être consacrées à la
conservation sont limitées. Par ailleurs on ignore la dynamique
écologique de plusieurs écosystèmes qui composent les
aires protégées.
Des efforts ont récemment été entrepris
pour mettre au point des outils permettant d'évaluer l'efficacité
des aires protégées dans une optique plus générale,
en incluant des facteurs institutionnels, sociaux et quantitatifs en plus des
facteurs biologiques. La Commission mondiale des aires protégées
de l'UICN a créé en 1998 un groupe de travail sur
l'efficacité de la gestion et organisé deux ateliers
internationaux sur cette question en 1999. La CMAP a proposé un cadre
d'évaluation (Hocking et Phillips, 1999) prévoyant cinq types
d'évaluation:
? L'évaluation de la conception, pour examiner la
planification ou la conception d'un réseau d'aires
protégées, en particulier ses carences éventuelles, son
adaptation aux objectifs prévus et sa représentativité;
? L'évaluation des intrants pour déterminer si
les ressources (fonds, personnel, équipement et infrastructure)
utilisées pour gérer la ou les zones protégées sont
adéquates et comment elles sont réparties;
? l'évaluation du processus pour examiner les normes du
système de gestion ainsi que les processus et les fonctions
utilisés pour l'administration de l'aire protégée;
? L'évaluation des extrants pour déterminer dans
quelle mesure les plans ainsi que les objectifs ou les normes prévus ont
été atteints où respectés; L'évaluation des
résultats,
c'est pour déterminer dans quelle mesure les objectifs de
la gestion sont atteints.
La planification et la gestion des aires
protégées ont connu un changement radical au cours de la
décennie écoulée (Dudley et al. 1999). Elles se
caractérisaient autrefois par le monopole du gouvernement central en
matière de contrôle, le protectionnisme, l'exclusion des
populations locales et, fréquemment, l'interdiction des utilisations
traditionnelles de la faune et de la flore.
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En octobre 1999, la FAO a tenu une consultation technique
internationale à Harare (Zimbabwe) sur la façon de concilier la
gestion des aires protégées et le développement rural
durable. La reconnaissance de l'importance de faire en sorte que les
populations rurales vivant dans les aires protégées ou à
proximité de celles-ci se sentent directement concernées par la
biodiversité s'est manifestée notamment sous deux formes: les
projets intégrés de développement et de conservation.
Etant donné qu'il y a des gens qui vivent à
l'intérieur ou à proximité de nombreuses aires
protégées, sinon de la majorité d'entre elles, les
écologistes ont entrepris de relier les objectifs de la conservation et
du développement afin que les populations locales profitent de certains
des avantages qu'apportent les aires protégées. Cette idée
n'est pas nouvelle, mais a simplement été intégrée
de plus en plus fréquemment dans les efforts de conservation au cours
des 10 dernières années.
La nécessité d'administrer les aires
protégées en tenant compte des besoins et des droits des
populations locales a été énoncée clairement lors
du Congrès mondial sur les parcs, qui a eu lieu en 1982 à Bali
(Indonésie). Par rapport aux politiques protectionnistes
antérieures qui avaient souvent pour résultat de creuser un
fossé entre les efforts de conservation et les populations locales cette
approche devrait permettre d'éviter l'exclusion de ces
dernières.
Gigure3 : Modèle de l'agencement territorial
MAB pour une aire protégée (UNESCO), 1995
Fonction de développement
Fonction d'éducation et recherche
Fonction de conservation
Zone de transition
Zone tampon Zone centrale
Source : François Muhashy, décembre
2010
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La gouvernance, concept relativement nouveau qui a
émergé lors du Congrès Mondial des Parcs Nationaux qui a
eu lieu à Durban en 2002. La gouvernance concerne le pouvoir, les
relations entre partenaires, la responsabilité et comment l'on rend
compte de ce qu'on a fait. La gouvernance est la combinaison explicite ou
implicite des politiques, pratiques et institutions qui affectent la vie
publique.
La gouvernance vise l'atteinte des objectifs de l'aire
protégée donc l'effectivité de la gestion. Elle
détermine le partage des coûts et bénéfices donc
l'équité de la gestion. La bonne gouvernance est essentielle
à la prévention ou résolution de conflits. Conflits
souvent liés à l'accès aux ressources comme les conflits
entre la PNKB et la communauté autochtone qui l'entoure. La distinction
fondamentale entre types de gouvernance peut être faite sur la base de:
(a) qui détient l'autorité et la responsabilité de
gestion; (b) qui a la responsabilité légitime de rendre compte
suivant la loi ou la coutume (UNEP, 2008).
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