III.1.2.2. Perceptions
socio-anthropologiques des variabilités climatiques
Les populations locales sont quasi-unanimes quant à
l'existencedes variabilités climatiques, soit environ 95 % de
l'échantillon.D'après elles, ces variabilités s'expriment
par une mauvaise répartition temporelle des saisons sèches et
pluvieuses, une augmentation des températures et une amplification de la
fréquence des vents et une apparition des espèces invasives
(criquet, chenille, etc.) des cultures. Les populations pensent que les causes
de ces changements sont : le déboisement des quelques rares galeries
forestières de la zone d'étude pour 49,3 % des cas, le
non-respect des normes sociales promues par les croyances traditionnelles avec
25 % et la punition due à la désobéissance des
divinités dans 25,7 % des cas.
Elles supposent ainsi quela perturbation de la saison agricole
serait l'un des éléments les plus affectés par le
changement climatique du fait de la hausse des températures, la
variabilité accrue des saisons pluvieuses et sèches, de
même que l'amplification des vents violents. De ce fait, 58,4 % des
répondant(e)s prétendent que les changements climatiques se
manifestent dans leur localité par des saisons sèches plus ou
moins longues; 23,3 % quant à eux estiment que l'intensité et la
récurrence des vents violents sont plus accentuées. Enfin, 18,3 %
sous-tendent que les manifestations sont les sécheresses ou pluies
inopinéesou absentes aujourd'hui.
III.1.2.3. Perception
paysanne des indicateurs de variabilités climatiques
III.1.2.3.1. Distribution des températures et
vents violents
Ø Tendance thermométrique
Le changement de température pendant la saison
sèche ainsi que pluvieuse est très perceptible par la
majorité des populations locales (Tableau I). D'après les
enquêtés, durant ces dix dernières années 83,3 %
pensent que les températures ont été élevées
en saison sèche et 77,3 % en saison pluvieuse. De plus, sur l'ensemble
de l'échantillon, 80,15 % des hommes et 90,74 % des femmes estiment que
les températures sont élevées en saison sèche.
Avant, l'a martelé un enquêté : « Endécembre,
début janvier 1980 il faisait très frais mais actuellement
(décembre 2015) on est très incertain quant à la venue de
cette fraicheur. Depuis l'année 2000, les températures ont
changé pendant la saison sèche, les nuits sont très
fraiches.»
Tableau I. Perceptions de la
distribution des températures durant les 10 dernières
années.
|
Période
|
Saisons
|
Perception de la température
|
Actuellement (2015)
(%)
|
Il y a 5 ans (%)
|
Il y a 10 ans (%)
|
Il y a plus de 10 ans (%)
|
saison sèche
|
Faible
|
0
|
0
|
0
|
10
|
Moyen
|
3,3
|
8,3
|
38,3
|
85,0
|
Elevée
|
96,7
|
91,7
|
61,7
|
5,0
|
saison pluvieuse
|
Faible
|
3,3
|
1,7
|
10,0
|
61,7
|
Moyen
|
66,7
|
83,3
|
81,7
|
35,0
|
Elevée
|
30,0
|
15,0
|
8,3
|
3,3
|
Ø Fréquence des vents violents
Les enquêtés (71,7 %) estiment quele changement
dans la fréquence des vents la plus élevée s'est
observée durant ces dix dernières années. Les statistiques
montrent d'après la répartition d'âge que 86,67 % de jeunes
âgés de moins de 30 ans, 75 % âgés entre 31 et 45
ans, 83,33 % âgés entre 46 et 60 ans et 82,53 % âgés
à partir de 61 ans affirment que le changement dans la fréquence
des vents violents s'est vu en hausse ces dix dernières années;
ces tranches prises séparément (Tableau II). Les signes qui
précèdent l'arrivée des vents violents sont entre autres
le virement de la couleur des nuages de blanche à rouge rosâtre,
l'affolement des animaux surtout les oiseaux, etc. (Fig. 8c). Selon les paysans
ces vents engendrent des dégâts importants: destruction des champs
et arrachage des toitures des habitations (Fig. 8a
et 8b).
Tableau II. Perception de la violence des vents en fonction du
niveau de l'âge.
|
Période
|
Tranche d'âge de l'échantillon
|
Perception de la fréquence des vents violents
|
Actuellement (2015)
(%)
|
Il y a 5 ans
|
Il y a 10 ans
|
Il y a plus de 10 ans
|
Moins de 30 ans
|
Faibles
|
0
|
0
|
0
|
0
|
Moyens
|
20
|
0
|
20
|
80
|
Elevées
|
80
|
100
|
80
|
20
|
31-45 ans
|
Faibles
|
8,33
|
8,33
|
8,33
|
16,67
|
Moyens
|
16,67
|
8,33
|
25
|
66,67
|
Elevées
|
75
|
83,33
|
66,67
|
16,67
|
46-60 ans
|
Faibles
|
0
|
0
|
4,5
|
13,63
|
Moyens
|
9,09
|
9,09
|
27,27
|
77,27
|
Elevées
|
90,90
|
90,90
|
68,18
|
9,09
|
61 et plus
|
Faibles
|
4,76
|
4,76
|
4,76
|
14,28
|
Moyens
|
4,76
|
9,52
|
23,81
|
66,67
|
Elevées
|
90,47
|
85,71
|
71,42
|
19,04
|
c
251652608
b
251649536
a
251654656
Fig.8. Effet des vents violents (a:
arrachage de toiture à Nachtigal: b: arrachage de toiture à
Bindalima II ; c: signe précurseur des vents violents).
III.1.2.3.2. Perceptions des changements de la
fréquence et l'ampleur des précipitations
Sans aucun doute, dans la localité le changement dans
la distribution des précipitations est perçu par tous. Ce
changement connait une haussecesdix dernières années pour
environ57,14 % d'hommes et 53,70 % de femmes. Par ailleurs,50 %de femmes et 50
% hommes affirment que le changement de la distribution était moyen il y
a plus de 10 ans(Tableau III). Comme l'a si bien déclaré un des
enquêtés: «Les pluies tombent soit avant, soient après
la période où elles sont censés tomber. Actuellement, ces
perturbations sont très récurrentes. Le retard des pluies ou des
petites rosées (Onguémé en langue locale) en
août2015 a entrainé la sécheresse et le jaunissement des
cherelles des cacaoyers, les ignames d'août n'ont pas été
récoltées à la bonne période.Si les pluies,
attendues à un mois précis ne viennent pas, le bouleversement
engendré se répercute sur les autres mois. Les premières
pluies avant débutaient en mars, actuellement elle débute en
mai-juin.» affirme un enquêté.
Tableau III. Perceptions dans le
changement de la distribution des précipitations.
|
Période
|
Sexe
|
perception distribution des précipitations
|
Actuellement (2015)
(%)
|
Il y a 5 ans (%)
|
Il y a 10 ans (%)
|
Il y a plus de 10 ans (%)
|
Homme
|
Faibles
|
7,14
|
7,14
|
11,91
|
35,71
|
Moyens
|
33,33
|
38,1
|
30,95
|
50
|
Elevées
|
59,52
|
54,76
|
57,14
|
14,28
|
Femme
|
Faibles
|
5,56
|
5,56
|
5,56
|
38,89
|
Moyens
|
38,89
|
38,89
|
44,44
|
50
|
Elevées
|
55,56
|
55,56
|
50
|
11,11
|
Les populations locales sont quasi-unanimes quant à la
baisse de la quantité des précipitations. 69,84 % d'hommes
estiment que le changement dans la quantité de pluies a
été élevé ces dix dernières années
par contre 59,52 % estiment que ce changement était moyen il y a plus de
10 ans. La gente féminine quant à elle pense que ces dix
dernières années le changement dans la quantité est
élevée et moyenne il y a plus de 10 ans; à 75,92 % et
72,22 % des cas respectivement (Tableau IV). «Il pleut abondamment pendant
une année et pendant une autre il ne tombe pas la même
quantité de précipitations. Il est à noter que quand il ne
pleut pas en septembre, octobre, novembre on se retrouve en janvier et
février avec des pluies diluviennes.Les pluiesont beaucoup
diminuées et ne sont pas distribuées de manière
uniforme.» tels sont les propos recueillis lors de l'interview auprès d'un paysan.
Tableau IV. Perception dans le changement de la quantité
des pluies.
|
Période
|
Sexe
|
perception de la quantité de pluie
|
Actuellement (2015)
(%)
|
Il y a 5 ans (%)
|
Il y a 10 ans (%)
|
Il y a plus de 10 ans (%)
|
Masculin
|
Faibles
|
7,14
|
7,14
|
9,52
|
26,2
|
Moyens
|
19,05
|
21,43
|
26,2
|
59,52
|
Elevées
|
73,81
|
71,43
|
64,29
|
14,28
|
Féminin
|
Faibles
|
11,11
|
11,11
|
5,56
|
22,22
|
Moyens
|
11,11
|
11,11
|
22,22
|
72,22
|
Elevées
|
77,78
|
77,78
|
72,22
|
5,56
|
III.1.2.3.3.Perception de la fréquence et
durée de la saison sèche
Globalement, quel que soit le sexe, le changement dans la
durée de la sécheresse de même que dans la fréquence
de la saison sèche sont ressentis dans la localité ces dix
dernières années (Fig. 9 et 10). 84 % des personnes ayant fait
des études primaires, 83,31 %des études secondaires, 83,5 %des
études supérieures, et 84,29 % des personnes n'ayant reçu
aucune formation éducationnelle affirment que le changement dans la
durée de la saison sèche est élevé ces dix
dernières années. De même, 93,2 % de personnes ayant au
moins 30 ans d'âge, 80,5 % ayant entre 31 et 45 ans, 84,8 % ayant un
âge compris entre 46 et 60 ans, et 79,57 % de personnes ayant 61 ans et
plus pensent que le changement dans la durée de la saison sèche
est élevée ces dix dernières années.
Fig.9. Perceptionsdu changement de la
durée de la saison sèche.
En ce qui concerne le changement dans la fréquence de
la sécheresse, 93,33 % des enquêtés ayant moins de 30 ans,
88,89 % ayant entre 31 et 45 ans, 75,75 % ayant entre 46 et 60 ans, et 88,88 %
ayant 61 ans et plus pensent que la fréquence est élevée
ces dix dernières années. Les résultats
révèlent également que 84 % de l'échantillon ayant
effectués les études primaires, 87,5 % le secondaire, 83,33 % le
supérieur et 82,35 % une formation informelle affirme que ce changement
est élevé ces dix dernières années.
Fig.10. Perception du changement de
la fréquence de la rudesse de la saison sèche.
|
|