Section II: Contraintes et perspectives des PMI
à Meknès .
Il existe plusieurs études et enquêtes qui ont
analysé cet aspect relatif aux blocages des PMI et mis en relief les
différentes contraintes qui entravent le bon fonctionnement et le
développement de ce secteur au Maroc .
Par ailleurs et tout au long des chapitres
précédents, nous avons pu relever un certain nombre de
contraintes et de facteurs de blocages inhérents au secteur des PMI
à Meknès. Ceux-ci se rapportent aussi bien à des
éléments internes aux entreprises (Structures
défavorables, etc.) qu'à des éléments externes (
contraintes financières, défaillance des infrastructures
d'accueil, etc.).
Notre objectif au niveau de cette section, est d'essayer dans
un premier lieu, d'examiner l'ensemble des facteurs de blocage du secteur des
PMI à Meknès, tels qu'ils
sont vécus ou perçus par les chefs de ces
unités eux même ( Paragraphe 1). Nous nous attacherons dans un
second lieu à examiner les perspectives d'avenir de ce secteur et
à faire certaines propositions pratiques susceptibles d'améliorer
la situation de ce segment du tissu productif au niveau local ( Paragraphe
2).
Paragraphe 1: Principaux facteurs de blocage des PMI
à Meknès et problèmes d'inadéquation des services
urbains
Si Meknès demeure un lieu relativement
privilégié d'implantation des activités productives et
plus particulièrement des PMI, eu égard aux potentialités
économiques qu'elle recèle, elle est également la ville
où le problème de fonctionnement des entreprises se posent avec
une grande acuité.
1-1 : Contraintes majeures au développement des
PMI à Meknès
Pour saisir l'importance de ces contraintes, nous avons
demandé aux dirigeants des PMI enquêtées de citer les 5
principaux obstacles auxquels ils sont confrontés. Par la
170
suite nous avons procédé par méthode de
pondération en accordant 5 points au premier élément
cité, 4 points au second et ainsi de suite.
l'objectif étant non seulement de recueillir le point de
vue des dirigeants de ces entreprises sur les contraintes au
développement de ce segment du tissu productif à Meknès,
mais aussi l'intensité et l'importance de ces obstacles.
Le tableau suivant fait ressortir ces principales contraintes
classées par degré d'intensité décroissant.
Tableau n° : Classification des contraintes
à l'implantation des PMI à Meknès.
Contraintes
|
Fréquence
|
%
|
Lourdeur des procédures
administratives
|
148
|
19,00
|
Manque de terrains industriels et
spéculation
foncière
|
117
|
15,00
|
Niveau élevé des impôts
|
102
|
13,05
|
Coût élevé de financement et
difficultés d'accès au crédit
|
94
|
12,05
|
Faiblesse des infrastructures
|
62
|
7,95
|
Indisponibilité de main d'oeuvre
qualifiée
|
47
|
6,00
|
Problèmes liés à la
demande
|
39
|
5,00
|
problèmes de maintenances industrielle
et
indisponibilité des pièces de
rechange
|
31
|
4,00
|
Problèmes liés aux fournisseurs des
matières
premières
|
28
|
3,60
|
Concurrence du secteur informel
|
23
|
2,95
|
Coût élevé des facteurs de
production
|
22
|
2,80
|
législation du travail peu
cohérente
|
18
|
2,30
|
Autres
|
49
|
6,30
|
Total
|
780
|
100
|
Source: Enquêtes personnelles.
Juillet/Août. 2000.
Le tableau ci-dessous suggère les remarques suivantes:
1) Globalement les chefs des PMI
interrogés sont du même avis sur les cinq grandes contraintes au
développement de ce secteur à Meknès à savoir: la
lourdeur des procédures administratives, le manque de terrains
industriels et spéculation foncière, niveau élevé
des impôts, coût élevé du financement et
difficultés d'accès au crédit bancaire et enfin faiblesse
des infrastructures. Ces contraintes jugées majeures représentent
à elles seules 67 % de l'ensemble des contraintes citées par les
dirigeants des entreprises enquêtées.
2)
171
La lourdeur des procédures administratives constitue la
principale contrainte à laquelle se heurte les PMI
enquêtées. En effet, une des plus grandes difficultés de
ces entreprises est la toile bureaucratique où elles se voient
enveloppées. Certes, des progrès substantiels ont
été réalisées ces dernières années en
matière de simplification des procédures administratives en vue
d'améliorer l'environnement des affaires. Ces progrès restent
cependant insuffisants eu égard au nombre encore important des
autorisations administratives requises surtout au niveau local.
Il est nécessaire de simplifier l'entourage
administratif des PMI par l'instauration d'un "guichet
unique" ou un département administratif capable de
coordonner les départements administratifs impliqués dans la
création des entreprises.
L'expérience des comités provinciaux
d'investissement créés sous la présidence des gouverneurs
et composés des chefs des départements impliqués dans
l'acte d'investir en vue de faciliter au niveau local la réalisation de
tous projets d'investissement, n'a pas donné entière
satisfaction. Les raisons de cet échec s'explique notamment par le
caractère très rigide de cette institution mais surtout par la
faiblesse des pouvoirs délégués aux chefs des services
extérieurs qui sont le plus souvent incapables de prendre des
décisions et sont obligés de consulter leurs services
centraux..
Parallèlement le projet du centre des
formalités des entreprises devant être créés au
niveau des chambres du commerce et de l'industrie, n'a toujours pas
été concrétisé de nos jours.
En attendant, créer son entreprise au Maroc reste un "
véritable parcours de combattant"1. Ce constat montre que le
système administratif marocain constitue un véritable blocage au
développement de l'investissement industriel au Maroc.
3) Les contraintes relatives au manque des terrains
industriels et à la spéculation foncière occupent la
deuxième place au niveau des contraintes majeures au
développement des PMI à Meknès. Dans leur réponses
à l'enquête, les dirigeants de ces entreprises ont tous
mentionné le foncier comme handicap principal pour l'investissement
industriel. Ils insistent sur la nécessité d'organiser ce secteur
et de contrôler les mécanismes de son fonctionnement en mettant
sur le marché des terrains à des prix raisonnables
affectés aux stricts besoins de l'industrie et aux vrais industriels et
non aux spéculateurs ou en encourageant la construction de
bâtiments pour location dans des zones équipés.
4) La contrainte fiscale vient en
troisième position avec un peu plus de 13 % de l'ensemble des
contraintes évoquées par les dirigeants interrogés. Certes
les réformes entreprises dans le domaine fiscal ont donné lieu
à une réduction des taux marginaux. Toutefois, demeure
posé le problème de la pression et surtout de la
multiplicité des taxes locales qui constituent une entrave
sérieuse au parachèvement de la réforme fiscale. Par
contre la contrainte financière, largement développée au
niveau du premier chapitre de cette dernière partie, vient en
quatrième position avec un peu plus de 12 %.
5) La faiblesse des infrastructures constitue
également une contrainte majeure au développement du secteur des
PMI à Meknès selon les chefs de ces entreprises. Le
( 1) JALLAL ( L) et GUIBERT ( G) : " Jeunes promoteurs, le
parcours du combattant " in revue Enjeux n° 73, Avril 1995, pp:
39-42.
172
développement de toute activité productive
exige, en effet, une disponibilité à un coût
compétitif et sans défaillance des infrastructures et des
services publics nécessaires à toute économie moderne
notamment en ce qui concerne l'énergie, les
télécommunications, les transports, etc.( Ce dernier volet sera
traité de manière détaillée dans le paragraphe
suivant).
6) A côté de ces contraintes
considérées comme majeures par les chefs des PMI à
Meknès, d'autres facteurs de blocages sont évoqués par ces
entrepreneurs. Ils concernent notamment l'indisponibilité de la main
d'oeuvre qualifiée, les problèmes liés à la
demande, les problèmes liés à la maintenance industrielle
et à l'indisponibilité des pièces détachées,
la législation du travail jugée peu cohérente, etc.
1- 2: Problèmes d'inadéquation des services
urbains
Dans ce second point, il s'agit
essentiellement d'examiner l'adéquation des services urbains par rapport
aux attentes des chefs des PMI de Meknès car non seulement les
coûts de ces services représentent une fraction importante dans la
comptabilité de ces entreprises mais encore parce que la
compétitivité de ces dernières dépend
énormément de la qualité de ces services et nombreuses
sont les entreprises qui choisissent leur localisation en fonction de la
qualité des services qu'elles sont susceptibles de trouver dans leur
environnement .
Il est question ici de l'eau industrielle, de
l'électricité, des moyens de télécommunications et
de l'assainissement.
Le tableau suivant fait ressortir le degré de
satisfaction des dirigeants des PMI à Meknès suivant la nature
des services urbains rendus.
Tableau n° : Degré de satisfaction des
dirigeants des PMI de la qualité des services urbains.
Services urbains Degré de satisfaction
|
Eau
industrielle
|
Electricité
|
Télécommunication
|
Assainissement
|
Solide
|
Liquide
|
Bon
|
32,70
|
59,60
|
92,30
|
11,50
|
12,60
|
Moyen
|
40,40
|
40,40
|
7,70
|
21,50
|
20,80
|
Insuffisant
|
19,20
|
-
|
-
|
48,10
|
36,90
|
Inexistant
|
7,70
|
-
|
-
|
18,90
|
26,70
|
Source: Enquêtes personnelles.
Juillet/Août. 2000.
Globalement et sur la base des résultats de
l'enquête consignés dans le tableau ci-dessus, nous pouvons dire
que les services urbains sont jugés inadéquats, peu efficaces et
ne répondent pas aux besoins des PMI localisées à
Meknès. Le degré de satisfaction diffère toutefois selon
la nature des services urbains rendus.
1-2-1: L'eau industrielle.
L'eau joue un rôle moteur dans l'activité
industrielle de manière générale. Son abondance et sa
qualité conditionnent dans une large mesure la localisation de plusieurs
activités manufacturières.
173
Région passant souvent pour être le "
château d'eau du Maroc", Meknès a toujours été
réputée par l'abondance et la qualité de ses eux. Mais
avec la croissance démographique et urbaine et le développement
des industries dans la ville, plusieurs facteurs de déséquilibres
sont apparus mettant en évidence l'acuité de la" question de
l'eau " .
Parmi ces facteurs de déséquilibres
soulignés d'ailleurs par le SDAU de Meknès1 , nous
relevons essentiellement: l'insuffisance des ressources hydriques face à
la croissance de la demande, l'appauvrissement de la nappe phréatique et
la pollution par manque d'assainissement.
S'agissant des PMI de l'espace d'étude, l'usage de
l'eau varie d'une branche à une autre. Si certaines n'en font qu'un
usage limité ( usage domestique) d'autres par contre ne peuvent se
passer de l'eau dans leur processus de production, soit en tant que
matières premières ajoutée au produit, soit encore pour
servir pour le lavage ou le refroidissement.
Si plus des 2/3 des dirigeants des PMI enquêtées
s'estiment moyennement ou médiocrement servis, il n'en demeure pas moins
que les tarifs appliqués à Meknès sont
considérés comme les plus faible au Maroc ( 1,59 dhs/ m3 hors TVA
contre 4,16 à Fès, 5,61 à Rabat et 5,63 dhs m3 à
Casablanca).
Parmi les problèmes soulevés à ce niveau,
nous notons en particulier, la faiblesse du débit de l'eau, les coupures
sans avis préalables ( peu fréquentes) , etc.
Soulignons enfin que les données de l'enquête ont
révélé que plus de 92% des PMI sont branchées au
réseau urbain d'eau potable. 7,70 % de ces entreprises sont
alimentées à partir des puits. Ces derniers sont cependant
utilisés dans plusieurs unités même reliées au
réseau, notamment au niveau de certains quartiers industriels et en zone
périphérique.
1-2-2: Alimentation en
électricité
L'énergie en général et l'énergie
électrique en particulier constitue un facteur déterminant dans
le processus d'industrialisation et dans le choix des sites pour la
localisation industrielle.
A Meknès, la totalité des PMI
enquêtées sont raccordées au réseau d'énergie
électrique lui-même lié au réseau national. Mais
seulement 59,60 % de ces entreprises s'estiment satisfaites de la
qualité de ce service. Par contre plus de 40 % des chefs d'entreprises
jugent la qualité de ce service de juste moyenne.
Parmi les problèmes soulevés à ce niveau,
nous relevons essentiellement les coupures électriques sans avis
préalable chose qui peut causer des préjudices techniques aux
matériels et des dégâts aux produits fabriqués. En
revanche tout le monde souligne avec satisfaction la décision de
réduction de 17 % du coût de l'électricité qui
constituait jusqu'à une date récente une contrainte à la
compétitivité des produits industriels et particulièrement
pour certaines branches.
1-2-3: Les télécommunications
Les télécommunications sont devenues aujourd'hui
un outil indispensable pour toute activité économique que ce soit
de production ou de service. L'existence d'un réseau
( 1) SDAU DE MEKNES: Rapport objectifs et orientations,
Année 1995, p, 25.
suffisant et de qualité permet, en effet, à
l'entreprise d'accéder à l'information et de s'adapter en temps
réel aux différentes fluctuations du marché.
A ce niveau, le degré de satisfaction des dirigeants
des PMI enquêtées est relativement important, soit plus de 92 %.
Ce taux s'explique par les progrès appréciables que ne cesse de
connaître le domaine des télécommunications et notamment le
téléphone mobile, ayant entraîné une
amélioration sensible au niveau de la qualité du service rendu et
une baisse des tarifs appliqués.
1-2-4: l'assainissement
L'évacuation des rejets liquide issus des PMI et de
l'activité industrielle pose un problème sérieux au niveau
de la ville de Meknès. Même la zone industrielle de Sidi Bouzekri
qui, en principe, devrait être dotée de tous les
équipements nécessaires pour son bon fonctionnement, ne dispose
pas d'un réseau d'assainissement. Les unités qui y sont
installées ont été obligées de creuser des fosses
sceptiques pour l'évacuation de leurs rejets liquides. Le même
problème se pose au niveau des quartiers industriels de la route
d'El-Hajeb et de Lafarge-ciment où les rejets sont directement
versés dans les oueds. Ceci ne manque pas de poser des problèmes
au niveau de l'environnement d'autant plus que ces rejets ne subissent aucun
traitement. Cette situation se reflète bien au niveau du degré de
satisfaction des dirigeants interrogés. 11,50 % seulement de ces
derniers s'estiment satisfaits contre 21,50% qui ont déclaré
être moyennement . Par ailleurs 48,10 % des chefs des PMI ont
manifesté leur insatisfaction concernant la qualité du service
d'assainissement liquide alors que 18,90 % de ces entreprises ne sont pas
branchées au réseau urbain.
La situation n'est guère meilleure au niveau du service
de l'assainissement solide. Ce domaine constitue, en effet, un sujet de
plaintes de la majorité des chefs des PMI interrogés. Au cours de
notre enquête, nous n'avons pas pu nous empêcher de constater un
nombre importants de décharges sauvages dans les espaces de
concentration industrielle et notamment à Sidi Bouzekri, Ain Slougui,
Route D'El Hajeb Et Oujeh Arouss.
L'insatisfaction qui se dégage au niveau de la
qualité de la plupart des services urbains examinés ci-haut,
traduit une certaine inadéquation de ces services par rapport aux
besoins des PMI locales. Cette contrainte qui s'ajoute aux autres contraintes
relevées au niveau du paragraphe précédent constitue un
handicap majeur au bon fonctionnement et au développement de ce segment
du tissu productif local.
Qu'en est-il à présent des perspectives d'avenir
? C'est ce que nous essayerons de voir dans le paragraphe suivant.
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