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Jeux d'argent et changement social a Yaounde

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par Badel ESSALA
Université de Yaoundé I - Master en sociologie 2018
  

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8.2.6. Le questionnaire

Le questionnaire est présenté par VERKEVISSEUR et al. (1993 :146), comme « un outil de collecte des données par lequel des questions écrites sont présentées aux répondants qui y répondent également par écrit ». C'est un outil de quantification qui a permis non seulement de mesurer autant que faire se peut, les informations sur la connaissance des jeux et leur pratique ; mais d'appréhender le changement social à différents niveaux de participation des acteurs impliqués. L'enquête en elle-même s'est déroulée de la période allant du 8 novembre au 17 décembre 2016. Au cours de cette période, cent trente questionnaires valides sur les cent cinquante distribués ont pu être collectés (voir annexe 2). C'est sur eux que repose le corpus principal du présent travail.

9. Mise au point conceptuelle

E. DURKHEIM (1958 :21) pense que « les mots de la langue usuelle comme concepts qu'ils expriment sont toujours ambiguës et le savant qui les emploierait tel qu'il les reçoit de l'usage sans leur faire subir d'autres élaborations s'exposerait aux plus graves confusions ». Vu cette précision, le chercheur a intérêt à définir ses concepts pour être sûr de les utiliser dans le même sens que ses lecteurs. Pour donc souscrire à cette exigence, il est nécessaire de clarifier les concepts de « jeu d'argent » et de « changement social ».

9.1. Jeu d'argent

La littérature scientifique n'apporte presque pas de définition au concept de « jeu d'argent ». La raison est que la plupart des travaux effectués dans ce champ font référence au concept de « jeu de hasard », concept qui connote non seulement des contingences de rationalités abstraites pour constituer un objet d'étude, mais surtout, parce que le présent travail se centre sur des jeux où les individus misent et perdent avec l'espoir de gagner plus d'argent dans l'avenir. Toutefois, il est nécessaire ici de faire le point sur les différentes approches définitionnelles du concept de « jeu de hasard » proposées par les auteurs, afin d'appréhender le concept de « jeu d'argent » dans cette étude.

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Une action libre, sentie comme fictive et située en dehors de la vie courante, capable néanmoins d'absorber totalement le joueur ; une action dénuée de tout intérêt matériel et de toute utilité qui s'accomplit en un temps et dans un espace expressément circonscrit. J. HUIZINGA (1951 :34-35).

Dans cette définition, l'auteur sépare le jeu de l'activité réelle, du « monde habituel » et le valorise en le considérant comme moteur de l'évolution des civilisations. Contrairement à J. HUIZINGA, R. CAILLOIS parle entre autres de l'aléa, au sujet des jeux où l'argent est présent. Selon lui, dans ce type de jeux :

Le rôle de l'argent est d'autant plus considérable que la part du hasard est plus grande et par conséquent la défense du joueur plus faible. Car, l'aléa n'a pas pour fonction de faire gagner de l'argent aux plus intelligents, mais tout au contraire d'abolir les supériorités naturelles ou acquises des individus, afin de mettre chacun sur un pied d'égalité absolue devant le verdict aveugle de la chance. R. CAILLOIS (1969 :58).

Par la suite, il établit une classification qu'il considérait manquante dans les travaux de J. HUIZINGA. Dans cette répartition, il propose une division en quatre rubriques principales, selon que dans les jeux considérés prédomine le rôle de la compétition, du hasard, du simulacre ou du vertige. Il les appelle respectivement : Agôn, Aléa, Mimicry, et Ilinx. Bien que ces catégories ne soient pas exclusives, les jeux basés sur l'aléa laissent entrevoir les jeux de hasard comme des évènements aléatoires, qui se définissent en opposition avec les activités de loisir. Cela revient à dire que, gagner ou perdre à un jeu de hasard ne dépend pas de l'habileté du joueur ou de certaines stratégies de jeu, mais dépend volontiers de la chance. Dans ce type de jeu, écrit C. BEART (1960 :18), « on ne cherche pas à éliminer l'injustice du hasard mais c'est l'arbitraire même de celui-ci qui constitue le ressort unique du jeu ».

C'est pourquoi G. FERRÉOL (2002 :150), définit le jeu de hasard comme « une action de loisir soumise à des règles conventionnelles, comportant gagnants et perdants et dans laquelle n'intervient ni calcul, ni habileté du joueur ». Par jeu de hasard, G. FERRÉOL sous-entend donc toute activité organisée par un système de règles définissant un succès et un échec, un gain et une perte. Suivant cette approche, le législateur camerounais par le truchement de la loi no 89/26/89 délibérée et adoptée en plénière le 29 novembre 1989, dans

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son article 2 statue que « sont considérés comme jeux de hasard, ceux qui procurent un gain en argent ou en nature et dans lesquels la chance prédomine sur l'adresse ». En analysant ces définitions, on voit émerger trois éléments qui permettent de caractériser un jeu d'argent : il doit être investi d'un enjeu, d'une possibilité de gain ou de perte et de la présence même accessoire du hasard.

Le « jeu d'argent » s'appréhende donc dans ce travail, comme la pratique d'une activité ludique associée à un intéressement financier à l'issue de la partie. Ici, chaque joueur engage un certain montant financier dans le jeu qui sera tout ou partie perdue, ou qui sera augmenté en cas de gain.

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